La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/01/2025 | FRANCE | N°24LY01870

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 23 janvier 2025, 24LY01870


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme B... D... épouse E..., représentée par la SELARL Roxane Vigneron, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 28 février 2023 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son époux, M. A... E..., d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui accorder le bénéfice du regroupement familial et de délivrer à M. A... E... un titre de séjour, de réexaminer sa demande et de mettre à la cha

rge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... D... épouse E..., représentée par la SELARL Roxane Vigneron, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 28 février 2023 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au bénéfice de son époux, M. A... E..., d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui accorder le bénéfice du regroupement familial et de délivrer à M. A... E... un titre de séjour, de réexaminer sa demande et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Par un jugement n° 2303935 du 29 avril 2024, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du préfet de l'Isère du 28 février 2023 (article 1er), lui a enjoint de réexaminer la demande de regroupement familial de Mme E... dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement (article 2) et a rejeté le surplus de la demande (articles 3 et 4).

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2024, la SELARL Roxane Vigneron demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement rejetant ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser au titre des frais exposés et non compris dans les dépens de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour défaut de motivation ;

- l'équité et la situation économique de la partie perdante ne pouvaient pas faire obstacle à l'application combinée des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La préfète de l'Isère, qui a reçu communication de la requête, n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pruvost, président,

- et les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... épouse E..., ressortissante marocaine née le 20 juin 1985, titulaire d'une carte de résident valable du 3 mai 2016 au 2 mai 2026, a sollicité, le 20 avril 2022, une autorisation de regroupement familial au bénéfice de son époux, M. A... E..., avec lequel elle s'est mariée le 26 mars 2022. Par une décision du 28 février 2023, le préfet de l'Isère a refusé de faire droit à sa demande. Par un jugement du 29 avril 2024, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision pour vice de procédure en l'absence de consultation pour avis du maire de la commune de résidence de la requérante, a enjoint au préfet de l'Isère de réexaminer sa demande de regroupement familial et a rejeté le surplus de la demande, notamment les conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat à verser la SELARL Roxane Vigneron au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. La SELARL Roxane Vigneron relève appel de ce jugement en tant seulement qu'il n'a pas fait droit aux conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat à son profit au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

2. Il résulte de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 que, dans le cas où le juge administratif ne fait pas droit aux conclusions présentées, sur le fondement de cet article, par l'avocat d'un bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, cet avocat a seul qualité pour exercer une voie de recours contre le rejet, total ou partiel, de ces conclusions. Cette voie de recours est identique à celle ouverte au principal, dont les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont l'accessoire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

4. Le tribunal administratif a suffisamment motivé son jugement en son point 7 en mentionnant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par Me Vigneron sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas motivé doit être écarté.

Sur les frais liés à la première instance :

5. Aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) ".

6. L'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Il appartient dans tous les cas au juge d'apprécier, en fonction des circonstances de l'espèce, s'il y a lieu de faire droit à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions.

7. Mme E..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale dans l'instance engagée devant le tribunal administratif, doit être regardée comme la partie gagnante dans l'instance devant le tribunal administratif. En l'absence de circonstances particulières ressortant des pièces du dossier de première instance, la SELARL Roxane Vigneron, avocate de Mme E..., qui disposait d'un droit propre à obtenir le bénéfice des frais exposés et non compris dans les dépens dus par la partie perdante et a demandé, à ce titre, une somme de 2 000 euros en première instance, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SELARL Roxane Vigneron renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qu'elle demande en appel au titre des frais exposés et non compris dans les dépens au titre de la première instance.

Sur les frais liés à l'instance d'appel :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au bénéfice de la SELARL Roxane Vigneron, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 4 du jugement n° 2303935 du tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2024 est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à la SELARL Roxane Vigneron, au titre de l'instance n° 2303935 devant le tribunal administratif de Grenoble, une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que la SELARL Roxane Vigneron renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : L'Etat versera à la SELARL Roxane Vigneron, au titre de l'instance d'appel, une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Roxane Vigneron et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 janvier 2025.

Le président-rapporteur,

D. PruvostLe président-assesseur,

X. Haïli

La greffière,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01870


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01870
Date de la décision : 23/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-05-09 Procédure. - Jugements. - Frais et dépens. - Aide juridictionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : VIGNERON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-23;24ly01870 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award