Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association départementale des amis et parents de personnes déficientes intellectuelles (ADAPEI) de la Loire a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015, à titre subsidiaire, de prononcer le remboursement des rappels indus à hauteur de 149 060 euros au titre de l'année 2013, 172 410 euros au titre de l'année 2014 et 151 388 euros au titre de l'année 2015, et de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1807576 du 10 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a déchargé l'ADAPEI de la Loire des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires mises à sa charge au titre des années 2013, 2014 et 2015 (article 1er), a mis à la charge de l'Etat le versement à l'ADAPEI de la Loire d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2), et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 3).
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 1er juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement ;
2°) de rétablir l'imposition en litige à hauteur de la somme de 680 144 euros dégrevée en exécution du jugement.
Il soutient que :
- les fonctions exercées par les personnels d'encadrement technique des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) présentent un caractère transverse aux deux secteurs déclarés par l'association, compte tenu notamment du mode de financement de leur rémunération ainsi que de leur rôle d'accompagnement et de soutien auprès des travailleurs handicapés ; l'existence de personnel intégralement affecté au secteur social n'exclut pas que le personnel d'encadrement technique des ESAT participe à la mission socio-éducative de l'association, les activités de suivi social d'insertion et celles de production des ESAT étant indissociablement liées ;
- les autres moyens soulevés en première instance par l'ADAPEI de la Loire ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2020, l'ADAPEI de la Loire, représentée par Me Cabeli-Peretti, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire demande à la cour de prononcer la décharge des rappels en litige à hauteur de 149 060 euros au titre de l'année 2013, de 172 410 euros au titre de l'année 2014 et de 151 388 euros au titre de l'année 2015, de mettre à la charge de l'Etat les dépens en application de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales, ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me Bentata, représentant l'ADAPEI de la Loire ;
Considérant ce qui suit :
1. L'association départementale des amis et parents de personnes déficientes intellectuelles (ADAPEI) de la Loire dispose dans ce département de douze établissements et services d'aide par le travail (ESAT), dont onze ont opté pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des recettes provenant du secteur " production/commercialisation " de leur activité, distinct de leur secteur social exonéré. Après réclamations préalables formées à la suite de la réponse obtenue à une demande de rescrit fiscal, l'ADAPEI a obtenu en juin et décembre 2016 le dégrèvement d'un excédent de taxe sur les salaires, versé au titre des années 2012, 2013, 2014 et 2015. L'ADAPEI de la Loire a ensuite fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale l'a, à nouveau, assujettie notamment à des suppléments de taxe sur les salaires au titre des années 2013 à 2015. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 10 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a déchargé l'ADAPEI de la Loire de ces impositions supplémentaires pour les trois années en litige et a mis à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. En vertu du 1 de l'article 231 du code général des impôts, les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés, à l'exception de celles correspondant aux prestations de sécurité sociale versées par l'entremise de l'employeur, sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant, à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations.
3. Le ministre, qui ne remet nullement en cause la sectorisation établie en application de l'article 209 de l'annexe 2 au code général des impôts par l'ADAPEI de la Loire, distinguant un secteur " production/commercialisation " et un secteur médico-social, ne peut valablement soutenir que ces deux secteurs seraient indissociablement liés pour assujettir à la taxe sur les salaires les rémunérations des personnels techniques d'encadrement des ESAT, constitués des moniteurs d'atelier et des agents d'accompagnement technique. La circonstance que la rémunération de ces personnels serait assurée par la dotation globale de fonctionnement versée par l'agence régionale de santé ne peut que demeurer sans incidence sur leur affectation à l'un ou l'autre secteur, dès lors que, comme le relève au demeurant le vérificateur lui-même dans la proposition de rectification du 20 décembre 2016, cette dotation a notamment pour but de compenser le surcoût de charges, en ce compris d'encadrement, résultant de l'emploi de travailleurs à capacité professionnelle réduite. Par ailleurs, le ministre ne démontre pas que les personnels techniques d'encadrement des ateliers exerceraient des missions de suivi socio-éducatif relevant du secteur social, alors que l'association justifie, par la production notamment de fiches de poste et par ses écritures circonstanciées non utilement contredites, que les " actions de soutien " effectuées notamment par les moniteurs d'atelier ont un caractère exclusivement professionnel, et ne relèvent pas d'actions de soutien social ou médico-social, dévolues aux personnels du seul secteur social de l'association. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que les personnels techniques d'encadrement des ESAT en cause ne seraient pas exclusivement affectés au secteur " production / commercialisation " de l'ADAPEI de la Loire.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des impositions en litige.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel par l'ADAPEI de la Loire et non compris dans les dépens. En l'absence de dépens, et notamment de frais d'expertise, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à l'ADAPEI de la Loire une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à l'ADAPEI de la Loire.
Délibéré après l'audience du 28 avril 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Le Frapper, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022.
La rapporteure,
M. Le Frapper
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
C. Langlet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY01771
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