Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2023 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2300628 du 6 juin 2023, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 10 juillet 2023, Mme B..., représentée par Me Ben Hadj Younès, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté susmentionné ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier ; il méconnaît le principe du contradictoire ; elle n'a pas disposé d'un délai suffisant pour répliquer au mémoire du préfet de la Côte-d'Or ;
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne l'intérêt supérieur de son enfant ; il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et d'une erreur manifeste d'appréciation ; il méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de séjour ; elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête Mme B... a été communiquée au préfet de la Côte d'Or qui n'a pas produit d'observations.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante de la république démocratique du Congo née en 1978, est entrée en France le 10 novembre 2017, sous couvert d'un visa court séjour, accompagnée de son enfant. Une autorisation provisoire de séjour en qualité de " parent accompagnant un mineur malade ", valide du 22 juillet au 22 septembre 2021 lui a été délivrée. Puis le préfet de la Côte-d'Or, saisi d'une demande de titre sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a, par décisions du 17 janvier 2023, refusé d'y faire droit, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé. Mme B... relève appel du jugement du 6 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) ". Le mémoire en réplique produit par le préfet de la Côte-d'Or devant le tribunal administratif de Dijon a été communiqué à la requérante le 5 mai 2023, soit avant la date de clôture d'instruction fixée au 11 mai 2023. Elle a disposé, en l'espèce, d'un délai suffisant pour y répliquer avant la clôture ou pour préparer sa défense en vue de l'audience du 30 mai 2023. Aucune violation du principe du contradictoire ne saurait ici être retenue.
Sur le fond du litige :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). ", aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. Le refus de titre en litige rappelle les démarches entreprises par Mme B... et les conditions de son entrée en France, ainsi que son lieu de naissance et sa nationalité. Il décrit l'objet de la demande d'autorisation provisoire de séjour qu'elle a présentée. Il procède ensuite à l'analyse de la situation globale de la requérante, en particulier sa situation personnelle, familiale et sociale, qui est décrite de façon très précise. Il suit de là que la décision est motivée en fait et en droit avec une précision suffisante au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Le préfet de la Côte-d'Or n'était pas tenu de motiver sa décision au regard de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant qui ne constitue pas le fondement de sa décision, ni de reprendre l'ensemble des circonstances de l'espèce. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit par suite, être écarté.
5. Cet arrêté n'est pas davantage entaché d'un défaut d'examen suffisant de la situation de l'intéressée, rien ne permettant de dire que le préfet de la Côte- d'Or n'aurait pas pris en compte les éléments relatifs à sa fille et son intérêt supérieur au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
7. Si la requérante fait valoir que sa fille a suivi sa scolarité en France où elle justifie obtenir d'excellents résultats, il n'apparaît pas que la décision litigieuse aurait pour effet de séparer l'enfant de sa mère et que celle-ci ne pourrait poursuivre sa scolarité dans son pays d'origine dans les mêmes conditions que celles qu'elle connaît en France. Aucune méconnaissance de l'article 3-1°de la convention des droits de l'enfant ne saurait être retenue.
8. Mme B... se prévaut de sa présence en France depuis 2017 et soutient que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe désormais dans ce pays, ajoutant que sa fille est scolarisée en France depuis l'école primaire et qu'elle-même présente un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'assistante de vie. Toutefois outre que les attestations produites par Mme B... sont peu circonstanciées, il apparaît que cette dernière s'est maintenue en situation irrégulière sur le territoire français à compter de la fin de validité de son visa puis de son autorisation provisoire de séjour, et qu'elle a conservé des attaches familiales fortes en république démocratique du Congo, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-neuf ans et où résident son mari et deux autres enfants mineurs. Dans ces conditions, le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de Mme B....
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il résulte de ce qui précède que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.
10. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Au soutien du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, soulevé à l'encontre de la décision portant fixation du pays de destination, la requérante se borne à renvoyer au moyen soulevé en ce sens à l'encontre de la décision portant refus de séjour. Dès lors, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 8 du présent arrêt, ce moyen doit être écarté. Mme B... n'ayant pas soulevé d'autre moyen à l'encontre de la décision, par laquelle le préfet a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée, elle n'est pas fondée en demander l'annulation.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 6 mai 2024 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.
La rapporteure,
C. Djebiri
Le président,
V-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY02316
kc