Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Le syndicat CFDT Interco du Rhône a demandé au tribunal administratif de Lyon d'une part, d'annuler la délibération du 26 avril 2021 de la commission permanente du conseil de la métropole de Lyon relative au télétravail, en tant que celle-ci ne prévoit pas de donner aux agents concernés les moyens nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, d'autre part d'enjoindre à la métropole de Lyon d'adopter une nouvelle délibération relative au télétravail prévoyant la prise en charge des frais inhérents au télétravail dans un délai de six mois, et de modifier en conséquence la convention relative au télétravail.
Par un jugement n° 2105090 du 3 août 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 octobre 2022 et 21 juillet 2023, le syndicat CFDT Interco du Rhône, représenté par Me Di Nicola, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 août 2022 ;
2°) d'annuler la délibération du 26 avril 2021 de la commission permanente du conseil de la métropole de Lyon relative au télétravail en tant que celle-ci ne prévoit pas de donner aux agents concernés les moyens, autres que ceux qu'elle mentionne, nécessaires à l'exercice de leurs fonctions en télétravail ;
3°) d'enjoindre à la métropole de Lyon d'adopter une nouvelle délibération relative au télétravail prévoyant la prise en charge de l'ensemble des frais estimés inhérents au télétravail dans un délai de six mois, et de modifier en conséquence la convention relative au télétravail ;
4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la délibération critiquée ne précise pas les modalités de prise en charge des coûts induits par le télétravail, en méconnaissance du décret du 11 février 2016 ;
- elle est entachée d'incompétence négative dès lors qu'elle renvoie la fixation des modalités de prise en charge des frais inhérents au télétravail à une convention ;
- elle méconnaît le décret du 11 février 2016 et le principe d'égalité en exigeant des agents en télétravail de fournir des moyens personnels, dans un espace dédié, sans bénéficier des titres-restaurant et sans compensation des frais fixes inhérents au télétravail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2023, la métropole de Lyon, représentée par Me Prouvez, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la cour n'est pas compétente pour connaître des conclusions de la requête relatives à la légalité de la délibération en tant qu'elle porte sur la question des tickets-restaurants ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un arrêt n° 22LY02883 du 26 juin 2024, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions en annulation de la délibération en cause, en tant que cet acte concernait l'absence de délivrance de titres-restaurant pour les agents en télétravail, et a rejeté le surplus des conclusions d'appel présentées par le syndicat CFDT Interco du Rhône.
Par une décision du 30 décembre 2024, le Conseil d'Etat a attribué à la cour le jugement des conclusions d'appel du syndicat CFDT Interco du Rhône qu'elle lui avait renvoyées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2025, la métropole de Lyon maintient ses conclusions tendant au rejet de cette partie du litige.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 février 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 février 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code du travail ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;
- l'ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967 ;
- le décret n° 2016-151 du 11 février 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Rémy-Néris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Rey, représentant la métropole de Lyon.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 26 avril 2021, la commission permanente du conseil de la métropole de Lyon a approuvé les conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail des agents de cette collectivité. Le syndicat CFDT Interco du Rhône a relevé appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 août 2022 qui a rejeté sa demande d'annulation de cette délibération, en tant qu'elle ne prévoit pas les moyens qu'il estime devoir être alloués aux agents pour effectuer leurs missions en télétravail. Par un arrêt n° 22LY02883 du 26 juin 2024, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions en annulation de la délibération en cause, en tant que cet acte concernait l'absence de délivrance de titres-restaurant pour les agents en télétravail et a rejeté le surplus des conclusions d'appel. Par une décision du 30 décembre 2024, le Conseil d'Etat, après avoir relevé que les conclusions de la demande d'annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 26 avril 2021 de la commission permanente du conseil de la métropole de Lyon ne constituent pas, y compris en tant que cette délibération ne prévoit pas la délivrance de titres-restaurant aux agents en télétravail, un litige portant sur l'attribution ou le versement d'une prestation ou d'une allocation ou la reconnaissance d'un droit au titre de l'action sociale, a attribué à la cour le jugement de ces conclusions.
2. Aux termes de l'article 9 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, désormais repris à l'article L. 731-1 et au premier alinéa de l'article L. 761-3 du code général de la fonction publique : " (...) L'action sociale, collective ou individuelle, vise à améliorer les conditions de vie des agents publics et de leurs familles, notamment dans les domaines de la restauration, du logement, de l'enfance et des loisirs, ainsi qu'à les aider à faire face à des situations difficiles. / (...) Les prestations d'action sociale, individuelles ou collectives, sont distinctes de la rémunération visée à l'article 20 de la présente loi et sont attribuées indépendamment du grade, de l'emploi ou de la manière de servir ".
3. D'une part, aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 1222-9 du code du travail : " (...) le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication ". Aux termes de l'article 133 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dont le principe est désormais repris à l'article L. 430-1 du code général de la fonction publique : " Les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L. 1222-9 du code du travail. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public. " Pour l'application de ces dispositions, l'article 6 du décret du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature dispose que : " Les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que les agents exerçant sur leur lieu d'affectation. / L'employeur prend en charge les coûts découlant directement de l'exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 19 de l'ordonnance du 27 septembre 1967 relative à l'aménagement des conditions de travail en ce qui concerne le régime des conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurants : " Les collectivités publiques et leurs établissements peuvent attribuer le titre-restaurant : / - dans le cas où ils n'ont pas mis en place de dispositif propre de restauration collective, aux agents qu'ils ne peuvent pas faire bénéficier, par contrat passé avec un ou plusieurs gestionnaires de restaurants publics ou privés, d'un dispositif de restauration compatible avec la localisation de leur poste de travail ;/ - dans le cas où ils ont mis en place un dispositif propre de restauration collective, aux agents qu'ils ne peuvent faire bénéficier, compte tenu de la localisation de leur poste de travail, ni de ce dispositif, ni d'un dispositif de restauration mis en place par contrat passé avec un ou plusieurs gestionnaires de restaurants publics ou privés ". Le nouvel article L. 732-2 du code général de la fonction publique, relatif aux tickets-restaurant, relève du titre de ce code consacré à l'action sociale des collectivités publiques.
5. En l'état des dispositions du décret du 11 février 2016 citées au point 3, lorsqu'une administration décide d'attribuer le bénéfice des titre-restaurants à ses agents dans les conditions prévues au point 4, les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient du même droit à l'attribution de ces titres que s'ils exerçaient leurs fonctions sur leur lieu d'affectation.
6. Il ressort des pièces du dossier que la délibération en litige a pour objet l'évolution des modalités de télétravail, établies par une précédente délibération du 4 novembre 2019. Elle précise, conformément aux dispositions de l'article 7 du décret du 11 février 2016, les activités éligibles au télétravail, les règles à respecter tant en matière de sécurité des systèmes d'information qu'en matière de temps de travail, les modalités de contrôle et de comptabilisation du temps de travail ou encore la quotité de télétravail autorisée. Le point 7 de la délibération concerne les modalités de prise en charge par l'employeur des coûts découlant directement de l'exercice du télétravail. En revanche, cet acte n'a ni pour objet ni pour effet d'organiser la délivrance des titres-restaurants durant les périodes de télétravail des agents, dont le régime relève de l'action sociale de la collectivité publique en cause et ne se rapporte pas à l'organisation du télétravail des agents. Par suite, les moyens invoqués par le syndicat requérant à l'encontre de la délibération du 26 avril 2021, tirés de ce que la délibération en litige ne préciserait pas les modalités de prise en charge des coûts induits par le télétravail en méconnaissance de l'article 19 de l'ordonnance du 27 septembre 1967 et des articles 6 et 7 du décret du 11 février 2016, qu'elle serait entachée d'incompétence négative dès lors qu'elle renvoie la fixation des modalités de prise en charge des frais inhérents au télétravail à une convention et qu'elle méconnaitrait le principe d'égalité, sont inopérants et doivent être écartés.
7. Il résulte de ce qui précède que le syndicat CFDT Interco du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions en annulation de la délibération précitée, en tant que cet acte concernerait l'absence de délivrance de titres-restaurant pour les agents en télétravail. Il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Les conclusions de la requête du syndicat CFDT Interco du Rhône tendant à l'annulation de la délibération du 26 avril 2021 en tant qu'elle ne prévoit pas la délivrance de titres-restaurant aux agents en télétravail sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CFDT Interco du Rhône et à la métropole de Lyon.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2025.
La rapporteure,
Emilie FelmyLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Michèle Daval
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY03649