Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes (CHUGA) à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices résultant selon elle de ses conditions d'emploi dégradées entre le 3 septembre 2015 et le 3 avril 2018.
Par un jugement n° 2004667 du 27 septembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2022, Mme A..., représentée par la SCP Germain-Phion, Jacquemet, agissant par Me Germain-Phion, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 septembre 2022 ;
2°) de condamner le CHUGA à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;
3°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge du CHUGA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a écarté l'existence d'une faute ; son employeur ne peut sérieusement prétendre ignorer les difficultés récurrentes rencontrées par les agents du bureau des entrées ; elle a été soumise à une charge de travail trop importante, au sein d'un service désorganisé, a travaillé dans une ambiance délétère et subi des remarques dénigrantes de la part d'une supérieure hiérarchique ; cette situation lui a causé un stress, un épuisement et une souffrance au travail qui ont conduit à un syndrome anxiodépressif et à un placement en arrêt de maladie ; son employeur, qui a refusé de prendre en compte les préconisations du médecin du travail, n'a pas pris de mesure concrète pour préserver sa santé physique et mentale ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'enquête menée du 19 mars au 31 août 2019 a permis d'établir que le CHUGA a méconnu son obligation de sécurité et de prévention ;
- les troubles subis dans ses conditions d'existence représentent un préjudice qui doit être indemnisé.
Le centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes n'a pas présenté d'écritures en défense.
Par ordonnance du 19 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère ;
- et les conclusions de Mme Bénédicte Lordonné, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes (CHUGA) à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation des préjudices résultant selon elle de ses conditions d'emploi dégradées entre le 3 septembre 2015 et le 3 avril 2018. Elle relève appel du jugement du 27 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Il résulte de l'article L. 811-1 du code général de la fonction publique que, depuis son entrée en vigueur le 1er mars 2022, et sauf dérogation, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité sont, en particulier celles définies par les livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail, au sein desquels l'article L. 4121-1 prévoit que : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu de l'article L. 4121-2 du même code, l'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement de principes généraux de prévention, au nombre desquels figurent, entre autres, l'évaluation des risques qui ne peuvent pas être évités, la planification de la prévention en y intégrant, notamment, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, et la prise de mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.
3. En vertu de ces dispositions, les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents, sauf à commettre une faute de service.
4. Il résulte de l'instruction que Mme A... a été recrutée en 2008 en qualité de gestionnaire administrative contractuelle par le centre hospitalier de Voiron, devenu par la suite centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes. Le 1er janvier 2014, Mme A... a été titularisée dans le grade d'adjoint administratif hospitalier de 2ème classe. Elle a été employée à compter du 3 septembre 2015 au bureau des entrées. Suite à des difficultés rencontrées dans son service, Mme A... a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 3 avril 2018.
5. A la suite d'une réunion du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en septembre 2019, l'inspecteur du travail, venant rappeler que la seule mise en place de mesures a posteriori ne saurait suffire à supprimer entièrement les risques auxquels les agents du centre hospitalier de Voiron sont exposés, a demandé la transmission du plan d'action mis en place afin de prévenir les risques psychosociaux. Le centre hospitalier de Voiron a versé en premier instance le document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP) pour les années 2015 à 2021, démontrant qu'il a procédé à une évaluation des risques conformément à la loi.
6. Au soutien de ses prétentions indemnitaires, Mme A... fait valoir qu'elle a été soumise à une charge de travail trop importante, au sein d'un service désorganisé. Elle évoque en particulier les sous-effectifs du bureau des entrées, des outils informatiques trop lents, des demandes de remplacement récurrentes, une mauvaise organisation des services, et une formation insuffisante. Elle évoque également une ambiance délétère ou encore des remarques dénigrantes de la part d'une supérieure hiérarchique en présence d'autres collègues. Toutefois, la requérante, auquel incombe la charge d'établir l'existence d'une faute, ne peut se borner à soutenir que son employeur ne pouvait ignorer les difficultés récurrentes rencontrées par les agents du bureau des entrées, sans produire d'élément probant et contemporain des faits dénoncés, portant à la connaissance de son employeur sa situation de souffrance au travail. Mme A... ne s'est manifestée pour signaler des événements " à caractère anormal " et solliciter un rendez-vous auprès de la coordinatrice des risques, qu'elle a obtenu deux jours plus tard, que par un courriel du 10 octobre 2018, postérieurement à son arrêt de maladie. Si l'enquête menée du 19 mars 2019 au 31 août 2019 par le CHSCT, à la demande des organisations syndicales, a révélé que les agents du bureau des entrées subissaient la polyvalence et la hausse de leur charge de travail, dans un contexte d'absentéisme de l'encadrement, doublée d'une problématique relationnelle, les conclusions de cette enquête se bornent à conclure à l'imputabilité au service de la maladie de l'intéressée. La commission de réforme ayant donné, lors de sa séance du 12 octobre 2021, un avis défavorable à la reconnaissance du caractère imputable au service de la pathologie, le centre hospitalier de Voiron a d'ailleurs refusé par une décision du 27 octobre 2021, de reconnaître le caractère imputable au service de la pathologie de Mme A.... Malgré l'existence de fiches de signalement remplies par le biais d'un logiciel, sur les problématiques d'absence de formation des nouveaux agents et de surcharge de travail des agents déjà présents, la requérante ne précise pas en quoi son employeur aurait méconnu son obligation de sécurité et de prévention des risques psycho-sociaux ni les mesures concrètes qu'il aurait dû prendre pour préserver sa santé physique et mentale. Mme A... reproche également à son employeur d'avoir refusé de prendre en compte les préconisations du médecin du travail, à la suite de la visite médicale de pré-reprise organisée le 22 novembre 2018, d'une reprise à temps partiel thérapeutique à 50%, avec changement de service. Toutefois, l'intéressée ne conteste pas l'absence de poste vacant compatible avec ces restrictions qui lui a été opposée par un courrier du 11 décembre 2018 ni que le centre hospitalier de Voiron lui a proposé plusieurs postes, dont un poste d'adjoint administratif en tant que standardiste. Si le standard est accolé au bureau des entrées, il ne s'agit pas du même service, de sorte que la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce poste ne pouvait lui être proposé. Enfin, une affectation sur un poste aménagé d'adjoint administratif au sein du service de santé au travail a été proposée à Mme A... et ce n'est qu'un arrêt de travail établi par son médecin jusqu'au 15 mars 2020 qui a fait obstacle à une reprise au 1er mars 2020.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8 Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que Mme A... demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes, qui n'est pas partie perdante.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2024.
La rapporteure,
Vanessa Rémy-Néris
Le président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Michèle Daval
La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03217