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30/03/2023 | FRANCE | N°20LY02984

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 30 mars 2023, 20LY02984


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête enregistrée sous le n° 1900112, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du jury de la formation de deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 qui l'a ajourné à cet examen, ainsi que des décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique. Il a également demandé que soit enjoint à l'université la validation de sa deuxième année de licence LEA, dans un délai de trente jours à compter

de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête enregistrée sous le n° 1900112, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du jury de la formation de deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 qui l'a ajourné à cet examen, ainsi que des décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique. Il a également demandé que soit enjoint à l'université la validation de sa deuxième année de licence LEA, dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, le réexamen de sa situation dans le même délai.

Par une seconde requête enregistrée sous le n° 1902066, M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon la condamnation de l'université Lumière Lyon II à lui verser, d'une part, la somme de 15 445 euros, assortie des intérêts, en réparation du préjudice résultant de son ajournement de deuxième année de licence LEA et, d'autre part, la somme de 15 000 euros, assortie des intérêts, en réparation du préjudice résultant d'un harcèlement moral et de faits de discrimination dont il estime avoir été victime.

Par un jugement n° 1900112-1902066 du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé la délibération du jury de la formation de la deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 en tant qu'elle prononce l'ajournement de M. A..., ainsi que les décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique. Il a également enjoint à la présidente de l'université Lumière Lyon II le réexamen de la situation de M. A... et a rejeté les surplus des conclusions de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 octobre 2020 et des mémoires enregistrés les 2 juillet 2021 et 2 août 2021, M. A..., représenté par Me Billet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, la délibération du jury de la formation de deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 qui l'a ajourné à cet examen, ainsi que les décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique ;

2°) d'enjoindre à la présidente de l'université Lumière Lyon II, à titre principal, de valider sa deuxième année de licence LEA, dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

3°) de condamner l'université Lumière Lyon II à lui verser, d'une part, la somme de 15 445 euros, assortie d'intérêts, en réparation du préjudice résultant de son ajournement de deuxième année de licence LEA et, d'autre part, la somme de 15 000 euros, assortie d'intérêts, en réparation du préjudice résultant d'un harcèlement moral et de faits de discrimination ;

4°) de mettre à la charge de l'université Lumière Lyon II le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros hors taxe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour celui-ci de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la délibération a été prise en méconnaissance du principe d'égalité entre les étudiants d'une même promotion ;

- elle est entachée d'une incompétence négative en ce que sa situation particulière n'a pas été évoquée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- en raison de son ajournement, la responsabilité de l'université est engagée, à titre principal, sur le fondement de la responsabilité sans faute pour rupture d'égalité devant les charges publiques, à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité pour faute ; le préjudice résultant de cet ajournement s'élève à 5 445 euros au titre du préjudice financier et 10 000 euros au titre du préjudice moral ;

- la responsabilité de l'université est également engagée au regard du harcèlement moral dont il a été victime. A ce titre, son préjudice peut être évalué à la somme de 15 000 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier 2021 et 21 juillet 2021, l'université Lumière Lyon II, représentée par Me Walgenwitz, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction dirigées contre la délibération du 18 juillet 2018 sont irrecevables car dirigées contre une décision qui a fait l'objet d'une annulation et a été remplacée par une nouvelle délibération du jury du 18 juin 2020 ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le règlement général de scolarité Licence 2016-2020 ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bentéjac, première conseillère ;

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Billet, représentant M. A..., et celles de Me Allala, assistée de Mme C..., élève avocate, représentant l'université Lumière Lyon 2.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... qui était inscrit, pour l'année universitaire 2017-2018, en deuxième année de licence de Langues étrangères appliquées (LEA) section anglais-arabe au sein de l'université Lumière Lyon 2, a été ajourné. Dans le cadre d'une première instance, il a sollicité du tribunal administratif de Lyon l'annulation de la délibération du jury du 18 juillet 2018 l'ajournant ainsi que des décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique formés contre cette délibération. Il a également demandé que soit enjoint à la présidente de l'université Lumière Lyon II, à titre principal, la validation de sa deuxième année de licence LEA, à titre subsidiaire, le réexamen de sa situation. Dans le cadre d'une seconde instance, il a sollicité la condamnation de l'université Lumière Lyon II à lui verser la somme de 15 445 euros en réparation du préjudice résultant de cet ajournement et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral et de faits de discrimination dont il estime avoir été victime, toutes deux assorties d'intérêts. Par jugement du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé la délibération du jury de la formation de la deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 en tant qu'elle prononce l'ajournement de M. A..., ainsi que les décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique, enjoint à la présidente de l'université Lumière Lyon II le réexamen de la situation de M. A... et rejeté les surplus des conclusions de M. A.... Celui-ci relève appel de ce jugement en demandant une nouvelle fois l'annulation de la délibération du jury de la formation de deuxième année de licence LEA de l'université Lumière Lyon II du 18 juillet 2018 qui l'a ajourné à cet examen, ainsi que les décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique. Il relève également appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions à fin d'injonction à titre principal tendant à la validation de sa deuxième année de licence LEA et en tant qu'il a rejeté sa demande de condamnation de l'université à l'indemniser des préjudices résultant, d'une part, de son ajournement de deuxième année de licence LEA, d'autre part, du harcèlement moral et de faits de discrimination dont il estime avoir été victime.

Sur l'étendue du litige :

2. M. A... n'est pas recevable à demander de nouveau en appel l'annulation de la délibération du jury du 18 juillet 2018 ainsi que des décisions de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique qui ont déjà été annulées par le tribunal administratif de Lyon.

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit aux conclusions à fin d'injonction présentées à titre principal :

3. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à relever appel en tant que le jugement n'a pas fait droit à sa demande principale. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale.

4. M. A... fait appel du jugement du 28 mai 2020 en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions d'injonction à titre principal tendant à la validation de sa deuxième année de licence LEA. Il appartient à la cour, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant elle, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale d'injonction du requérant.

5. M. A... soutient tout d'abord que les devoirs portant sur la rédaction d'un CV, d'une lettre de motivation et d'une autodictée en langue arabe n'ont fait l'objet d'aucune évaluation alors qu'ils auraient dû être pris en compte dans le calcul de ses moyennes de travaux dirigés " Négociation arabe " et " Société, culture et institution " ce qui constitue une rupture d'égalité avec les autres étudiants de la promotion. Toutefois, en l'admettant fondé, l'annulation pour un tel motif n'impliquerait, nécessairement, que le seul réexamen de la situation de M. A... et non la validation de sa deuxième année de licence LEA. Ainsi ce moyen n'aurait pas été mieux à même de régler le litige que ceux sur lesquels se fonde le jugement attaqué tirés de la composition irrégulière du jury et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'éducation. Par suite et conformément à ce qui a été dit au point 3, ce moyen n'étant pas susceptible de conduire à faire droit à la demande principale du requérant tendant à ce que sa seconde année de licence LEA soit validée, la cour n'a pas à se prononcer sur le moyen tiré de l'inégal traitement dont M. A... aurait été victime avant de statuer sur ses conclusions à fin d'injonction.

6. M. A... soutient également que la présidente du jury a méconnu l'étendue de sa compétence en refusant de réévaluer sa moyenne de manière à ce qu'il valide sa deuxième année et que le jury a entaché sa délibération d'une erreur d'appréciation en ne lui accordant pas des points de jury et en ne tenant pas compte des difficultés relationnelles l'opposant à l'un de ses enseignants. Toutefois, alors qu'aucune règle ni aucun principe n'impose au jury d'accorder des points supplémentaires à un candidat et que son appréciation ne peut utilement être contestée, les moyens invoqués, qui ne sont pas fondés, ne sont ainsi pas davantage de nature à faire droit à la demande d'injonction à titre principal de M. A....

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la présidente de l'université Lumière Lyon II de valider sa deuxième année de licence LEA.

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit aux conclusions aux fins d'indemnisation :

8. Le requérant sollicite la condamnation de l'université Lumière Lyon II à lui verser la somme de 15 445 euros en réparation de son ajournement de deuxième année de licence LEA. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'échec de M. A... à valider sa deuxième année de licence soit uniquement imputable aux illégalités dont était entachée la délibération initiale prononçant son ajournement, cet ajournement ayant été confirmé par la délibération prise en exécution du jugement attaqué. Dès lors, son préjudice ne présentant pas un caractère suffisamment certain, ses conclusions doivent être rejetées.

9. M. A... sollicite en outre la condamnation de l'université Lumière Lyon II à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral dont il estime avoir été victime de la part d'un enseignant. Toutefois, le seul fait que l'enseignant en cause n'ait pas corrigé certains des travaux préparés par M. A... ou aurait montré une attitude hostile à son égard au cours de sa scolarité n'est pas de nature à caractériser une situation de harcèlement moral susceptible d'être indemnisée à ce titre.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions aux fins d'indemnisation.

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'université Lumière Lyon II, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par l'université Lumière Lyon II, au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'université Lumière Lyon II présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'université Lumière Lyon II.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

Mme Bentéjac, première conseillère,

Mme Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023.

La rapporteure,

C. Bentéjac

Le président,

F. Pourny

La greffière,

E. Labrosse

La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY02984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02984
Date de la décision : 30/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

30-02-05-01 Enseignement et recherche. - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. - Enseignement supérieur et grandes écoles. - Universités.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Caroline BENTEJAC
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL JEAN-PIERRE et WALGENWITZ

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-03-30;20ly02984 ?
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