Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures
M. et Mme C... et A... B... ont demandé au tribunal administratif de de Lyon, chacun en ce qui les concerne, d'annuler les décisions du 6 juin 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le délai de départ volontaire en cas d'exécution d'office et leur a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par un jugement nos 2307065-2307066 du 6 février 2024, le tribunal administratif de Lyon a joint et rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 13 mai 2024, M. et Mme B..., représentés par la SCP Courderc-Zouine, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de leur délivrer une carte de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de les munir sans délai d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à leur conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- le refus d'admission exceptionnelle au séjour opposé à M. B... est insuffisamment motivé en fait et entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- la préfète, qui été saisie d'une demande d'autorisation de travail, s'est méprise sur l'étendue de sa compétence ;
- le refus de titre de séjour opposé à Mme B... méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les refus de titres de séjour méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ils méconnaissent le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la préfète du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que leur situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant leur admission au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et plus largement quant aux conséquences des refus de titre de séjour sur leur situation personnelle ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- les décisions fixant le pays de destination méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français sont entachées d'erreur d'appréciation.
La requête a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau de l'aide juridictionnelle du 10 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Moya, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... et A... B..., ressortissants albanais, relèvent appel du jugement du 6 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 6 juin 2023 de la préfète du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination en cas d'exécution d'office de ces mesures d'éloignement et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.
Sur les refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, le refus de titre de séjour opposé à M. B..., qui indique notamment que si l'intéressé a présenté une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée pour un poste d'aide étancheur délivrée le 26 août 2021, il n'a produit ni visa de long séjour, ni autorisation de travail au soutien d'une demande de titre de séjour en qualité de salarié, est suffisamment motivé en fait. Par ailleurs, il ne ressort, ni des motifs de la décision en cause, ni des autres pièces des dossiers, que la préfète du Rhône se serait abstenue de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... au vu des éléments dont elle avait connaissance.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces des dossiers que M. B... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " sur le fondement des dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aujourd'hui reprises à l'article L. 435-1 de ce code. La préfète n'était pas tenue, avant de prendre la décision contestée, de faire instruire préalablement la demande d'autorisation de travail concernant M. B... pour qu'il puisse exercer le métier d'étancheur. Par suite, le moyen selon lequel la préfète du Rhône aurait méconnu l'étendue de sa compétence et entaché, pour ce motif, sa décision d'une erreur de droit doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale" d'une durée d'un an. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...). ".
5. Dans son avis du 10 janvier 2023, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme B..., qui souffre d'une dépression post-traumatique, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Mme B... ne peut dès lors utilement soutenir que l'antidépresseur qui lui est prescrit n'est pas commercialisé dans son pays d'origine et il ne ressort pas des pièces des dossiers que son état de santé serait en lien avec des évènements qui seraient survenus en Albanie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En dernier lieu, M. et Mme B... reprennent les moyens déjà soulevés en première instance, tirés de ce que les refus de titres de séjour méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de ce que la préfète du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que leur situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant leur admission au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et plus largement quant aux conséquences des refus de titre de séjour sur leur situation personnelle. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
Sur les obligations de quitter le territoire français :
7. A l'appui de leurs conclusions dirigées contre les obligations de quitter le territoire français, M. et Mme B... reprennent les moyens déjà soulevés en première instance, tirés de ce que ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif dans son jugement.
Sur les décisions fixant le pays de destination :
8. A l'appui de leurs conclusions contre les décisions fixant le pays de destination, M. et Mme B... reprennent le moyen déjà soulevé en première instance, tiré de ce que ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif dans son jugement.
Sur les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :
9. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français / Il en est de même pour l'édiction de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...). ".
10. Pour leur interdire de retourner sur le territoire français pour une durée de six mois, la préfète du Rhône a relevé que M. et Mme B... n'avaient pas été autorisés à séjourner en France, qu'ils ne justifiaient pas d'attaches privées et familiales sur le territoire français et qu'ils ne s'étaient pas conformés aux précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre le 12 avril 2017. Si les récépissés de demandes de cartes de séjour qui ont été délivrés aux intéressés à compter de 2021 ont abrogé ces obligations de quitter le territoire français, il n'en demeure pas moins qu'ils ne les ont pas exécutées après leur validation par la cour administrative d'appel de Lyon par des arrêts du 19 décembre 2017. Dans ces conditions, les motifs invoqués par la préfète sont de nature à justifier légalement les interdictions de retour dans leur principe et leur durée.
11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Leur requête doit être rejetée, en toutes leurs conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente de chambre,
Mme Vinet, présidente-assesseure,
M. Moya, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2024.
Le rapporteur,
P. MoyaLa présidente,
C. Michel
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY01371
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