Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2023 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2400171 du 5 février 2024, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 23 avril 2024, M. B..., représenté par Me Albertin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer son dossier dans le délai de quinze jours et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est intervenue au terme d'une procédure irrégulière faute de consultation de la commission du titre de séjour ;
- en l'absence de production au dossier de première instance du rapport médical, il n'est pas établi que l'avis du collège des médecins de l'OFII a été régulièrement pris ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2024, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 14 octobre 2024, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a produit des observations.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau de l'aide juridictionnelle du 27 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Moya, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant nigérian entré en France au mois de juillet 2019, relève appel du jugement du 5 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Drôme du 13 novembre 2023 rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, il ne ressort ni des termes de la décision contestée, ni des autres éléments du dossier que le préfet de la Drôme n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...). ". Aux termes de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...). ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...). ". L'article R. 425-13 de ce code dispose que : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins (...). Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...). ".
4. Il ressort des pièces du dossier qu'un rapport médical a été établi le 25 août 2023 par un médecin qui n'a pas siégé au sein du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a émis, le 16 octobre 2023, un avis sur l'état de santé de M. B.... Ce collège était régulièrement composé de trois médecins. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'avis du collège des médecins de l'OFII est irrégulier.
5. Pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité par M. B... au titre de son état de santé, le préfet de la Drôme s'est approprié le sens de cet avis du 16 octobre 2023 estimant qu'il nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourra effectivement y bénéficier d'un traitement approprié.
6. M. B... souffre d'un diabète insulino-dépendant, qui a nécessité la pose d'un capteur " Freestyle libre " et pour lequel il bénéficie d'un suivi régulier par un diabétologue et un médecin généraliste au vu de bilans sanguins effectués tous les trois ou quatre mois et a fait l'objet d'une hospitalisation une semaine en 2023 pour apprendre à équilibrer son diabète. Il verse à l'instance un document rédigé le 28 décembre 2023 par un médecin d'un hôpital de Benin City qui se borne à affirmer que, pour diverses raisons, l'insuline sous-cutanée ne sera très probablement pas disponible ou trop chère pour qu'il puisse s'en procurer au Nigéria, ainsi qu'un certificat médical du même hôpital, établi le 26 février 2024, qui relève le coût très onéreux du traitement du diabète insulino-dépendant au Nigéria. M. B... n'établit pas, au vu de ces pièces, qu'il ne pourra pas effectivement y bénéficier d'un traitement approprié. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité doit, dès lors, être écarté.
7. En troisième lieu, compte tenu de ce qui est jugé au point 6, de la durée et des conditions du séjour de M. B... en France, de ce qu'il n'établit pas y avoir noué une relation avec une compatriote et de ce qu'il ne soutient pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le préfet de la Drôme, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Le préfet n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. B....
8. En quatrième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles visés par ces dispositions auxquels il envisage néanmoins de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent. Par suite, M. B... ne remplissant pas les conditions pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Drôme n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'illégalité qu'il invoque du refus de titre de séjour qui lui a été opposé entache d'illégalité la décision prescrivant son éloignement.
10. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré la méconnaissance du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prohibent l'éloignement d'un étranger dont l'état de santé requiert une prise en charge médicale à défaut de laquelle il serait exposé à des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui ne peut lui être effectivement procurée dans le pays de renvoi, doit être écarté.
11. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui se fondent sur les mêmes arguments que ceux développés à l'encontre de la décision de refus de séjour, ne peuvent qu'être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus.
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Drôme et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente de chambre,
Mme Vinet, présidente-assesseure,
M. Moya, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2024.
Le rapporteur,
P. MoyaLa présidente,
C. Michel
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 24LY01168
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