Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 28 mai 2020 par laquelle le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a refusé de lui accorder le bénéfice d'un congé de longue maladie pour la période allant du 6 novembre 2017 au 5 novembre 2018 et l'a placée en disponibilité d'office à compter de cette dernière date, et d'enjoindre à cette autorité de lui accorder le bénéfice du congé de longue maladie, ou, à défaut, de réexaminer sa situation.
Par un jugement n° 2004245 du 19 juillet 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Gay, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 juillet 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 28 mai 2020 du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes ;
3°) d'enjoindre à cette autorité de lui accorder le bénéfice du congé de longue maladie, ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de la région Auvergne-Rhône-Alpes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des pathologies dont elle souffre et de la liste fixée à l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 1986.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 octobre 2022 et 8 avril 2024, la région Auvergne-Rhône-Alpes, représentée par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle s'en réfère aux écritures produites en première instance.
Par une ordonnance du 3 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie ;
- l'arrêté du 30 juillet 1987 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., adjointe technique territoriale principale de 2ème classe, exerce les fonctions de cuisinière au lycée agricole du Valentin à Bourg-lès-Valence. Le 3 mai 2018, elle a présenté une demande de congé de longue maladie, qui a d'abord été rejetée par une décision du 13 septembre 2018, laquelle a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 mars 2021 au motif qu'elle n'était pas motivée en droit, puis par un arrêté du 20 septembre 2018. Par une décision du 28 mai 2020, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a de nouveau refusé de placer Mme A... en congé de longue maladie, l'a placée en congé de maladie ordinaire du 6 novembre 2017 au 5 novembre 2018, et maintenue en disponibilité d'office à compter de cette dernière date. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, la décision attaquée du 28 mai 2020 comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée. L'argument selon lequel l'administration ne pouvait ni se fonder sur les expertises qu'elle ne vise ni s'abstenir de faire référence à un autre rapport d'expert, relève de la contestation du bien-fondé de la décision et non du caractère suffisant de la motivation de celle-ci, appréciée au regard des exigences, en l'espèce remplies, découlant de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, dans sa version applicable au litige, désormais repris à l'article L. 822-1 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) ". Aux termes de l'article 19 du décret susvisé du 30 juillet 1987, dans sa version applicable au litige : " Le ministre chargé de la santé détermine par arrêté, après avis du comité médical supérieur, une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre aux caractéristiques définies à l'article 57 (3°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, peuvent ouvrir droit à un congé de longue maladie. Toutefois, le bénéfice d'un congé de longue maladie demandé pour une affection qui n'est pas inscrite sur la liste prévue à la phrase précédente peut être accordé après l'avis du comité médical compétent. ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 1986 susvisé, rendu applicable aux fonctionnaires territoriaux par l'arrêté du 30 juillet 1987 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie : " Un fonctionnaire est mis en congé de longue maladie lorsqu'il est dûment constaté qu'il est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions au cours d'une des affections suivantes lorsqu'elle est devenue invalidante : (...) 7. Affections évolutives de l'appareil oculaire avec menace de cécité. ".
4. D'une part, comme l'ont estimé les premiers juges par des motifs que la requérante ne critique pas à hauteur d'appel, il ne ressort pas des pièces du dossier que la pathologie liée aux ulcères variqueux dont elle souffre, qui ne figure pas dans la liste indicative établie par l'arrêté du 14 mars 1986, la mettait dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rendait nécessaire un traitement et des soins prolongés et présentait un caractère invalidant et de gravité confirmée. A ce titre, le comité médical puis le comité médical supérieur ont émis, respectivement les 5 septembre et 19 novembre 2019, un avis défavorable à l'attribution d'un congé de longue maladie et l'expert a retenu dans ses conclusions du 22 juillet 2019 que les ulcères étaient en voie de cicatrisation, impliquant l'absence de caractère de gravité de cette pathologie.
5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment des expertises des 12 juin et 22 juillet 2019, ainsi que des avis précités des comité médical et comité médical supérieur, que l'affection oculaire sévère dont souffre Mme A... ne présentait pas, à la date du 6 novembre 2017, un caractère de gravité suffisant de nature à justifier l'octroi d'un congé de longue maladie, et ne faisait pas obstacle à la reprise de ses fonctions à compter du 6 novembre 2018. Si Mme A... soutient que les expertises médicales mentionnées dans l'avis du comité départemental, datées des 28 août 2017, 14 novembre 2017 et 25 juillet 2018 ne portaient pas sur l'examen des conditions nécessaires à l'octroi d'un congé de longue maladie mais se prononçaient notamment sur l'aptitude à l'exercice de ses fonctions, les éléments d'ordre médical contenus dans celles-ci permettaient à l'administration d'apprécier si les critères rappelés au point 3 étaient remplis et de nature à faire droit à sa demande. Contrairement à ce que la requérante soutient, l'expertise conduite par un médecin spécialiste des affections oculaires, le 12 juin 2019, n'a pas conclu à la gravité de la pathologie ophtalmique et au risque de cécité pour la période allant du 6 novembre 2017 au 5 novembre 2018, mais se bornait à faire référence à l'analyse émise par un autre praticien à la suite d'un examen réalisé le 23 avril 2018. En tout état de cause, il ne ressort pas de cette expertise que les critères relatifs au caractère invalidant de la pathologie de Mme A... et à la nécessité d'un traitement et de soins prolongés de nature à justifier l'octroi d'un congé de longue maladie auraient été remplis. En outre, l'experte n'a pas indiqué, en réponse aux questions posées par sa désignation es qualité par le comité médical, que les arrêts de travail devaient relever d'un congé de longue maladie, mais a conclu à l'inverse que l'acuité visuelle de la requérante et son champ visuel binoculaire étaient suffisants pour les activités quotidiennes et celles liées à son poste de travail, cette analyse étant confortée par le contrôle du 3 septembre 2018. Elle a également relevé que les arrêts de travail n'étaient plus justifiés le 6 novembre 2018 et que Mme A... était apte à la reprise de ses fonctions. Ainsi, nonobstant la circonstance que la pathologie invoquée figure au point 7 de l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 1986 ouvrant droit à un congé de longue maladie, la requérante n'établit pas qu'elle remplissait les conditions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 lorsqu'elle a demandé, le 3 mai 2018, à bénéficier d'un congé de longue maladie. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit donc être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction de la requête doivent, par suite, être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la requérante présentées sur leur fondement et dirigées contre la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce et en application de ces mêmes dispositions, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante le versement d'une somme au titre des frais exposés par la région.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la région Auvergne-Rhône-Alpes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 octobre 2024.
La rapporteure,
Emilie FelmyLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Michèle Daval
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02820