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17/04/2025 | FRANCE | N°23LY03986

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 17 avril 2025, 23LY03986


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme C... et A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2201211 du 24 octobre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour



Par une

requête et un mémoire enregistrés les 29 décembre 2023 et 16 octobre 2024, M. et Mme B..., représentés par Me Aujoulat, de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C... et A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2201211 du 24 octobre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 décembre 2023 et 16 octobre 2024, M. et Mme B..., représentés par Me Aujoulat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la proposition de rectification du 10 décembre 2019 est insuffisamment motivée ;

- les détournements de fonds sociaux commis au préjudice de la SARL Marcouly étaient imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, dès lors que M. B... n'était pas dirigeant de fait de cette société ;

- à titre subsidiaire, l'administration n'était pas fondée à appliquer aux revenus distribués la majoration de 1,25 prévue par le 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts ;

- la substitution de base légale demandée par l'administration les priverait de la possibilité de demander la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, en méconnaissance de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er juillet et 4 novembre 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, les sommes imposées en tant que revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts peuvent être maintenues sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Moya, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Seigne pour M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du tribunal correctionnel de Cahors du 28 juin 2018, M. B... a été condamné pour avoir fait, de mauvaise foi, usage des biens et du crédit de son employeur, la société à responsabilité limitée (SARL) Marcouly, qu'il savait contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser d'autres sociétés. M. B... et son épouse ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration a réintégré dans leurs revenus imposables les sommes indûment supportées par la SARL que l'administration a regardées comme des revenus distribués imposables entre leurs mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. M. et Mme B... ont, en conséquence, été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013, assorties de la majoration de 80 % prévue au c de l'article 1729 du même code. Ils relèvent appel du jugement du 24 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et majorations.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : "'L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...).'"'Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : "'La proposition de rectification prévue par l'article L 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...).'".

3. Si la proposition de rectification du 10 décembre 2019 cite notamment les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, il résulte de ses termes que le service a fondé les rectifications litigieuses sur le c de l'article 111 du même code. Il suit de là que la proposition de rectification adressée à M. et Mme B... était, contrairement à ce qu'ils soutiennent, suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. / (...). ". Aux termes de l'article 111 de ce code : " Sont notamment considérés comme des revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...). ".

5. Il résulte de l'instruction que M. B... a fait supporter à la SARL Marcouly dont il était salarié, des factures correspondant à des travaux réalisés à son domicile personnel. Ses fonctions de directeur d'agence ne lui conféraient pas la qualité de dirigeant ou de mandataire social de cette société et il ne résulte pas de l'instruction que ses dirigeants, associés ou mandataires sociaux ont eu effectivement connaissance des détournements commis par l'intéressé. Les manœuvres de celui-ci, qui demandait à des entreprises d'émettre des faux bons de commandes et des fausses factures pour des travaux dont il bénéficiait personnellement, sur lesquels étaient mentionnées des interventions en lien avec la réhabilitation d'une carrière dont la SARL Marcouly lui avait confié la charge, étaient habilement mises en œuvre et difficiles à détecter et étaient de nature à abuser le service comptable de la société. Ces circonstances ne révèlent pas un comportement délibéré ou une carence manifeste de ses dirigeants dans son organisation ou dans la mise en œuvre des dispositifs de contrôle qui seraient à l'origine, directe ou indirecte, des détournements. Dans ces conditions, M. et Mme B... sont fondés à soutenir que les sommes litigieuses sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts, et ne pouvaient par conséquent être imposées dans celle des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts.

6. Toutefois, l'administration est en droit à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée par elle, dès lors que cette substitution peut être faite sans méconnaître les règles de la procédure d'imposition. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour de substituer, pour l'imposition des sommes en litige, au fondement erroné du c de l'article 111 du code général des impôts, celui de l'article 92 du même code.

7. Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / (...) / 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2. ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) / 3° Si le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 ; / (...). ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 de ce livre : " (...) L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable ou la personne morale mentionnée à la première phrase du présent alinéa n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. ".

8. L'activité de détournement de fonds à laquelle s'est livré M. B... est illicite. Ce dernier n'a pas déposé les déclarations qu'il était tenu de souscrire et n'a pas non plus fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. Par suite, l'administration était en droit de suivre la procédure d'évaluation d'office, en application des dispositions du 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, sans adresser au contribuable une mise en demeure préalable. En raison de cette situation d'évaluation d'office, M. et Mme B... ne peuvent utilement soutenir que la substitution de base légale demandée par le ministre les priverait de la garantie tenant à la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et ils ne peuvent obtenir, par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction de l'imposition qu'ils contestent qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases d'imposition, ce qu'ils ne font pas.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Leur requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... B... et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Michel, présidente de chambre,

Mme Vinet, présidente-assesseure,

M. Moya, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 avril 2025.

Le rapporteur,

P. MoyaLa présidente,

C. Michel

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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