Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Ninkasi Musiques a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 21 février 2019 du préfet du Rhône refusant d'autoriser l'ouverture jusqu'à 7 heures du matin de la discothèque " Ninkasi Kao " qu'elle exploite à Lyon, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1906405 du 23 septembre 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 novembre 2020 la société Ninkasi Musiques, représentée par Me Roche, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de classer l'établissement en cause dans la catégorie des débits de boissons ayant pour activité principale l'exploitation d'une piste de danse ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des frais du litige.
Elle soutient que :
- le tribunal a méconnu son office en procédant à une substitution de motif qui n'était pas sollicitée ;
- il a omis de répondre aux moyens, fondés, tirés de ce que le préfet, en rejetant sa demande au motif que l'établissement fait partie d'un ensemble immobilier au sein duquel les exploitations commerciales prises isolément ne répondent pas aux conditions d'implantation et d'isolement prescrites au règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public, a commis une erreur de droit et a porté atteinte aux principes d'égalité devant la loi et de liberté du commerce et de l'industrie ;
- en rejetant sa demande au motif que le service de sécurité de l'établissement n'est pas agréé par le conseil national des activités privées de sécurité le préfet a ajouté une condition qui n'est pas prévue à l'article 9 de l'arrêté préfectoral du 20 mars 2012 règlementant la police des débits de boissons et restaurants dans le département du Rhône et fixant les périmètres de protection ;
- les pièces qu'elle a transmises à l'appui de sa demande permettaient au préfet d'apprécier l'importance relative de la piste de danse par rapport à l'ensemble de l'établissement ;
- au titre de son activité principale, elle doit être classée dans la catégorie des établissements recevant du public de type P ;
- elle excipe de l'illégalité de l'article 9 de l'arrêté du 20 mars 2012 qui crée une inégalité de traitement injustifiée entre les discothèques implantées dans un local isolé et celles implantées dans un ensemble immobilier.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 octobre 2021, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés par la société Ninkasi Musiques ne sont pas fondés ;
- c'est à tort que le tribunal a censuré le motif de son arrêté tenant à l'absence de billetterie.
Un mémoire enregistré le 21 janvier 2022 présenté pour la société Ninkasi Musiques n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du tourisme ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public ;
- l'arrêté du 20 mars 2012 du préfet du Rhône réglementant la police des débits de boissons et restaurants dans le département du Rhône et fixant les périmètres de protection ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,
- et les observations de Me Gauthier pour la société Ninkasi Musiques.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier du 21 décembre 2018, la société Ninkasi Musiques a demandé au préfet du Rhône de l'autoriser à ouvrir jusqu'à 7 heures du matin la discothèque qu'elle exploite à Lyon sous l'enseigne " Ninkasi Kao ". Par une décision du 21 février 2019, le préfet a rejeté sa demande. La société Ninkasi Musiques a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler cette décision ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Elle relève appel du jugement du 23 septembre 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article D. 314-1 du code du tourisme : " L'heure limite de fermeture des débits de boissons ayant pour objet principal l'exploitation d'une piste de danse est fixée à 7 heures du matin. ". En vertu de l'article 9 de l'arrêté du 20 mars 2012 du préfet du Rhône visé ci-dessus, les établissements dont la principale activité est l'exploitation d'une piste de danse doivent, pour être autorisés à ouvrir de midi jusqu'à 7 heures du matin, remplir un certain nombre de conditions qu'il énumère. Ils doivent notamment disposer d'un espace réservé à la danse d'une importance suffisante pour en faire l'élément essentiel de l'activité de l'établissement, être classés en type " P " (salles de danse et salles de jeu) et, à titre accessoire, en type " N " (restaurants et débits de boissons) au regard de la réglementation des établissements recevant du public, être titulaires d'un contrat général de représentation auprès d'un organisme collecteur des droits audiovisuels et voisins spécifique aux discothèques et disposer d'un service de sécurité et d'une billetterie ou d'une caisse enregistreuse émettant un ticket remis à leurs clients.
3. Pour refuser à la société Ninkasi Musiques l'autorisation d'ouvrir jusqu'à 7 heures du matin son établissement Ninkasi Kao, le préfet du Rhône s'est fondé, en premier lieu, sur le motif tiré de ce qu'elle n'est pas titulaire d'un contrat général de représentation auprès d'un organisme collecteur des droits audiovisuels et voisins spécifique aux discothèques. Les motifs pour lesquels le tribunal a écarté un moyen relatif à l'inexactitude matérielle de cette affirmation, qui n'était pas plus soulevé en première instance qu'en appel, sont surabondants et restent sans incidence sur la régularité du jugement attaqué qui n'a pas procédé d'office à une substitution de motif non sollicitée. La société requérante n'est pas dès lors pas fondée à soutenir que le tribunal aurait méconnu son office.
4. En deuxième lieu, les exploitations groupées dans un même bâtiment, ne répondant pas aux conditions d'isolement de l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité dans les établissements recevant du public, sont considérées, en vertu du 1er § de l'article GN 2 de cet arrêté, comme constituant un seul établissement recevant du public.
5. Il ressort des pièces du dossier que le Ninkasi Kao est installé dans un local sous-loué par la société Ninkasi Musiques à la SCI Ninkasi Immobilière Gerland qui a pris en location ce local, désigné local n° 2 dans le contrat de sous-location, et un autre, désigné local n° 1 dans le contrat de sous-location, situé dans le même immeuble, par un contrat de crédit-bail immobilier. Le local n° 1 est affecté à des activités de restauration, brasserie et spectacles vivants. Le bâtiment est classé en type "NL" (restaurants et débits de boissons / salles d'auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usages multiples) avec une activité annexe de type " P " concernant le seul local n° 2, pour l'application de la réglementation des établissements recevant du public. Ce classement principal ne correspond pas à celui requis par l'article 9 de l'arrêté du 20 mars 2012, rappelé au point 2, ainsi que le préfet l'a opposé à la société Ninkasi Musiques pour rejeter sa demande.
6. Contrairement à ce que soutient la société Ninkasi Musiques, la décision du 21 février 2019 contestée ne porte pas, par elle-même, atteinte au principe d'égalité devant la loi entre les discothèques installées dans des bâtiments affectés exclusivement à l'exploitation de pistes de danse et celles installées dans un ensemble immobilier regroupant plusieurs exploitations, ni à la liberté du commerce et de l'industrie et le préfet, qui a fait application les dispositions de l'arrêté du 20 mars 2012, n'a pas commis une erreur de droit. En tout état de cause, les discothèques installées dans des bâtiments affectés exclusivement à l'exploitation de pistes de danse n'étant pas dans la même situation que celle du Ninkasi Kao, la société Ninkasi Musiques n'est pas fondée à se prévaloir, à l'encontre de la décision contestée, d'une violation du principe d'égalité devant la loi. Elle n'est pas non plus fondée à exciper de l'illégalité de l'arrêté du 20 mars 2012, qui ne crée pas une nouvelle condition non prévue à l'article D. 314-1 du code du tourisme et ne porte pas non plus par lui-même atteinte au principe d'égalité devant la loi et à la liberté du commerce et de l'industrie. Elle n'est donc pas fondée à soutenir qu'au titre de son activité principale, elle doit être classée dans la catégorie des établissements recevant du public de type " P ".
7. En troisième lieu, l'article L. 612-6 du code de la sécurité intérieure subordonne l'exercice des missions de sécurisation des personnes et des biens, visées au 1° de l'article L. 611-1 de ce code, à l'obtention d'un agrément délivré par le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Aux termes du 1° de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : / 1° À fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles (...) ".
8. Il ressort du dossier joint à la demande de la société Ninkasi Musiques d'autorisation d'ouverture jusqu'à 7 heures du matin que les prestations de la société Starlight Protection Privée visaient à assurer la sécurité des personnes se trouvant dans l'établissement Ninkasi Kao. Par suite le préfet, en rejetant la demande d'autorisation au motif que la société Ninkasi Musiques avait confié ces prestations à une société qui n'y était pas habilitée faute d'agrément du CNAPS, n'a pas commis une erreur de droit.
9. En quatrième lieu, la surface totale de l'immeuble accueillant l'établissement Ninkasi Kao, de 1 945 m2, était précisée dans le contrat de sous-location joint à la demande. Ce contrat mentionnait à son article 1er que la superficie du local n°2 est d'environ 677 m2 et à son article 4 que cette superficie est de 450 m2. Toutefois, dans sa demande du 26 décembre 2018, la société Ninkasi Musiques avait indiqué que la superficie de la piste de danse est de 127 m2. Elle y avait joint un plan du bâtiment sur lequel étaient figurés la piste de danse, la scène, le bar, le vestiaire et la billetterie du Ninkasi Kao, ainsi que le local n° 1. Malgré l'incertitude sur la surface du local n° 2, la société Ninkasi Musiques avait fourni à l'appui de sa demande des éléments d'information suffisants pour que le préfet puisse apprécier l'importance de l'espace réservé à la piste de danse. Par suite, le préfet n'était pas fondé à retenir le caractère incomplet de la demande malgré l'absence d'indication de la superficie de la piste de danse par rapport à la surface totale de l'établissement.
10. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que si la société requérante a transmis à l'appui de sa demande un billet de concert, ce billet, mis en vente par une billetterie en ligne, n'est pas de nature à établir, ainsi que le fait valoir le préfet et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, que l'établissement Ninkasi Musiques dispose d'une billetterie ou d'une caisse enregistreuse émettant un ticket remis aux clients, comme l'impose l'article 9 de l'arrêté du 20 mars 2012.
11. Il résulte de l'instruction que le préfet du Rhône aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur le motif tiré de ce que le dossier de demande d'autorisation ne permettait pas d'apprécier l'importance de l'espace réservé à la danse et sur celui, censuré par le jugement attaqué qui n'est pas contesté en appel sur ce point, tiré de ce que l'emprise du vestiaire n'était pas précisée sur le plan joint à la demande d'autorisation.
12. Il résulte de ce qui précède que la société Ninkasi Musiques n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon, qui a statué sur tous les moyens qui lui étaient présentés, a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Ninkasi Musiques est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ninkasi Musiques et au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme Michel, présidente assesseure,
Mme Duguit-Larcher, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2022.
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N° 20LY03377