Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler le titre de perception émis le 20 août 2018 par lequel la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin a mis à sa charge la somme de 723 217,60 euros et de le décharger du paiement de cette somme.
Par un jugement n° 1803279 du 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 septembre 2020 sous le n° 20MA03443, M. B..., représenté par Me Maillet, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 juillet 2020 ;
2°) de le décharger de l'obligation de payer la somme de 723 217,60 euros ;
3°) de mettre à la charge de la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute pour la minute d'avoir été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ;
- le jugement est irrégulier faute de faire mention de la note en délibéré reçue par le tribunal le 25 juin 2020 ;
- le titre de recette est insuffisamment motivé ;
- la créance n'est pas fondée ;
- la somme mise à sa charge est disproportionnée.
Par un mémoire enregistré le 4 novembre 2020, le directeur départemental des finances publiques du Var conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est mal dirigée en ce qu'elle est dirigée contre le comptable public et il ne lui appartient pas de se prononcer sur le bien-fondé de la créance ;
- aucun des autres moyens soulevés n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 15 décembre 2021, la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin, représentée par Me Sindres, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code des transports ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public ;
- et les observations de Me Bornet substituant Me Sindres, représentant la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin.
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat de garantie d'usage conclu le 26 janvier 2018, la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin a conféré à M. B... un droit d'occupation privative du domaine public pour un poste d'amarrage au port de plaisance des Marines de Cogolin pour une durée de vingt ans. Le 20 août 2018, le directeur de la régie a émis à l'encontre de M. B... un titre exécutoire en vue du recouvrement de la redevance forfaitaire de 723 217,60 euros correspondant à la participation au financement des ouvrages prévue à l'article 2 de ce contrat de garantie d'usage. M. B... relève appel du jugement n° 1803279 du 20 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire et à ce qu'il soit déchargé de l'obligation de payer la somme de 723 217,60 euros.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort de la minute du jugement attaqué qui a été transmise par le tribunal administratif de Toulon qu'elle comporte la signature du président de la formation de jugement, celle du rapporteur et celle de la greffière d'audience. Le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier, faute pour cette minute d'être revêtue des signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque ainsi en fait et doit dès lors être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l''article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. Mention y est faite que le rapporteur et le rapporteur public et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du troisième alinéa de l'article R. 732-1 ont été entendus. Lorsque, en application de l'article R. 732-1-1, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions, mention en est faite. Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée. ".
5. Si l'appelant soutient que le jugement attaqué est irrégulier faute de faire mention de la production par l'exposant d'une note en délibéré reçue par le tribunal, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, il ressort de la lecture du jugement que la note en délibéré du 25 juin 2020 y est bien mentionnée. Par suite, le moyen invoqué manque en fait.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. En premier lieu, aux termes du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " 4° Une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable sous pli simple. (...) / En application de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que l'ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif adressée au redevable doit mentionner les nom, prénoms et qualité de la personne qu'il l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur.
7. En l'espèce, il est constant que le nom, le prénom et la qualité de l'émetteur de l'acte (Eric Giorsetti, directeur général de la régie) sont bien mentionnés sur le titre de recette contesté. En outre, la direction départementale des finances publiques du Var a produit au cours de l'instance le bordereau de titre de recettes du 20 août 2018 signé par ce même ordonnateur. Il s'ensuit que le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions des articles L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme manquant en fait.
8. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. / (...). Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ".
9. Le titre de recette contesté indique que la somme de 723 217,60 euros pour le recouvrement de laquelle il est établi correspond à la " garantie d'usage B... Jean-Jacques Epi Galiote 3 " et qu'il a été émis au profit de la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin. Il résulte de l'instruction que le contrat de garantie d'usage signé le 26 janvier 2018 fixe, en son article 2, le montant de la participation au titre du financement des ouvrages à la somme de 723 217,60 euros calculée en fonction des dimensions du poste d'amarrage objet de la garantie. Ainsi cette indication, qui définit la nature de la créance et précise son fondement contractuel, satisfait aux exigences fixées par les dispositions précitées. Par suite, le moyen invoqué tiré de l'insuffisance de motivation du titre de perception doit être écarté.
10. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Et aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ".
11. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article R. 5314-31 du code des transports : " ... Il peut être accordé des garanties d'usage de postes d'amarrage ou de mouillage pour une durée maximale de trente-cinq ans, en contrepartie d'une participation au financement d'ouvrages portuaires nouveaux constituant une dépendance du domaine public de l'Etat. Le contrat accordant la garantie d'usage mentionnée ci-dessus doit prévoir que le droit attaché à cette garantie ne peut faire l'objet d'une location que par l'entremise du gestionnaire du port ou avec son accord. "
12. Par ailleurs, aux termes de l'article 4 des conditions générales du contrat de garantie d'usage d'un poste d'amarrage au port de plaisance des Marines de Cogolin : " Le contrat particulier précise le montant de la redevance à régler à la commune. Cette redevance est réglée à la signature du contrat par le bénéficiaire, que ce dernier utilise immédiatement ou non son droit d'usage. (...) Le contrat est résilié de plein droit et le droit d'usage considéré comme caduc si le règlement de la redevance forfaitaire n'a pas été effectué dans les 15 jours calendaires avant la date de mise à disposition de l'emplacement. " Selon l'article 2 du contrat de garantie d'usage conclu entre l'appelant et la Régie, le montant de la redevance due au titre de la participation pour le financement des ouvrages a été fixée à la somme de 723 217,60 euros. Par ailleurs, son article 5.2 prévoyait que le " bénéficiaire s'engage à user lui-même de la garantie d'amarrage mise à sa disposition. / (...) Toute cession et/ou transmission ne peut avoir lieu que dans les conditions fixées à l'article 3.2.1 des clauses annexées au présent contrat ".
13. Il résulte de l'instruction que, par un avenant au contrat de garantie d'usage signé le 9 avril 2018, la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin a accepté la cession du contrat de garantie d'usage de M. B... à la société CEFEA SA. Toutefois, il résulte de l'application combinée des stipulations précitées que M. B... était redevable dès la signature du contrat de la somme de 723 217,60 euros sans que cette obligation soit conditionnée par l'effectivité du droit d'usage. Si le requérant entend se prévaloir d'un courrier envoyé par la régie le 23 juillet 2018 indiquant que le non-paiement de la participation aux travaux a entraîné la caducité du contrat selon les termes de l'article 4 des conditions générales précité, cette résiliation, qui n'a d'effet que pour l'avenir, ne décharge pas le co-contractant des obligations jusqu'alors mises à sa charge. M. B... ne peut, par ailleurs, utilement invoquer les dispositions des conditions générales relatives à la rétrocession qui prévoit un remboursement de la somme initialement versée en fonction du nombre d'années d'utilisation qui ne s'appliquent pas à la cession du contrat de garantie d'usage.
14. En quatrième lieu, il ne résulte pas des dispositions de l'article R. 5314-31 du code des transports, qui régissent les garanties d'usage, que le contrat devrait, à peine d'illégalité, prévoir un mécanisme de " prorata en cas de cession du contrat à un tiers " ni des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à l'occupation du domaine public que la redevance d'occupation doive être établie exclusivement au regard de sa durée, alors que doivent être pris en compte " les avantages de toute nature " qu'en tire le bénéficiaire. Par suite, l'appelant n'est fondé à soutenir ni que le véritable débiteur serait le nouveau bénéficiaire, cessionnaire du contrat d'usage ni que le contrat serait illégal en ce qu'il ne prévoit pas la réduction de la redevance due au prorata en cas de cession.
15. En dernier lieu, l'avantage accordé à l'occupant du domaine public consiste en la possibilité, en échange du paiement d'une redevance, de bénéficier d'une garantie d'usage d'amarrer son navire à un poste d'amarrage pendant une période de vingt ans. Cette redevance tient également compte des avantages que retire le titulaire d'une garantie d'usage du port tel que l'abri permanent ou un accès à son navire. Si l'appelant soutient que la redevance apparaît disproportionnée au regard des avantages qui sont procurés au titulaire de l'autorisation, il ne précise pas en quoi ces avantages procurés seraient insuffisants au regard du montant de la redevance à acquitter. La circonstance que M. B... ait cédé, au demeurant de sa propre initiative et à titre onéreux, son contrat de garantie d'usage peu de temps après sa signature et n'a ainsi pas bénéficié des avantages procurés sur l'ensemble de la période de vingt ans prévue au contrat ne saurait, par elle-même, démontrer le caractère disproportionné de la redevance calculée sur la durée totale du contrat. Dès lors, le moyen invoqué tiré du caractère disproportionné du montant de la redevance doit être écarté.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1803279, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa requête.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin et non compris dans les dépens. Les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par l'appelant soit mise à la charge de la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin, qui n'est pas la partie perdante.
19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de M. B... au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par le directeur départemental des finances publiques du Var au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la Régie du port de plaisance des Marines de Cogolin.
Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques du Var
Délibéré après l'audience du 21 octobre 2022, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Ciréfice, présidente assesseure,
- M. Prieto, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 novembre 2022.
N° 20MA03443 2
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