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03/04/2025 | FRANCE | N°23LY02659

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 03 avril 2025, 23LY02659


Vu la procédure suivante :



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 août 2023 et 24 juin 2024, non communiqué, l'association Les Robins des Mâts, l'association Comité sancerrois patrimoine mondial, l'association Fédération Patrimoine environnement, le Bureau interprofessionnel des vins du Centre, le syndicat viticole de Pouilly, la commune de Pouilly-sur-Loire, la commune de Saint-Andelain, la commune de Sancerre, la commune de Suilly-la-Tour, M. M... et Mme AS... AL..., M. J... et Mme AT... AC..., M. B... et Mme

AY... V..., M. AJ... et Mme AX... I..., Mme A... K..., M. E... AM... et Mme L... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 août 2023 et 24 juin 2024, non communiqué, l'association Les Robins des Mâts, l'association Comité sancerrois patrimoine mondial, l'association Fédération Patrimoine environnement, le Bureau interprofessionnel des vins du Centre, le syndicat viticole de Pouilly, la commune de Pouilly-sur-Loire, la commune de Saint-Andelain, la commune de Sancerre, la commune de Suilly-la-Tour, M. M... et Mme AS... AL..., M. J... et Mme AT... AC..., M. B... et Mme AY... V..., M. AJ... et Mme AX... I..., Mme A... K..., M. E... AM... et Mme L... AI..., M. C... et Mme T... I..., M. AP... Q..., M. N... et Mme H... W..., M. AH... P... et Mme D... G..., M. O... et Mme Y... BA..., Mme AZ... AQ..., M. AK... AB..., M. AA... et Mme AO... AG..., M. U... et Mme R... AU..., M. C... et Mme Z... AE..., le groupement foncier agricole du Domaine de Favray, la SCEA Château Favray, M. AF... et Mme AV... F..., M. S... et Mme BB... AR..., la SCEA AD... AN..., M. AD... AN..., l'EARL Mauroy Gauliez et la SARL Château de Tracy - Comtesse C... X..., représentés par Me Echezar, demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Nièvre a refusé de suspendre l'exécution de l'arrêté du 29 novembre 2017 ayant accordé à la société RES, devenue la société Q Energy France, l'autorisation unique d'exploiter un parc éolien composé de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Saint-AF...-sur-Nohain et de Saint-Laurent l'Abbaye le temps que cette dernière obtienne une dérogation à la destruction de la grue cendrée ;

2°) de suspendre ladite autorisation ou d'enjoindre au préfet de la Nièvre de suspendre l'autorisation environnementale dans l'attente de l'obtention de la dérogation à la destruction d'espèces protégées ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'annulation de l'autorisation environnementale en tant que n'a pas été mis en œuvre le régime de la dérogation prévu à l'article L. 411-2 du code de l'environnement pour la grue cendrée implique que le préfet suspende, sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, l'exploitation de l'installation en cause ;

- la cour peut, dans le cadre de ses pouvoirs de plein contentieux, directement prononcer la suspension de l'exécution de l'autorisation.

Par un mémoire enregistré le 21 mai 2024, le préfet de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les conclusions aux fins de suspension, qui n'ont pas été présentées dans le cadre d'un référé suspension et ne peuvent être rattachées aux pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, que la cour a implicitement refusés de mettre en œuvre dans son arrêt du 9 mars 2023, sont irrecevables ;

- les dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement ne sont applicables qu'aux installations en fonctionnement ou celles dont les travaux ont débuté, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

La société Q Energy France à laquelle la requête a été communiquée n'a pas présenté d'observations.

Par une ordonnance du 21 mai 2024, l'instruction a été close en dernier lieu au 24 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public,

- et les observations de Me Cambus pour la société Q Énergy France ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 29 novembre 2017 le préfet de la Nièvre a délivré à la société RES, devenue la société Q Énergy France, l'autorisation unique d'exploiter un parc éolien composé de huit aérogénérateurs et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Saint-Quentin-sur-Nohain et de Saint-Laurent l'Abbaye. A la suite de jugements avant-dire droit rendus par le tribunal administratif de Dijon à la demande de l'association Les Robins des Mâts et autres les 11 mai 2020 et 2021, le préfet de la Nièvre a pris des arrêtés modificatifs d'autorisation les 16 mars 2021 et 23 novembre 2021. Par jugement du 7 février 2022, le tribunal administratif de Dijon a annulé les arrêtés du préfet de la Nièvre des 29 novembre 2017, 16 mars et 23 novembre 2021. Par un arrêt du 9 mars 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé les jugements des 11 mai 2020, 11 mai 2021 et 7 février 2022 et l'arrêté du 29 novembre 2017 uniquement en tant que n'a pas été mis en œuvre le régime de la dérogation prévu à l'article L. 411-2 du code de l'environnement pour la grue cendrée. Par une décision n° 473862, 473954 du 20 décembre 2024, le Conseil d'Etat a, d'une part, rejeté le pourvoi formé par la société Q Energy France contre l'arrêt et, d'autre part, sur pourvoi de l'association et autres, annulé l'arrêt du 9 mars 2023 en tant seulement qu'il concerne la dérogation " espèces protégées ", pour insuffisance de motivation, faute d'avoir répondu au moyen tiré de ce que la société pétitionnaire aurait dû solliciter une dérogation " espèces protégées " au titre des dispositions du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en ce qui concerne les chiroptères et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour.

2. Par courrier reçu le 11 avril 2023, l'association Les Robins des Mâts a demandé au préfet de la Nièvre de suspendre l'autorisation dans l'attente de l'obtention de la dérogation pour la grue cendrée. L'association Les Robins des Mâts et autres demandent à la cour d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet a rejeté leur demande, de suspendre l'exécution de l'autorisation ou d'enjoindre au préfet de prononcer une telle suspension.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction :

3. Aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement : " I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. Elle peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages, l'utilisation des objets et dispositifs ou la poursuite des travaux, opérations, activités ou aménagements jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification, à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent. L'autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne mise en demeure (...) ".

4. Il résulte des dispositions des articles L. 171-7 et L. 171-8 du code de l'environnement que lorsqu'il a été constaté soit que des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou que des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation ou de la déclaration requise en application du même code ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, soit l'inobservation des prescriptions applicables à ces installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, le préfet est tenu d'édicter une mise en demeure de régulariser la situation ou de satisfaire à ces prescriptions dans un délai qu'il détermine. Il peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages.

5. Le préfet de la Nièvre a indiqué, sans que cela ne soit contesté, que le parc, dont les travaux de réalisation n'ont pas débuté, n'est pas exploité. Dans ces conditions, le préfet ne peut faire usage, à l'encontre de la société Q Énergy France, des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 171-7 du code de l'environnement. Par suite, les conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de la Nièvre a refusé de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient de cet article, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de prendre une telle décision, ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin de suspension de l'autorisation :

6. Compte tenu de ce qui a été indiqué précédemment, la demande présentée par l'association tendant à ce que la cour, dans le cadre de ses pouvoirs de plein contentieux, ordonne, en lieu et place du préfet, la suspension de l'autorisation, sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, ne peut qu'être rejetée.

7. À supposer que l'association ait par ailleurs entendu demander à la cour de faire application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, selon lequel, lorsque le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, qu'un vice n'affecte qu'une partie de cette autorisation et limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demande à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction sur la partie qui a été entachée d'irrégularité, et qu'en pareil cas, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées, de telles conclusions sont irrecevables dans la présente instance qui ne porte pas par elle-même sur l'autorisation environnementale.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Les Robins des Mâts et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les Robins des Mâts, désignée en qualité de représentante unique des requérants, à la société Q Energy France et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2025, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre,

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure,

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

M. AW...

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY02659

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02659
Date de la décision : 03/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

29-035 Energie.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : LPA LAW

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-03;23ly02659 ?
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