Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 juin 2023 par lequel le préfet de l'Ardèche lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2305982 du 1er décembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2024, M. B... représenté par Me Hassid, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er décembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 juin 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, en cas d'annulation de la seule décision fixant le pays de renvoi, de lui " délivrer une assignation à résidence ", de lui restituer son passeport et sa carte d'identité et de supprimer la mention du présent arrêté au système d'information Schengen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- en écartant les moyens soulevés, le tribunal a entaché son jugement d'erreurs de droit et d'appréciation ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur de droit en examinant sa demande sur le fondement de l'article 7) b de l'accord franco-algérien, révélant un défaut d'examen particulier de sa demande ;
- elle méconnait l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a entaché sa décision de ne pas faire usage de son pouvoir de régularisation d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour les mêmes raisons que précédemment ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Haïli, président-assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 14 mars 1990, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 28 décembre 2016 selon ses déclarations. Par une décision du 30 décembre 2022, le préfet de l'Ardèche lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans. Par un jugement n° 2300482 du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision et enjoint au préfet de l'Ardèche de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois. Par un arrêté du 29 juin 2023, le préfet de l'Ardèche lui a à nouveau refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement susvisé du 1er décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si l'appelant fait valoir que les premiers juges ont commis des erreurs de droit et des erreurs d'appréciation en écartant ses moyens, notamment de légalité interne, de telles erreurs, à les supposer établies, relèvent de l'appréciation du bien-fondé de leur jugement et non de sa régularité.
Sur la légalité de l'arrêté :
3. M. B... reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance et sans critique utile du jugement, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué, du défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale, et de l'erreur de droit commise par le préfet pour avoir examiné sa demande sur le fondement de l'article 7) b de l'accord franco-algérien, révélant, selon lui, un défaut d'examen. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux point 2 et 3 du jugement attaqué.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, M. B... était célibataire et sans charge de famille et a constitué la majeure partie de sa vie privée et sociale en Algérie. Si l'intéressé, qui est entré irrégulièrement en France le 28 décembre 2016, se prévaut de la durée de son séjour et de son insertion professionnelle par la signature d'un contrat à durée indéterminée en novembre 2021, il ressort des pièces du dossier que son temps de présence en France procède principalement de son maintien irrégulier sur le territoire français et que de telles circonstances alléguées ne sont pas suffisantes pour caractériser l'intensité et la centralité de ses intérêts y afférents. Enfin, alors que M. B... qui soutient qu'il dispose de liens familiaux en France, où résident son frère et sa sœur, n'apporte pas davantage d'explication à hauteur d'appel sur cette relation, l'intéressé n'allègue pas être dépourvu d'attaches personnelles et familiales en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans. Par suite et dans ces conditions, le préfet de l'Ardèche en refusant de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Il n'a ainsi méconnu ni le 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
6. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État ".
7. L'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. Dès lors que ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
8. En se bornant à énoncer dans sa requête d'appel, sans souci d'intelligibilité, que " sur l'illégalité interne : sur le pouvoir de régularisation du préfet : sur l'erreur de droit : le moyen est maintenu. Voir plus haut ", sans procéder à un renvoi précis à une page ou à un paragraphe de son argumentation, l'appelant n'assortit pas son moyen de précision suffisante pour mettre la cour à même d'en apprécier la portée.
9. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, en l'absence d'argumentation distincte, et même en tenant compte des conséquences spécifiques à la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de M. B..., le préfet de l'Ardèche n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant la mesure d'éloignement à l'encontre du requérant et n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant cette mesure.
11. En l'absence d'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité par voie d'exception de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, et en tout état de cause, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées en application des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Haïli, président-assesseur,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2024.
Le rapporteur,
X. Haïli
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 24LY00095