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19/12/2024 | FRANCE | N°24LY02057

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 19 décembre 2024, 24LY02057


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



L'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la société civile immobilière Château de Rosières, Mme F... G..., M. et Mme D... C..., M. E... B... et M. E... H... ont demandé au tribunal administratif de Dijon :



1°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2015 par lequel le préfet de la région Bourgogne a autorisé la société Éole Res à exploi

ter un parc éolien de dix-sept aérogénérateurs et cinq structures de livraison sur les territoires des commu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la société civile immobilière Château de Rosières, Mme F... G..., M. et Mme D... C..., M. E... B... et M. E... H... ont demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2015 par lequel le préfet de la région Bourgogne a autorisé la société Éole Res à exploiter un parc éolien de dix-sept aérogénérateurs et cinq structures de livraison sur les territoires des communes de Montigny-Momay-Villeneuve-sur-Vingeanne, de Pouilly-sur-Vingeanne et de Saint-Seine-sur-Vingeanne ;

2°) de mettre à la charge de l'État et de la société Éole Res la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1601325 du 25 juin 2018, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du préfet de la région Bourgogne du 9 décembre 2015 et a mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédures devant la cour avant cassation

I. Par une requête enregistrée le 24 août 2018 sous le n° 18LY03261 et un mémoire enregistré le 15 novembre 2019, la société Res, représentée par Me Gelas, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ;

3°) de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;

4°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer le temps de la régularisation par une autorisation modificative ou de prononcer une annulation partielle de l'autorisation en litige, limitée à l'avis de l'autorité environnementale, en ordonnant une reprise de l'instruction limitée à cette phase de la procédure ;

5°) de mettre à la charge de l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres une somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en particulier sur l'absence d'application de l'article L. 181-18 du code de justice administrative ;

- les premiers juges ont, à tort, considéré comme recevable la demande présentée par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne ;

- l'avis émis par l'autorité environnementale était régulier ;

- à supposer cet avis irrégulier, l'autorisation aurait dû être délivrée par le juge, en vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, ou un sursis à statuer, dans l'attente de sa régularisation, ou une annulation seulement partielle aurait dû être prononcé, en application de l'article L. 181-18 du même code ;

- les autres moyens soulevés en première instance n'étaient pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2019, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la société civile immobilière Château de Rosières, Mme F... G..., M. et Mme D... C..., M. E... B... et M. E... H..., représentés par Me Monamy, avocat, concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de la société Res et, le cas échéant, de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement n'est pas irrégulier ;

- les autres moyens ne sont pas fondés ;

- le préfet de la région Bourgogne n'était pas compétent pour signer l'autorisation litigieuse, celui-ci s'étant irrégulièrement substitué aux préfets compétents ;

- le dossier de demande d'autorisation ne comportait pas l'ensemble des avis requis par le 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- par voie d'exception, l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 méconnaît l'article R. 553-3 du code de l'environnement, en ce qu'il fixe des conditions techniques de démantèlement et en ce qu'il limite la longueur des câbles qui doivent être démantelés en fin d'exploitation ;

- l'étude d'impact est insuffisante quant à l'impact du projet sur les chiroptères, sur l'avifaune et sur le paysage, en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement ;

- l'avis d'ouverture de l'enquête publique n'a pas été régulièrement affiché en mairie et publié, en méconnaissance de l'article R. 123-11 du code de l'environnement ;

- les avis émis sur le permis de construire par le ministre en charge de l'aviation civile, par le ministre en charge de la défense, par le maire de Montigny-Mornay-Villeneuve sur-Vingeanne et par certaines communes limitrophes n'ont pas été mis à la disposition du public, en méconnaissance de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- l'avis émis par le département de la Côte-d'Or n'a pas été mis à la disposition du public, en méconnaissance de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- le dossier d'enquête publique n'a pas été accessible pendant la totalité de la durée de l'enquête en mairie de Saint-Seine-sur-Vingeanne, en méconnaissance de l'article R. 123-10 du code de l'environnement ;

- les conclusions de la commission d'enquête publique sont insuffisamment motivées, en méconnaissance de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ;

- le dossier de demande ne comportait pas de description précise des capacités techniques et financières du pétitionnaire, en méconnaissance de l'article R. 512-3 du code de l'environnement ;

- le pétitionnaire ne justifie pas de capacités techniques et financières suffisantes, en méconnaissance de l'article L. 512-3 du code de l'environnement ;

- le pétitionnaire ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et du décret du 26 janvier 2017 pris pour son application, lesquelles ont été adoptées sans être précédées d'une évaluation environnementale, en méconnaissance de la directive du 27 juin 2001 et de l'article L. 122-1 du code de l'environnement ;

- le préfet a méconnu l'article R. 515-101 du code de l'environnement en faisant application de l'arrêté du 26 août 2011, pour limiter à 50 000 euros par éolienne les garanties financières à constituer en vue de leur démantèlement, cet arrêté étant entaché d'illégalité ;

- le préfet a méconnu l'article R. 515-46 du code de l'environnement en faisant application de l'arrêté du 26 août 2011 pour limiter à 10 mètres la longueur des câbles à démanteler, cet arrêté étant entaché d'illégalité pour les mêmes motifs que précédemment ;

- le projet autorisé méconnaît les articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'environnement, eu égard aux atteintes qu'il porte aux lieux avoisinants, au patrimoine et aux chiroptères.

Par un arrêt avant-dire droit n° 18LY03261, 18LY03416 du 11 février 2021, la cour a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer sur les conclusions présentées par la société Res jusqu'à l'expiration du délai de dix mois imparti au ministre de la transition écologique pour justifier de l'intervention d'un arrêté de régularisation de l'autorisation délivrée par le préfet de la région Bourgogne le 9 décembre 2015.

Par un mémoire enregistré le 9 mars 2022, la société Res a communiqué l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 portant autorisation modificative de l'autorisation du 9 décembre 2015.

Un mémoire présenté pour l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres tendant à ce qu'il soit ordonné dans le cadre de l'instruction aux autres parties de verser à l'instance l'intégralité des éléments de la procédure de régularisation a été enregistré le 14 mars 2022 et n'a pas été communiqué.

Par quatre mémoires enregistrés les 3 mai, 23 juin, 26 septembre et 26 octobre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres concluent aux mêmes fins que précédemment et demandent en outre à la cour d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022.

Ils soutiennent que :

- ils s'approprient l'argumentation développée dans la note de M. A... ;

- le dossier soumis à l'enquête publique complémentaire n'était pas complet, à défaut pour le pétitionnaire de l'avoir actualisé des dernières connaissances relatives aux migrations des milans royaux ;

- le préfet a méconnu les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, en s'abstenant d'exclure l'éolienne T 13 en dépit de son impact sur les chiroptères ;

- les prescriptions imposées au pétitionnaire sont insuffisantes pour assurer la protection des chauves-souris, au vu de l'avis émis par la MRAE et par la commission d'enquête ;

- les prescriptions imposées au pétitionnaire sont insuffisantes pour assurer la protection de l'avifaune, au vu notamment des nouvelles données recueillies sur la migration des milans royaux, ou insuffisamment précises ;

- en permettant ainsi la destruction de milans royaux, espèce protégée menacée d'extinction, le préfet devait imposer au pétitionnaire d'obtenir préalablement une dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées en application de l'article L. 411-1 du code de l'environnement ;

- en n'exigeant pas de mesures de compensation des atteintes portées aux espèces protégées, le préfet a méconnu les articles L. 110-1, L. 122-1-1 et L. 511-1 du code de l'environnement.

Par trois mémoires enregistrés les 2 juin, 9 septembre et 11 octobre 2022, la société Q Energy France, venant aux droits de la société Res, conclut aux mêmes fins que précédemment et demande à la cour de rejeter les conclusions de l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 ou, à titre subsidiaire, de surseoir à statuer le temps de sa régularisation par une autorisation modificative.

Elle soutient que les moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 qui soit sont irrecevables, soit ne sont pas fondés, seront écartés.

Par un arrêt n° 18LY03261, 18LY03416 du 15 mars 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a, d'une part, annulé l'arrêté du préfet de la région Bourgogne du 9 décembre 2015, tel que modifié par l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022, en tant qu'il autorise l'éolienne T 13, qu'il ne prévoit aucune mesure de bridage à l'égard de l'éolienne T 12 et qu'il n'identifie pas précisément les espèces cibles du dispositif anticollision prévu par l'article 3.1 de l'autorisation modificative, d'autre part, complété l'article 5 de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 en y ajoutant l'éolienne T 12, enfin, enjoint au préfet de la Côte-d'Or de compléter l'article 3.1 de son arrêté du 2 mars 2022 en précisant les espèces cibles du dispositif anticollision qu'il prévoit.

Par une décision n° 474167 du 18 juillet 2024, le conseil d'État a annulé les arrêts des 11 février 2021 et 15 mars 2023 de la cour et renvoyé les affaires à la cour.

II. Par une requête enregistrée le 4 septembre 2018 sous le n° 18LY03416, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en particulier sur l'influence que l'irrégularité retenue est susceptible d'avoir eu sur le sens de la décision en litige et sur la complète information du public ;

- l'irrégularité relevée par les premiers juges n'était pas nature à justifier l'annulation de l'arrêté en litige, dès lors qu'elle n'est pas susceptible d'avoir eu une incidence sur le sens de la décision en litige et n'a pas nui à la complète information du public ;

- à supposer que l'irrégularité retenue entache d'illégalité l'autorisation en litige, un sursis à statuer, dans l'attente de sa régularisation, ou, subsidiairement, une annulation seulement partielle aurait dû être prononcé ;

- il s'en remet aux observations produites par le préfet en première instance quant aux autres moyens contestant la légalité de cette autorisation.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2019, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la société civile immobilière Château de Rosières, Mme F... G..., M. et Mme D... C..., M. E... B... et M. E... H..., représentés par Me Monamy, concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de l'État, et le cas échéant de la société Res, la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils exposent que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- le préfet de la région Bourgogne n'était pas compétent pour signer l'autorisation litigieuse, celui-ci s'étant irrégulièrement substitué aux préfets compétents ;

- le dossier de demande d'autorisation ne comportait pas l'ensemble des avis requis par le 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- par voie d'exception, l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 méconnaît l'article R. 553-3 du code de l'environnement, en ce qu'il fixe des conditions techniques de démantèlement et en ce qu'il limite la longueur des câbles qui doivent être démantelés en fin d'exploitation ;

- l'étude d'impact est insuffisante quant à l'impact du projet sur les chiroptères, sur l'avifaune et sur le paysage, en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement ;

- l'avis d'ouverture de l'enquête publique n'a pas été régulièrement affiché en mairie et publié, en méconnaissance de l'article R. 123-11 du code de l'environnement ;

- les avis émis sur le permis de construire par le ministre en charge de l'aviation civile, par le ministre en charge de la défense, par le maire de Montigny-Mornay-Villeneuve sur-Vingeanne et par certaines communes limitrophes n'ont pas été mis à la disposition du public, en méconnaissance de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- l'avis émis par le département de la Côte-d'Or n'a pas été mis à la disposition du public, en méconnaissance de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- le dossier d'enquête publique n'a pas été accessible pendant la totalité de la durée de l'enquête en mairie de Saint-Seine-sur-Vingeanne, en méconnaissance de l'article R. 123-10 du code de l'environnement ;

- les conclusions de la commission d'enquête publique sont insuffisamment motivées, en méconnaissance de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ;

- le dossier de demande ne comportait pas de description précise des capacités techniques et financières du pétitionnaire, en méconnaissance de l'article R. 512-3 du code de l'environnement ;

- le pétitionnaire ne justifie pas de capacités techniques et financières suffisantes, en méconnaissance de l'article L. 512-3 du code de l'environnement ;

- le pétitionnaire ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et du décret du 26 janvier 2017 pris pour son application, lesquelles ont été adoptées sans être précédées d'une évaluation environnementale, en méconnaissance de la directive du 27 juin 2001 et de l'article L. 122-1 du code de l'environnement ;

- le préfet a méconnu l'article R. 515-101 du code de l'environnement en faisant application de l'arrêté du 26 août 2011, pour limiter à 50 000 euros par éolienne les garanties financières à constituer en vue de leur démantèlement, cet arrêté étant entaché d'illégalité ;

- le préfet a méconnu l'article R. 515-46 du code de l'environnement en faisant application de l'arrêté du 26 août 2011 pour limiter à 10 mètres la longueur des câbles à démanteler, cet arrêté étant entaché d'illégalité pour les mêmes motifs que précédemment ;

- le projet autorisé méconnaît les articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'environnement, eu égard aux atteintes qu'il porte aux lieux avoisinants, au patrimoine et aux chiroptères.

Par un arrêt avant-dire droit n° 18LY03261, 18LY03416 du 11 février 2021, la cour a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer sur les conclusions présentées par le ministre de la transition écologique et solidaire jusqu'à l'expiration du délai de dix mois imparti à celui-ci pour justifier de l'intervention d'un arrêté de régularisation de l'autorisation délivrée par le préfet de la région Bourgogne le 9 décembre 2015.

Un mémoire présenté pour l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres tendant à ce qu'il soit ordonné dans le cadre de l'instruction aux autres parties de verser à l'instance l'intégralité des éléments de la procédure de régularisation a été enregistré le 14 mars 2022 et n'a pas été communiqué.

Par un mémoire enregistré le 3 mai 2022, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres concluent aux mêmes fins que précédemment et demandent en outre à la cour d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022.

Ils soutiennent que :

- ils s'approprient l'argumentation développée dans la note de M. A... ;

- le dossier soumis à l'enquête publique complémentaire n'était pas complet, à défaut pour le pétitionnaire de l'avoir actualisé des dernières connaissances relatives aux migrations des milans royaux ;

- le préfet a méconnu les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement, en s'abstenant d'exclure l'éolienne T 13 en dépit de son impact sur les chiroptères ;

- les prescriptions imposées au pétitionnaire sont insuffisantes pour assurer la protection des chauves-souris, au vu de l'avis émis par la MRAE et par la commission d'enquête ;

- les prescriptions imposées au pétitionnaire sont insuffisantes pour assurer la protection de l'avifaune, au vu notamment des nouvelles données recueillies sur la migration des milans royaux, ou insuffisamment précises ;

- en permettant ainsi la destruction de milans royaux, espèce protégée menacée d'extinction, le préfet devait imposer au pétitionnaire d'obtenir préalablement une dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées en application de l'article L. 411-1 du code de l'environnement ;

- en n'exigeant pas de mesures de compensation des atteintes portées aux espèces protégées, le préfet a méconnu les articles L. 110-1, L. 122-1-1 et L. 511-1 du code de l'environnement.

Par un mémoire enregistré le 10 juin 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a communiqué l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 portant autorisation modificative de l'autorisation du 9 décembre 2015.

Par un arrêt n° 18LY03261, 18LY03416 du 15 mars 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a, d'une part, annulé l'arrêté du préfet de la région Bourgogne du 9 décembre 2015, tel que modifié par l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022, en tant qu'il autorise l'éolienne T 13, qu'il ne prévoit aucune mesure de bridage à l'égard de l'éolienne T 12 et qu'il n'identifie pas précisément les espèces cibles du dispositif anticollision prévu par l'article 3.1 de l'autorisation modificative, d'autre part, complété l'article 5 de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 en y ajoutant l'éolienne T 12, enfin, enjoint au préfet de la Côte-d'Or de compléter l'article 3.1 de son arrêté du 2 mars 2022 en précisant les espèces cibles du dispositif anticollision qu'il prévoit.

Par une décision n° 474167 du 18 juillet 2024, le conseil d'État a annulé les arrêts des 11 février 2021 et 15 mars 2023 de la cour et renvoyé les affaires à la cour.

Procédure devant la cour après cassation

Par un courrier du 31 juillet 2024, les parties ont été informées de la reprise de l'instance devant la cour après renvoi des affaires par le Conseil d'État.

Par des mémoires enregistrés les 13 septembre et 15 octobre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la société civile immobilière Château de Rosières, Mme F... G..., M. et Mme D... C..., M. E... B... et M. E... H..., représentés par Me Monamy, doivent être regardés comme demandant à la cour :

1°) de rejeter les requêtes de la société Res, désormais dénommée société Q Énergy France, et du ministre de la transition écologique et solidaire ;

2°) d'annuler, outre l'arrêté du préfet de la région Bourgogne du 9 décembre 2015, l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 ;

3°) à titre subsidiaire, en cas d'annulation partielle des arrêtés des 9 décembre 2015 et 2 mars 2022 ou de prononcé d'un sursis à statuer, de suspendre l'exécution des parties non viciées de ces arrêtés ;

4°) de mettre à la charge de la société Q Énergy France et de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté du 9 décembre 2015 modifié par l'arrêté du 2 mars 2022 méconnaît l'article 6 de la convention d'Aarhus ;

- l'arrêté du 9 décembre 2015 modifié par l'arrêté du 2 mars 2022 n'est pas conforme au montant des garanties financières telles que prévues par l'annexe I à l'arrêté du 26 août 2011 dans sa rédaction issue de l'arrêté du 11 juillet 2023 ;

- l'exploitant aurait dû obtenir une dérogation à la destruction de spécimens et d'habitats de milan royal ; il aurait dû plus généralement obtenir une telle dérogation pour la destruction de 7,44 hectares d'habitats d'au moins dix-huit espèces d'oiseaux protégés ; une dérogation était nécessaire pour la destruction de spécimens de rapaces et de grue cendrée ; elle était aussi nécessaire pour la destruction des chiroptères ;

- si le moyen tiré de l'absence de dérogation à la destruction d'habitats ou d'espèces protégées était retenu, il conviendrait de suspendre les effets des arrêtés litigieux en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Par des mémoires enregistrés les 13 septembre et 2 octobre 2024, la société Q Énergy France, anciennement dénommée Res, représentée par Me Gelas, conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.

Elle soutient, en outre, que :

- il appartient à la cour de se prononcer en tenant compte de l'arrêté modificatif du 2 mars 2022 ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de la convention d'Aarhus est irrecevable, ayant été présenté plus de deux mois après le premier mémoire en défense, et il est mal fondé ;

- aucune dérogation à la destruction d'espèces protégées n'était nécessaire ;

- afin de répondre à la critique sur l'imprécision des espèces ciblées par le dispositif anti-collision, la cour pourrait compléter ainsi l'article 3.1 de l'arrêté du 2 mars 2022 : " Les éoliennes peuvent être asservies à un dispositif expérimental anti-collision qui détecte en temps réel les oiseaux en vol et régule le fonctionnement des éoliennes (arrêt ou décélération des turbines) pour prévenir les collisions. Le dispositif anti-collision devra couvrir l'intégralité des éoliennes du parc. Les espèces cibles du dispositif seront les espèces patrimoniales d'oiseau à fort niveau de sensibilité à l'éolien suivantes : milan noir, milan royal. Il est entendu que le dispositif fonctionnera pour tout autre oiseau de gabarit équivalent aux espèces cibles " ;

- il appartiendra à la cour de fixer le montant des garanties financières de démantèlement des installations à 1 700 000 euros conformément aux dispositions de l'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 telles que modifiées par l'arrêté du 11 juillet 2023 ;

- à titre subsidiaire, la cour prononcera le sursis à statuer, conformément aux dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, le temps de régulariser l'arrêté du 9 décembre 2015.

Par un mémoire enregistré le 2 octobre 2024, le ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet des requêtes.

Il soutient que :

- il s'en rapporte à ses écritures présentées dans l'instance n° 18LY03416 ;

- il appartiendra à la cour de fixer le montant des garanties financières de démantèlement des installations à 1 700 000 euros conformément aux dispositions de l'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 telles que modifiées par l'arrêté du 11 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention d'Aarhus ;

- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le décret n 2011-2019 du 29 décembre 2011 ;

- le décret n° 2016-519 du 28 avril 2016 ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- l'arrêt C-474/10 du 20 octobre 2011 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- l'arrêt C-43/10 du 11 septembre 2012 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- l'arrêt C-290/15 du 27 octobre 2016 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gelas pour la société Q Énergy France ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 décembre 2015, le préfet de la région Bourgogne a autorisé la société Éole Res, devenue depuis société Res puis société Q Énergy France, à exploiter un parc éolien dit I... " composé de dix-sept éoliennes et cinq postes de livraison sur le territoire des communes de Montigny-Momay-Villeneuve-sur-Vingeanne, de Pouilly-sur-Vingeanne et de Saint-Seine-sur-Vingeanne. Saisi par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté par un jugement du 25 juin 2018, dont la société Res et le ministre de la transition écologique et solidaire ont relevé appel par deux requêtes distinctes.

2. Par un arrêt avant-dire droit du 11 février 2021, la cour a joint ces requêtes et retenu comme fondés deux moyens tirés, respectivement, de l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale et de l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation quant aux capacités financières du pétitionnaire. Estimant ces vices régularisables, elle a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer sur les conclusions présentées par la société Res et le ministre de la transition écologique et solidaire jusqu'à l'expiration du délai de dix mois imparti à ce dernier pour justifier de l'intervention d'un arrêté de régularisation de l'autorisation du 9 décembre 2015.

3. Par un arrêté du 2 mars 2022, que l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres a contesté dans le cadre des instances en cours, le préfet de la Côte d'Or a modifié l'arrêté du 9 décembre 2015.

4. Par un arrêt du 15 mars 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a, d'une part, annulé l'arrêté du préfet de la région Bourgogne du 9 décembre 2015, tel que modifié par l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022, en tant qu'il autorise l'éolienne T 13, qu'il ne prévoit aucune mesure de bridage à l'égard de l'éolienne T 12 et qu'il n'identifie pas précisément les espèces cibles du dispositif anti-collision prévu par l'article 3.1 de l'autorisation modificative, d'autre part, complété l'article 5 de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 2 mars 2022 en y ajoutant l'éolienne T 12, enfin, enjoint au préfet de la Côte-d'Or de compléter l'article 3.1 de son arrêté du 2 mars 2022 en précisant les espèces cibles du dispositif anti-collision qu'il prévoit, et d'autre part, rejeté le surplus de leurs conclusions aux fins d'annulation.

5. Par une décision du 18 juillet 2024, le Conseil d'État, à la demande de l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, a annulé l'arrêt avant-dire-droit ainsi que, par voie de conséquence, le second arrêt de la cour et lui a renvoyé les affaires.

6. Les requêtes de la société Res et du ministre de la transition écologique et solidaire sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Les premiers juges ont précisément indiqué les considérations de droit et de fait sur lesquels ils se sont fondés pour retenir le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale. Ils n'étaient pas tenus d'apporter plus de précisions quant aux motifs pour lesquels ils ont estimé que cette irrégularité était de nature à nuire à l'information complète de la population et à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative. Par ailleurs, ils ont également indiqué avec suffisamment de précision le motif pour lequel ils n'ont pas mis en œuvre les pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 181-18 du code de l'environnement. Par suite, les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé doit être écarté.

8. En second lieu, les éventuelles erreurs de droit et d'appréciation dont serait entaché le jugement attaqué, qui ne sont susceptibles d'affecter que le bien-fondé de ce jugement, demeurent sans incidence sur sa régularité.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

9. En premier lieu, selon ses statuts, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne a pour objet notamment " la défense de l'environnement et du patrimoine culturel de la vallée de la Vingeanne en la protégeant des projets qui auraient un impact sur l'environnement, sur le paysage, sur le bâti de caractère ou sur la qualité de vie. Les activités de l'association se limitent aux communes situées sur la Vingeanne " et sont étendues " aux communes (...) : Montigny-Mornay-Villeneuve-sur-Vingeanne, Pouilly-sur-Vingeanne, (...) Saint-Seine-sur Vingeanne ". Par son importance, le projet éolien en cause, implanté sur le territoire de trois des communes précisément visées par les statuts de l'association, a un impact sur l'environnement et le paysage que cette association s'est donné pour but de protéger. Par suite, et alors que la recevabilité d'une requête collective est assurée lorsque l'un au moins des requérants est recevable à agir, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne justifie, ainsi que l'a indiqué le tribunal, eu égard à son objet et à son ressort géographique, d'un intérêt pour demander l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2015.

10. En second lieu, les conclusions d'une requête collective, qu'elles émanent d'un requérant qui attaque plusieurs décisions ou de plusieurs requérants qui attaquent une ou plusieurs décisions, sont recevables dans leur totalité si elles présentent entre elles un lien suffisant. En l'espèce, l'examen au fond de la requête ne nécessitait pas un examen distinct de chaque situation individuelle, de sorte que, comme l'a retenu le tribunal, leur requête collective est recevable.

Sur l'office du juge :

11. En vertu de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, l'autorisation d'exploiter en litige, qui a été délivrée au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, est considérée comme une autorisation environnementale relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement. Les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état. En application de ces mêmes dispositions, l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de cette même ordonnance, est applicable aux autorisations délivrées avant le 1er mars 2017 notamment lorsque celles-ci sont contestées. Ainsi, l'autorisation litigieuse est soumise à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécient au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

12. Par ailleurs, lorsqu'il estime qu'une telle autorisation a été délivrée en méconnaissance des règles de procédure applicables à la date de sa délivrance, le juge peut, eu égard à son office de juge du plein contentieux, prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.

13. Lorsqu'il relève que l'autorisation environnementale contestée devant lui méconnaît une règle de fond applicable à la date à laquelle il se prononce, il peut, dans le cadre de son office de plein contentieux, lorsque les conditions sont remplies, modifier ou compléter l'autorisation environnementale délivrée afin de remédier à l'illégalité constatée, ou faire application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

14. En l'espèce, la légalité de l'arrêté du 9 décembre 2015 doit s'apprécier en prenant en compte les régularisations de la procédure ainsi que les modifications des prescriptions induites par l'arrêté modificatif du 2 mars 2022, et ce malgré l'annulation de l'arrêt avant-dire droit du 11 février 2021 de la cour administrative d'appel de Lyon qui n'a pas pour effet de priver d'effet cet arrêté.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

15. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que : " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. - Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement. Dans le cas d'un projet relevant de la procédure d'examen au cas par cas, l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement est saisie par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage d'un dossier présentant le projet et détermine si ce dernier doit être soumis à la réalisation d'une étude d'impact. / IV.- La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public (...) ". En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code, dans sa version issue du décret du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagement, applicable au litige, l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé. En vertu de l'article R. 122-25 du code de l'environnement, issu du décret du 28 avril 2016 portant réforme de l'autorité environnementale, et dont les dispositions ont par la suite été transférées à l'article R. 122-21 du même code, les agents du service régional chargé de l'environnement qui apportent leur appui à la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil régional de l'environnement et de développement durable, sont placés, pour l'exercice de cet appui, sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale.

16. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions, suffisamment précises, de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

17. Lorsque le préfet de région est l'autorité compétente pour autoriser le projet, en particulier lorsqu'il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région, ou dans les cas où il est en charge de l'élaboration ou de la conduite du projet au niveau local, si la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, définie par le décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable et les articles R. 122-21 et R. 122-25 du code de l'environnement, peut être regardée comme disposant, à son égard, d'une autonomie réelle lui permettant de rendre un avis environnemental dans des conditions répondant aux exigences résultant de la directive, il n'en va pas de même des services placés sous son autorité hiérarchique, comme en particulier la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL).

18. Le vice de procédure qui résulte de ce que l'avis prévu par le III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement a été rendu par le préfet de région en qualité d'autorité environnementale dans un cas où il était par ailleurs compétent pour autoriser le projet, ainsi que le prévoyait, à la date de la décision attaquée, l'article R. 122-6 du même code, peut être réparé par la consultation, sur le projet en cause, à titre de régularisation, d'une autorité présentant les garanties d'impartialité requises. Lorsqu'un vice de procédure entache un avis qui a été soumis au public, notamment dans le cadre d'une enquête publique, préalablement à l'adoption de la décision attaquée, la régularisation implique non seulement que la procédure de consultation soit reprise, mais aussi que le nouvel avis soit porté à la connaissance du public.

19. Il résulte de l'instruction que l'avis de l'autorité environnementale a été émis le 25 mars 2015, à une date antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 28 avril 2016 mentionné au point 15, par le préfet de la région Bourgogne qui a également autorisé le projet litigieux. Il n'apparaît pas que l'unité territoriale de la Côte-d'Or et la mission d'évaluation environnementale placée au sein du service développement durable et aménagement, qui ont instruit, respectivement, la décision en litige et cet avis, toutes deux placées au sein de la DREAL de Bourgogne sous l'autorité hiérarchique du préfet de région, auraient disposé d'une autonomie réelle permettant que l'avis environnemental soit rendu dans des conditions répondant aux exigences de la directive. Il apparaît toutefois que le préfet de région Bourgogne-Franche-Comté a de nouveau soumis le projet à la mission régionale de l'autorité environnementale le 22 juin 2021, postérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 28 avril 2016 mentionné ci-dessus, laquelle a rendu son avis le 10 août 2021. Une enquête publique complémentaire a été menée et s'est déroulée du 9 novembre au 24 novembre 2021. A l'issue de l'enquête, par un arrêté du 2 mars 2022 le préfet de la Côte-d'Or a modifié l'arrêté du 9 décembre 2015. Il est constant que ce nouvel avis, qui a été porté à la connaissance du public, a été rendu par une autorité disposant d'une autonomie réelle à l'égard du préfet de région.

20. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, au vu de ces éléments nouveaux, le tribunal administratif s'est fondé sur l'irrégularité de l'avis rendu par l'autorité environnementale pour annuler l'arrêté du 9 décembre 2015.

21. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des autres moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 9 décembre 2015 en litige, ainsi que contre l'arrêté modificatif du 2 mars 2022, par les demandeurs tant en première instance qu'en appel.

Sur les autres moyens soulevés :

En ce qui la compétence du préfet de région :

22. Aux termes du quatrième alinéa de l'article 2 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'État dans les régions et départements : " Le préfet de région peut également évoquer, par arrêté, et pour une durée limitée, tout ou partie d'une compétence à des fins de coordination régionale. Dans ce cas, il prend les décisions correspondantes en lieu et place des préfets de département ".

23. En application de ces dispositions, le préfet de la région Bourgogne a, par un arrêté du 1er juillet 2013, décidé d'exercer la compétence pour statuer, en lieu et place notamment du préfet de la Côte-d'Or, sur les demandes d'autorisation au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Si par arrêt du 3 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie ainsi que son annexe, le schéma régional de l'éolien, auquel l'arrêté du 1er juillet 2013 se réfère, sans qu'il n'en constitue pour autant la base légale ou que cet arrêté ait été pris pour son application, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de cet arrêté qui pouvait être adopté par le préfet dans le but de coordonner l'instruction et la délivrance de telles autorisations au niveau régional. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 9 décembre 2015 doit être écarté.

En ce qui concerne la concertation préalable :

24. Aux termes du premier paragraphe de l'article 6 de la convention d'Aarhus : " Chaque partie : / a) applique les dispositions du présent article lorsqu'il s'agit de décider d'autoriser ou non des activités proposées du type de celles énumérées à l'annexe I (...) ". Au vingtième paragraphe de cette annexe I est mentionnée " toute activité non visée aux paragraphes 1 à 19 ci-dessus pour laquelle la participation du public est prévue dans le cadre d'une procédure d'évaluation de l'impact sur l'environnement conformément à la législation nationale ". Aux termes du troisième paragraphe de l'article 6 de la même convention : " Pour les différentes étapes de la procédure de participation du public, il est prévu des délais raisonnables laissant assez de temps pour informer le public (...) et pour que le public se prépare et participe effectivement aux travaux tout au long du processus décisionnel en matière d'environnement ". Aux termes du quatrième paragraphe du même article : " Chaque partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence ". Ces stipulations doivent être regardées comme produisant des effets directs dans l'ordre juridique interne.

25. Il résulte de l'instruction que la société Res a développé son projet à compter de décembre 2011. Les habitants, les propriétaires fonciers et les exploitants de la zone d'étude ainsi que les élus du canton ont été informés du projet au début du processus par l'organisation dès le début de l'année 2012 de réunions publiques d'information, la diffusion de bulletins d'information, l'organisation de visites d'un parc éolien en service et la mise en place d'un comité de pilotage composé d'élus. Les modalités d'information du public sur le projet en cause lui ont ainsi permis, en l'espèce, d'être informé au début du processus décisionnel, lorsque toutes les options et solutions étaient encore possibles et qu'il pouvait exercer une réelle influence, et ce même si le pétitionnaire, pour les besoins de sa demande, avait dû définir avec précision son projet. Par suite, et alors que le public a par la suite été associé au projet pendant l'enquête publique, au cours de laquelle il a présenté de nombreuses observations, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention d'Aarhus doit être écarté.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

26. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population, les éléments du dossier de demande devant par ailleurs figurer dans le dossier soumis à enquête publique en vertu des articles L. 512-1 et R. 123 -6, ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En outre, eu égard à son office, le juge du plein contentieux des installations classées peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées, sous réserve qu'elles n'aient pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population.

S'agissant de l'avis des propriétaires intéressés :

27. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " I. - À chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; (...) ". Aux termes de l'article R. 553- 6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / a) Le démantèlement des installations de production ; b) L'excavation d'une partie des fondations ; / c) La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / d) La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ". Aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, modifié par l'arrêté du 6 novembre 2014 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévues à l'article R. 553-6 du code de l'environnement comprennent : / 1. Le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que ne doivent être joints à demande d'autorisation que les avis des propriétaires des parcelles sur lesquelles sont implantés les installations de production d'électricité, les postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison.

28. L'article R. 553-6 précité n'impose pas, en cas d'opération de démantèlement et de remise en état, la suppression de l'ensemble du réseau électrique, et notamment des câbles de liaison ou d'alimentation, qui ne constitue pas des " installations de production ". Par suite, les dispositions de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 ne sont pas illégales au motif qu'elles ne prévoient le démantèlement des câbles que dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. Par ailleurs, le ministre chargé de l'environnement devait, en vertu des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 553-6 du code de l'environnement, fixer les conditions techniques de remise en état du site après exploitation. Il pouvait donc légalement, sans méconnaître les dispositions de cet article et sans entacher l'arrêté du 26 août 2011 d'incompétence, fixer le périmètre du démantèlement des câbles des aérogénérateurs. Dès lors, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne sont pas fondés à soutenir que le préfet était tenu d'écarter l'application de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 précité au motif qu'il aurait été illégal.

29. Dans ces conditions, le pétitionnaire n'avait pas à solliciter l'avis des propriétaires des parcelles supportant les pistes d'accès aux éoliennes sous lesquelles seront enterrés les câbles électriques et celui des propriétaires des parcelles devant être traversées par des câbles électriques. A supposer même que le pétitionnaire ait envisagé de déposer à l'arrêt de l'installation les câbles de liaison sur toute leur longueur, cette prévision, qui va au-delà des strictes exigences précitées, n'était pas de nature à imposer au pétitionnaire de joindre au dossier de demande l'avis d'autres propriétaires que ceux concernés par les opérations de démantèlement des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison.

S'agissant de l'indication des capacités techniques et financières :

30. En vertu du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de délivrance de l'autorisation attaquée, la demande d'autorisation mentionne " les capacités techniques et financières de l'exploitant ".

31. Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières. Si cette règle a été ultérieurement modifiée par le décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale, qui a créé l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement en vertu duquel le dossier comprend une description des capacités techniques et financières dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour en justifier, cette évolution de la règle de droit ne dispense pas le pétitionnaire de l'obligation de régulariser une irrégularité dans la composition du dossier au vu des règles applicables à la date de délivrance de l'autorisation dès lors que l'irrégularité en cause a eu pour effet de nuire à l'information complète du public.

32. D'une part, il résulte de l'instruction que, dans sa demande, la société Res a décrit les modalités techniques de construction, d'exploitation et de maintenance du parc éolien projeté, en précisant les phases pour lesquelles elle entendait avoir recours à la sous-traitance et celles qu'elle entendait assurer par ses propres moyens, en décrivant son organisation interne. Contrairement à ce que prétendent l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, elle a notamment précisé les partenaires auxquels elle fait habituellement appel pour mener à bien ce type de projet. Enfin, elle a fait état de son expérience en énumérant les nombreux projets précédemment menés à bien. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'y joindre des engagements des éventuels partenaires auxquels le pétitionnaire fera appel, le dossier de demande a suffisamment précisé les capacités techniques de la société Res.

33. D'autre part, à l'appui de sa demande, la société Res a indiqué, sans arrêter de montage financier précis, que la construction du parc sera financée soit par apport de fonds propres par le groupe Res, dont elle est une filiale, soit par recours à la dette bancaire.

34. Toutefois, elle a, le 15 juin 2021, complété son dossier de demande quant à ses capacités financières, en précisant son chiffre d'affaires moyen annuel au cours des trois précédents exercices, la progression de ses fonds propres entre 2013 et 2020 et le montage financier envisagé, composé pour 20 % de fonds propres et 80 % d'emprunts bancaires. Il était précisé qu'en cas de refus bancaire, le financement serait assuré exclusivement par des fonds propres, de sorte qu'elle n'avait pas à l'assortir de l'engagement d'un établissement bancaire à la financer. Ces éléments, qui constituaient des informations suffisamment précises et étayées sur ses capacités techniques et financières ont été soumis au public dans le cadre de l'enquête publique complémentaire qui s'est déroulée du 9 au 24 novembre 2021, et pris en compte par le préfet lorsqu'il a décidé d'accorder l'arrêté modificatif du 2 mars 2022.

35. Par suite, et dès lors que le vice qui entachait l'arrêté initial a été régularisé en cours de procédure, le moyen tiré de ce que le dossier de demande d'autorisation était incomplet sur les capacités techniques et financières de l'exploitant doit être écarté.

S'agissant des insuffisances de l'étude d'impact :

36. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 (...) ". Aux termes de l'article R. 122-5 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II. - L'étude d'impact présente : 1° Une description du projet (...) ; 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; / 4° Une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus. (...) 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité (...) 9° Une description des difficultés éventuelles, de nature technique ou scientifique, rencontrées par le maître d'ouvrage pour réaliser cette étude (...) ". Aux termes de l'article R. 512-8 du même code, alors en vigueur : " I. - Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. (...) ".

37. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

38. S'agissant, d'une part, de l'étude chiroptérologique, si, par un courrier du 9 juillet 2014, les services de la DREAL ont sollicité la réalisation de mesures supplémentaires, compte tenu de la présence aux environs du projet d'une colonie de murins à oreilles échancrées et de grands rhinolophes et, ainsi, de la sensibilité de cet enjeu, il résulte de l'instruction qu'une étude complémentaire a été réalisée en novembre 2014, sur le fondement des enregistrements opérés par deux récepteurs placés à proximité des éoliennes considérées comme sensibles et au cours des périodes requises. Si la hauteur d'installation de ces appareils a été moindre que celle préconisée par ce courrier, l'étude complémentaire a fourni les justifications techniques de ce dispositif et justifié l'efficacité de celui-ci. En outre, l'étude d'impact ayant ainsi fait état de ces contraintes, conformément aux dispositions précitées du 9° du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, ni l'administration, ni le public n'ont pu être induits en erreur. Enfin, l'insuffisance de cette étude ne saurait être démontrée par la circonstance qu'elle ne respecterait pas intégralement certaines recommandations telles que celles du groupe de travail Eurobats, lesquelles sont dépourvues de valeur contraignante.

39. D'autre part, s'agissant du volet " avifaune ", il ressort de l'instruction que celui-ci se fonde sur une étude écologique élaborée à partir des campagnes d'enregistrement et d'observations réalisées au cours d'un cycle biologique complet, comprenant les périodes d'hivernage, de migration et de reproduction. L'étude d'impact comporte ainsi une description de l'état initial, ainsi que des cartes et une analyse des enjeux, notamment des enjeux migratoires, concluant à l'absence d'axe migratoire majeur mais à l'existence d'haltes migratoires et d'axes secondaires à proximité. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres se prévalent d'une " analyse " réalisée par leurs soins et de l'avis rendu par l'autorité environnementale le 25 mars 2015, lequel critique la précision de la méthode mise en œuvre et les dates des campagnes de recherche, ils ne démontrent toutefois pas, par les pièces qu'ils produisent, que l'inventaire des espèces auquel cette étude a abouti serait incomplet, à l'égard notamment d'espèces protégées, ni, par suite, que l'analyse des enjeux et impacts serait faussée.

40. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres font valoir sur ce point que le dossier soumis à l'enquête publique complémentaire n'était pas complet, à défaut pour le pétitionnaire d'avoir actualisé l'étude d'impact des dernières connaissances relatives aux migrations du milan royal, toutefois, la MRAe a elle-même relevé, dans son avis du 10 août 2021, que l'étude de l'état initial avait permis de révéler la présence de cette espèce dans la zone d'implantation et ses abords proches et que les observations ont permis de mettre en évidence les fonctionnalités des différents habitats de l'aire d'étude. L'étude a porté sur un cycle biologique complet, incluant la phase de migration postnuptiale et permis d'identifier un axe de migration postnuptiale " secondaire " du milan royal à plus d'un kilomètre à l'ouest de celui-ci. Par ailleurs, une mise à jour du diagnostic écologique a été réalisée en juin 2021, en tenant compte d'inventaires complémentaires menés en 2019-2020. La qualité et la fiabilité des études dont se prévalent l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, qui relèvent notamment l'omission d'un " couloir majeur d'intérêt national de migration du milan royal ", n'apparaissent pas supérieures à celles de l'étude d'impact, au point de faire sérieusement douter des informations qui y sont contenues, voire de les invalider, et de remettre en cause l'analyse qu'elle comporte et ses conclusions.

41. Enfin, s'agissant du volet " patrimoine et paysage ", il est composé d'une description de l'état initial du site, ainsi que d'une analyse de l'impact, y compris cumulé, du projet. Le dossier comprend un inventaire des sites en cause, différentes cartographies de l'impact visuel du projet et des photomontages. Chacun illustre la perception du projet depuis les lieux de vie, les routes et les unités paysagères et est accompagné d'une analyse, au sein de l'aire d'étude éloignée et de l'aire d'étude intermédiaire. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres se prévalent des avis défavorables émis par les services en charge de l'architecture et du patrimoine des préfectures de la Côte-d'Or, de la Haute-Saône et de la Haute-Marne, dans le cadre de l'instruction des demandes de permis de construire, ces avis remettent essentiellement en cause, en se fondant sur les cartes et les photomontages qu'elle comporte, les conclusions de l'étude quant à l'impact du projet, non son caractère complet et sincère. Contrairement à ce que mentionnent certains de ces avis, l'étude n'apparaît pas imprécise quant à l'impact du projet dans l'aire d'étude éloignée. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté.

En ce qui concerne l'enquête publique :

S'agissant de la publication et de l'affichage de l'avis d'enquête publique :

42. Aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête précise par arrêté, quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et après concertation avec le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête : (...) 4° Les lieux, ainsi que les jours et heures où le public pourra consulter le dossier d'enquête et présenter ses observations sur le registre ouvert à cet effet ; en cas de pluralité de lieux d'enquête, l'arrêté désigne parmi eux le siège de l'enquête, où toute correspondance relative à l'enquête peut être adressée au commissaire enquêteur ou à la commission d'enquête ; 5° Les lieux, jours et heures où le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête, représentée par un ou plusieurs de ses membres, se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations (...) ". Aux termes de l'article R. 123-11 du même code, dans sa rédaction applicable : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. (...). II.- L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tout autre procédé. Pour les projets, sont au minimum désignées toutes les mairies des communes sur le territoire desquelles se situe le projet. (...). Cet avis est publié quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et pendant toute la durée de celle-ci. (...) ".

43. Il résulte de l'instruction que l'avis d'enquête publique a été publié, à deux reprises, dans trois journaux locaux, et une copie de l'avis publié dans l'Est Républicain a été versée au dossier. Par ailleurs, il résulte de l'instruction, notamment du rapport et des conclusions de la commission d'enquête publique, que quatre-vingt-dix personnes ont inscrit des observations sur les quatre registres mis à disposition, que quatre cent dix-sept documents ou pétitions ont été en outre déposés, soit un total de sept cent quarante-quatre observations générant mille trois cent seize remarques, sur une population susceptible d'être concernée par le projet de sept mille personnes environ, ce qui constitue une participation particulièrement importante. Dans ces conditions, s'il n'apparait pas que l'avis aurait régulièrement fait l'objet de l'ensemble des publications et des affichages en mairie prévus par le préfet et le code de l'environnement, notamment sur la commune de Montigny-Mornay-Villeneuve-sur-Vingeanne, dont certains habitants se sont néanmoins déplacés aux permanences, les modalités d'affichage et les modalités de publication de l'avis d'ouverture n'apparaissent pas avoir eu une incidence sur la correcte information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération, ni été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête publique. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 123-11 du code doit être écarté.

S'agissant de la faculté de consulter le dossier en mairie :

44. Aux termes de l'article R. 123-10 du code de l'environnement : " Les jours et heures, ouvrables ou non, où le public pourra consulter un exemplaire du dossier et présenter ses observations sont fixés de manière à permettre la participation de la plus grande partie de la population, compte tenu notamment de ses horaires normaux de travail. Ils comprennent au minimum les jours et heures habituels d'ouverture au public de chacun des lieux où est déposé le dossier ; ils peuvent en outre comprendre des heures en soirée ainsi que plusieurs demi-journées prises parmi les samedis, dimanches et jours fériés ".

45. L'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres soutiennent, en se fondant sur une observation en ce sens figurant dans le registre déposé en mairie de Saint-Seine-sur-Vingeanne, que la consultation du dossier n'a plus été possible dans cette mairie, à compter du 22 mai 2015 et en dehors de la présence des commissaires, en raison des congés de sa secrétaire. Toutefois, il résulte de ce registre que des observations y ont été déposées en dehors des permanences et postérieurement au 22 mai 2015. A supposer même que le dossier n'ait plus pu être consulté dans cette mairie à cette date, il était disponible dans les trois autres mairies situées à seulement quelques kilomètres ainsi qu'en ligne. Par suite, à la supposer avérée, cette irrégularité n'a pu avoir, en l'espèce, pour effet de nuire à la correcte information du public ou de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 123-10 du code de l'environnement ne peut qu'être écarté.

S'agissant des avis émis :

46. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : (...) 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. (...) ".

47. Ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet d'exiger que soient joints au dossier d'enquête publique préalable à la délivrance des autorisations d'exploiter un parc éolien sur le fondement de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, les accords et avis rendus sur le fondement du code de l'urbanisme, dans le cadre de la procédure d'instruction de la demande de permis de construire ou de permis d'aménager éventuellement requis pour le même projet. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de ce dossier en raison du défaut des accords préalables du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense, de l'avis du maire d'implantation de la commune d'implantation, des avis des communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes et de l'avis de l'autorité gestionnaire d'une voie publique impactée, à savoir les communes et le département de la Côte-d'Or requis pour la délivrance du permis de construire en vertu, respectivement, des dispositions des articles R. 423-51, R. 425-9 du code de l'urbanisme et R. 244-1 du code de l'aviation civile, de l'article R. 423-72 du code de l'urbanisme, du XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 et de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme, doit être écarté.

S'agissant de la motivation des conclusions de la commission d'enquête :

48. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement dans sa version alors applicable : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". Il résulte de ces dispositions que le commissaire enquêteur doit, d'une part, établir un rapport relatant le déroulement de l'enquête et procéder à un examen des observations recueillies lors de celle-ci, en résumant leur contenu. Il doit, d'autre part, indiquer dans un document séparé, ses conclusions motivées sur l'opération, en tenant compte de ces observations mais sans être tenu de répondre à chacune d'elles.

49. Il résulte de l'instruction que, dans son rapport, la commission d'enquête publique a présenté le projet, analysé notamment son environnement, les justifications de l'implantation et ses divers impacts techniques, socio-économiques et environnementaux, avant d'énumérer l'ensemble des observations recueillies et leur teneur, de les synthétiser selon leur sens et les thèmes sur lesquels elles portaient. Ces observations ont ensuite été analysées, par thème, selon les différentes problématiques abordées, et assorties de la position de la commission, après avoir au besoin sollicité les observations du maître d'ouvrage. De ce rapport, la commission a tiré des conclusions séparées, lesquelles reprennent, pour chacune des problématiques identifiées, une synthèse de l'analyse qu'elle en a faite, appuyée sur des caractéristiques propres du projet et de son environnement. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres contestent certaines positions adoptées par la commission, notamment à l'égard des pétitions reçues, les conclusions rédigées à l'issue de l'enquête publique sont suffisamment motivées et répondent aux exigences de l'article R. 123-19 du code de l'environnement précité.

En ce qui concerne les capacités techniques et financières du pétitionnaire :

50. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017 visée ci-dessus : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ".

51. Ces dispositions modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 du code de l'environnement. Il en résulte que, lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que des garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

52. En premier lieu, il résulte de l'article 3 de la directive du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans ses arrêts du 11 septembre 2012 (C-43/10), Nomarchiaki Aftodioikisi Aitoloakarnanias et du 27 octobre 2016 (C-290/15) Patrice d'Oultremont contre région wallonne, que la notion de " plans et programmes " se rapporte à tout acte qui établit, en définissant des règles et des procédures de contrôle applicables au secteur concerné, un ensemble significatif de critères et de modalités pour l'autorisation et la mise en œuvre d'un ou de plusieurs projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Si, selon la Cour de justice de l'Union européenne, la notion de " plans et programmes " peut ainsi recouvrir, au sens de la directive, des actes normatifs adoptés par la voie législative ou réglementaire, c'est à la condition toutefois que ces actes concernent des secteurs déterminés et qu'ils définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011 peut être autorisée.

53. L'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale et le décret du 26 janvier 2017, qui déterminent les règles applicables aux projets relevant des secteurs soumis auparavant à la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement, n'ont pas pour objet de définir le cadre dans lequel peuvent être mis en œuvre des projets déterminés dans un secteur particulier. Ni cette ordonnance, ni ce décret ne relèvent, en conséquence, de la notion de " plans et programmes " au sens de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001. Ils n'avaient donc pas à être précédés d'une évaluation environnementale. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'absence d'évaluation environnementale s'oppose à ce que leurs dispositions soient applicables à la décision en litige doit être écarté.

54. En deuxième lieu, s'agissant des capacités techniques du pétitionnaire, il résulte du dossier de demande d'autorisation d'exploitation que, pour la construction, la société Res prévoit d'avoir recours à la sous-traitance pour différents lots, tout en conservant la maîtrise d'œuvre et en assurant le contrôle du chantier, grâce à ses propres ingénieurs. S'agissant de l'exploitation, elle prévoit de l'assurer elle-même par ses propres moyens humains et techniques, organisés dans son département " Exploitation et maintenance " et en recourant notamment à des " superviseurs de site ". L'entretien sera assuré par les fabricants des installations, selon un plan d'entretien qu'elle élabore. Contrairement à ce que prétendent l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, la société a précisé les partenaires auxquels elle fait habituellement appel pour mener à bien ce type projet. Enfin, elle peut se prévaloir d'une importante expérience et d'un grand nombre de réalisations dans le secteur de l'éolien terrestre. Dans ces conditions, la société Res justifie de capacités techniques suffisantes, au sens de l'article L. 181-27 du code de l'environnement.

55. S'agissant, en troisième lieu, des capacités financières du pétitionnaire, il résulte de l'instruction, et notamment des données produites par la société dans le cadre de l'actualisation qui a été faite en octobre 2021, que la société pétitionnaire est une société par actions simplifiée au capital de 10 816 792 euros qui disposait, au 31 décembre 2020, de capitaux propres, en constante augmentation depuis 2013, à hauteur de 203 423 000 euros. Le montant total des investissements nécessaires pour le projet, qui avait alors été réévalué à la somme de 64,57 millions d'euros, devait être financé à hauteur de 20% en fonds propres et, pour le reste par un prêt à long terme. Dans le cas où aucun prêt ne serait accordé, la société pétitionnaire pourrait, compte tenu des fonds propres dont elle dispose, auto financer l'ensemble du projet. Dans ces circonstances et au vu de son expérience, du nombre de projets éoliens déjà réalisés et des fonds propres investis par le passé, la société Res justifie de capacités financières suffisantes, au sens de l'article L. 181-27 du code de l'environnement.

En ce qui concerne le schéma régional éolien :

56. Aux termes de l'article L. 515-44 du code de l'environnement : " (...) / L'autorisation d'exploiter tient compte des parties du territoire régional favorables au développement de l'énergie éolienne définies par le schéma régional éolien mentionné au 3° du I de l'article L. 222-1, si ce schéma existe. ".

57. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres s'étonnent que le schéma régional éolien de Franche-Comté n'ait pas prévu de zone d'exclusion de l'éolien autour de l'étang de Theuley, ils ne démontrent ni que l'ensemble des conditions fixées par ce schéma, notamment quant aux types de gîtes qui ont été sélectionnés pour fixer ces zones, étaient effectivement réunies, ni, par suite, que le schéma était illégal à cet égard et que l'autorisation serait, par voie de conséquence, illégale.

En ce qui concerne la nécessité d'une dérogation à la destruction d'espèces protégées :

58. Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, qui transposent en droit interne l'article 12 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite directive " Habitats ", que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, comme le prévoient les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant, d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.

59. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".

S'agissant des chiroptères :

60. Le projet est implanté dans une zone présentant une grande diversité de chiroptères et de forts enjeux en raison notamment de la présence d'espèces d'intérêt communautaire, due à la proximité de l'étang de Theuley situé en zone Natura 2000 et constituant une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) où se situe une colonie de mille deux cents individus de grand rhinolophe et de murin à oreilles échancrées. Plusieurs espèces de chiroptères à forte patrimonialité, dont la barbastelle d'Europe, le murin de Natterer et la noctule commune, ainsi que la pipistrelle commune sont présents sur le site, et en particulier à proximité des lisières boisées. Pour protéger les chiroptères, l'arrêté du 9 décembre 2015 a prévu, outre des mesures consistant à maintenir le sol en graviers au pied des éoliennes, à combler les cavités au niveau de la nacelle et à limiter l'éclairage, un plan de bridage des éoliennes T 9, T 13, T 15 et T 16 du 1er avril au 30 septembre, pendant les quatre premières heures de la nuit, en cas de vent inférieur à 6 mètres par seconde. Ce plan de bridage a été renforcé par l'arrêté du 2 mars 2022 qui l'a étendu aux éoliennes T 2, T 4 et T 10, du lever au coucher du soleil, mais limité sa période du 15 avril au 30 septembre et seulement lorsque la température est supérieure à 10 degrés. L'autorisation prévoit en outre la réalisation d'un suivi post-implantation de ce système, selon un protocole arrêté au niveau régional.

61. Il ne résulte pas de l'instruction que les mesures de bridage imposées aux éoliennes ainsi situées à proximité d'un boisement seraient insuffisantes, les seuls avis dont l'association et autres se prévalent, émis par le conseil national de la protection de la nature sur d'autres projets de parcs éoliens, ne suffisant pas à le démontrer. Il en va ainsi en particulier de la vitesse du vent en-deçà de laquelle le bridage est exigé, l'étude d'impact, fondée sur une étude de 2008, établissant une très forte baisse de l'activité chiroptérologique dès la vitesse de 6 mètres par seconde. Il en est de même s'agissant de la période de bridage, les relevés effectués sur un autre parc éolien proche de celui en litige, dont ils prévalent, confirmant une activité encore très faible au mois d'avril et fortement réduite dès le mois d'octobre. Par ailleurs, contrairement à ce que prétendent les demandeurs de première instance qui se sont appropriés les observations de M. A... jointes à leurs écritures, la procédure de suivi, fixée par l'article 3.2 de l'autorisation modificative pour le dispositif de détection des rapaces n'avait pas à être transposée au dispositif de bridage prévu pour la protection des chiroptères. A défaut d'établir l'insuffisance des mesures de bridage, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne sauraient davantage soutenir qu'un dispositif de suivi des chiroptères en altitude aurait dû être imposé. Enfin, eu égard aux contrôles susceptibles d'être diligentés par l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement à l'égard de telles installations, aucune mesure supplémentaire de contrôle du respect de ces prescriptions n'avait à être prévue par l'autorisation modificative. Ainsi, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne sont pas fondés à contester les modalités du bridage imposées par l'autorisation modificative en vue de la protection des chiroptères.

62. Si, pour l'éolienne T 13, située à seulement 60 mètres d'une lisière boisée, la MRAE a, dans son avis du 10 août 2021, préconisé " une exclusion de la localisation proposée ", compte tenu de la proximité du boisement, toutefois les recommandations formulées à cet égard par EUROBATS ou la SFEPM, prévoyant la mise en place d'une " zone tampon " de 200 mètres en lisière de boisement, sont dépourvues de caractère obligatoire. En l'espèce, il apparaît que si dans l'étude d'impact initiale, aucun point d'écoute n'avait été placé en altitude dans le secteur du bois de Pouilly, à la suite de la demande faite en ce sens par la DREAL, des études complémentaires ont été réalisées, par implantation à 17 mètres de hauteur, sur un chêne âgé, d'un capteur ayant permis de suivre pendant plusieurs mois l'activité chiroptérologique au-dessus de la canopée. L'étude a démontré que les pics d'activité ont systématiquement correspondu à des nuits durant lesquelles les conditions météorologiques ont été particulièrement favorables à l'activité chiroptérologique (vent très faible, absence de précipitations et températures élevées). Cette étude complémentaire a permis de détecter la présence de pipistrelle commune, noctule commune, noctule de Leisler, pipistrelle de Khul et pipistrelle de Nathusius pour lesquelles les risques engendrés par l'implantation de l'éolienne T 13 ont été qualifiés de modérés pour la pipistrelle commune et de faibles à modérés pour les autres. Il n'apparaît pas que, après mise en œuvre du système de bridage prévu par l'arrêté, qui produit pleinement ses effets pendant les périodes d'activité des chiroptères, le risque de mortalité pour ces différentes espèces serait encore suffisamment caractérisé pour justifier une demande de dérogation.

63. Toutefois, compte tenu du risque de collision de chiroptères accru par la proximité de boisements, la MRAE a, dans son avis du 10 août 2021, préconisé des mesures de bridage des différentes éoliennes situées à proximité d'un tel boisement, parmi lesquelles figure l'éolienne T 12. Ces préconisations ont été reprises par l'autorisation modificative à l'exception de l'éolienne T 12, alors même qu'elle se situe, comme les autres éoliennes, à proximité du bois de Montrepain pour lequel l'étude chiroptérologique complémentaire a démontré la présence de chauves-souris. En l'absence de toute autre justification apportée, il y a lieu, conformément aux pouvoirs dévolus au juge du plein contentieux et rappelés au point 13 ci-dessus, d'ajouter l'éolienne T 12 à la liste des éoliennes visées par le bridage chiroptères prévu à l'article 5 de l'arrêté du 2 mars 2022, afin que le risque induit par la présence de cette éolienne pour les chiroptères ne soit pas suffisamment caractérisé.

S'agissant de l'avifaune :

64. En premier lieu, il résulte de l'instruction que dans le dossier complémentaire déposé en juin 2021, il a été observé des vols de milans noirs en périodes pré et postnuptiale et de milans royaux en période prénuptiale. Alors que l'autorisation initiale ne prévoyait aucune mesure de bridage en faveur de l'avifaune, l'autorisation modificative, délivrée par le préfet de la Côte-d'Or le 2 mars 2022, a, en son article 3, repris l'ensemble des préconisations formulées par la MRAE afin de limiter les risques de collision pesant sur ces espèces. Toutefois, alors qu'il apparait clairement à la lecture de l'arrêté modificatif que le dispositif anti-collision prévu est obligatoire, il y a lieu de lever l'ambiguïté de la formulation de l'article 3.1 qui indique que les " éoliennes peuvent être asservies à un dispositif expérimental anti-collision " en précisant qu'" elles sont asservies à un dispositif anti-collision " lequel devra être fonctionnel dès la mise en fonctionnement du parc éolien. Par ailleurs, ainsi que le fait valoir l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, en s'appropriant les moyens soulevés par M. A... dans une note du 24 avril 2022, l'article 3 de l'arrêté modificatif, en prévoyant que les espèces visées par le dispositif sont les espèces patrimoniales d'oiseaux à fort niveau de sensibilité à l'éolien listées dans l'annexe 5 du protocole de suivi environnemental ministériel de 2015 alors que cette annexe classe les espèces en quatre niveau, de un à quatre par ordre croissant de risque, sans définir lequel de ces niveaux est " fort ", est insuffisamment précis. Au vu de ce tableau et des motifs qui ont conduit le préfet à imposer cette prescription complémentaire, il y a lieu de préciser que les espèces cibles du dispositif sont les rapaces, notamment le milan royal et le milan noir. Contrairement à ce que prétendent les demandeurs de première instance, ce dispositif n'avait pas à être étendu à l'ensemble des espèces protégées. Le système de bridage ainsi mis en place, qui, en l'absence de mention contraire, a vocation à fonctionner en permanence, ne comporte pas d'ambiguïté quant à la nature du dispositif, qui ne comprend pas de mécanisme d'effarouchement. Pour s'assurer que ce dispositif, qualifié d'expérimental dans l'arrêté, présente des garanties d'effectivité suffisantes, il y a lieu de préciser que le système, qui devra être soumis à l'inspection des installations classées avant la mise en service industrielle du parc et devra être le système disponible le plus efficace, devra être en mesure de repérer les individus de rapaces à 360 degrés autour des éoliennes et à une distance suffisante pour permettre la régulation de la vitesse de rotation du rotor concerné avant tout risque d'entrée en collision de l'oiseau avec les pâles. Il n'apparaît pas que les modalités du suivi, qui couvre l'ensemble des périodes de migration pré nuptiale et post-nuptiale, notamment des milans royaux, inclut un contrôle de la mortalité, exige la rédaction d'un rapport de fonctionnement et prévoit, au vu de ce dernier, une validation a posteriori du dispositif, ne seraient pas suffisantes, en particulier au motif qu'un seul un passage par quinzaine au mois d'octobre est prescrit. Par ailleurs, l'arrêté prévoit qu'en cas de mortalité d'un individu d'une espèce patrimoniale d'oiseau à fort niveau de sensibilité à l'éolien, l'exploitant met en place l'arrêt diurne des machines, informe l'inspection des installations classées, détermine les causes de l'impact, les défaillances du système et les évolutions à apporter au dispositif anti-collision qui ne pourra être remis en fonctionnement qu'après accord explicite du préfet. L'arrêté précise qu'en cas de défaillance du dispositif anti-collision l'arrêt diurne des machines est mis en place. L'arrêté n'avait pas à prévoir un arrêt des machines y compris en période nocturne en cas de constat d'un décès, les espèces plus particulièrement visées, à savoir les milans noirs et royaux, étant diurnes. Il n'apparait pas que, après prise en compte des mesures d'évitement et de réduction prévues par l'arrêté attaqué, telles que complétées par l'arrêté du 2 mars 2022 et le présent arrêt, et à supposer même que le projet se situerait dans un couloir important de migration du milan royal, le risque résiduel de mortalité des milans, et en particulier du milan royal, et d'autres rapaces serait suffisamment caractérisé pour nécessiter le dépôt d'une demande de dérogation.

65. En second lieu, s'agissant des grues cendrées, il ressort de l'avis de la MRAE que cette espèce présente un risque de collision d'autant plus important que les conditions météorologiques sont mauvaises. Si l'arrêté prévoit des mesures supplémentaires de bridage, conformes aux préconisations de la MRAE, pendant " les jours de migration de l'espèce " et tenant compte du " contexte météorologique local ", la société pétitionnaire a indiqué, dans ses écritures qu'elle mettrait en œuvre le dispositif prévu dans le protocole cadre grue cendrée en Bourgogne-Franche-Comté établi conjointement par la DREAL BFC, France énergie éolienne, le syndicat des énergies renouvelables et la LPO, lequel est plus précis que ce qu'indique l'arrêté. Il y a, en conséquence, lieu de modifier l'arrêté litigieux en ce sens en imposant la mise en œuvre de ce dispositif. Sous réserve de cette modification de l'arrêté, les risques de mortalité de la grue cendrée n'apparaissent pas suffisamment caractérisés pour justifier l'obtention d'une dérogation à la destruction d'espèces protégées.

S'agissant de la destruction d'habitats :

66. Si, d'après l'association et autres, le projet induit la destruction de 7,40 hectares d'espaces ouverts ou semi-ouverts, composés de prairies, cultures et friches et de 0,04 hectares de boisements, toutefois, il ressort de l'étude d'impact que la plus grande partie de la zone d'implantation potentielle du projet abrite des espaces dont les enjeux en termes d'habitat sont nuls ou faibles. Un quart environ de la zone d'implantation potentielle, composée pour l'essentiel de chenaies/charmaies neutrophile et à la marge de prairies de fauche et pâturées, de haies et de hêtraies présentent des enjeux modérés pour l'habitat. Or, le pétitionnaire a fait le choix de n'implanter les éoliennes que dans des secteurs où les enjeux en termes d'habitats sont négligeables ou faibles. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que les suppressions et destructions impliquées par le projet engendreraient un risque de perte d'habitat suffisamment caractérisé.

67. Dans ces conditions, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne sont pas fondés à soutenir que le projet nécessitait une demande de dérogation pour la destruction d'habitats d'espèces protégées.

En ce qui concerne les atteintes aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

68. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ". Selon l'article L. 511-1 de ce code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ".

S'agissant de l'atteinte portée aux paysages et au patrimoine :

69. Il résulte de l'instruction que le projet autorisé prévoit l'implantation de dix-sept aérogénérateurs d'une hauteur, pale comprise, de 180 mètres au nord-est du département de la Côte-d'Or, sur les territoires des communes de Montigny-Momay-Villeneuve-sur-Vingeanne, de Pouilly-sur-Vingeanne et de Saint-Seine-sur-Vingeanne. Ce projet se trouve au sein d'une vaste unité paysagère composée d'un plateau calcaire agricole et boisé, globalement caractérisé par de grands espaces ouverts ainsi que des boisements marqués, qui accueille déjà plusieurs parcs éoliens, notamment d'Ecoulottes, de Beaumont-sur-Vingeanne et de Mirebellois, situés dans un rayon d'une dizaine de kilomètres. Il se situe plus précisément au sein du plateau de Vars-Orain, dominé par les grandes cultures, organisées en grandes parcelles, entrecoupées des forêts de Louches, de Champlitte, d'Autrey. Les vues s'ouvrent parfois largement et profondément mais sont le plus souvent cadrées par des boisements importants ou des bosquets épars plus ou moins distants. Cet espace comprend divers villages qui présentent une qualité architecturale notable. A proximité du projet, se trouve la vallée de la Vingeanne, qui rompt profondément avec les paysages voisins puisqu'il s'agit, d'après l'étude d'impact, d'un " écrin intime, agricole, habité et qui dispose d'une intéressante richesse patrimoniale qui représente un enjeu local et voir départemental pour certains monuments (Talmay et Rosières) ".

70. Si l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres font valoir que la vallée de la Vingeanne est reconnue comme " site paysager majeur " en raison de la richesse de ses paysages et de son patrimoine historique, il est constant que le projet ne sera pas implanté dans cette vallée mais à l'est de celle-ci, sur une vaste plaine agricole, qui ne présente pas d'enjeu fort en termes paysagers et patrimoniaux. Il résulte des photomontages de l'étude d'impact, dont le réalisme n'a pas été remis en cause, notamment par les avis défavorables émis par les services en charge de l'architecture et du patrimoine des préfectures de la Côte-d'Or, de la Haute-Saône et de la Haute-Marne, que l'impact visuel du projet sera en grande partie minoré par le relief, légèrement vallonné, et les boisements qui ponctuent le paysage environnant et masquent en grande partie les mâts des machines, notamment depuis la vallée de la Vingeanne et les villages qui la composent. Il ressort du photomontage qui lui est consacré dans l'étude paysagère que cet effet de masque, combiné à l'éloignement des éoliennes, limitera également l'impact de la co-visibilité du projet et du château de Rosières, sans effets de surplomb ni d'écrasement. Il en est de même, ainsi qu'il résulte également des photomontages produits par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres, de l'abbaye de Theuley, la visibilité du projet étant au demeurant limitée à son porche. Par ailleurs, il n'est pas établi que le château de Saint-Seine-sur-Vingeanne bénéficie d'une protection particulière.

S'agissant du risque de saturation visuelle :

71. Bien que le nombre d'aérogénérateurs actuellement autorisés dans les environs soit important, il résulte de l'instruction que, d'après les photomontages figurant dans l'étude d'impact pour illustrer les effets cumulés, le projet ne remet pas en cause l'implantation des parcs dans une même perspective ou à distance entre eux. Les photomontages produits par l'association qui se concentrent sur un axe transversal sud-ouest/nord-est bien déterminé et limité aux seuls secteurs élevés ne suffisent pas à justifier de l'existence d'une situation de saturation visuelle.

S'agissant de l'atteinte aux chiroptères et à l'avifaune :

72. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 60 à 65, le projet, tel qu'autorisé par le préfet et modifié par le présent arrêt, ne présente pas de dangers ou inconvénients pour les chiroptères et l'avifaune au sens de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

En ce qui concerne les mesures de compensation :

73. Lorsque les mesures d'évitement et de réduction ne suffisent pas à rendre non suffisamment caractérisés les risques pour les habitats et les espèces, la demande de dérogation à la destruction de tels habitats ou espèces doit être accompagnée de mesures compensatoires.

74. En l'espèce, le projet ne nécessitait pas, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, de demande de dérogation. Par suite, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne sont pas fondés à soutenir que l'autorisation serait illégale à défaut d'avoir imposé au pétitionnaire des mesures de compensation.

En ce qui concerne le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site :

75. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. (...). ". Les articles 30 à 32 (section 8 Garanties financières), de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de la modification faite par un arrêté du 10 décembre 2021, entré en vigueur le 1er janvier 2022, précisent ces dispositions. L'annexe I à cet arrêté, auquel renvoie l'article 30, dont la rédaction est quant à elle issue d'un arrêté du 11 juillet 2023, entré en vigueur le 20 suivant, prévoit en ses I et II que le montant initial de la garantie financière d'une installation (M) est égal au nombre d'éoliennes multiplié par le coût unitaire forfaitaire d'un aérogénérateur (Cu) qui varie selon la puissance de l'éolienne. Celui-ci s'établit à 75 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 MW (a du II). Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule suivante (b du II) : " Cu = 75 000 + 25 000 * (P-2) / où : / - Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; / - P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). ".

76. Il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières, avant application de la formule d'actualisation mentionnée à l'annexe II de l'arrêté du 26 août 2011 mentionné ci-dessus, a été fixé en dernier lieu par l'arrêté modificatif du 2 mars 2022 à 1 275 000 euros, conformément aux dispositions en vigueur à la date de cet arrêté préfectoral selon lesquelles le coût unitaire était calculé selon la formule " Cu = 50 000 + 25 000*(P-2) ". Toutefois, d'après les dispositions désormais en vigueur rappelées au point précédent, le montant initial de la garantie financière de chaque aérogénérateur, d'une puissance maximale de 3 MW, s'élève à 100 000 euros (Cu = 75000 + 25 000*(3-2)). Il en résulte que le montant initial de la garantie financière, avant application de la formule d'actualisation, doit être fixé, pour les dix-sept aérogénérateurs à la somme de 1 700 000 euros. Par suite, il y a lieu, conformément aux pouvoirs dévolus au juge du plein contentieux et rappelés au point 13 ci-dessus, de remplacer la formule de calcul du montant de la garantie financière de l'installation figurant à l'article 6 de l'arrêté du 2 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or, ayant abrogé et remplacé l'article 5 de l'arrêté du 9 décembre 2015, par la nouvelle formule rappelée au point ci-dessus et de porter le montant initial des garanties financières, avant application de la formule d'actualisation, de 1 275 000 euros à 1 700 000 euros.

77. Compte tenu de cette actualisation, l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et autres ne peuvent utilement faire valoir que le préfet aurait dû écarter l'annexe I précitée, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle l'autorisation a été initialement délivrée, dans la mesure où celle-ci prévoyait un montant excessivement faible.

En ce qui concerne les mesures de démantèlement et de remise en état du site :

78. Comme il a été indiqué ci-dessus, les dispositions de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 ne sont pas illégales au motif qu'elles ne prévoient le démantèlement des câbles que dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance des obligations de démantèlement mises à la charge de l'exploitant doit être écarté.

79. Il résulte ce qui précède que la société Res, depuis devenue société Q Énergy France, et le ministre en charge de l'écologie sont seulement fondés à demander la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a de contraire à ce qui précède.

80. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter l'ensemble des conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 3.1 de l'arrêté du 2 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or, relatif au dispositif anti-collision en faveur de la préservation des rapaces, est modifié conformément à ce qui a été indiqué au point 64 du présent arrêt.

Article 2 : L'article 4.1 de l'arrêté du 2 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or, relatif au dispositif de bridage des grues cendrées, est modifié conformément à ce qui a été indiqué au point 65 du présent arrêt.

Article 3 : L'article 5 de l'arrêté du 2 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or, relatif au bridage des chiroptères, est complété par l'ajout de l'éolienne T 12 à la liste des éoliennes visées par le bridage chiroptères.

Article 4 : L'article 6 de l'arrêté du 2 mars 2022 du préfet de la Côte-d'Or, relatif aux garanties financières, qui abroge et remplace l'article 5 de l'arrêté du 9 décembre 2015, est modifié conformément à ce qui a été indiqué au point 76 du présent arrêt.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société Q Énergy France, à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques et à l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, désignée en qualité de représentante unique.

Copie en sera adressée au préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté et au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY02057

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02057
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

29-035 Energie.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : LPA CGR Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;24ly02057 ?
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