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09/02/2022 | FRANCE | N°20MA01369

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 09 février 2022, 20MA01369


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... D... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Jonquières-Saint-Vincent à leur verser la somme de 45 776,74 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment subir du fait d'inondations répétées de leur propriété.

Par un jugement n° 1800289 du 24 janvier 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 24 mars, 16 novembre e

t 17 décembre 2020, M. A... D... et Mme B..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... D... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Jonquières-Saint-Vincent à leur verser la somme de 45 776,74 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment subir du fait d'inondations répétées de leur propriété.

Par un jugement n° 1800289 du 24 janvier 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 24 mars, 16 novembre et 17 décembre 2020, M. A... D... et Mme B..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 janvier 2020 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune de Jonquières-Saint-Vincent à leur verser la somme de 45 776,74 euros, assortie des intérêts à compter de la date de leur demande préalable ;

3°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le maire de Jonquières-Saint-Vincent a commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police administrative générale ;

- il n'a pas fait assurer l'exécution d'une ordonnance du 11 août 2010 du juge des référés du tribunal de grande instance de Nîmes ;

- il a également commis une faute en délivrant une autorisation de lotir à la SARL les Tilloises ;

- il a commis une faute en s'abstenant de constater une infraction sur le fondement de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme ;

- une canalisation d'eaux pluviales de la SARL les Tilloises empiète sur leur propriété ;

- les préjudices dont ils demandent l'indemnisation sont établis.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 10 novembre et 11 décembre 2020, la commune de Jonquières-Saint-Vincent, représentée par Me Mahistre, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M. A... D... et Mme B... ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner la SARL les Tilloises à la garantir de toute condamnation ;

3°) de mettre à la charge de M. A... D... et de Mme B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande préalable est dépourvue de cause juridique ;

- la créance est prescrite ;

- la SARL les Tilloises a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- les moyens soulevés par M. A... D..., Mme B... et la SARL les Tilloises ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2020, la SARL les Tilloises, représentée par la SELARL P.L.M.C. avocats, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M. A... D... et Mme B... et l'appel en garantie dirigé à son encontre par la commune de Jonquières-Saint-Vincent ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner M. F... E... et la SNC Eiffage route grand Sud à la garantir de toute condamnation ;

3°) par la voie de l'appel incident, d'annuler l'article 2 du jugement attaqué, et de mettre les frais d'expertise à la charge de M. A... D... et Mme B... ;

4°) de mettre à la charge de M. A... D... et de Mme B..., d'une part, et de la commune de Jonquières-Saint-Vincent, d'autre part, la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le dommage est imputable à M. E... et à la SNC Eiffage route grand Sud ;

- les moyens soulevés par M. A... D..., Mme B... et la commune de Jonquières-Saint-Vincent ne sont pas fondés.

Par des observations, enregistrées le 21 août 2020, M. E..., représentée par le cabinet Casanova-Maingourd-Thaï Thong, conclut au rejet de la requête de M. A... D... et Mme B... et de l'appel en garantie dirigé à son encontre par la SARL les Tilloises.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître des conclusions dirigées à son encontre ;

- l'appel en garantie de la SARL les Tilloises est irrecevable, faute de préciser son fondement juridique ;

- cette action est prescrite ;

- M. A... D..., Mme B... et la commune de Jonquières-Saint-Vincent ont commis des fautes de nature à l'exonérer de sa responsabilité ;

- les moyens soulevés par M. A... D..., Mme B... et la SARL les Tilloises ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2020, la SNC Eiffage route grand Sud, représentée par Me de Cazalet, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M. A... D... et Mme B... et l'appel en garantie dirigé à son encontre par la SARL les Tilloises ;

2°) de mettre à la charge de la SARL Les Tilloises la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître des conclusions dirigées à son encontre ;

- l'action en garantie de la SARL les Tilloises est prescrite.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions dirigées contre des personnes privées.

Un mémoire a été enregistré le 20 novembre 2020 en réponse à cette mesure d'information pour M. E....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Mérenne,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me Mahistre, représentant la commune de Jonquières-Saint-Vincent, de Me Gomila, représentant M. E..., et de Me de Cazalet, représentant la SNC Eiffage route grand Sud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D... et Mme B... ont acquis le 26 septembre 2007, sur le territoire de la commune de Jonquières-Saint-Vincent, le lot n°5 d'un lotissement réalisé par la SARL les Tilloises en vertu d'une autorisation de lotir accordée le 14 juin 2006. Par une ordonnance du 12 octobre 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a ordonné une expertise concernant les inondations récurrentes de leur propriété. L'expert a déposé son rapport le 25 février 2016.

2. M. A... D... et Mme B... font appel du jugement du 24 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune de Jonquières-Saint-Vincent. La commune appelle en garantie la SARL les Tilloises, qui appelle elle-même en garantie M. E... et la SNC Eiffage route grand Sud.

Sur l'incompétence de la justice administrative :

3. Il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la responsabilité d'une personne privée, en dehors de cas spécifiques étrangers au présent litige. Les appels en garantie dirigés contre la SARL les Tilloises, M. E... et la SNC Eiffage route grand Sud doivent donc être rejetés comme présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur la responsabilité de la commune :

4. En premier lieu, l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment (...) le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que (...) les inondations ". L'article L. 2212-4 du même code ajoute qu' " En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. "

5. Le litige porte sur les inondations récurrentes du jardin et du garage de la propriété de M. A... D... et Mme B..., en raison de l'insuffisance du réseau d'évacuation des eaux pluviales du lotissement relevant de la SARL les Tilloises. Par une ordonnance du 11 août 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nîmes lui a ordonné de remédier à ces dysfonctionnements. Ces inondations sont de nature à priver les requérants de l'usage de leur garage et de leur jardin, notamment pour y installer une piscine et y entretenir une végétation d'agrément. De telles circonstances, qui ne sont pas à l'origine d'un danger pour la sécurité des personnes, ne sont pas constitutives d'un trouble à l'ordre public de nature à justifier l'usage par le maire des pouvoirs de police administrative générale qu'il tient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Elles sont encore moins à l'origine d'un danger grave ou imminent pouvant justifier que le maire ordonne certaines mesures à la SARL les Tilloises en application de l'article L. 2212-4 du même code, et ce, alors même que l'eau formerait un " vortex " au dessus d'un avaloir dans l'hypothèse où sa grille de protection serait retirée.

6. En deuxième lieu, le maire n'a pas la responsabilité de faire exécuter les décisions rendues par le juge judiciaire.

7. En troisième lieu, si les requérants font valoir qu'une canalisation d'eaux pluviales de la SARL les Tilloises empiète sur leur propriété, cette circonstance n'engage pas la responsabilité de la commune. En outre, elle est étrangère aux dommages dont ils demandent réparation.

8. En quatrième lieu, le tribunal administratif a écarté l'existence d'une faute dans l'instruction et la délivrance des autorisations d'urbanisme par des motifs appropriés, figurant au point 5 du jugement attaqué, qu'il y a lieu d'adopter en appel.

9. Enfin, en se bornant à faire état du dysfonctionnement du réseau d'eaux pluviales de la SARL les Tilloises et de ce que la canalisation mentionnée au point 7 n'est pas prévue par l'autorisation de lotir délivrée à cette société le 14 juin 2006, les requérants ne mettent pas en évidence une infraction au code de l'urbanisme qu'il aurait incombé au maire de poursuivre sur le fondement de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... D... et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Si la SARL les Tilloises conteste l'article 2 du jugement attaqué, qui a mis les frais d'expertise à sa charge, ces conclusions ne sont pas assorties de moyens venant à leur soutien.

12. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. A... D... et de Mme B... le versement de la somme de 1 000 euros à la commune de Jonquières-Saint-Vincent, d'une part, et à la charge de la SARL les Tilloises le versement de la somme de 1 500 euros à la SNC Eiffage route grand Sud, d'autre part, au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.

13. Il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les autres parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la commune de Jonquières-Saint-Vincent dirigées contre la SARL les Tilloises et celles de la SARL les Tilloises dirigées contre M. E... et la SNC Eiffage route grand Sud sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 2 : La requête de M. A... D... et de Mme B... est rejetée.

Article 3 : M. A... D... et de Mme B... verseront à la commune de Jonquières-Saint-Vincent la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La SARL les Tilloises versera la somme de 1 500 euros à la SNC Eiffage route grand Sud en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... D... et à Mme C... B..., à la commune de Jonquières-Saint-Vincent, à la SARL les Tilloises, à M. F... E... et à la SNC Eiffage route grand Sud.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2022.

2

No 20MA01369


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01369
Date de la décision : 09/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-02 Police. - Police générale. - Tranquillité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SCP CASANOVA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-09;20ma01369 ?
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