Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 28 avril 2022 portant refus de nomination en qualité d'agent administratif des finances publiques stagiaire à la suite de sa réussite au concours de recrutement organisé au titre de l'année 2022.
Par un jugement n° 2201695 du 7 mai 2024, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 juillet 2024, Mme B..., représentée par Me Kovak, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision susmentionnée ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et du numérique, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre principal, de procéder à sa nomination avec toutes les conséquences administratives et financières en découlant, à compter d'un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision est entachée d'erreur d'appréciation en ce qu'elle s'appuie sur des faits anciens, isolés, intervenus il y a plus de dix ans, avant qu'elle n'intègre l'administration et alors qu'elle était sous l'emprise de son ancien compagnon ; ils n'ont pas fait l'objet d'une inscription au casier judiciaire ; son comportement est depuis irréprochable et elle avait les compétences et qualités requises.
Par un mémoire enregistré le 9 janvier 2025, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Par renvoi à ses écritures de première instance, il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 3 janvier 2025, l'instruction a été close au 17 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boffy, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B... a été nommée le 4 octobre 2015 agente administrative des finances publiques et a été affectée à la paierie départementale de l'Yonne à compter du 1er septembre 2017. Par un arrêté du 23 novembre 2020, le directeur général des finances publiques a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de révocation en raison d'un manquement grave à l'obligation de probité. La requête de Mme B... contre cet arrêté a été rejetée par jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 janvier 2022. Mme B... s'est à nouveau présentée au concours d'agent administratif des finances publiques, auquel elle a été admise. Par une décision du 28 avril 2022, le directeur général des finances publiques a refusé de prononcer sa nomination en qualité d'agent administratif des finances publiques stagiaire. Par un jugement du 7 mai 2024, dont Mme B... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande dirigée contre cette décision.
2. Aux termes de l'article L. 321-1 du code général de la fonction publique : " Sous réserve des dispositions des articles L. 321-2 et L. 321-3, nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire : (...) 3° Le cas échéant, si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions ; (...) ". Si ces dispositions retiennent comme critère d'appréciation des conditions générales requises pour l'accès à la fonction publique, le fait, le cas échéant, que les mentions portées au bulletin n° 2 du casier judiciaire du candidat ne sont pas incompatibles avec l'exercice des fonctions, elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité compétente apprécie, dans l'intérêt du service, compte tenu de la nature des fonctions auquel l'intéressé postule et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, s'il présente les garanties requises.
3. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 17 décembre 2019 non frappé de cassation, devenu définitif, Mme B... a été condamnée à une peine d'emprisonnement de deux ans avec sursis et au paiement d'une amende de quinze mille euros pour s'être rendue coupable de complicité de tentative d'escroquerie réalisée en bande organisée, d'usage de faux dans un document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité ou accordant une autorisation, et de vol dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt, pour des faits commis du 1er novembre 2014 au 13 août 2015, alors qu'elle était employée de banque. Si Mme B... indique que ces faits sont anciens, il apparaît toutefois que l'administration n'a eu connaissance effective de leur réalité, de leur nature et de leur ampleur, au plus tôt, que lors de la transmission par la justice de l'extrait de la décision pénale du tribunal correctionnel de Montargis, édité le 5 juillet 2017 et que l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, mentionné plus haut, est intervenu moins de deux ans avant la décision en litige. Par ailleurs, si ces faits ont été commis avant l'intégration de l'intéressée au sein de l'administration, il ressort cependant des pièces du dossier que, comme l'a relevé le tribunal correctionnel de Montargis, elle a préparé le concours externe d'agent administratif en même temps qu'elle commettait les infractions pour lesquelles elle a été condamnée. Sa condamnation est ainsi intervenue pour des faits qui se sont déroulés du 1er novembre au 13 août 2015, alors qu'elle a rejoint l'administration le 4 octobre 2015, soit moins de deux mois plus tard. Enfin, ni sa jeunesse ni l'emprise dont elle affirme avoir été victime de la part de son compagnon d'alors ne sauraient suffire, d'après les pièces du dossier, à spécialement atténuer le rôle qu'elle a pu jouer dans ces infractions alors que, d'après la cour d'appel d'Orléans, les faits reprochés étaient " d'une ampleur considérable " et le rôle de l'intéressée, qui " en a constitué un rouage essentiel ", était " central ", l'influence de son compagnon ne devait pas " l'exonérer de ses responsabilités qui sont significatives " et " en acceptant de produire (...) des faux en connaissant parfaitement quelle était leur destination, elle a rendu possibles des escroqueries graves et permis la réalisation de dommages conséquents. ". Au regard de leur gravité, ces faits apparaissent incompatibles avec l'exercice des fonctions d'agent administratif des finances publiques. En conséquence, et quand bien même Mme B... aurait-elle donné satisfaction dans l'exercice des fonctions qu'elle a occupées une première fois au sein de l'administration et, à la date de la décision attaquée, sa condamnation ne figurait pas au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, le ministre a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, se fonder sur ces faits, dont il a eu légalement connaissance, pour refuser de prononcer sa nomination en qualité d'agent administratif des finances publiques stagiaire.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
Mme Boffy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.
La rapporteure,
I. Boffy
Le président,
V-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 24LY01878
kc