Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2022 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. Son conseil, Me C... a demandé que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par jugement n° 2202778 du 31 janvier 2023, la présidente du tribunal a fait droit à la demande d'annulation et d'injonction mais a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 février 2023, M. A... C... demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et à son bénéfice la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient qu'en rejetant sa demande tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le tribunal a fait une appréciation inexacte de ces dispositions.
La requête a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard,
- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 décembre 2022, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé d'admettre au séjour M. B..., ressortissante ivoirien, l'a obligé à quitter le territoire français sous trente jours, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire pendant un an. M. B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler cet arrêté. Son conseil, Me C..., a demandé que soit mise à la charge de l'Etat et à son bénéfice la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Par jugement n° 2202778 du 31 janvier 2023, la présidente du tribunal a annulé cet arrêté et a rejeté la demande tendant à ce que l'Etat verse à l'avocat les frais de l'instance. M. C... relève appel de ce jugement dans cette dernière mesure.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne (...) la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". Et aux termes de l'article de la loi du 10 juillet 1991 : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 : " L'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle perçoit une rétribution (...) / Le montant de la dotation affecté à l'aide juridictionnelle résulte d'une part, du nombre de missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d'autre part, du produit d'un coefficient par type de procédure et d'une unité de valeur de référence. Le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, de cette unité de valeur de référence est fixé, pour les missions dont l'admission à l'aide juridictionnelle est prononcée à compter du 1er janvier 2022, à 36 euros ". Aux termes de l'article 86 du décret du 28 décembre 2020 : " La contribution de l'Etat à la rétribution des avocats qui prêtent leur concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale (...) est déterminée par le produit de l'unité de valeur prévue par la loi de finances (UV) et des coefficients, le cas échéant majorés, fixés dans les tableaux figurant en annexe I du présent décret et du taux d'admission à l'aide juridictionnelle ". Le point XIV 6 de cette annexe affecte un coefficient de 14 aux " recours dirigés contre les mesures prises en matière de droit des étrangers, à l'exception des recours indemnitaires et des référés ".
4. La présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir relevé que l'avocat désigné, à la demande de M. B..., au titre de l'aide juridictionnelle en vue de contester la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) n'avait accompli aucune diligence si bien que le bureau d'aide juridictionnelle de la CNDA avait été contraint de désigner un nouvel avocat, le 15 décembre 2022, a prononcé l'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 7 décembre 2022 au motif que la décision de l'OFPRA du 18 juillet 2022 n'était pas définitive à la date de cet arrêté et que l'intéressé bénéficiait du droit de se maintenir en France jusqu'à la décision de la CNDA statuant sur sa demande. Elle a rejeté la demande présentée sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, dans les circonstances de l'espèce, au motif que le détail de l'argumentation juridique du moyen d'annulation de l'arrêté n'avait pas été développé par l'avocat.
5. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier que l'Etat a, dans cette instance, la qualité de partie perdante et que l'annulation de l'arrêté litigieux a été obtenue grâce au recours contentieux ayant donné lieu à l'aide juridictionnelle. Dans les circonstances de l'espèce, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la présidente du tribunal a rejeté ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. L'article 4 du jugement attaqué doit en conséquence être annulé en tant qu'il a rejeté ces conclusions.
6. Il y a lieu pour la cour, statuant par l'effet dévolutif de l'appel, de mettre à la charge de l'Etat, dans les circonstances de l'espèce, la somme de 1 000 euros à verser à M. C... en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridique qui lui a été confiée, au titre de l'instance n° 2202778 engagée devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand par M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 4 du jugement n° 2202778 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 31 janvier 2023 est annulé.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridique qui lui a été confiée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président,
Mme Evrard, présidente assesseure,
Mme Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.
La rapporteure,
A. EvrardLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY00628