Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2014.
Par un jugement nos 1904676-1904695 du 12 juillet 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 septembre 2022, M. C..., représenté par Me Ibarra, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et entaché d'une contradiction dans ses motifs ;
- en procédant à la déclaration de la plus-value immobilière réalisée en 2014, la SCI Sami a manifesté son intention de ne pas recourir à l'option d'imposition différée des plus-value latentes prévue au II de l'article 202 ter du code général des impôts, en cas d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés d'une société relevant de l'article 8 du même code ;
- c'est à l'occasion du contrôle de la SCI qu'une option " forcée " a été effectuée à la demande du service vérificateur en faveur de cette atténuation conditionnelle en 2017, soit plus de trois ans après la déclaration de plus-value ; cette option n'est pas valable ;
- la nouvelle déclaration de plus-value adressée le 28 mars 2019 doit être prise en compte, dès lors que le choix offert aux contribuables peut être effectué par voie de réclamation contentieuse dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-2 du livre des procédures fiscales, la loi n'ayant pas prévu que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraînait la déchéance du droit à cette option ;
- cette nouvelle déclaration, intervenue dans le délai de réclamation, ne fait que confirmer la volonté initiale des associés de la SCI manifestée par le dépôt de la déclaration de plus-value du 3 avril 2014.
Par un mémoire, enregistré le 30 mars 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable pour défaut de moyens s'agissant de la rectification afférente aux revenus distribués correspondant au solde débiteur du compte courant d'associé de M. C... dans les écritures de la SCI Sami ;
- pour le surplus, les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 11 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 12 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Sami, ayant pour objet l'acquisition, l'administration et l'exploitation d'immeubles bâtis et non bâtis, dont M. C... détenait 45 % des parts et était le gérant, qui a opté, le 13 décembre 2012, pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés à compter du 1er janvier 2013, n'a adressé à l'administration ni sa déclaration de revenus n° 2072, ni le bilan d'ouverture du premier exercice d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés dans le délai de soixante jours imparti par les II et III de l'article 202 ter du code général des impôts. Le 3 avril 2014, elle a déclaré une plus-value résultant de son changement de régime fiscal et payé, à ce titre, la somme de 61 486 euros. Le 23 avril 2014, elle a cédé l'ensemble immobilier qu'elle détenait au prix de 850 000 euros. Le 16 mai 2014, elle a télédéclaré un bilan de l'exercice 2013, premier exercice soumis à l'impôt sur les sociétés, faisant apparaître une augmentation de 415 576 euros de la valeur des immeubles inscrits à l'actif avec, en contrepartie au passif, la comptabilisation d'un " écart de réévaluation ". Le 27 juin 2014, l'assemblée générale ordinaire de la SCI SAMI a décidé de distribuer cet écart de réévaluation entre les associés au prorata de leurs droits dans le capital social, représentant un montant de 187 009 euros pour M. C..., somme versée, selon le rapport de gérance, en franchise d'impôt. Le 30 novembre 2017, M. C... a déposé une déclaration rectificative pour l'imposition de ses revenus de l'année 2014 dans laquelle il a fait figurer cette distribution ainsi qu'une somme de 21 499 euros correspondant au solde débiteur de son compte courant d'associé ouvert dans la comptabilité de cette société. Il a, en conséquence, été assujetti à un complément d'impôt sur le revenu et à des contributions sociales au titre de l'année 2014, assortis d'intérêts de retard. Le 8 janvier 2018, la SCI Sami a présenté une réclamation tendant à obtenir le dégrèvement de l'imposition acquittée au titre de la plus-value déclarée en avril 2014, demande à laquelle il a été fait droit par décision du 25 avril 2018. Le 28 mars 2019, M. C... a présenté une réclamation tendant à obtenir la décharge des impositions établies au titre de l'année 2014 conformément à sa déclaration rectificative à raison de la distribution de 187 009 euros, à l'appui de laquelle il a produit une nouvelle déclaration de la plus-value latente consécutive au changement de régime d'imposition établie par la SCI Sami. Il relève appel du jugement du 12 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions établies à ce titre.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges ont répondu, de manière suffisamment circonstanciée, au moyen tiré de ce que l'option pour l'imposition immédiate de la plus-value latente pouvait être effectuée dans le délai de réclamation contentieuse au point 9 du jugement attaqué. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que ce jugement est insuffisamment motivé.
3. Si M. C... soutient que ce jugement est entaché d'une contradiction dans ses motifs, un tel moyen relève du bien-fondé de la décision du tribunal administratif et est sans incidence sur sa régularité. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.
Sur les conclusions à fin de décharge :
4. Il résulte de l'instruction que la somme de 187 009 euros, distribuée par la SCI Sami et déclarée par M. C..., a été imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers conformément à l'article 108 du code général des impôts aux termes duquel " Les dispositions des articles 109 à 117 fixent les règles suivant lesquelles sont déterminés les revenus distribués par : / 1° Les personnes morales passibles de l'impôt prévu au chapitre II du présent titre ; / 2° Les personnes morales et sociétés en participation qui se sont volontairement placées sous le même régime fiscal en exerçant l'option prévue au 3 de l'article 206. (...) " avec application de l'abattement de 40 % prévu au 1° du 3. de l'article 158 du même code. Si M. C... allègue avoir été contraint, par le vérificateur en charge de la vérification de comptabilité de la SCI Sami, de souscrire une déclaration rectificative comprenant cette somme, il n'apporte aucun élément probant de nature à l'établir.
5. M. C... ayant été imposé à raison d'une distribution régulière de dividendes, intervenue en 2014 après que la SCI Sami a cédé l'ensemble immobilier dont la comptabilisation à l'actif, après option pour l'imposition à l'impôt sur les sociétés, a donné lieu à l'inscription d'un écart de réévaluation, la circonstance que la plus-value latente comprise dans le patrimoine social de la SCI à l'occasion du changement de régime fiscal aurait pu être imposée au titre de l'année 2012 selon le régime des plus-values des particuliers, est, en elle-même, sans incidence sur l'existence et le caractère imposable de cette distribution au titre de l'année 2014, année au cours de laquelle elle est intervenue.
6. Au demeurant, selon l'article 202 ter du code général des impôts : " (...) / II. Si une société ou un organisme dont les revenus n'ont pas la nature de bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, d'une exploitation agricole ou d'une activité non commerciale cesse totalement ou partiellement d'être soumis à l'un des régimes définis aux articles 8 à 8 ter, 238 ter, 239 quater A, 239 quater B, 239 quater C, 239 quater D, 239 septies et au I des articles 239 quater et 239 quinquies, l'impôt sur le revenu est établi au titre de la période d'imposition précédant immédiatement le changement de régime, à raison des revenus et des plus-values non encore imposés à la date du changement de régime, y compris ceux qui proviennent des produits acquis et non encore perçus ainsi que des plus-values latentes incluses dans le patrimoine ou l'actif social. / Toutefois, en l'absence de création d'une personne morale nouvelle, ces dernières plus-values ne sont pas taxées dans les conditions prévues au premier alinéa du présent II si l'ensemble des éléments du patrimoine ou de l'actif sont inscrits au bilan d'ouverture de la première période d'imposition ou du premier exercice d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, en faisant apparaître distinctement, d'une part, leur valeur d'origine et, d'autre part, les amortissements et provisions y afférents qui auraient été admis en déduction si la société ou l'organisme avait été soumis à l'impôt sur les sociétés depuis sa création. / La société ou l'organisme doit, dans un délai de soixante jours à compter de la réalisation de l'événement qui a entraîné le changement de régime mentionné au premier alinéa du présent II, produire au service des impôts les déclarations et autres documents qu'il est normalement tenu de souscrire au titre d'une année d'imposition. / III. Les sociétés et organismes définis aux I et II doivent, dans un délai de soixante jours à compter de la réalisation de l'événement qui entraîne le changement de régime ou d'activité mentionné auxdits I et II, produire le bilan d'ouverture de la première période d'imposition ou du premier exercice au titre duquel le changement prend effet. / (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'une société de personnes, dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux qui leur est attribuée, opte pour l'impôt sur les sociétés, ce changement de régime d'imposition implique, en principe, l'imposition immédiate des plus-values latentes au nom des associés selon les règles applicables aux plus-values des particuliers. Sous réserve des conditions prévues au II de l'article 202 ter, la société peut toutefois opter pour une imposition différée des plus-values latentes, en son nom, selon les règles applicables en matière d'impôt sur les sociétés. Ce choix est matérialisé par les valeurs inscrites à l'actif du bilan d'ouverture de la première période d'imposition ou du premier exercice d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, qui doit être adressé à l'administration dans un délai de soixante jours suivant l'événement qui a entraîné le changement de régime d'imposition.
8. Les dispositions qui instituent un régime fiscal optionnel et prévoient que le bénéfice de ce régime doit être demandé dans un délai déterminé n'ont, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable qui a omis d'opter dans ce délai de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et suivants du livre des procédures fiscales. Il en va autrement si la loi a prévu que l'absence d'option dans le délai qu'elle prévoit entraîne la déchéance de la faculté d'exercer l'option ou lorsque la mise en œuvre de cette option implique nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé.
9. Eu égard aux conséquences qu'elle entraîne, s'agissant du régime d'imposition des plus-values latentes incluses dans le patrimoine ou l'actif social au moment de l'assujettissement d'une société de personnes à l'impôt sur les sociétés, régime qui a une incidence tant sur les obligations comptables, déclaratives et fiscales de la société que sur le redevable légal de l'imposition de ces plus-values, l'option prévue par le II de l'article 202 ter du code général des impôts implique nécessairement que le choix ouvert à la société soit exercé dans un délai déterminé. Il s'ensuit que M. C... ne peut se prévaloir, pour soutenir que la SCI Sami a valablement opté pour l'imposition immédiate de plus-value latente correspondant à l'ensemble immobilier qu'elle détenait, ni de la déclaration de plus-value immobilière n° 2048 IMM souscrite par celle-ci en avril 2014, sur laquelle la SCI est, au demeurant, revenue en janvier 2018 en présentant une réclamation, ni de la déclaration de plus-value de la même SCI, datée du 28 mars 2019, produite à l'appui de sa propre réclamation. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a imposé la distribution, correspondant à une partie de l'écart de réévaluation libre de l'ensemble immobilier cédé par la société en 2014, à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux de mobiliers.
10. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir du ministre, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Laval, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. PruvostLa greffière,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02766