Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. E... B... et Mme D... F..., épouse B..., ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le maire de la commune de Four les a mis en demeure de remettre en état les avaloirs et barbacanes du mur longeant leur propriété dans le délai de quatre semaines et d'enjoindre à cette autorité et au président de la communauté d'agglomération des portes de l'Isère (CAPI) d'effectuer les travaux de remise en état du mur dans le délai de deux mois.
Par jugement n° 1901185 du 18 mai 2021, le tribunal a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 19 juillet 2021, M. et Mme B..., représentés par Orsec Avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 mai 2021 ainsi que l'arrêté du 21 décembre 2018 ;
2°) d'enjoindre au maire de Four et au président de la CAPI d'effectuer les travaux de remise en état du mur tels que préconisés par l'expert M. A... dans le délai de trois mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de leur verser annuellement une somme de 5 000 euros en indemnisation du trouble de jouissance et du préjudice moral résultant du risque d'effondrement du mur sur leur propriété ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Four et de la CAPI la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'ils étaient à l'origine du bouchage des canalisations d'évacuation au pied du mur de soutènement par du béton ;
- le mur de clôture de leur propriété constitue un ouvrage public accessoire de la voie publique qui menace de s'effondrer sur leur propriété en raison de l'absence d'écoulement des eaux pluviales après les travaux d'imperméabilisation de la chaussée ; ils sont victimes d'un dommage de travaux publics et sont fondés à demander qu'il soit fait injonction à la personne publique de prendre les mesures nécessaires afin de faire cesser ce dommage ou à défaut, à ce que la CAPI et la commune soient condamnées solidairement à réaliser les travaux afin que ne cesse ce dommage.
Par mémoire enregistré le 22 novembre 2021, la CAPI, représentée par Me Petit, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. et Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les conclusions indemnitaires des époux B... sont nouvelles en appel et irrecevables ;
- les conclusions tendant à la condamner à réaliser des travaux de remise en état du mur sont irrecevables, faute de réclamation préalable telle que prévue par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; ces conclusions ne présentent pas de lien suffisant avec les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2018 ;
- sa responsabilité ne saurait être engagée ; les désordres sur le mur ne lui sont pas imputables mais résultent des agissements fautifs des requérants consistant en l'obstruction des avaloirs et barbacanes ainsi qu'en l'absence d'entretien du mur, lequel n'est pas un mur de soutènement de la voie publique mais un simple mur de clôture de la propriété des requérants à qui en incombe l'entretien ; la faible fréquentation de la voirie ne peut être à l'origine des désordres en cause ; les requérants ne démontrent pas l'existence d'un préjudice anormal et spécial.
Par mémoire enregistré le 29 novembre 2021, la commune de Four, représentée par Me Ducrot, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :
- d'enjoindre à M. et Mme B... de déboucher à leurs frais les barbacanes et avaloirs ;
- de mettre à la charge de M. et Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les conclusions indemnitaires des époux B... sont nouvelles en appel et irrecevables ; subsidiairement ces conclusions ne sont assorties d'aucun justificatif ;
- le maire pouvait, sur le fondement de ses pouvoirs de police qu'il tient des articles L. 2212-2 et L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales, demander aux époux B... de déboucher les évacuations d'eaux pluviales de la voie publique existantes en pied de mur dès lors que l'obstruction au libre écoulement des eaux qui stagnent sur la voie publique, entrave la circulation des usagers et détériore la voie publique ; subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour estimerait que la commune est seule à même de réaliser les travaux, les époux B..., du fait de leurs agissements fautifs consistant à avoir bouché ces évacuations, doivent être condamnés à rembourser à la commune le prix des travaux nécessaires à la désobstruction conformément au devis versé aux débats ;
- les conclusions à fin d'injonction sont infondées dès lors qu'aucune des collectivités intimées n'est à l'origine des désordres en cause.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,
- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public,
- les observations de Me Barbier pour la CAPI et celles de Me Magon pour la commune de Four ;
Considérant ce qui suit :
1. Les époux B... sont propriétaires d'un bien immobilier situé notamment en contrebas de la rue du Ribollet dont le mur de soutènement constitue aussi la limite séparative. Ce mur dispose d'un dispositif d'évacuation des eaux pluviales qui se déversent dans un canal implanté en pied de mur du côté de la propriété des époux B.... Le mur de soutènement est affecté de désordres ayant provoqué en 2014 un effondrement partiel qui a donné lieu à une expertise judiciaire ordonnée en février 2015 par le tribunal administratif de Grenoble et à la remise d'un rapport par l'expert M. A..., le 15 juillet 2016. La migration des eaux pluviales de la chaussée à travers le mur conjuguée à la pression due à la circulation routière a été identifiée comme la cause de la destruction des joints et du délitement du mur. Constatant que les barbacanes et avaloirs d'évacuation d'eaux pluviales avaient été bouchées, le maire de Four a, par arrêté du 21 décembre 2018 et sur le fondement des articles L. 2212-2 du code général des collectivités locales, mis en demeure les époux B... de remettre en état ces ouvrages. Les époux B... relèvent appel du jugement du 18 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté et d'injonction en exécution des travaux de remise en état du mur.
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Les conclusions tendant à ce que les collectivités intimées soient condamnées solidairement à verser aux requérants la somme de 5 000 euros en réparation des troubles de jouissance et du préjudice moral sont nouvelles en appel et, par suite, doivent être rejetées comme irrecevables.
Sur l'arrêté du 21 décembre 2018 :
3. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer (...) la sûreté (...) et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues (...) et voies publiques (...) ; 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables (...) les accidents (...), tels que les (...) éboulements de terre ou de rochers (...) ".
4. Si la rue du Ribollet est une voirie communale d'intérêt communautaire dont la gestion relève de la CAPI à la suite d'un transfert de compétence, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le maire de Four intervienne sur le fondement de ses pouvoirs de police générale pour prévenir la survenance d'un trouble à l'ordre public. Or, il ressort des pièces du dossier que le bouchage du dispositif d'évacuation des eaux pluviales provoque la stagnation de volumes d'eaux sur la voie publique et provoque une poussée hydrostatique susceptible d'entraîner la ruine du mur et de la voie que cet ouvrage supporte, créant un risque pour la sécurité des usagers. En conséquence, le maire a pu, pour prévenir ce risque, exercer les prérogatives qu'il tient des dispositions citées au point 3 et enjoindre aux requérants de déboucher les barbacanes. Si M. et Mme B... se prévalent d'un jugement du 31 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a désigné la CAPI comme responsable des travaux de reprise, cette décision ne saurait être comprise comme autorisant les requérants à aggraver les désordres de l'ouvrage ni comme faisant obstacle à ce que le maire prescrive les mesures de protection nécessaires à protection de la sécurité publique.
5. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2018.
Sur les conclusions à fin d'injonction des époux B... :
6. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des époux B... dirigées contre l'arrêté du 21 décembre 2018 n'appelle aucune mesure d'exécution de la part de la commune ou de la communauté d'agglomération. Par suite, les conclusions à fin d'injonction de la requête doivent être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction de la commune de Four :
7. La commune de Four réitère en appel ses conclusions sans critiquer le motif d'irrecevabilité que lui a opposé le tribunal. Celles-ci doivent, dès lors, être rejetées.
Sur les frais d'instance :
8. Dans les circonstances de l'espèce les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des époux B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Four et les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la CAPI sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et Mme D... F..., épouse B..., à la communauté d'agglomération Portes de l'Isère et à la commune de Four.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2023 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président
Mme Aline Evrard, présidente assesseure,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.
La rapporteure,
Christine Psilakis
Le président,
Philippe Arbarétaz
Le greffier,
Julien Billot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 21LY02445