Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 mai 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a approuvé le plan de prévention des risques d'incendie de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune de Marseille, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 24 septembre 2018.
Par un jugement n° 1809351 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 août 2020, M. B..., représenté par Me Burtez-Doucède, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2020 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 mai 2018 et la décision du 24 septembre 2018 ;
3°) d'enjoindre à l'Etat, sous astreinte, de procéder dans un délai de quinze jours, au classement de la parcelle cadastrée 908 R 295 et la partie bâtie de la parcelle cadastrée 908 R 294 dans un zonage constructible du PPRIF en litige ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a procédé à un détachement de parcelle et insiste pour que l'annulation du PPRIF s'applique tout particulièrement à la parcelle cadastrée n° 295 qu'il a conservée après avoir vendu le reste de son terrain ;
- les modalités de la concertation n'ont pas été conformes à ce qui avait été décidé en 2011 et la concertation n'a pu avoir lieu effectivement pendant sept ans ;
- l'arrêté contesté ne pouvait pas se fonder sur un arrêté portant prescription du plan adopté en 2011 et devenu obsolète ;
- le classement de sa parcelle en zone rouge est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le commissaire enquêteur a donné un avis favorable au reclassement de la partie bâtie de sa parcelle cadastrée n° 295 en zone B1 ;
- ce classement en zone rouge n'est pas cohérent avec le classement en zone UP1 ou UM2 constructible du PLU ;
- le classement en litige méconnait le principe d'égalité de traitement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête de M. B....
Elle fait valoir que :
- les conclusions du requérant doivent être regardées comme étant désormais dirigées contre l'arrêté préfectoral du 22 mai 2018 en tant seulement qu'il approuve le classement en zone rouge dans le PPRIF de la parcelle cadastrée section 908 R 295, issue de la division de l'ancienne parcelle cadastrée section 908 R 264 et il doit ainsi être regardé comme s'étant désisté de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 22 mai 2018 en tant qu'il approuve le classement en zone rouge dans le PPRIF de la parcelle cadastrée section 908 R 265 ;
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Claveau, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 30 mars 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendie de forêt (PPRIF) sur le territoire de la commune de Marseille. L'élaboration de ce plan a donné lieu à une phase de consultation du 1er janvier 2017 au 31 mars 2017, puis à un arrêté du 9 octobre 2017 portant ouverture et organisation d'une enquête publique, réalisée du 30 octobre au 30 novembre 2017, et au terme de laquelle la commission d'enquête a rendu, le 8 janvier 2018, un avis favorable assorti d'une réserve et accompagné de recommandations. Le préfet des Bouches-du-Rhône a, par un arrêté du 22 mai 2018, approuvé le PPRIF, lequel classe en zone rouge les parcelles cadastrées 908 R 264 et 265, appartenant à M. B... et situées au 33 chemin de Cézanne dans le 16ème arrondissement à Marseille. M. B... relève appel du jugement du 8 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 22 mai 2018 et de la décision du 24 septembre 2018 rejetant son recours gracieux.
Sur l'étendue du litige :
2. Au regard de l'ensemble de ses écritures, M. B... doit être regardé comme demandant l'annulation du jugement du 8 juillet 2020 et de l'arrêté préfectoral du 22 mai 2018 seulement en tant qu'il classe en zone rouge la parcelle cadastrée n° 295 issue de la division de l'ancienne parcelle cadastrée section 908 R 264 sur le territoire de la commune de Marseille, ces dispositions étant divisibles, ainsi que, dans cette même mesure, de la décision explicite de rejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la concertation avec le public :
3. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. (...) ". Aux termes de l'article R. 562-2 du code précité dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté fixant les modalités de la concertation : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. Il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. / Il est notifié aux maires des communes ainsi qu'aux présidents des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour l'élaboration des documents d'urbanisme dont le territoire est inclus, en tout ou partie, dans le périmètre du projet de plan. / Il est, en outre, affiché pendant un mois dans les mairies de ces communes et aux sièges de ces établissements publics et publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département. Mention de cet affichage est insérée dans un journal diffusé dans le département. ". Selon le dernier alinéa de cet article R. 562-2 dans sa rédaction issue du 2° de l'article 1er du I du décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 relatif à la procédure d'élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles, publié au Journal officiel de la République française du 30 juin 2011 : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé dans les trois ans qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Ce délai est prorogeable une fois, dans la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations. ". L'article 2 de ce décret prévoit cependant que : " Les dispositions du I de l'article 1er sont applicables aux plans de prévention des risques naturels prévisibles dont l'établissement est prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du premier mois suivant la publication du présent décret. ". La concertation à destination du public prévue par ces dispositions doit porter sur la nature et les options essentielles du projet et se dérouler avant que celui-ci ne soit arrêté. Il incombe, par ailleurs, à l'autorité administrative de veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu'elle a elle-même fixées.
4. Il résulte de ces dernières dispositions qu'à la date du 30 mars 2011 à laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration du plan en litige, le dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, qui prévoit un délai de trois ans à compter de sa prescription pour approuver un plan de prévention des risques naturels prévisibles, n'était pas applicable. Seules étaient alors en vigueur les dispositions précitées de l'article R. 562-2 du code de l'environnement qui ne prévoyaient aucun délai pour l'approbation d'un tel plan. Par ailleurs, la seule circonstance qu'un délai notable de sept ans se soit écoulé entre l'arrêté prescrivant le plan et son approbation n'a pas eu pour effet, en l'absence de disposition légale ou règlementaire le prévoyant, de frapper de caducité l'arrêté du 30 mars 2011 du préfet des Bouches-du-Rhône. Ce délai est, dès lors, sans incidence sur la régularité de la procédure d'élaboration du PPRIF de la commune de Marseille et par suite, sur la légalité de l'arrêté en litige. Ainsi, M. B... ne peut utilement soutenir que le préfet était tenu de prescrire, à nouveau, le lancement de la procédure d'élaboration du PPRIF et ne pouvait se fonder sur un arrêté du 30 mars 2011 devenu obsolète.
5. M. B... ne peut utilement soutenir que les modalités de la concertation n'ont pas été respectées par rapport à ce qui a été défini par l'arrêté du 30 mars 2011, la concertation n'ayant pu avoir lieu effectivement pendant sept ans dès lors que cet arrêté n'a prévu aucun délai pour l'approbation du plan en litige. En outre, il n'établit pas en quoi les objectifs et motifs définis par cet arrêté ne seraient plus les mêmes en 2017.
En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation quant au classement de la parcelle cadastrée n° 295 en zone rouge :
6. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs (...) / VII. ' Des décrets en Conseil d'Etat définissent en tant que de besoin les modalités de qualification des aléas et des risques, les règles générales d'interdiction, de limitation et d'encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité, ainsi que d'information des populations, dans les zones exposées aux risques définies par les plans de prévention des risques naturels prévisibles. (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions que les plans de prévention des risques naturels prévisibles constituent des documents qui, élaborés à l'initiative de l'Etat, ont pour objet de définir, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, des zones exposées à des risques naturels à l'intérieur desquelles s'appliquent, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, des contraintes d'urbanisme importantes.
8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement de la cartographie de l'aléa produite par le préfet que la parcelle cadastrée n° 295 issue de la division de l'ancienne parcelle cadastrée section 908 R 264 appartenant à M. B... a été classée en zone rouge et en aléa " très fort ", ne pouvant pas faire l'objet d'une défense efficace contre l'incendie. Cette parcelle située dans le massif de la Côte bleue lequel présente un aléa fort à exceptionnel, est au contact de zones boisées au nord et au sud. Par ailleurs, sa situation sur les hauts d'un versant l'expose particulièrement au risque d'incendie dès lors que dans le cadre d'un feu montant depuis le vallon situé au sud-est qui présente un aléa exceptionnel, la propagation du feu sera accélérée par l'effet de la pente montante, la puissance du feu étant alors d'autant plus importante. M. B... ne conteste pas valablement la carte d'aléa en se bornant à soutenir que sa date d'établissement n'est pas connue et qu'il est fréquent de voir des variations dans le temps. Il ne démontre pas que les parcelles du lotissement " Campagne bleu " seraient situées plus haut sur le même versant alors que l'aléa de ces parcelles a été estimé " fort " justifiant un classement en zone B1 et qu'elles ne sont en contact avec le massif que du seul côté sud. En outre, la carte qu'il produit ne permet pas d'établir que l'incendie identifié par la base de données Prométhée serait à une distance importante de sa parcelle alors que le préfet des-Bouches-du-Rhône s'est fondé sur une carte des feux élaborée par le SDIS confirmant la sensibilité du massif, notamment à l'est du secteur de la parcelle qui a été parcouru quatre fois par le feu, le dernier datant de 2001. Ainsi, le seul fait que l'aléa de la parcelle cadastrée n° 295 soit classé très fort " suffit à retenir un classement en zone rouge, sans qu'y fasse obstacle son caractère défendable et son enjeu en termes d'urbanisation résultant de la présence de voies publiques desservant le terrain, d'hydrants à moins de 200 mètres ou de ce que la zone serait dans la continuité urbaine, en habitat groupé très dense. Si l'appelant soutient que sa parcelle non boisée est soumise à une obligation de débroussaillage, il ne saurait être garanti par principe qu'il s'acquitte en permanence de cette obligation. Il s'ensuit que le classement en zone rouge de la parcelle cadastrée n° 295 n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
9. En deuxième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir de ce que le commissaire enquêteur a recommandé, dans son rapport, un zonage B1 de sa parcelle dès lors que l'avis de la commission d'enquête ne lie pas l'autorité préfectorale qui n'est pas tenue de le suivre.
10. En troisième lieu, l'appelant ne peut utilement invoquer le manque de cohérence entre le classement partiel de la parcelle cadastrée n° 295 en zone UP1 constructible par le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) approuvé en décembre 2019, postérieurement à l'arrêté en litige, ou en zone UM2 " maîtrise de l'urbanisation " du plan local d'urbanisme (PLU) par la modification approuvée le 28 juin 2018 et son classement en zone rouge par le PPRIF en litige dans la mesure où en vertu des dispositions de l'article L. 562-4 du code de l'environnement, le plan de prévention vaut servitude d'utilité publique, laquelle doit être annexée au plan local d'urbanisme et est, de ce fait, opposable à toute demande relative à l'occupation ou l'utilisation du sol fondée sur le code de l'urbanisme.
En ce qui concerne le moyen tiré de la rupture d'égalité :
11. Il est de la nature des plans de prévention des risques naturels de distinguer et de délimiter, en fonction des degrés d'exposition à ces risques, des zones à l'intérieur desquelles s'appliquent des contraintes d'urbanisme importantes et des zones ne nécessitant pas l'application de telles contraintes. Dès lors que le classement en zone rouge de la parcelle appartenant à M. B... ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée, comme il a été dit au point 8, l'intéressé ne peut utilement invoquer la méconnaissance du principe d'égalité des citoyens devant la loi. En tout état de cause, la parcelle cadastrée n° 295 appartenant à l'appelant du fait de son risque d'aléa évalué à " très fort " n'est pas placée dans la même situation que les parcelles voisines situées au sud et classées en zone B1 qui correspondent à un aléa " fort " ainsi qu'il a été dit précédemment.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 22 mai 2018 et de la décision de rejet de son recours gracieux du 24 septembre 2018.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
13. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de M. B....
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Ciréfice, présidente assesseure,
- Mme Marchessaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2022.
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N° 20MA03195
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