Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par jugement n° 2204632 du 16 septembre 2022, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 6 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Guerault, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, subsidiairement, de réexaminer sa demande après remise sous huitaine d'une autorisation provisoire de séjour, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour repose sur des faits matériellement inexacts puisqu'il travaille sous couvert d'un contrat de travail à durée indéterminée et dispose d'un logement autonome ; ces erreurs ont été déterminantes puisque ces circonstances auraient pu conduire la préfète à prendre en sa faveur une mesure dérogatoire favorable ;
- en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète de l'Ain a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la préfète a méconnu l'étendue de sa compétence, en n'envisageant pas de lui délivrer à titre dérogatoire un titre de séjour après avoir constaté qu'il ne remplissait pas les conditions pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire.
Par mémoire enregistré le 10 février 2023, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 novembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Corvellec.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant albanais né le 10 août 1987, est entré en France le 16 décembre 2021 afin d'y rejoindre son épouse, qui y disposait d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " valable jusqu'au 6 juin 2023. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... relève appel du jugement du 16 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète de l'Ain du 20 mai 2022 rejetant sa demande, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la mention portée dans l'arrêté litigieux selon laquelle M. A... n'a produit, à l'appui de sa demande de titre de séjour, ni promesse d'embauche, ni contrat de travail, ni aucun diplôme lui permettant d'occuper un emploi en France n'est pas erronée. Par suite, alors même qu'il occupait, à la date de la décision litigieuse, un emploi sous contrat de travail à durée indéterminée conclu le 14 mars 2022, cette circonstance n'est pas de nature à entacher les motifs de cette décision d'une erreur matérielle. Par ailleurs, si le préfet a indiqué, à tort, que M. A... ne dispose pas d'un logement autonome, il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur ce motif matériellement erroné.
3. En deuxième lieu, s'il est toujours loisible à un préfet de régulariser la situation d'un étranger qui ne remplirait pas les conditions pour obtenir un titre de séjour, la circonstance que la préfète de l'Ain n'ait pas indiqué, dans l'arrêté litigieux, qu'elle n'avait pas entendu régulariser la situation de M. A... n'est pas de nature à démontrer qu'elle n'aurait pas envisager de le faire. Par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que la préfète a méconnu l'étendue de sa compétence en n'envisageant pas de lui délivrer un titre de séjour à titre dérogatoire.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
5. M. A..., qui est arrivé en France en décembre 2021 à l'âge de trente-quatre ans, pour y rejoindre son épouse avec laquelle il s'était marié en Albanie quelques mois auparavant, résidait depuis seulement cinq mois en France lorsque le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Dans ces conditions, et alors même que son épouse et sa belle-famille résident régulièrement sur le territoire français, que son épouse y travaille et qu'il a lui-même signé un contrat de travail à durée indéterminée en mars 2022, eu égard au caractère très récent de son séjour en France et de la brièveté de sa vie commune avec son épouse, la préfète de l'Ain n'a pas, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... et en l'obligeant à quitter le territoire français, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par ces mesures. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point 4 doit ainsi être écarté. Pour les mêmes motifs, en prenant les décisions en litige, et alors même que la mesure d'éloignement aura pour conséquence de mettre fin à son contrat de travail, la préfète n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
7. Les circonstances dont M. A... se prévaut, rappelées au point 5, et notamment le fait qu'il a obtenu très rapidement un contrat de travail à durée indéterminée en arrivant en France et que le couple dispose désormais de son propre logement, ne suffisent pas à caractériser, compte tenu du caractère récent de son arrivée en France et de la brièveté de sa vie commune avec son épouse, des circonstances particulières justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En refusant de délivrer à M. A... un titre de séjour sur le fondement de cet article, la préfète de l'Ain n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
8. En dernier lieu, il résulte ce qui précède que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les autres décisions contenues dans l'arrêté du 20 mai 2022 sont illégales en conséquence de l'illégalité de ces décisions.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, en ce compris celles aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président,
Mme Evrard, présidente assesseure,
Mme Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.
La rapporteure,
S. CorvellecLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
M-A. Boizot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 23LY00080