Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 8 juin 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule lui a infligé la sanction disciplinaire du blâme, ensemble la décision du 13 septembre 2021 rejetant son recours gracieux, ainsi que la décision du 5 juillet 2021 par laquelle le maire a engagé une " procédure pécuniaire ", et les titres exécutoires émis en conséquence à son encontre le 15 octobre 2021 par la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Par un jugement n° 2102388 du 23 mars 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 21 mai 2023, et un mémoire en réplique, enregistré le 25 septembre 2024, non communiqué, M. A..., représenté par Me Boussoum, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 23 mars 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 juin 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule lui a infligé la sanction disciplinaire du blâme, la décision du 5 juillet 2021 par laquelle le maire a engagé une " procédure pécuniaire ", la décision du 13 septembre 2021 rejetant son recours gracieux, ainsi que les titres exécutoires du 15 octobre 2021 émis par la commune ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable dès lors que les décisions contestées présentent un lien suffisant ;
- les décisions sont illégales dès lors qu'il disposait d'une autorisation implicite du maire de la commune pour l'exercice de son activité accessoire ;
- l'augmentation du volume horaire de l'activité accessoire ne saurait être regardée comme un changement substantiel dans les conditions d'exercice de celle-ci ;
- le maire pouvait s'opposer à la poursuite de l'activité accessoire sans le sanctionner ;
- il n'a commis aucune faute ;
- la commune ne peut demander le remboursement des sommes dues qu'à compter du 15 octobre 2019 en application de l'article 37-1 alinéa 1 de la loi du 12 avril 2000 ;
- la commune réclame le reversement de sommes qui n'ont pas été perçues, dès lors que les titres exécutoires font état d'une somme totale de 37 536,42 euros alors qu'il n'a perçu que 25 181 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2023, la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule, représentée par Mes Vial et Perrouty, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, à la condamnation de M. A... à lui verser les sommes de 5 796,74 euros pour l'année 2016, 6 304 euros pour l'année 2017, 6 439 euros pour l'année 2018, 6 514 euros pour l'année 2019 et 3 995 euros pour l'année 2020 ;
3°) à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable en l'absence de lien suffisant entre les décisions contestées ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 août 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 ;
- le décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 ;
- le décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique,
- les observations de Me Boussoum, représentant M. A... et celles de Me Vial, représentant la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été recruté par la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule en qualité d'adjoint technique. A compter de l'année 2014 et jusqu'en septembre 2021, il a exercé à titre personnel une activité de professeur de judo pour le compte du Judo Club Saint-Pourçinois. Par un courrier du 27 mai 2021, M. A... a été informé de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre. Par un arrêté du 8 juin 2021, notifié le 10 juin 2021, le maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule lui a infligé la sanction du blâme au motif de l'exercice d'une activité accessoire non autorisée. Le 5 juillet 2021, M. A... a été informé de l'engagement d'une procédure visant au reversement des sommes perçues au titre de l'activité accessoire précitée. Par un courrier du 26 juillet 2021, M. A... a formé un recours gracieux auprès du maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule, qui a été rejeté par une décision du 13 septembre 2021. Le 15 octobre 2021, cinq titres exécutoires ont été émis à son encontre, pour un montant total de 37 536,42 euros. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'ensemble de ces décisions.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Les conclusions d'une requête unique tendant à ce que soient annulées plusieurs décisions sont recevables dans leur totalité si ces décisions présentent entre elles un lien suffisant.
3. M. A... a contesté en première instance l'arrêté du maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule lui infligeant une sanction en raison de l'exercice d'une activité accessoire non autorisée, le courrier l'informant de la volonté de la commune de procéder au reversement des sommes perçues du fait de cet exercice non autorisé de son activité, la décision rejetant le recours gracieux formé contre ces deux actes, et les cinq titres exécutoires qui en ont découlé. Ces décisions, qui sont toutes relatives aux conséquences que la commune a tirées du manquement reproché à M. A..., présentent entre elles un lien suffisant. Par suite, et quand bien même la demande dirigée contre les titres exécutoires relève, par nature, du plein contentieux, la fin de non-recevoir opposée en défense doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version applicable au présent litige, repris ensuite à l'article 25 septies de la même loi puis aux articles L. 121-3, L. 123-1 et L. 123-7 du code général de la fonction publique : " I- Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. / (...) / Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public peuvent toutefois être autorisés à exercer, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, à titre accessoire, une activité, lucrative ou non, auprès d'une personne ou d'un organisme public ou privé, dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui leur sont confiées et n'affecte pas leur exercice ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 mai 2007 relatif au cumul d'activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, alors en vigueur : " Dans les conditions fixées au dernier alinéa du I de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et celles prévues par le présent décret, les fonctionnaires, les agents non titulaires de droit public et les ouvriers régis par le régime des pensions des établissements industriels de l'Etat peuvent être autorisés à cumuler une activité accessoire à leur activité principale, sous réserve que cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service. Cette activité peut être exercée auprès d'une personne publique ou privée. Un même agent peut être autorisé à exercer plusieurs activités accessoires ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Les activités accessoires susceptibles d'être autorisées sont les suivantes : / I.- Dans les conditions prévues à l'article 1er du présent décret : / (...) 2° Enseignement et formation ; (...) ". Aux termes du premier alinéa de son article 4 : " Le cumul d'une activité exercée à titre accessoire mentionnée aux articles 2 et 3 avec une activité exercée à titre principal est subordonné à la délivrance d'une autorisation par l'autorité dont relève l'agent intéressé ". Aux termes de son article 5 : " Préalablement à l'exercice de toute activité soumise à autorisation, l'intéressé adresse à l'autorité dont il relève qui lui en accuse réception, une demande écrite qui comprend les informations suivantes : (...) / 2° Nature, durée, périodicité et conditions de rémunération de cette activité. (...) ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " L'autorité compétente notifie sa décision dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande. / Lorsque l'autorité compétente estime ne pas disposer de toutes les informations lui permettant de statuer sur la demande, elle invite l'intéressé à la compléter dans un délai maximum de quinze jours à compter de la réception de sa demande. Le délai prévu au premier alinéa est alors porté à deux mois. / En l'absence de décision expression écrite contraire dans le délai de réponse mentionné aux premier et deuxième alinéa, l'intéressé est réputé autorisé à exercer l'activité accessoire / L'activité accessoire ne peut être exercée qu'en dehors des heures de service de l'intéressé. ". Aux termes de l'article 7 du même décret en vigueur en 2014, repris dans des termes identiques à l'article 10 du décret du 27 janvier 2017 relatif à l'exercice d'activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d'activités et à la commission de déontologie de la fonction publique puis à l'article 14 du décret du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique : " Tout changement substantiel intervenant dans les conditions d'exercice ou de rémunération de l'activité exercée à titre accessoire par un agent est assimilé à l'exercice d'une nouvelle activité. / L'intéressé doit adresser une nouvelle demande d'autorisation à l'autorité compétente dans les conditions prévues à l'article 5 ". Aux termes de son article 8 : " L'autorité dont relève l'agent peut s'opposer à tout moment à la poursuite d'une activité dont l'exercice a été autorisé, dès lors que l'intérêt du service le justifie, que les informations sur le fondement desquelles l'autorisation a été donnée apparaissent erronées ou que l'activité en cause ne revêt plus un caractère accessoire ".
5. Il résulte des dispositions précitées d'une part, que l'autorité appelée à statuer sur une demande d'autorisation de cumul d'activités à titre accessoire peut fixer le terme d'une telle autorisation et s'opposer à tout moment, dans l'intérêt du service, à la poursuite de l'activité dont l'exercice a été autorisé, d'autre part que l'agent doit solliciter une nouvelle autorisation pour tout changement substantiel intervenant dans les conditions d'exercice ou de rémunération de l'activité qu'il exerce à titre accessoire.
6. Contrairement à ce que M. A... indique, la sanction du blâme qui lui a été infligée par la décision attaquée du 8 juin 2021 est fondée sur l'activité accessoire de professeur de judo qu'il a poursuivie, telle qu'elle a résulté des " différents changements substantiels intervenus ", et non du fait même de l'existence de cette activité, alors d'ailleurs qu'il reconnaît dans ses écritures avoir conclu un contrat de travail de droit privé en septembre 2014 pour exercer son activité pour un volume horaire mensuel de 28,33 heures, porté en septembre 2016 à 37,79 heures, soit environ deux heures de plus par semaine. Toutefois, alors même que la demande d'autorisation d'activité à titre accessoire présentée au mois de juin 2014 par M. A... ne précisait pas ses conditions d'exercice et n'a fait l'objet d'aucune demande de complément de la part de la commune, la seule augmentation, à compter de septembre 2016, du volume horaire de l'activité d'enseignement de cet art martial ne constitue pas, eu égard à son caractère limité et contrairement à ce que la commune a estimé, un changement substantiel dans les conditions d'exercice ou de rémunération qui nécessitait l'octroi d'une nouvelle autorisation de la part de l'autorité compétente afin de permettre à M. A... de cumuler son activité professionnelle principale et cette activité accessoire. En outre, si la commune fait état des effets du changement en litige sur les conditions d'exercice des fonctions de l'agent, chargé d'assurer la sécurité aux horaires fixes et précis de sortie des écoles, elle ne donne aucun élément, qui résulterait notamment des comptes-rendus d'entretien professionnel ou de remarques concernant la manière d'exécuter son service, qui permettrait d'apprécier la pertinence de cette argumentation. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que le maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule a commis une erreur d'appréciation en estimant que les conditions d'exercice de son activité accessoire avaient été substantiellement modifiées en 2016 par rapport à l'autorisation implicite qui a résulté de l'absence de réponse à la demande qu'il avait présentée en 2014, et qu'il la poursuivait ainsi en méconnaissance des dispositions du décret du 2 mai 2007 citées au point 4. Le manquement de M. A... à son obligation de consacrer l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées telle que résultant des articles précités du code général de la fonction publique reprenant les dispositions de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 n'est ainsi pas établi. Il s'ensuit que l'arrêté du 8 juin 2021 du maire de la commune prononçant la sanction du blâme à son encontre est entaché d'erreur dans la qualification juridique des faits et doit être annulé pour ce motif.
7. En deuxième lieu, aux termes du V de l'article 25 puis du VI de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983, désormais repris à l'article L. 123-9 du code général de la fonction publique : " (...) la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes perçues au titre des activités interdites, par voie de retenue sur le traitement. ", ces dispositions s'appliquant sans préjudice de l'engagement de poursuites disciplinaires.
8. Il résulte des considérations retenues au point 6 que M. A... est fondé à soutenir qu'en l'absence de faute, les titres exécutoires qu'il conteste sont entachés d'illégalité et doivent par conséquent être annulés, ainsi que la décision du 13 septembre 2021 rejetant son recours gracieux. Il y a également lieu de le décharger du paiement de ces sommes.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête dirigés contre l'ensemble des actes attaqués, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Pour les mêmes motifs que ceux fondant la décharge des sommes mises à la charge de M. A... par les titres exécutoires, les conclusions subsidiaires de la commune tendant à la condamnation de ce dernier au paiement de sommes perçues au titre des activités accessoires ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule. Dans les circonstances de l'espèce et en application de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune une somme de 2 000 euros.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 23 mars 2023, l'arrêté du 8 juin 2021, la décision du 5 juillet 2021 et la décision du 13 septembre 2021 du maire de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule, ainsi que les cinq titres exécutoires émis par la commune le 15 octobre 2021 à l'encontre de M. A... sont annulés. M. A... est déchargé du paiement des sommes correspondant à ces titres exécutoires, pour un montant total de 37 536,42 euros.
Article 2 : La commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions subsidiaires de la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Copie en sera adressée à la direction départementale des finances publiques de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2025.
La rapporteure,
Emilie FelmyLe président,
Jean-Yves TallecLa greffière,
Péroline Lanoy
La République mande et ordonne à la préfète de l'Allier en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY01758