Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le ministre de l'intérieur a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie dont elle souffre et d'enjoindre à cette autorité de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1902171 du 17 février 2022, le tribunal a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 1er avril 2022, Mme A..., représentée par Me Pouderoux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision contestée méconnaît les dispositions du IV de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, la pathologie psychique dont elle souffre étant imputable au service.
Par une ordonnance du 10 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 novembre 2022.
Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a produit un mémoire, enregistré le 1er février 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chassagne, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... était titulaire du grade d'adjoint administratif principal de 2ème classe du ministère de l'intérieur et de l'outre-mer, et exerçait ses fonctions au sein de la direction centrale de recrutement et de la formation, située à Clermont-Ferrand. A la suite de son placement en arrêt de travail à partir du 4 mars 2019, elle a demandé le 5 juin 2019 la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre à compter du 1er mars 2019. Le 1er octobre 2019, la commission de réforme du ministère de l'intérieur a émis un avis défavorable à cette reconnaissance, au vu d'un rapport médical du 19 septembre 2019 établi par un médecin psychiatre désigné par l'administration. Par un arrêté du 8 octobre 2019, le ministre de l'intérieur a finalement opposé un refus à la demande présentée par Mme A... le 5 juin 2019. Celle-ci relève appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 17 février 2022 qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive (...) à une maladie contractée en service définis aux (...) IV du présent article. (...). / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / (...) / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'État. / (...). "
3. Il résulte des dispositions précitées du IV l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 que, dans l'hypothèse où le mécanisme de présomption prévu par le premier alinéa ne peut être retenu, dans le cas prévu par le troisième alinéa, peut être regardée comme imputable au service une maladie lorsqu'il est démontré qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions, et donc, si elle présente un lien direct avec l'exercice de ces fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de cette maladie, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de cette maladie du service.
4. Au vu en particulier d'un certificat médical du 5 juin 2019 comme du rapport médical du 19 septembre 2019, il apparaît que Mme A... souffre d'une pathologie d'ordre psychique. Cette pathologie, compte tenu de sa nature, ne figure pas au nombre de celles pour lesquelles joue le mécanisme de présomption prévu par les dispositions ci-dessus. Si le rapport du 19 septembre 2019 a retenu que cette pathologie était imputable au service, ce constat repose sur les seules déclarations de l'intéressée qui a décrit ses conditions de travail telles qu'elle pouvait les ressentir, et non sur des éléments objectifs. Ce rapport fait par ailleurs état du trouble psychiatrique dont souffre l'intéressée depuis longtemps, qui nécessite un suivi spécialisé et un traitement médical assez lourd, notamment après une tentative de suicide en 2005 et une hospitalisation d'un mois à cette occasion. Comme l'a notamment rappelé la commission de réforme dans son avis émis le 1er octobre 2019, Mme A... présentait un état antérieur. Aucune pièce du dossier, et notamment pas les certificats médicaux des 3 et 17 juillet 2019 établis respectivement par le médecin psychiatre traitant de Mme A... et par le médecin de prévention, qui sont peu précis ou le témoignage d'un agent syndical en date du 30 novembre 2018, ne suffit à montrer que les conditions de travail de l'intéressée, en particulier récentes, seraient essentiellement et directement à l'origine du développement de son affection. Dans ces conditions, et sans qu'il soit nécessaire de vérifier la condition liée à l'incapacité permanente, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que, en prenant la décision contestée, et en ne reconnaissant pas l'imputabilité au service de sa pathologie, le ministre de l'intérieur aurait méconnu les dispositions rappelées plus haut.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 23 février 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
M. Chassagne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.
Le rapporteur,
J. Chassagne
Le président,
V.-M. Picard La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY00984
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