Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure
Par deux requêtes distinctes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 3 avril 2024 par lequel la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, ainsi que d'annuler la décision du même jour par laquelle la préfète de l'Allier l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Par jugement n° 2400789, 2400791 du 10 avril 2024, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, après avoir renvoyé à une formation collégiale du tribunal les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour du 3 avril 2024, rejeté la demande tendant à l'annulation des décisions du 3 avril 2024 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ainsi que la demande tendant à l'annulation de la décision portant assignation à résidence.
Par un jugement n° 2400789 du 16 juillet 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 2024 portant refus de séjour.
Procédure devant la cour
I. Par une requête, enregistrée le 7 mai 2024 sous le n° 24LY1344, M. B..., représenté par Me Jauvat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2024 susvisé en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du 3 avril 2024 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ;
2°) d'annuler les décisions du 3 avril 2024 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans susvisées ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de lui délivrer dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour mention " salarié " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- cette décision aurait dû être précédée de la saisine de la commission du titre de séjour ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et entaché sa décision d'une erreur de droit ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale dès lors que le refus de séjour du 16 septembre 2022 sur lequel elle se fonde n'était pas définitif ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions lui refusant tout délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français sont illégales en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
- la décision lui refusant tout délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur d'appréciation et d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2024, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 2 août 2024 sous le n° 24LY02292, M. B..., représenté par Me Jauvat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 juillet 2024 susvisé ;
2°) d'annuler la décision du 3 avril 2024 portant refus de séjour susvisée ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de lui délivrer dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour mention " salarié " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- cette décision aurait dû être précédée de la saisine de la commission du titre de séjour ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.
La requête de M. B... a été communiquée à la préfète de l'Allier qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 29 juin 1990, est entré irrégulièrement en France le 11 septembre 2014 selon ses déclarations. Par un arrêté du 2 août 2018, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 11 mars 2019, le préfet du Cantal a prononcé à son encontre une mesure d'éloignement. Par un arrêté du 16 septembre 2022, la préfète de l'Allier a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 3 mai 2024, le même tribunal a rejeté sa demande d'annulation dirigée contre l'arrêté du 16 septembre 2022. Par un nouvel arrêté du 3 avril 2024, la préfète de l'Allier a refusé de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par une décision du même jour, la préfète a assigné M. B... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... relève appel des jugements par lesquels le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ont rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'ensemble des décisions édictées à son encontre le 3 avril 2024.
2. Les deux requêtes présentées par M. B... tendent à l'annulation de décisions contenues dans le même arrêté. Elles ont fait l'objet d'une instruction commune et présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, M. B... réitère en appel le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant refus de séjour qui lui a été opposée sans apporter d'éléments nouveaux de fait ou de droit ni critiquer les motifs par lesquels les premiers juges ont écarté ce moyen. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision en litige ni des pièces du dossier que la préfète de l'Allier aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation personnelle du requérant.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, dispose par ailleurs que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
6. Si M. B... se prévaut de sa durée de présence de plus de neuf ans en France et de la présence sur le territoire français de ses parents, titulaires d'une carte de résident, ses deux sœurs, titulaires d'un titre de séjour et d'une carte de résident et son frère, de nationalité française, il est entré en France à l'âge de 24 ans et n'établit pas être dépourvu d'autres attaches privées et familiales dans son pays d'origine. Si M. B... se prévaut d'une relation avec une ressortissante française, aucune vie commune n'est établie entre les intéressés, M. B... ayant d'ailleurs déclaré vivre chez son frère et la déclaration de concubinage datée du 2 octobre 2022 n'étant corroborée par aucune pièce justificative. Dans ces conditions, et malgré la relative insertion professionnelle dont fait état le requérant qui travaille en qualité de cuisinier depuis septembre 2020, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par la préfète sur sa situation personnelle ne peut être accueilli.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 visé ci-dessus : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention 'salarié' ". Selon l'article 11 de cet accord : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. Chaque État délivre notamment aux ressortissants de l'autre État tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ". Le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, à son point 2.3.3, que " le titre de séjour portant la mention 'salarié', prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) ". L'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ".
8. Il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat visé par les services en charge de l'emploi.
9. Pour refuser de délivrer à M. B... un titre de séjour sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-tunisien précité, la préfète de l'Allier, qui a relevé que l'intéressé est entré irrégulièrement en France sans visa, a ainsi entendu lui opposer le défaut de production d'un visa de long séjour. Dès lors que M. B... ne justifie pas détenir un tel visa, la préfète de l'Allier a pu à bon droit, pour ce seul motif, refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 cité ci-dessus prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de leur méconnaissance est donc inopérant. En outre, eu égard aux éléments dont le requérant a fait part, rappelés au point 6, le refus de la préfète de l'Allier de faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation sur la demande de titre de séjour " salarié " présentée n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. La préfète n'a pas davantage commis une telle erreur en estimant que M. B... ne faisait état ni de circonstances humanitaires ni de motifs exceptionnels justifiant qu'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " lui soit délivrée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
11. En sixième lieu, dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, M. B... ne peut utilement se prévaloir des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir.
12. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance (...) 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 (...) ".
13. Il ressort de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que lorsque l'étranger remplit les conditions de délivrance de plein droit certains titres de séjour ou s'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour et réside en France depuis plus de dix ans. En l'espèce, il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que M. B... ne remplit pas les conditions de délivrance des titres de séjour visés aux articles L. 423-23 et L. 435-1 du code précité. Le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour doit dès lors être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
14. En l'absence d'illégalité de la décision portant refus de séjour opposée à M. B..., ce dernier n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle portant obligation de quitter le territoire français.
15. La décision contestée portant obligation de quitter le territoire français du 3 avril 2024 est fondée sur le 3°) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et vise la décision portant refus de séjour opposé le même jour à sa demande de titre de séjour. Cette décision de refus de titre de séjour a légalement fondé la mesure d'éloignement édictée le même jour et ne saurait être regardée comme une décision confirmative de la décision portant refus de séjour édictée le 16 septembre 2022 laquelle n'était pas devenue définitive à la date du 3 avril 2024 en raison du recours contentieux introduit par le requérant devant le tribunal et encore pendant à cette date. La circonstance qu'à la date de l'obligation de quitter le territoire français en litige, les décisions des 16 septembre 2022 et 3 avril 2024 portant refus de séjour n'étaient pas devenues définitives n'a aucune incidence sur leur légalité ni sur celle de la mesure d'éloignement édictée. En outre, par un arrêt n° 24LY01561 rendu ce même jour, la cour a confirmé la légalité de l'arrêté du 16 septembre 2022 édicté à l'encontre de M. B....
16. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, les moyens tirés de ce que la décision susvisée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
Sur la décision refusant tout délai de départ volontaire :
17. En premier lieu, compte tenu de l'absence d'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision susvisée serait illégale en raison de l'illégalité de ces décisions.
18. En deuxième lieu, en se bornant à soutenir que la décision susvisée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, le requérant n'apporte pas les précisions suffisantes à l'appui de ce moyen permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.
Sur la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :
19. Les moyens dirigés contre les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale pour défaut de base légale.
20. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
21. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
22. Compte tenu de la présence en France des deux parents de M. B... et trois membres de sa fratrie et de l'absence de menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français, la préfète de l'Allier a, en retenant une durée d'interdiction de retour en France de trois ans, qui constitue la durée maximale prévue par les dispositions précitées, entaché sa décision de disproportion et ce alors même que l'intéressé n'a pas exécuté deux précédentes mesures d'éloignement. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen invoqué à l'encontre de cette décision, M. B... est fondé à en demander l'annulation.
23. Il résulte de ce qui précède que M. B... est uniquement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 avril 2024 portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
24. Le présent arrêt n'impliquant pas que la préfète de l'Allier délivre à M. B... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salarié ", les conclusions à fin d'injonction présentées à ce titre par l'intéressé doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
25. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 10 avril 2024 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la préfète de l'Allier du 3 avril 2024 portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans opposée à M. B....
Article 2 : La décision du 3 avril 2024 de la préfète de l'Allier portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans opposée à M. B... est annulée.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 300 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Emilie Felmy, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
M. Jean-Simon Laval, premier conseiller,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 mai 2025.
La rapporteure,
Vanessa Rémy-NérisLa présidente,
Emilie Felmy
La greffière,
Florence Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière
2
N°s 24LY01344, 24LY02292