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13/02/2025 | FRANCE | N°24LY02832

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 13 février 2025, 24LY02832


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à défaut de surseoir à statuer jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Lyon se soit prononcé sur sa nationalité, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel il pourrait être éloigné d'office.



Par un j

ugement n° 2402766 du 30 août 2024, le tribunal a rejeté sa demande.





Procédures devant la cour



I- P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à défaut de surseoir à statuer jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Lyon se soit prononcé sur sa nationalité, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2402766 du 30 août 2024, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour

I- Par une requête enregistrée le 4 octobre 2024, M. C..., représenté par Me Firmin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Lyon se soit prononcé sur sa situation et d'enjoindre à la préfète, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2023 et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer une carte de séjour portant la mention, à titre principal, " vie privée et familiale ", ou, à titre subsidiaire la mention salarié ou étudiant ou travailleur temporaire, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- son appel est recevable ;

- la question de sa nationalité française au regard de l'article 21-12 du code civil est une question sérieuse ; il disposait d'un délai de six mois pour contester le refus d'enregistrement de sa déclaration d'acquisition de la nationalité française par le tribunal de proximité de Villeurbanne le 29 décembre 2023, soit jusqu'au 29 juin 2024 et a assigné le procureur de la République dans ce délai ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les articles L. 435-3, L. 422-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination sont illégales du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La préfète du Rhône à laquelle la requête a été communiquée, n'a pas présenté d'observations.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2024.

II- Par une requête enregistrée le 4 octobre 2024 sous le n° 24LY02833, M. C..., représenté par Me Firmin, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) de surseoir à l'exécution du jugement n° 2402766 du 30 août 2024 du tribunal administratif de Lyon sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que l'exécution du jugement aurait des conséquences difficilement réparables et que les moyens qu'il présente sont sérieux.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 novembre 2024.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- et les observations de Me Devaux, substituant Me Firmin, pour M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant albanais né le 22 septembre 2005, entré en France le 23 janvier 2020 et confié à l'aide sociale à l'enfance, a demandé, à sa majorité, la délivrance d'un titre de séjour. Il relève appel du jugement du 30 août 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 19 décembre 2023 de la préfète du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays vers lequel il pourrait être éloigné d'office sous le n° 24LY02832 et demande le sursis à exécution de ce jugement sous le n° 24LY02833.

2. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont dirigées contre le même jugement, pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la requête n° 24LY02832 :

En ce qui concerne les conclusions aux fins de sursis à statuer :

3. Aux termes de l'article L. 110-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sont considérées comme étrangers au sens du présent code les personnes qui n'ont pas la nationalité française, soit qu'elles aient une nationalité étrangère, soit qu'elles n'aient pas de nationalité ". Aux termes de l'article 21-12 du code civil : " (...) Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité française : / 1° L'enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l'aide sociale à l'enfance ; / (...). ". Aux termes de l'article 26-3 du même code : " Le ministre ou le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire refuse d'enregistrer les déclarations qui ne satisfont pas aux conditions légales. / Sa décision motivée est notifiée au déclarant qui peut la contester devant le tribunal judiciaire durant un délai de six mois. (...) / La décision de refus d'enregistrement doit intervenir six mois au plus après la date à laquelle a été délivré au déclarant le récépissé constatant la remise de toutes les pièces nécessaires à la preuve de recevabilité de la déclaration. / (...). " Aux termes de l'article 26-4 de ce code : " A défaut de refus d'enregistrement dans les délais légaux, copie de la déclaration est remise au déclarant revêtue de la mention de l'enregistrement. / (...). ". Aux termes de l'article 26-5 dudit code : " Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa (1°) de l'article 23-9, les déclarations de nationalité, dès lors qu'elles ont été enregistrées, prennent effet à la date à laquelle elles ont été souscrites. ". Selon les termes de l'article 29 du même code : " La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques. / Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif ou judiciaire à l'exception des juridictions répressives comportant un jury criminel. ". Enfin, aux termes de l'article 30 de ce code : " La charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. / Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants. ". Il résulte de ces dispositions que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause sauf s'il est titulaire d'un certificat de nationalité française, et que l'exception de nationalité ne constitue une question préjudicielle que si elle présente une difficulté sérieuse.

4. Aux termes de l'article R. 771-2 du code de justice administrative : " Lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, la juridiction administrative initialement saisie la transmet à la juridiction judiciaire compétente. Elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a souscrit le 12 juillet 2023 devant le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal de proximité de Villeurbanne, une déclaration de nationalité fondée sur les dispositions précitées de l'article 21-12 du code civil. Dans le délai prévu par les dispositions également précitées de l'article 26-3 et avant que n'intervienne la mesure prévue par l'article 26-4 du même code, cette autorité a refusé d'enregistrer cette déclaration par une décision prise le 29 décembre 2023 aux motifs, d'une part, que l'acte de naissance produit ne comportait pas la date de délivrance de la copie certifiée conforme et que son apostille était incorrecte puisque l'acte n'a pas été signé électroniquement et, d'autre part, que s'agissant du certificat de naissance multilingue, le nom et la qualité de la personne qui a procédé à la signature électronique de l'acte fait défaut de sorte que l'apostille est rendue impossible et que, subsidiairement, ce certificat ne comporte pas les mentions substantielles pour être qualifié d'acte d'état-civil.

6. Ainsi, faute d'un tel enregistrement, M. C... ne peut pas être regardé comme bénéficiant de la nationalité française. M. C... a assigné le procureur de la République devant le juge judiciaire pour contester ce refus d'enregistrement. Si le requérant fait notamment valoir dans l'assignation qu'il a jointe à sa requête que la copie de l'acte de naissance a été délivrée par M. A..., officier d'état-civil de la préfecture de Vlora et que l'authenticité de la signature de ce dernier est attestée par la préfecture de Vlora, l'apostille du ministère de l'Europe et des affaires étrangères vise un acte signé électroniquement par la direction générale de l'état-civil, ce qui n'est manifestement pas le cas de l'acte qui a été revêtu de l'apostille. Dans ces conditions, et alors qu'il est constant que l'autre acte produit par M. C... ne constitue pas une copie de son acte de naissance, l'apostille n'authentifie pas la personne qui a délivré cet acte et M. C... ne justifie pas qu'il existerait une difficulté sérieuse sur la question de sa nationalité justifiant de surseoir à statuer.

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et d'astreinte :

7. M. C... reprend en appel les moyens tirés de ce que le refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 423-22, L. 435-3, L. 422-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article L. 423-23 de ce code et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, que la décision fixant le délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination sont illégales du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français et que la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu, par adoption des motifs du tribunal d'écarter ces moyens.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction doivent, par suite, être rejetées.

Sur la requête n° 24LY02833 :

9. Le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement du 30 août 2024 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 24LY02833 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les frais d'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. C... ou à son conseil une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la requête n° 24LY02833.

Article 2 : La requête n° 24LY02832 et le surplus des conclusions de la requête n° 24LY02833 sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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N° 24LY02832, 24LY02833

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02832
Date de la décision : 13/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : FIRMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-13;24ly02832 ?
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