Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 du préfet du Cantal déclarant cessibles au profit de la commune de Saint-Urcize les parcelles cadastrées section C nos 379 et 380 lui appartenant et nécessaires à la réalisation du projet de création d'un espace public.
Par un jugement n° 1801812 du 30 juin 2020, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 septembre 2020 Mme B..., représentée par Me Petitjean, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;
- il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière sans nouvelle enquête parcellaire ;
- un conseiller municipal personnellement intéressé par le projet a pris part à la délibération du 29 mai 2015 du conseil municipal de Saint-Urcize sollicitant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique ;
- elle excipe de d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 17 février 2016 déclarant d'utilité publique le projet de création de l'espace public en raison de la partialité du commissaire enquêteur, de l'incomplétude du dossier d'enquête, de ce que le projet déclaré d'utilité publique ne correspond pas à celui dont le conseil municipal a demandé la mise à l'enquête et de l'absence d'utilité publique du projet.
Par un mémoire enregistré le 14 décembre 2020, la commune de Saint-Urcize, représentée par Me Maisonneuve, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés ;
- les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 29 mai 2015 et de l'arrêté du 17 février 2016 sont tardives et donc irrecevables.
Par un mémoire enregistré le 16 février 2021, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... ;
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;
- et les observations de Me Marion, pour la commune de Saint-Urcize.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 17 février 2016, le préfet du Cantal a déclaré d'utilité publique au profit de la commune de Saint-Urcize le projet de création d'un espace public dans le centre du bourg afin d'agrandir l'espace consacré au marché. Par un arrêté du 27 octobre 2016, il a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à la réalisation de ce projet. En raison de la caducité de cet arrêté, un nouvel arrêté de cessibilité a été pris le 20 juillet 2018. Mme B..., propriétaire des parcelles cadastrées section C nos 379 et 380, incluses dans le périmètre du projet déclaré d'utilité publique, a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018. Par un jugement du 30 juin 2020 dont elle relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 112-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages, l'expropriant adresse au préfet du département où l'opération doit être réalisée, pour qu'il soit soumis à l'enquête, un dossier comprenant au moins : / 1° Une notice explicative ; / 2° Le plan de situation ; / 3° Le plan général des travaux ; / 4° Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; / 5° L'appréciation sommaire des dépenses. ".
3. D'une part, au stade de l'enquête publique, les documents soumis à l'enquête ont pour objet non de décrire en détail les ouvrages envisagés mais seulement de permettre au public de connaître la nature et la localisation des travaux prévus ainsi que les caractéristiques générales des ouvrages les plus importants. D'autre part, l'appréciation sommaire des dépenses jointe au dossier d'enquête publique a pour objet de permettre à tous les intéressés de s'assurer que les travaux ou ouvrages, compte tenu de leur coût réel, tel qu'il peut être raisonnablement estimé à l'époque de l'enquête, ont un caractère d'utilité publique.
4. Le dossier de présentation du projet soumis à enquête publique, bien que succinct, était suffisant pour permettre au public de comprendre la teneur du projet, de petite envergure, comme le démontrent les observations émises par le public. L'appréciation sommaire des dépenses a intégré le coût prévisionnel de l'opération, de 109 374 euros, dont 90 840 euros au titre des travaux, 9 084 euros au titre des honoraires de maîtrise d'œuvre et 9 450 euros pour l'acquisition du garage de 18 m2 sis sur la parcelle cadastrée section C n° 380 et de la parcelle cadastrée section C n° 379 de 297 m2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le coût prévisionnel d'acquisition des biens aurait été manifestement sous-évalué puisque le juge de l'expropriation, par un jugement du 17 janvier 2020, a alloué à Mme B... une indemnité principale de 10 336,50 euros. Le montant des travaux et les frais de maîtrise d'œuvre, tels qu'ils résultent de la déclaration d'utilité publique du projet, ont été portés à 103 200 euros et 10 560 euros, cette différence ayant pour cause un remaniement du projet pour tenir compte de la réserve formulée par le commissaire-enquêteur relative aux places de stationnement.
5. En deuxième lieu, il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet d'agrandissement dans le centre du bourg de l'espace consacré au marché, situé sur la place de l'Afrique, serait surdimensionné par rapport au nombre d'étalages installés le dimanche matin sur cette place. Le projet répond par ailleurs à un impératif de sécurité publique, l'exiguïté de la place de l'Afrique ne garantissant pas la circulation des véhicules et des piétons dans des conditions des sécurité satisfaisantes les jours de marché. Le projet vise également à favoriser les rencontres et les échanges entre les habitants de tous âges. Il contribue aussi à l'attractivité et au dynamisme de la commune, par la mise en valeur de l'entrée du bourg et du site touristique du rocher de la Vierge d'une part, et en rendant visible le marché depuis la route qui mène à l'école, d'autre part. L'opération répond ainsi à une finalité d'intérêt général.
7. Mme B... soutient que la commune dispose dans le centre du bourg, à cent cinquante mètres de la place de l'Afrique, d'une autre place centrale, plus grande, ainsi que d'une troisième place et d'une aire de repas et qu'elle est propriétaire de quatre parcelles permettant la création d'un espace public sans recourir à l'expropriation. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ces emplacements, éloignés de la place de l'Afrique et du centre du bourg, ne permettraient pas d'atteindre des objectifs équivalents à ceux poursuivis par la commune à travers l'opération déclarée d'utilité publique.
8. Enfin, l'atteinte à la propriété privée, portant sur un garage loué et un jardin non régulièrement entretenu qui n'est pas attenant à la maison d'habitation de Mme B..., n'est pas excessive eu égard à l'intérêt que présente l'opération.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le projet serait dépourvu d'utilité publique.
10. En troisième lieux, aux termes de l'article R. 112-23 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Dans le cas prévu à l'article R. 112-22, si les conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête sont défavorables à la déclaration d'utilité publique de l'opération envisagée, le conseil municipal est appelé à émettre son avis par une délibération motivée dont le procès-verbal est joint au dossier transmis au préfet. / Faute de délibération dans un délai de trois mois à compter de la transmission du dossier au maire, le conseil municipal est regardé comme ayant renoncé à l'opération. "
11. Si Mme B... soutient que le projet déclaré d'utilité publique ne correspond pas à celui dont le conseil municipal a demandé la mise à l'enquête, il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur a émis le 15 novembre 2015 un avis favorable au projet en recommandant de supprimer les places de stationnement et de réaliser un lieu de rencontre tel que souhaité par les habitants. À la suite de cet avis, le conseil municipal s'est réuni le 15 février 2016 pour délibérer à nouveau sur son projet, en application de l'article R. 112-23 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
12. Pour le surplus, Mme B... reprend en appel les moyens déjà invoqués devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand tirés de ce que l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente et de ce qu'il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière sans nouvelle enquête parcellaire préalable, de ce qu'un conseiller municipal personnellement intéressé par le projet a pris part à la délibération du 29 mai 2015 du conseil municipal de Saint-Urcize sollicitant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique du projet et de ce que le commissaire enquêteur désigné pour donner son avis sur l'utilité publique du projet était partial. Ces moyens ne sont assortis d'aucune précision supplémentaire ni d'aucun élément pertinent constitutifs d'une critique des motifs par lesquels le tribunal les a justement rejetés. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs du jugement attaqué.
13. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Urcize, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée au même titre par la commune de Saint-Urcize.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la commune de Saint-Urcize.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente,
Mme Duguit-Larcher, première conseillère,
Mme Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.
La présidente-rapporteure,
C. A...L'assesseure la plus ancienne,
A Duguit-Larcher
Le greffier,
J. Billot
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 20LY02715