Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL Simon Graphic a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de la décision du 3 mai 2019 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Auvergne-Rhône-Alpes et du département du Rhône a rejeté sa demande d'agrément portant sur le transfert des déficits fiscaux reportables de la SARL Imprimerie Bobillier.
Par un jugement n° 1905308 du 15 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 novembre 2020 et 7 janvier 2022, la SARL Simon Graphic, représentée par Me Sirat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Lyon du 15 septembre 2020 ainsi que la décision susmentionnée ;
2°) d'enjoindre à l'administration fiscale d'agréer le transfert des déficits reportables non déduits par la SARL Imprimerie Bobillier pour un total de 250 386 euros ou, à titre subsidiaire, pour un montant de 187 411 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'évolution du chiffre d'affaires de la SARL Imprimerie Bobillier mentionné dans la décision de refus d'agrément a pour origine la dégradation du secteur de l'imprimerie et divers facteurs ;
- l'évolution des effectifs de la société s'explique par le coût des salaires en Suisse et celle des moyens d'exploitation par le changement du mode de financement du matériel d'exploitation par la société absorbée, celle-ci ayant dû avoir recours au crédit-bail mobilier, et dans une moindre mesure à la location pure de matériel ; ces évolutions n'ont eu pour but que de soutenir l'activité de l'entreprise ;
- elles ne correspondent pas à la notion de " changement significatif " visée par les dispositions du b) du II de l'article 209 du code général des impôts ;
- elle est fondée à solliciter à titre subsidiaire que sa demande soit agréée pour la période 2007-2015 pour laquelle elle remplit les conditions visées par les dispositions précitées.
Par deux mémoires, enregistrés les 29 juin 2021 et le 18 février 2022 (non communiqué), le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 19 janvier 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 21 février 2022.
Par un courrier du 3 juin 2022, la cour a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties de ce que de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par la SARL Simon Graphic tendant à l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle porte uniquement sur le refus d'agrément au titre du transfert des déficits constatés sur la période 2007-2015 en raison de l'indivisibilité de la décision en cause.
Deux réponses à ce moyen soulevé d'office ont été produites pour le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique les 7 et 10 juin 2022.
Une réponse à ce moyen soulevé d'office a été produite pour la SARL Simon Graphic le 8 juin 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Simon Graphic, qui exerce une activité d'imprimerie, a sollicité auprès de l'administration fiscale, par courrier du 24 novembre 2016, le bénéfice des dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts prévoyant le transfert des déficits de la société confondue Imprimerie Bobillier, constatés pendant la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2015, à son profit, en raison de l'opération de transmission universelle de patrimoine réalisée définitivement le 25 novembre 2016, société dont elle détient la totalité des parts depuis le 29 septembre 2011. Par décision du 3 mai 2019, la direction régionale des finances publiques de la région Auvergne-Rhône-Alpes et du département du Rhône a refusé de lui délivrer l'agrément sollicité au motif que deux des conditions du II de l'article 209 du code général des impôts n'étaient pas remplies. La SARL Simon Graphic relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la demande présentée à titre principal :
2. Aux termes du II de l'article 209 du code général des impôts dans sa version applicable : " En cas de fusion ou opération assimilée placée sous le régime de l'article 210 A, les déficits antérieurs et la fraction d'intérêts mentionnée au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212 non encore déduits par la société absorbée ou apporteuse sont transférés, sous réserve d'un agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, à la ou aux sociétés bénéficiaires des apports, et imputables sur ses ou leurs bénéfices ultérieurs dans les conditions prévues respectivement au troisième alinéa du I et au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212. / En cas de scission ou d'apport partiel d'actif, les déficits transférés sont ceux afférents à la branche d'activité apportée. / L'agrément est délivré lorsque : (...) b) L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé n'a pas fait l'objet par la société absorbée ou apporteuse, pendant la période au titre de laquelle ces déficits et ces intérêts ont été constatés, de changement significatif, notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d'activité c) L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés absorbantes ou bénéficiaires des apports pendant un délai minimal de trois ans, sans faire l'objet, pendant cette période, de changement significatif, notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d'activité ;(...) ".
3. Il résulte des dispositions du b du II de l'article 209 du général des impôts que la condition qu'elles énoncent tient à ce qu'examinée pour elle-même, l'activité transférée à la société absorbante n'ait pas fait l'objet de changements significatifs pendant la période au titre de laquelle ont été constatés les déficits dont le transfert est demandé. Cette période s'étend de l'exercice de naissance des déficits en cause jusqu'à celui au cours duquel est effectuée la demande tendant à leur transfert. En outre, la diminution par la société absorbée, au cours de ladite période, de son emploi et des moyens d'exploitation qu'elle met en œuvre, ne saurait à elle seule, lorsqu'elle est destinée à assurer le maintien du volume de l'activité à l'origine des déficits, être regardée comme un changement significatif d'activité justifiant le refus de l'agrément sollicité.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'administration fiscale a refusé à la SARL Simon Graphic le bénéfice de l'agrément visé au II de l'article 209 du code général des impôts aux motifs que les conditions posées au b) et c) de cet article pour le transfert des déficits de la société Imprimerie Bobillier n'étaient pas remplies. L'administration ne conteste pas en appel l'invalidation par les premiers juges du motif tiré de non-respect du c) du II de l'article 209 précité. Demeure donc seul en litige le premier motif de refus d'agrément tiré de ce que la société absorbée avait connu des changements significatifs pendant la période au titre de laquelle les déficits ont été constatés, soit du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2015, en particulier que son chiffre d'affaires, qui oscillait entre 857 738 euros et 1 174 779 euros au début de la période déficitaire de 2000 à 2003 avec un effectif évoluant de 16 à 9 salariés, est passé, sur la période déficitaire de 2007 à 2012, entre 537 884 euros et 718 209 euros pour ne comprendre que deux salariés à compter de l'exercice 2012.
5. Il n'est pas contesté en l'espèce que, sur la période considérée, le chiffre d'affaires de la SARL Imprimerie Bobillier a été réduit de moitié et que, dans le même temps, ses effectifs, au nombre de 16 en 2001 sont tombés à 2 dès 2012. Par suite, en admettant même que les moyens d'exploitation mis en œuvre par la SARL Imprimerie Bobillier pendant cette période n'auraient pas connu d'évolutions en raison notamment d'un changement de mode de financement de ces moyens d'exploitation matériels, qui n'est pas un motif retenu par l'administration dans la décision contestée, le volume de son activité a néanmoins connu des changements significatifs pendant la période au titre de laquelle ont été constatés les déficits dont le transfert est demandé, se matérialisant par une baisse significative de son chiffre d'affaires et de ses effectifs. Dans ces conditions, la SARL Simon Graphic n'est pas fondée à soutenir que le motif retenu par l'administration, pour lui refuser l'agrément sollicité, tiré de l'existence de changements significatifs du volume d'activité de la SARL Imprimerie Bobillier serait erroné.
6. D'ailleurs, et en méconnaissance du b) du II de l'article 209 précité, cette demande pouvait être rejetée au motif que les activités de librairie et de papeterie, soit deux des trois activités outre celle d'imprimerie que la société exerçait en 2001, avaient cessé à la date de la reprise d'activité par la requérante alors que la demande de transfert de déficits a porté sur les déficits générés par ces trois activités.
En ce qui concerne la demande présentée à titre subsidiaire :
7. Lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation partielle d'un acte dont les dispositions forment un tout indivisible, le juge de l'excès de pouvoir est tenu de rejeter ces conclusions comme irrecevables, quels que soient les moyens invoqués contre la décision attaquée. Il est constant que la SARL Simon Graphic a sollicité un agrément en vertu des dispositions précitées au titre des déficits constatés pendant la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2015, pour un montant total de 250 386 euros. La décision portant refus d'agrément du 3 mai 2019 n'étant pas divisible, la SARL Simon Graphic n'est pas recevable à solliciter, auprès du juge de l'excès de pouvoir, l'annulation partielle de la décision contestée en tant qu'elle porte sur une autre période que celle au titre de laquelle la demande a été présentée.
8. Il résulte de ce qui précède que la SARL Simon Graphic n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Simon Graphic la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Simon Graphic est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à SARL Simon Graphic et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre ;
Mme Dèche, présidente assesseure ;
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 août 2022.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
S. Lassalle
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03373
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