La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/01/2025 | FRANCE | N°23LY02959

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 09 janvier 2025, 23LY02959


Vu les procédures suivantes :





I- Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 septembre 2023, 12 avril et 2 mai 2024 sous le n° 23LY02959, l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein, la commune de Montréal, M. B... C..., M. A... C... et la société SCI R.D.C, représentés par Me Catry, demandent à la cour :



1°) d'annuler l'arrêté du 23 mai 2023 par lequel le préfet de l'Yonne a autorisé la société Parc éolien du Val Nanté à construire et exploiter cinq éoliennes et un poste de livraison sur le territoire

de la commune de Massangis ;



2°) de mettre à la charge du préfet de l'Yonne la somme de 4 ...

Vu les procédures suivantes :

I- Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 septembre 2023, 12 avril et 2 mai 2024 sous le n° 23LY02959, l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein, la commune de Montréal, M. B... C..., M. A... C... et la société SCI R.D.C, représentés par Me Catry, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 23 mai 2023 par lequel le préfet de l'Yonne a autorisé la société Parc éolien du Val Nanté à construire et exploiter cinq éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Massangis ;

2°) de mettre à la charge du préfet de l'Yonne la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont un intérêt à agir ;

- les avis et décisions des personnes publiques, services et commissions intéressés recueillis en application de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme sont entachés d'irrégularités ;

- la consultation des conseils municipaux des communes intéressées par le projet est entachée d'irrégularité, dès lors que tous les conseils municipaux situés dans le périmètre d'affichage des avis d'enquête publique n'ont pas rendu d'avis ;

- le montant des garanties financières n'est pas suffisant pour couvrir le coût de démantèlement du parc ;

- en méconnaissance de l'article L. 181-27 du code de l'environnement, la société Parc éolien du Val Nanté n'a pas suffisamment justifié de ses capacités techniques et financières ;

- les conditions de remise du site à l'état naturel sont irrégulières ;

- en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, l'étude d'impact est entachée d'insuffisances concernant l'étude de dangers, l'analyse écologique, l'analyse paysagère, en particulier les photomontages ; c'est en particulier le cas de l'étude chiroptérologique, en raison des défaillances du mat de mesure, de la détermination du périmètre de la ZIP, du défaut de prise en compte de l'existence d'une ZNIEFF et des recommandations EUROBATS, de l'absence de prise en compte du défaut d'analyse de l'activité diurne, de l'étude paysagère, compte tenu de l'incidence sur le site de Vézelay et eu égard aux conditions dans lesquelles les photomontages ont été réalisés, de l'étude acoustique, en raison du recours insuffisant à la norme NF S 31-114, et des sensibilités hydrogéologiques, eu égard à l'insuffisance de l'inventaire des cavités et de la méthodologie globale de l'étude ;

- une demande de dérogation pour la destruction d'espèces protégées aurait dû être présentée en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en raison du risque caractérisé d'atteinte aux chiroptères et à l'avifaune, et notamment au milan royal et à la grue cendrée ; il existe un risque caractérisé de mortalité et de perte d'habitat du grand murin, du rhinolophe euryale, du petit rhinolophe et de destruction et de perte d'habitat du milan royal ; il en va de même de la cigogne noire ;

- la phase d'enquête publique est entachée d'irrégularités ;

- le projet a été autorisé en violation de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, dès lors qu'il subsistait un doute quant à savoir s'il portait atteinte aux objectifs de conservation du site Natura 2000 " Pelouses, forêts et habitats à chauve-souris du sud de la vallée de l'Yonne et de ses affluents " ;

- le projet n'est pas compatible avec les objectifs n° 63 et n° 67 du schéma de cohérence territoriale (SCoT) du Grand Avallonais en matière de consommation d'espaces et d'intégration architecturale ;

- en méconnaissance des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, le projet porte une atteinte excessive aux paysages et monuments, aux chiroptères, à l'avifaune, à la commodité du voisinage et aux eaux souterraines ; certaines espèces de chiroptères sont particulièrement vulnérable et les mesures ERC sont insuffisantes ; il en va de même du milan royal et de la cigogne noire ; le paysage présente un grand intérêt et une sensibilité forte auquel le projet portera atteinte, notamment aux sites de Vézelay, de Noyers-sur-Serein, de Montréal, de Grimault, du château de Jouancy ainsi qu'à divers monuments inscrits ; le projet entraine une saturation du paysage ; il existe un risque de surplomb et d'effet d'écrasement du bourg de Grimault ; il existe un risque sur les écosystèmes aquatiques, les nappes phréatiques et la qualité des eaux souterraines.

Par des mémoires enregistrés les 24 novembre 2023 et 31 mai 2024, ce dernier non communiqué, la société Parc éolien du Val Nanté, représentée par Me Guiheux, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de la régularisation de l'autorisation environnementale, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

3°) de mettre solidairement à la charge des requérants la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour les requérants de justifier d'un intérêt à agir contre l'arrêté litigieux ;

- les moyens tirés de vices de procédure entachant la légalité de l'arrêté, de l'insuffisance du montant des garanties financières, de l'insuffisante présentation des capacités techniques et financières, de l'irrégularité des conditions de remise en état du site, des insuffisances de l'étude d'impact, des irrégularités affectant l'enquête publique, de l'absence d'évaluation des incidences Natura 2000 et des atteintes excessives à l'environnement doivent être regardés comme des moyens nouveaux, dès lors qu'ils n'ont été assortis des précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé qu'après l'expiration du délai de deux mois suivant la communication du premier mémoire en défense, et sont par conséquent irrecevables en application de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative ;

- le moyen tiré de l'irrégularité des avis et décisions des personnes publiques, services et commissions intéressées recueillis en application de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme est inopérant, dans la mesure où ces dispositions sont relatives à l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme et non à celle des demandes d'autorisation environnementale ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, les éventuels vices de légalité externe qui affecteraient l'arrêté peuvent être régularisés, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

- à titre subsidiaire, le juge pourra faire application de ses pouvoirs de juge du plein contentieux pour modifier directement le montant des garanties financières.

Par des mémoires enregistrés les 19 avril et 24 mai 2024, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable, les requérants ne justifiant pas avoir notifié leur recours à l'auteur de la décision ainsi qu'à son bénéficiaire, en méconnaissance des dispositions du 2ème alinéa de l'article L. 181-17 du code de l'environnement ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, l'arrêté peut être annulé seulement en tant que le régime de la dérogation espèces protégées n'a pas été mis en œuvre ;

- à titre subsidiaire, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer sera prononcé le temps que le vice tiré de l'insuffisante justification des capacités techniques et financières soit régularisé et qu'une nouvelle décision soit adoptée.

Par une ordonnance en date du 3 mai 2024, l'instruction a été close, en dernier lieu, au 31 mai 2024.

Par un courrier en date du 2 décembre 2024, les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative de ce que la cour est susceptible de fonder l'arrêt sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité, en application de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative, de certains moyen présentés par les requérants par application de cet article dès lors que, lorsqu'un moyen n'a pas été assorti de précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé avant l'expiration du délai de deux mois prévu par ces dispositions puis que de telles précisions sont apportées au-delà de ce délai, le moyen ainsi reformulé est un moyen nouveau au sens de ces dispositions. La cour a précisé qu'étaient susceptibles d'être rejetés, pour ce motif, les moyens suivants : le caractère insuffisant de l'étude d'impact, l'absence de dérogation à la destruction de chiroptères, l'absence de dérogation à la destruction de la cigogne noire, les atteintes portées par les projets aux paysages, sites, monuments et éléments de patrimoine archéologique, à la commodité du voisinage, aux chiroptères et à l'avifaune, à la nappe affleurante et à la structure hydrogéologique des lieux environnants en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, le caractère insuffisant des capacités techniques et financières des pétitionnaires.

L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein et autres ont produit des observations le 3 décembre 2024 qui ont été communiquées. Elle fait notamment valoir qu'elle avait valablement soulevé ces différents moyens et que, s'agissant de la cigogne noire, elle se prévaut de faits nouveaux justifiant que la cristallisation des moyens soit levée.

La société Parc éolien du Val Nanté a produit des observations le 17 décembre 2024 qui ont été communiquées. Elle demande notamment à la cour d'écarter comme irrecevables pour ce même motif les moyens tirés des vices de procédure, le moyen tiré de l'irrégularité des conditions de remise en état du site, le moyen tiré des irrégularités de l'enquête publique ainsi que le moyen tiré de l'absence d'évaluation des incidences du projet en zone Natura 2000.

II- Par une requête et des mémoires enregistrés les 17 septembre 2023, 12 avril et 2 mai 2024 sous le n° 23LY02960, l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein, la commune de Montréal, M. B... C..., M. A... C... et la société SCI R.D.C, représentés par Me Catry, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 23 mai 2023 par lequel le préfet de l'Yonne a autorisé la société Parc éolien de la Come Lothereau à construire et exploiter cinq éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Massangis ;

2°) de mettre à la charge du préfet de l'Yonne la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont un intérêt à agir ;

- les avis et décisions des personnes publiques, services et commissions intéressés recueillis en application de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme sont entachés d'irrégularités ;

- la consultation des conseils municipaux des communes intéressées par le projet est entachée d'irrégularité, dès lors que tous les conseils municipaux situés dans le périmètre d'affichage des avis d'enquête publique n'ont pas rendu d'avis ;

- le montant des garanties financières n'est pas suffisant pour couvrir le coût de démantèlement du parc ;

- en méconnaissance de l'article L. 181-27 du code de l'environnement, la société Parc éolien de la Come Lothereau n'a pas suffisamment justifié de ses capacités techniques et financières ;

- les conditions de remise du site à l'état naturel sont irrégulières ;

- en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, l'étude d'impact est entachée d'insuffisances concernant l'étude de dangers, l'analyse écologique, l'analyse paysagère, en particulier les photomontages ; c'est en particulier le cas de l'étude chiroptérologique, en raison des défaillances du mat de mesure, de la détermination du périmètre de la ZIP, du défaut de prise en compte de l'existence d'une ZNIEFF et des recommandations EUROBATS, de l'absence de prise en compte du défaut d'analyse de l'activité diurne, de l'étude paysagère, compte tenu de l'incidence sur le site de Vézelay et eu égard aux conditions dans lesquelles les photomontages ont été réalisés, de l'étude acoustique, en raison du recours insuffisant à la norme NF S 31-114, et des sensibilités hydrogéologiques, eu égard à l'insuffisance de l'inventaire des cavités et de la méthodologie globale de l'étude ;

- une demande de dérogation pour la destruction d'espèces protégées aurait dû être présentée en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en raison du risque caractérisé d'atteinte aux chiroptères et à l'avifaune, et notamment au milan royal et à la grue cendrée ; il existe un risque caractérisé de mortalité et de perte d'habitat du grand murin, du rhinolophe euryale, du petit rhinolophe et de destruction et de perte d'habitat du milan royal ; il en va de même de la cigogne noire ;

- la phase d'enquête publique est entachée d'irrégularités ;

- le projet a été autorisé en violation de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, dès lors qu'il subsistait un doute quant à savoir s'il portait atteinte aux objectifs de conservation du site Natura 2000 " Pelouses, forêts et habitats à chauve-souris du sud de la vallée de l'Yonne et de ses affluents " ;

- le projet n'est pas compatible avec les objectifs n° 63 et n° 67 du schéma de cohérence territoriale (SCoT) du Grand Avallonais en matière de consommation d'espaces et d'intégration architecturale ;

- en méconnaissance des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, le projet porte une atteinte excessive aux paysages et monuments, aux chiroptères, à l'avifaune, à la commodité du voisinage et aux eaux souterraines ; certaines espèces de chiroptères sont particulièrement vulnérable et les mesures ERC sont insuffisantes ; il en va de même du milan royal et de la cigogne noire ; le paysage présente un grand intérêt et une sensibilité forte auquel le projet portera atteinte, notamment aux sites de Vézelay, de Noyers-sur-Serein, de Montréal, de Grimault, du château de Jouancy ainsi qu'à divers monuments inscrits ; le projet entraine une saturation du paysage ; il existe un risque de surplomb et d'effet d'écrasement du bourg de Grimault ; il existe un risque sur les écosystèmes aquatiques, les nappes phréatiques et la qualité des eaux souterraines.

Par des mémoires enregistrés les 24 novembre 2023 et 31 mai 2024, ce dernier non communiqué, la société Parc éolien de la Come Lothereau, représentée par Me Guiheux, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer dans l'attente de la régularisation de l'autorisation environnementale, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

3°) de mettre solidairement à la charge des requérants la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour les requérants de justifier d'un intérêt à agir contre l'arrêté litigieux ;

- les moyens tirés de vices de procédure entachant la légalité de l'arrêté, de l'insuffisance du montant des garanties financières, de l'insuffisante présentation des capacités techniques et financières, de l'irrégularité des conditions de remise en état du site, des insuffisances de l'étude d'impact, des irrégularités affectant l'enquête publique, de l'absence d'évaluation des incidences Natura 2000 et des atteintes excessives à l'environnement doivent être regardés comme des moyens nouveaux, dès lors qu'ils n'ont été assortis des précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé qu'après l'expiration du délai de deux mois suivant la communication du premier mémoire en défense, et sont par conséquent irrecevables en application de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative ;

- le moyen tiré de l'irrégularité des avis et décisions des personnes publiques, services et commissions intéressées recueillis en application de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme est inopérant, dans la mesure où ces dispositions sont relatives à l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme et non à celle des demandes d'autorisation environnementale ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, les éventuels vices de légalité externe qui affecteraient l'arrêté peuvent être régularisés, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ;

- à titre subsidiaire, le juge pourra faire application de ses pouvoirs de juge du plein contentieux pour modifier directement le montant des garanties financières.

Par des mémoires enregistrés les 19 avril et 24 mai 2024, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable, les requérants ne justifiant pas avoir notifié leur recours à l'auteur de la décision ainsi qu'à son bénéficiaire, en méconnaissance des dispositions du 2ème alinéa de l'article L. 181-17 du code de l'environnement ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, l'arrêté peut être annulé seulement en tant que le régime de la dérogation espèces protégées n'a pas été mis en œuvre ;

- à titre subsidiaire, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, un sursis à statuer sera prononcé le temps que le vice tiré de l'insuffisante justification des capacités techniques et financières soit régularisé et qu'une nouvelle décision soit adoptée.

Par une ordonnance en date du 3 mai 2024, l'instruction a été close, en dernier lieu, au 31 mai 2024.

Par un courrier en date du 2 décembre 2024, les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative de ce que la cour est susceptible de fonder l'arrêt sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité, en application de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative, de certains moyen présentés par les requérants par application de cet article dès lors que, lorsqu'un moyen n'a pas été assorti de précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé avant l'expiration du délai de deux mois prévu par ces dispositions puis que de telles précisions sont apportées au-delà de ce délai, le moyen ainsi reformulé est un moyen nouveau au sens de ces dispositions. La cour a précisé qu'étaient susceptibles d'être rejetés, pour ce motif, les moyens suivants : le caractère insuffisant de l'étude d'impact, l'absence de dérogation à la destruction de chiroptères, l'absence de dérogation à la destruction de la cigogne noire, les atteintes portées par les projets aux paysages, sites, monuments et éléments de patrimoine archéologique, à la commodité du voisinage, aux chiroptères et à l'avifaune, à la nappe affleurante et à la structure hydrogéologique des lieux environnants en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, le caractère insuffisant des capacités techniques et financières des pétitionnaires.

L'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein et autres ont produit des observations le 3 décembre 2024 qui ont été communiquées. Elle fait notamment valoir qu'elle avait valablement soulevé ces différents moyens et que, s'agissant de la cigogne noire, elle se prévaut de faits nouveaux justifiant que la cristallisation des moyens soit levée.

La société Parc éolien de la Come Lothereau a produit des observations le 17 décembre 2024 qui ont été communiquées. Elle demande notamment à la cour d'écarter comme irrecevables pour ce même motif les moyens tirés des vices de procédure, le moyen tiré de l'irrégularité des conditions de remise en état du site, le moyen tiré des irrégularités de l'enquête publique ainsi que le moyen tiré de l'absence d'évaluation des incidences du projet en zone Natura 2000.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2023-1103 du 27 novembre 2023 ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 du ministre de l'agriculture et de la pêche et de la ministre de l'écologie et du développement durable, fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté du 29 octobre 2009 du ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté modifié du 26 août 2011 du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Catry pour l'association sauvegarde de la Haute Vallée du Serein et autres ainsi que celles de Me Bonnin, pour les sociétés Parc éolien du Val Nanté et Parc éolien de la Come Lothereau ;

Considérant ce qui suit :

1. Les sociétés Parc éolien du Val Nanté et Parc éolien de la Come Lothereau ont chacune présenté le 9 juillet 2019 une demande d'autorisation en vue de la construction et de l'exploitation des parcs éoliens dits, d'une part, " D... ", et d'autre part, " Massangis-Sud " composés respectivement de cinq éoliennes et un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Massangis. Les éoliennes E1, E2, E3, E9 et E10 appartiennent au parc éolien dit " D... ", tandis que les éoliennes E4, E5, E6, E7 et E8 appartiennent au parc éolien " Massangis-Sud ". Par des arrêtés du 23 mai 2023, le préfet de l'Yonne a accordé les autorisations sollicitées. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 23LY02959 et 23LY02960, l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein, la commune de Montréal, M. B... C..., M. A... C... et la société SCI R.D.C demandent à la cour d'annuler ces deux arrêtés.

2. Ces deux requêtes étant relatives à deux parcs éoliens qui ont fait l'objet d'une étude d'impact, d'une enquête publique et d'une instruction communes par les services de l'État, il y a lieu de les joindre pour statuer par un unique arrêt.

Sur la recevabilité des requêtes :

3. En premier lieu, l'article 3 du décret du 27 novembre 2023 visé ci-dessus relatif à la notification des recours en matière d'autorisations environnementales précise qu'il s'applique aux recours relatifs aux autorisations environnementales et aux arrêtés complémentaires pris à compter du 1er janvier 2024. Les arrêtés litigieux ayant été adoptés le 23 mai 2023, la fin de non-recevoir, opposée dans chacune des affaires, tirée de ce que les requérants n'auraient pas respecté cette formalité, ne peut qu'être écartée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 181-50 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable aux présents litiges : " Les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15-1 peuvent être déférées à la juridiction administrative : / (...) / 2° Par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3 (...) ".

5. L'intérêt pour agir des groupements et associations s'apprécie au regard de leur objet statutaire et de l'étendue géographique de leur action.

6. Il résulte de l'instruction que l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein a pour objet, selon l'article 2 de ses statuts : " la préservation de l'environnement, notamment de la flore et de la faune, des paysages et du patrimoine culturel, du cadre de vie, de la santé et de la sécurité des hommes, contre toutes les atteintes qui pourraient lui être portées, notamment par l'implantation d'éoliennes et des équipements qui leur sont liés ", et ce notamment sur le territoire de la commune de Massangis. L'article 2 des statuts précise en outre que l'association " entreprendra toute démarche et action pour concourir aux buts ci-dessus et se réserve le droit de mener toute action en justice, contre les projets d'installations industrielles ne prenant pas en compte les intérêts de la nature, des gens, du patrimoine paysager et bâti, notamment contre les usines d'aérogénérateurs dites "parcs" éoliens ". Les actions engagées contre les arrêtés attaqués, en ce qu'ils autorisent la construction et l'exploitation de deux parcs éoliens situés sur le territoire de la commune de Massangis, s'inscrivent dans le champ matériel et géographique de l'objet de l'association. Par suite, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour contester les arrêtés attaqués.

7. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'intérêt à agir des autres demandeurs dès lors que la recevabilité d'une requête collective est assurée lorsque l'un au moins des requérants est recevable à agir, la fin de non-recevoir opposée sur ce point en défense dans chacune des deux affaires ne peut qu'être écartée.

Sur l'office du juge :

8. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et à la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

9. Lorsqu'il relève que l'autorisation environnementale contestée devant lui méconnaît une règle de fond applicable à la date à laquelle il se prononce, il peut, dans le cadre de son office de plein contentieux, lorsque les conditions sont remplies, modifier ou compléter l'autorisation environnementale délivrée afin de remédier à l'illégalité constatée, ou faire application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.

Sur l'application des dispositions de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative :

10. Aux termes de l'article R. 311-5 du code de justice administrative : " Les cours administratives d'appel sont compétentes pour connaître, en premier et dernier ressort, des litiges portant sur les décisions suivantes, y compris leur refus, relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent classées au titre de l'article L. 511-2 du code de l'environnement, à leurs ouvrages connexes, ainsi qu'aux ouvrages de raccordement propres au producteur et aux premiers postes du réseau public auxquels ils sont directement raccordés : /1° L'autorisation environnementale prévue par l' article L. 181-1 du code de l'environnement (...) ". Aux termes de l'article R. 611-7-2 du même code : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1, lorsque la juridiction est saisie d'un litige régi par les articles R. 311-5, R. 811-1-3 ou R. 811-1-4, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie. ".

11. Il résulte de ces dispositions qu'un moyen nouveau présenté après l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense est, en principe, irrecevable. Lorsqu'est produit un mémoire comportant un tel moyen, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction doit informer les parties de son irrecevabilité, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, sauf s'il décide de fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens, postérieure à la production du mémoire en cause. Il est toujours loisible au président de la formation de jugement de fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens s'il estime que les circonstances de l'affaire le justifient. Il doit y procéder dans le cas particulier où le moyen est fondé sur une circonstance de fait ou un élément de droit dont la partie concernée n'était pas en mesure de faire état avant l'expiration du délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense et est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire.

12. Lorsqu'un moyen n'a pas été assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé avant l'expiration du délai de deux mois prévu par ces dispositions, les précisions apportées au-delà de ce délai doivent être regardées comme un moyen nouveau au sens des dispositions précitées, par suite irrecevable.

Sur la procédure :

En ce qui concerne les avis et décisions des personnes publiques, services et commissions intéressés par le projet :

13. Aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur. ".

14. Ces dispositions, relatives à l'instruction des demandes de permis de construire et des déclarations préalables, ne sont pas applicables à l'instruction des demandes d'autorisation environnementale. Par suite, le moyen, au demeurant non assorti de précisions, tiré de ce que ces dispositions auraient été méconnues est inopérant à l'encontre des arrêtés litigieux et doit, par conséquent, être écarté.

En ce qui concerne la consultation des conseils municipaux intéressés :

15. Aux termes de l'article R. 181-38 du code de l'environnement : " Dès le début de la phase de consultation du public, le préfet demande l'avis du conseil municipal des communes mentionnées au III de l'article R. 123-11 ou au I de l'article R. 123-46-1 et des autres collectivités territoriales, ainsi que de leurs groupements, qu'il estime intéressés par le projet, notamment au regard des incidences environnementales notables de celui-ci sur leur territoire. Ne peuvent être pris en considération que les avis exprimés au plus tard dans les quinze jours suivant la clôture de l'enquête publique ou de la consultation du public réalisée conformément aux dispositions de l'article L. 123-19. ". Aux termes du III de l'article R. 123-11 du même code : " L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne le ou les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tout autre procédé. Pour les projets, sont au minimum désignées toutes les mairies des communes sur le territoire desquelles se situe le projet ainsi que celles dont le territoire est susceptible d'être affecté par le projet (...) ". Aux termes du 3° de l'article R. 181-36 du même code : " Pour les projets relevant du 2° de l'article L. 181-1, les communes mentionnées au III de l'article R. 123-11 ou au I de l'article R. 123-46-1 sont celles dont une partie du territoire est située à une distance, prise à partir du périmètre de l'installation, inférieure au rayon d'affichage fixé dans la nomenclature des installations classées pour la rubrique dont l'installation relève, auxquelles le préfet peut adjoindre d'autres communes par décision motivée. ". Il ressort de la rubrique n° 2980 de la nomenclature des installations classées que le rayon d'affichage pour les installations terrestres de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent comprenant au moins un aérogénérateur dont la hauteur du mât et de la nacelle au-dessus du sol est supérieure ou égale à cinquante mètres est de six kilomètres.

16. Il résulte de l'instruction que les communes d'Annoux, de Blacy, de Chatel-Gérard, de Coutarnoux, de Dissangis, de Grimault, de Jouancy, de l'Isle-sur-Serein, de Marmeaux, de Massangis, de Sainte-Colombe, de Sarry, de Talcy et de Thizy, ainsi que la Communauté de communes du Serein ont rendu un avis dans le délai de 15 jours suivant la clôture de l'enquête publique. La seule circonstance que les communes d'Angely, de Censy et de Noyers-sur-Serein n'aient pas rendu d'avis dans ce délai ne suffit pas démontrer qu'elles n'auraient pas été régulièrement consultées. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation des conseils municipaux intéressés doit être écarté.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

17. Dans leurs requêtes introductives d'instance, les requérants se sont bornés à soutenir qu'ils " entendront démontrer que l'étude d'impact versée au dossier de demande d'autorisation comporte plusieurs carences, s'agissant notamment de l'étude de dangers, l'analyse écologique, de l'analyse paysagère, en particulier de la teneur des photomontages, ainsi que de l'étude d'impact sur laquelle les sociétés pétitionnaires fondent leur projet ". Ces moyens ne sont pas assortis de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

18. Postérieurement à l'expiration du délai de deux mois courant après la communication aux parties du premier mémoire en défense, les requérants ont soutenu, en apportant des précisions, que l'étude chiroptérologique, l'étude paysagère, l'étude acoustique et l'étude des sensibilités hydrogéologiques figurant dans l'étude d'impact étaient insuffisantes. Ils ont ainsi, au sens des dispositions précitées au point 10, formulé de nouveaux moyens, irrecevables.

En ce qui concerne la présentation des capacités techniques et financières de la société :

19. A supposer que, dans leurs requêtes introductives d'instance, en citant les dispositions de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, les requérants aient entendu soulever un moyen tiré du caractère incomplet des dossiers de demandes d'autorisations sur les capacités techniques et financières, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé. Il ne peut, dès lors, qu'être écarté.

En ce qui concerne l'enquête publique :

20. Si les requérants ont fait valoir qu'ils " entendront relever " des vices qui " ont affecté la procédure et le déroulement de l'enquête publique " et que des irrégularités " affectent la composition du dossier du rapport rendu par le commissaire enquêteur ", ils n'ont pas assorti ces moyens des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la phase d'enquête publique doivent être écartés.

Sur le fond :

En ce qui concerne l'absence de dérogation espèces protégées :

21. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ".

22. Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 (...) ".

23. Il résulte de ces dispositions que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, l'autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.

24. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus, qui concerne les espèces de mammifères terrestres et d'oiseaux figurant sur les listes fixées par les arrêtés du 23 avril 2007 et du 29 octobre 2009, impose d'examiner si l'obtention d'une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l'espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l'applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l'état de conservation des espèces protégées présentes.

25. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".

S'agissant des chiroptères :

26. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude écologique jointe à l'étude d'impact, que les inventaires acoustiques ont permis de mettre en évidence la présence de quinze espèces de chiroptères dans la zone d'implantation potentielle (ZIP) du projet, 71 % des contacts concernant la pipistrelle commune, 11 % le petit rhinolophe, 8 % la sérotine commune et les 10 % restant comprenant un cortège constitué principalement du murin " sp " (2,7 %), du grand murin (1,6 %), du murin à moustaches (1,3 %) et de la barbastelle d'Europe (1,2 %). En croisant la sensibilité des différentes espèces de chiroptères aux éoliennes avec leur niveau d'activité sur le site, l'étude écologique conclut qu'il existe un risque " modéré " de collision sur le site pour le grand murin, la pipistrelle commune, la pipistrelle de Nathusius et la sérotine commune. Compte-tenu de leurs habitudes de déplacement et de chasse, près du sol et de la végétation, le risque de collision pour le petit rhinolophe et le rhinolophe euryale est qualifié de " nul ", sans que cette évaluation soit sérieusement contredite par les requérants. Les points d'écoute active ont permis de mettre en lumière une activité chiroptérologique soutenue au niveau des lisières de boisement. Ont ainsi été mesurées des moyennes de cent-trente contacts par heure au droit du point n° 2, cent-dix contacts par heure au droit du point n° 5 et quatre-vingt-dix-neuf contacts par heure au droit du point n° 3. Il ressort des pièces du dossier que les éoliennes E1 et E4 à E8 seront situées à une distance inférieure à deux-cents mètres en bout de pale des lisières de boisement. L'étude d'impact conclut à un risque de collision " faible à modéré " en ce qui concerne ces éoliennes, compte-tenu de leur proximité avec des zones d'activité chiroptérologique soutenue, tandis que le risque est qualifié de " faible " pour les autres éoliennes.

27. Si certaines éoliennes se situent à moins de deux-cents mètres des lisières des forêts, les recommandations formulées à cet égard par EUROBATS, prévoyant la mise en place d'une " zone tampon " de deux-cents mètres en lisière de boisement, sont dépourvues de caractère obligatoire. Pour remédier aux impacts du projet, qui se situe à proximité de ZNIEFF, sur les différentes espèces de chiroptères, plusieurs mesures ont été prévues, dont notamment l'entretien du pied des éoliennes pour éviter d'attirer la faune, en maintenant le sol en graviers dans un rayon de huit mètres, ainsi qu'un éclairage nocturne compatible avec les chiroptères. Le préfet de l'Yonne a imposé à l'article 2.3.1 de chacun des deux arrêtés d'autorisation, un bridage asservi par " mise en drapeau " des pâles des éoliennes E1 et E4 à E8, placées les plus près des forêts, du 15 avril au 15 octobre, toute la nuit lorsque la vitesse du vent est inférieure à trois mètres par seconde et de trente minutes avant le coucher du soleil jusqu'à sept heures après le coucher du soleil, lorsque la vitesse du vent est comprise entre trois et sept mètres par seconde, pour une température comprise entre 10°C et 23°C à hauteur de nacelle et en l'absence de précipitations. Il ressort toutefois de l'étude écologique que certaines espèces de chiroptères, connaissent sur ce site un regain d'activité durant la deuxième moitié du mois d'octobre, et ainsi que l'avait d'ailleurs pris en compte le pétitionnaire en prévoyant initialement un bridage jusqu'au 31 octobre. Afin de garantir l'effectivité de la mesure de bridage prévue pour les chiroptères, il y donc lieu d'étendre cette mesure jusqu'au 31 octobre. En tenant compte de cette modification pour les éoliennes E1 et E4 à E8, il n'apparaît pas, après prise en compte des différentes mesures d'évitement et de réduction, que le risque de destruction de chiroptères par collision ou en raison du phénomène de barotraumatisme resterait à un niveau suffisamment caractérisé, la circonstance que l'étude d'impact qualifierait ce risque de faible ne permettant pas de déduire le contraire. S'agissant des éoliennes E2, E3, E9 et E10, pour lesquelles le risque a été qualifié de faible, il n'apparaît pas qu'un bridage serait nécessaire. En outre, le risque de destruction d'habitat n'est pas suffisamment caractérisé.

28. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction qu'il existerait, après prise en compte de la modification apportée au point précédent, s'agissant des espèces de chiroptères contactées sur le site, un risque d'atteinte suffisamment caractérisé imposant une demande de dérogation sur le fondement des dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

S'agissant de l'avifaune :

29. En premier lieu, il ne saurait se déduire de ce que l'étude d'impact conclut à un impact résiduel faible sur l'avifaune après application des mesures d'évitement et de réduction que ce risque serait suffisamment caractérisé pour nécessiter une demande de dérogation à la destruction d'espèces protégées.

30. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le milan royal, espèce classée " en danger " sur la liste rouge de Bourgogne, a été contacté à quarante-sept reprises en migration prénuptiale et à vingt-quatre reprises en migration postnuptiale, le projet se situant sur un axe migratoire. L'espèce n'a pas été contactée sur la ZIP en période de nidification, période où le milan royal est le plus sensible au risque de collision, l'essentiel de ses facultés cognitives étant alors mobilisées sur le repérage des proies, ce qui limite sa capacité à détecter les obstacles. Compte-tenu de leur capacité d'évitement des éoliennes en période de migration, l'étude d'impact du projet conclut, sans être sérieusement contredite sur ce point, à un risque " faible " de collision et à une sensibilité " négligeable " au phénomène d'effet barrière et de perte d'habitat. Outre la mesure visant à réduire l'attractivité du pied des éoliennes en maintenant le sol en graviers dans un rayon de huit mètres, les arrêtés d'autorisation prévoient la mise en place d'un dispositif de bridage dynamique sur l'ensemble des éoliennes, ciblant certaines espèces en particulier, dont le milan royal, et consistant en l'arrêt ou la décélération des turbines en cas de détection d'un spécimen. Il est prévu qu'en cas de défaillance ou d'indisponibilité du système de détection ou en cas de mortalité constatée, un bridage de chacune des éoliennes est mis en place entre une heure après le lever du soleil et jusqu'à une heure avant son coucher, du 1er février au 31 mai et du 1er septembre au 30 novembre. Il résulte de l'instruction que ces mesures présentent des garanties d'effectivité suffisantes. Compte tenu de l'ensemble des mesures ainsi prévues, les risque de destruction et de perte d'habitat n'apparaissent pas suffisamment caractérisés s'agissant du milan royal. Aucune dérogation n'était donc requise pour cette espèce.

31. En troisième lieu, les requérants se bornent à soutenir que la mesure de bridage des éoliennes en période de fenaison ne vaudrait que pour les milans et ne viendrait pas atténuer le risque pesant sur la grue cendrée. Il résulte cependant de l'instruction, d'une part, que la grue cendrée n'a été observée qu'au cours des périodes de migration, entre février et mars pour la migration prénuptiale et entre octobre et décembre en période de migration post nuptiale, et d'autre part que différentes mesures de bridage ont été prévues pour ces périodes. Outre le dispositif de bridage dynamique évoqué au point précédent, qui a également pour cible les spécimens de grue cendrée, les arrêtés d'autorisation prévoient la mise en place de mesures spécifiques en vue de limiter l'impact des projets sur la grue cendrée, et notamment la mise en place d'un protocole, associant l'exploitant et la ligue pour la protection des oiseaux (LPO), un bureau d'étude ou une association spécialisée, permettant d'aboutir à la mise en arrêt des éoliennes en cas de conditions météorologiques défavorables en période de migration (du 1er février au 31 mars et du 1er octobre au 10 décembre). Par conséquent, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'il existerait un risque d'atteinte suffisamment caractérisé concernant la grue cendrée.

32. En dernier lieu, si la synthèse ornithologique réalisée par la LPO Yonne fait apparaître que des spécimens de cigogne noire ont pu être observés à des distances comprises entre quinze et vingt kilomètres du terrain d'assiette des projets en 2016 et en 2017, il ressort toutefois de l'étude écologique, conduite sur l'ensemble des quatre saisons par un bureau d'études spécialisé, qu'aucun spécimen de cette espèce n'a alors été contacté au sein de la zone d'implantation potentielle des projets. Les requérants produisent deux attestations de tierces personnes indiquant avoir observé en mai et en septembre 2021 un spécimen de cigogne noire à proximité des hameaux de Moutomble et du Grand-Val-de-la-Nef, situés respectivement à environ neuf et onze kilomètres à vol d'oiseau des projets, ainsi que plusieurs attestations et films d'observations qui auraient été faites à Chevigny-le-Désert et Bierry-les-Belles-Fontaines, où serait implanté un nid, et à Vassy-sous-Pisy, situés à une vingtaine de kilomètres de Massangis, et entre Massangis et Dissangis au cours de l'année 2024. Toutefois, outre la distance relativement importante entre le site et les lieux d'observation, rien ne permet de s'assurer des périodes exactes et des endroits où ces observations ont pu être réalisées. Elles ont par ailleurs été faites au sud et à l'est de la zone d'implantation sans qu'une fréquentation par la cigogne noire de la zone d'implantation potentielle des projets elle-même ou de ses abords proches, dont rien ne permet de dire qu'ils constitueraient en particulier un lieu de passage ou de gagnage, puisse être raisonnablement admise, au point de contredire l'étude écologique. Dans ces conditions, le risque de destruction ou de perte d'habitat induit par les projets n'apparaît pas, s'agissant de la cigogne noire, suffisamment caractérisé.

33. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction qu'il existerait, s'agissant de l'avifaune, un risque d'atteinte suffisamment caractérisé imposant une demande de dérogation " espèces protégées " sur le fondement des dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'atteinte à un site Natura 2000 :

34. Aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : (...) 2° Les (...) projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations (...) VI. - L'autorité chargée d'autoriser (...) s'oppose à tout (...) projet (...) si l'évaluation des incidences requise (...) se révèle insuffisante ou s'il en résulte que leur réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation (...). ".

35. Ces dispositions transposent en droit français celles de l'article 6 de la directive n° 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et la flore sauvage (directive " Habitats ") et de son article 7, qui en étend l'application aux sites désignés par l'article 4 de la directive n° 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages, remplacée par la directive n° 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009, concernant la conservation des oiseaux sauvages (directive " Oiseaux ").

36. Il résulte des dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement, éclairées par l'interprétation donnée par la Cour de justice de l'Union européenne aux dispositions de la directive européenne qu'elles transposent, que l'autorisation d'un projet entrant dans leur champ d'application ne peut être accordée qu'à la condition que les autorités compétentes, une fois identifiés tous les aspects dudit projet pouvant, par eux-mêmes ou en combinaison avec d'autres plans ou projets, affecter les objectifs de conservation du site Natura 2000 concerné, et compte tenu des meilleures connaissances scientifiques en la matière, aient acquis la certitude qu'il est dépourvu d'effets préjudiciables sur les objectifs de conservation du site. Il en est ainsi lorsqu'il ne subsiste aucun doute raisonnable d'un point de vue scientifique quant à l'absence de tels effets.

37. Le site d'implantation des projets n'est situé au sein d'aucune zone Natura 2000. Il se trouve à un kilomètre neuf-cents de la zone spéciale de conservation (ZSC) " Gîtes et habitats à chauves-souris en Bourgogne ", à onze kilomètres sept-cents de la ZSC " Pelouses et forêts calcicoles des côteaux de la Cure et de l'Yonne en amont de Vincelles " également intitulée " pelouses forêts et habitats à chauve-souris du sud de la vallée de l'Yonne et des affluents ", à quinze kilomètres trois-cents de la ZSC " Vallées de la Cure et du Cousin dans le Nord Morvan " et à seize kilomètres cinq-cents de la ZSC " Eboulis calcaires de la vallée de l'Armançon ". L'étude écologique jointe aux dossiers comprend une évaluation des incidences des projets sur les objectifs de conservation de ces sites Natura 2000. Ce document conclut à l'absence d'atteinte aux objectifs de conservation des sites en question, notamment, en ce qui concerne les chiroptères, en raison de l'éloignement de trois des quatre sites par rapport à la zone d'implantation des projets et compte-tenu de la mise en place d'une mesure de bridage pour les éoliennes E1 et E4 à E8. Les requérants soutiennent que l'évaluation des incidences aurait omis d'étudier le risque d'effet barrière pour les chiroptères et que cette omission laisserait subsister un doute quant à l'absence d'effets préjudiciables sur les objectifs de conservation des sites Natura 2000. Dans son avis du 28 août 2019, la direction départementale des territoires a indiqué que l'effet barrière devait être pris en considération afin de s'assurer que la présence des machines ne réduira pas le territoire de chasse de certaines espèces compris dans le site Natura 2000 proche et notamment le petit rhinolophe, présent en nombre dans la ZIP. Toutefois, il ressort de l'étude écologique que le risque d'effet barrière lié au fonctionnement des éoliennes a effectivement été pris en compte et qu'il a été jugé " négligeable " compte-tenu de la hauteur des éoliennes et de la faible altitude de vol des chiroptères. Cette analyse se trouve confirmée, notamment pour le petit rhinolophe, par les résultats des écoutes en altitude, puisqu'aucun spécimen de cette espèce n'a été contacté à quatre-vingt mètres. Toutes espèces confondues, les écoutes en altitude font apparaître une diminution de 82 % de l'activité chiroptérologique à quatre-vingts mètres par rapport à l'activité au sol. Dans ces conditions, il ne subsistait aucun doute raisonnable d'un point de vue scientifique quant à l'absence d'effets préjudiciables du projet sur les objectifs de conservation des ZSC " Gîtes et habitats à chauves-souris en Bourgogne ", " Pelouses et forêts calcicoles des côteaux de la Cure et de l'Yonne en amont de Vincelles ", " Vallées de la Cure et du Cousin dans le Nord Morvan " et " Eboulis calcaires de la vallée de l'Armançon " et c'est sans méconnaître les dispositions du VI de l'article L. 414-4 du code de l'environnement que le préfet de l'Yonne ne s'est pas opposé aux projets litigieux.

En ce qui concerne les atteintes aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

38. En vertu de l'article L. 181-3 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts notamment mentionnés à l'article L. 511-1 du même code. Aux termes de cet article : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, (...) soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ".

S'agissant des atteintes aux paysages, sites, monuments et éléments de patrimoine archéologique :

39. Les moyens, soulevés dans les requêtes introductives d'instances tirés de ce que " le projet querellé porte une atteinte manifeste à la qualité paysagère du milieu dans lequel il est prévu d'être implanté, ainsi qu'aux nombreux sites, monuments et éléments de patrimoine archéologique que compose le secteur " ne sont pas assortis de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé et la portée.

40. Les requérants n'ont apporté des précisions suffisantes pour apprécier la portée et le bien-fondé de ces moyens que postérieurement à l'expiration du délai de deux mois courant après la communication aux parties du premier mémoire en défense. Ces précisions, fournies après expiration du délai prévu par les dispositions de l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative, s'analysent comme des moyens nouveaux tardifs et donc irrecevables.

S'agissant de la commodité du voisinage :

41. Dans leurs requêtes introductives d'instance, les requérants ont soutenu que " le projet soulève une problématique d'atteinte à la commodité du voisinage du fait du risque de saturation et d'effet subséquent d'encerclement qu'il induit " sans apporter aucune précision sur les lieux qui seraient concernés par ce risque de saturation. Ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier sa portée et son bien-fondé. Les éléments qu'ils ont fournis au-delà du délai de deux mois prescrit par l'article R. 611-7-2 du code de justice administrative pour préciser ces moyens doivent eux-mêmes être regardés comme des moyens nouveaux dont la tardiveté entraîne l'irrecevabilité.

S'agissant de l'atteinte portée aux chiroptères et à l'avifaune :

42. Dans leurs requêtes introductives d'instance, les requérants se sont bornés à soutenir que " le projet portera atteinte à l'avifaune et aux populations de chiroptères dont la présence dans le secteur est avérée et insuffisamment appréciée. / Compte tenu de l'insuffisance des mesures ERC prises pour maîtriser ces impacts, le projet portera une atteinte significative aux intérêts faunistiques protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement ", sans assortir ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

43. Les précisions qu'ils ont fournies postérieurement à l'expiration du délai de deux mois courant après la communication aux parties du premier mémoire en défense s'analysent, compte tenu des développements aux points 10 à 12, comme des nouveaux moyens irrecevables. En toute hypothèse, les requérants ont fait état de l'attractivité du site d'implantation pour les chiroptères, de la vulnérabilité des espèces identifiées sur le site, de l'insuffisance des mesures envisagées pour éviter, réduire et compenser (ERC) les atteintes portées par les projets à l'environnement. Mais, pour les motifs qui ont été exposés plus haut, il n'apparaît pas, compte tenu notamment du renforcement de la mesure de bridage tel que précisé au point 27, et en dépit de l'implantation de six des éoliennes à moins de deux cent mètres en bout de pale de lisières de boisement, que les risques encourus par les chiroptères seraient spécialement excessifs et présenteraient un danger pour ces espèces. S'agissant des oiseaux, et compte tenu des informations contenues dans l'étude d'impact, qui ne sont pas davantage incomplètes, et des mesures mises en œuvre pour éviter en particulier les collisions et surveiller l'évolution des populations d'avifaune répertoriées sur place et à proximité, les risques que présente l'exploitation du site pour les différentes espèces étudiées, notamment le milan royal et la cigogne noire, n'apparaissent pas excessifs. Dans ces circonstances, aucune violation des intérêts liés à la protection de la nature et de l'environnement ne saurait davantage être retenue ici.

S'agissant des risques de pollution de la nappe affleurante et l'impact hydrogéologique du projet :

44. Il résulte de l'instruction que les projets sont implantés sur un terrain karstique, à l'aplomb de deux nappes phréatiques. La zone d'implantation potentielle des projets est concernée par deux périmètres éloignés de protection de captages en eau potable, sans pour autant que les éoliennes elles-mêmes ne se trouvent au sein de l'un de ces périmètres. Les projets prévoient la mise en œuvre de fondations d'une profondeur de trois à cinq mètres. L'étude d'impact conclut que les projets auront un impact brut " modéré " sur les eaux souterraines en raison de l'imperméabilisation des sols et de la présence de ces deux périmètres. Ainsi que l'ont relevé l'agence régionale de santé, la MRAe et la commission d'enquête, la zone d'implantation des éoliennes présente une importante vulnérabilité au risque de pollution des eaux souterraines par fuites au cours de la phase travaux.

45. En vue de pallier ce risque de pollution des eaux souterraines, et suivant les recommandations émises par les instances précitées, l'article 2.4 des arrêtés d'autorisation subordonne le lancement des travaux à la réalisation d'une étude géotechnique visant à identifier la nature du sol et à définir le type de fondation adaptée pour l'implantation des aérogénérateurs, laquelle permettra d'identifier avec précisions les cavités et la nature des sols. Cette étude sera présentée à l'inspection des installations classées en amont du lancement des travaux. Dans l'hypothèse où l'étude conclurait à la nécessité de mettre en œuvre des fondations différentes de celles présentées au dossier les arrêtés imposent le dépôt d'une demande de modification du projet portant a minima sur l'impact sur la géologie, sur l'hydrogéologie et les eaux souterraines ainsi que sur la santé. Par ailleurs, les arrêtés prévoient des mesures visant à limiter les impacts des travaux sur les nappes phréatiques, telles que le stockage des matériaux et produits potentiellement polluants sur une aire dédiée, l'entretien des véhicules de chantier hors du site et dans des structures adaptées, l'équipement de chacun des véhicules par un kit anti-pollution ainsi que la mise en place d'un plan d'intervention pour prévenir les pollutions accidentelles. Dans ces conditions, et compte-tenu des mesures prévues par les arrêtés d'autorisation, les projets ne peuvent être regardés comme portant une atteinte excessive aux ressources hydrogéologiques et aux eaux souterraines.

46. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de la méconnaissance des intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement doit être écarté.

En ce qui concerne les capacités techniques et financières :

47. Les requérants, qui se sont bornés à soutenir dans leurs requêtes introductives d'instance, après avoir cité les dispositions applicables, qu'" en l'espèce, la société pétitionnaire ne justifie pas disposer des capacités techniques et financières qui lui permettraient d'assumer pleinement l'installation, le fonctionnement et le démantèlement de l'installation en litige " n'ont pas assorti ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

48. Ils n'ont apporté des précisions que postérieurement à l'expiration du délai de deux mois courant après la communication aux parties du premier mémoire en défense. Ces nouveaux moyens sont, compte tenu de ce qui a été dit aux points 10 à 12, irrecevables.

En ce qui concerne les conditions de remise en état du site et le montant des garanties financières :

49. Si les requérants ont fait valoir dans la requête introductive d'instance qu'ils " seront amenés à critiquer " les irrégularités relatives aux " conditions prévues pour la remise du site à l'état naturel " ainsi que " les insuffisances qui affectent, d'une part, les garanties de démantèlement et de remise en état du site et, d'autre part, les mesures mêmes de démantèlement et de remise en état du site ", puis que " le montant de garantie prévu pour le démantèlement de la centrale ne suffit pas à couvrir la totalité du coût que représenterait un démantèlement totale du parc ", ils n'ont assorti ces moyens d'aucune précision suffisante permettant d'en apprécier la portée ou le bien-fondé. Par suite, ces différents moyens doivent être écartés.

En ce qui concerne la compatibilité du projet avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Grand Avallonais :

50. L'autorisation environnementale n'est pas au nombre des décisions dont l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme exige la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité de l'autorisation environnementale avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Grand Avallonais doit être écarté comme inopérant.

51. Il résulte de ce qui précède que les requérants sont seulement fondés à demander à la cour de modifier l'article 2.3.1 de chacun des arrêtés attaqués conformément à ce qui a été dit au point 27 en étendant la période de bridage pour les chiroptères jusqu'au 31 octobre.

Sur les frais liés au litige :

52. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens.

53. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les requérants qui n'ont pas, dans les présentes instances, la qualité de partie perdante, versent à la société Parc éolien du Val Nanté et à la société Parc éolien de la Come Lothereau les sommes qu'elles réclament au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : A l'article 2.3.1 de chacun des arrêtés attaqués la mention portant sur la période de bridage pour les chiroptères " du 15 avril au 15 octobre " est remplacée par " du 15 avril au 31 octobre ".

Article 2 : Le surplus des conclusions présenté par l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein et autres, ainsi que les conclusions présentées par la société Parc éolien du Val Nanté et la société Parc éolien de la Come Lothereau sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Sauvegarde de la Haute Vallée du Serein désignée en qualité de représentante unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Parc éolien du Val Nanté, à la société Parc éolien de la Come Lothereau et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 janvier 2025.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY02959, 23LY002960

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02959
Date de la décision : 09/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

29-035 Energie.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : CATRY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-09;23ly02959 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award