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13/07/2022 | FRANCE | N°20LY02444

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 13 juillet 2022, 20LY02444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon : 1°) d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle l'institut départemental de l'enfance et de la famille (A...) de Saône-et-Loire a refusé de reconnaître sa maladie imputable au service ; 2°) d'enjoindre à l'IDEF de Saône-et-Loire de reconnaître sa pathologie imputable au service et de la rétablir, par voie de conséquence, rétroactivement dans sa position statutaire et son régime indemnitaire, dans un délai de 15 jours à compter de la

notification du présent jugement, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa sit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon : 1°) d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle l'institut départemental de l'enfance et de la famille (A...) de Saône-et-Loire a refusé de reconnaître sa maladie imputable au service ; 2°) d'enjoindre à l'IDEF de Saône-et-Loire de reconnaître sa pathologie imputable au service et de la rétablir, par voie de conséquence, rétroactivement dans sa position statutaire et son régime indemnitaire, dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent jugement, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un même délai ; 3°) de mettre à la charge de l'IDEF de Saône-et-Loire une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902463 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 28 juin 2019, a enjoint, dans un délai de trois mois, à l'IDEF de Saône-et-Loire de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... et de régulariser sa situation administrative en tenant compte de cette reconnaissance, a mis à la charge de l'IDEF de Saône-et-Loire le versement à Mme B... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 août 2020 et 25 mars 2021, l'IDEF de Saône-et-Loire, représenté par Me Meunier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2020 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme B... devant ce tribunal ;

3°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du 28 juin 2019 est motivée en droit et en fait ;

- le moyen de première instance selon lequel la décision attaquée serait entachée d'une erreur de droit est sans portée dès lors que la décision en litige, d'une part, se borne à refuser de faire droit à une reconnaissance de maladie imputable au service et ne concerne pas la mise en disponibilité d'office, d'autre part, ne se fonde pas sur l'état de santé antérieur de Mme B... ;

- c'est à tort que le jugement attaqué, sans prise en compte des facteurs contextuels, a retenu l'existence d'un lien entre l'état dépressif de Mme B... et le service, alors que cette dernière est à l'origine des événements qui ont conduit à son arrêt de travail ; le fait personnel de l'agent conduit à détacher la maladie du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2020, Mme C... B..., représentée par Me Mendel, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) d'enjoindre à l'IDEF de Saône-et-Loire de la rétablir rétroactivement dans sa position statutaire et son régime indemnitaire, dans un délai de 15 jours à, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un même délai ;

2°) de mettre à la charge de l'IDEF de Saône-et-Loire une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen sérieux de sa demande de reconnaissance de la maladie comme étant imputable au service, d'une part, en ce que la décision attaquée ne vise ni ne cite les avis de la commission de réforme du 5 mars 2019 et du 7 mai 2019, d'autre part, en ce qu'elle ne fait pas état de l'expertise médicale du 11 janvier 2019, enfin, en ce qu'elle ne comporte aucune précision d'ordre médical et n'a pas joint l'avis cité de la commission de réforme ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit, dès lors que l'agent dont la pathologie est imputable au service ne saurait être placé en disponibilité d'office pour raison de santé du fait de l'épuisement de ses congés ordinaires ;

- le jugement doit être confirmé, dès lors que l'IDEF ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute et encore moins d'une faute personnelle ou d'un fait personnel exorbitant du service.

Par ordonnance du 25 mars 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- les observations de Me Meunier pour l'institut départemental de l'enfance et de la famille de Saône-et-Loire.

Considérant ce qui suit :

1. L'institut départemental de l'enfance et de la famille (A...) de Saône-et-Loire relève appel du jugement du 25 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision de son directeur en date du 28 juin 2019 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme C... B... imputable au service, et lui a enjoint, dans un délai de trois mois, de reconnaître cette imputabilité et de régulariser sa situation administrative en tenant compte de cette reconnaissance.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, dans sa rédaction alors applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...). "

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir été convoquée à un entretien avec le directeur de l'IDEF de Saône-et-Loire le 31 octobre 2017, Mme B... a souffert d'un syndrome dépressif, pour lequel son employeur a par ailleurs financé trois séances auprès d'une psychologue. Cette dernière a attesté d'un état assimilable à un " état de stress post traumatique après qu'elle ait été remise en cause dans son travail sans avoir perçu de signaux d'alerte avant-coureurs ". Pour retenir l'imputabilité au service du syndrome dépressif dont souffre Mme B..., le jugement attaqué s'est fondé en particulier sur la seconde expertise sollicitée par la commission de réforme, qui conclut à une " symptomatologie psychiatrique de survenance aigue dans le cadre d'adversité brutale survenue au travail ", et à l'absence d'antécédents psychiatriques. Les premiers juges ont relevé que cette expertise a conduit la commission de réforme à émettre, par deux fois, les 5 mars 2019 et 7 mai 2019, un avis favorable à l'imputabilité au service de la maladie.

5. Pour critiquer ce jugement, l'IDEF de Saône-et-Loire fait valoir qu'en l'espèce, Mme B... est à l'origine des événements qui ont conduit à son arrêt de travail.

6. Il ressort des pièces du dossier que l'entretien pré-disciplinaire du 31 octobre 2017 a eu pour objet de permettre à Mme B... de s'expliquer sur son comportement à la suite des plaintes récurrentes de la part de ses collègues. A l'occasion de cet entretien, dont il n'est pas établi qu'il aurait donné lieu à des propos ou un comportement excédant l'exercice normal de son pouvoir hiérarchique, le directeur de l'IDEF a décidé de ne pas sanctionner Mme B..., mais de l'encourager à aborder différemment les relations professionnelles avec ses collègues de travail et le travail en équipe. Le compte-rendu de cet entretien fait état du mal-être des agents travaillant avec Mme B... en raison des difficultés au travail suscitées quotidiennement par son comportement. Celui de la réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 11 décembre 2017, faisant un point de situation après l'organisation d'une journée de médiation, confirme le vécu de harcèlement, de disqualification professionnelle voire personnelle des agents et l'incapacité de l'intéressée à entendre les difficultés évoquées par ses collègues, concluant à l'impossibilité pour l'équipe de travailler à nouveau ensemble. Par suite, et quand-bien même il n'a pas été sanctionné, le comportement de Mme B... constitue la cause déterminante de la dégradation et du caractère conflictuel de ses relations de travail. Il en résulte, alors même qu'elle n'avait pas d'antécédent à sa pathologie, que le syndrome anxio-dépressif dont elle souffre résulte d'un fait personnel conduisant à détacher la survenance de la maladie du service. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions citées au point 2 pour annuler la décision du 28 juin 2019.

7. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Dijon et devant la cour.

En ce qui concerne les autres moyens :

8. En premier lieu, la décision du 28 juin 2019 vise les textes applicables et l'avis favorable de la commission de réforme du 7 mai 2019. Elle précise suffisamment les motifs pour lesquels l'IDEF a considéré que le lien de causalité n'était pas établi. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée, qui n'avait pas à mentionner les expertises médicales ou citer les avis de la commission de réforme, doit être écarté.

9. En second lieu, le moyen selon lequel ne saurait être placé en disponibilité d'office pour raison de santé du fait de l'épuisement de ses congés ordinaires l'agent dont la pathologie est imputable au service, ce qui n'est pas le cas, comme il a été dit au point 6, ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que l'IDEF de Saône-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 28 juin 2019, refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B....

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la demande de Mme B... dirigées contre la décision du 28 juin 2019, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction que l'intimée reprend en appel ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que Mme B... demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de l'IDEF de Saône-et-Loire, qui n'est pas partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'IDEF de Saône-et-Loire au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Dijon et le surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à l'institut départemental de l'enfance et de la famille de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet de Saône-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY02444


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02444
Date de la décision : 13/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ADIDA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-07-13;20ly02444 ?
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