La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/11/2022 | FRANCE | N°21MA02966

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 28 novembre 2022, 21MA02966


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 2102554 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 ju

illet 2021, Mme A..., représentée par Me Prezioso, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.

Par un jugement n° 2102554 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 juillet 2021, Mme A..., représentée par Me Prezioso, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 juin 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- les décisions attaquées sont entachées d'incompétence de leur auteur ;

- elles sont insuffisamment motivées ;

- le rapport médical n'est pas conforme à l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016 dès lors qu'il retranscrit de manière incomplète et erronée la situation médicale de la requérante ;

- la procédure est irrégulière car l'avis du collège des médecins n'a pas été rendu conformément aux prescriptions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'avis du collège des médecins est également irrégulier car il n'est pas démontré que ces derniers aient été régulièrement désignés ;

- cet avis du collège des médecins est également irrégulier, en l'absence de fiabilité de la signature du collège des médecins ;

- le collège des médecins n'a pas émis son avis à la suite d'une délibération collégiale ;

- l'avis du collège des médecins est enfin irrégulier car les rubriques dédiées à la procédure figurant sur le modèle réglementaire de l'annexe de l'arrêté précité du 27 décembre 2016 n'ont pas été complétées ;

- les décisions attaquées méconnaissent l'article 6 alinéa 1-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elles méconnaissent également l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

Un courrier du 22 août 2022 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 612-3 alinéa 3 du code de justice administrative les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 3 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;

- l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial ;

- le décret n° 2014-1627 du 26 décembre 2014 relatif aux modalités d'organisation des délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial ;

- le décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Isabelle Gougot, rapporteure.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 15 février 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 4 janvier 2021 Mme A..., ressortissante algérienne, sur le fondement de l'article 6, 7° de l'accord franco-algérien et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. Mme A... relève appel du jugement du 24 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. D'une part, aux termes du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " est délivré " au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ".

3. D'autre part, l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur dispose que : " ... le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé... ". Et selon l'article R. 313-22 du même code : " ... le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ". Et aux termes du premier alinéa de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...). Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle... ". L'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. (...) ". Et l'article 6 du même arrêté dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

4. En premier lieu, malgré une invitation de la Cour, la requérante n'a pas produit le rapport médical établi le 30 janvier 2021 par le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Par suite, le moyen qu'elle invoque selon lequel ce rapport médical ne serait pas conforme à l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016 car il retranscrirait de manière incomplète et erronée la situation médicale de la requérante ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les médecins du collège ayant émis, le 4 février 2021, un avis sur la situation de l'intéressée figuraient sur la liste des médecins désignés à ce titre dans l'arrêté du ministre de l'intérieur du 28 janvier 2021 portant désignation du collège des médecins de l'OFII. La requérante n'est donc pas fondée à soutenir que l'avis du collège des médecins est irrégulier car il n'est pas démontré qu'ils aient été régulièrement désignés.

6. En troisième lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le collège des médecins peut délibérer sous la forme d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis rendu par le collège des médecins, le 4 février 2021, porte la mention qui fait foi jusqu'à preuve du contraire : " après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ". Le moyen selon lequel le collège des médecins n'aurait pas émis son avis à la suite d'une délibération collégiale doit par suite être écarté.

7. En quatrième lieu, les dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 selon lesquelles l'avis du collège des médecins de l'OFII mentionne " les éléments de procédure " renvoient, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité. S'il ressort de l'avis émis en l'espèce le 4 février 2021 que les cases de la rubrique relative aux éléments de procédure aux stades de l'élaboration du rapport et de l'avis n'ont pas été cochées, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette omission ait privé l'intéressée d'une garantie, ni qu'elle ait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision. Elle n'est, par suite, pas de nature à avoir entaché l'arrêté attaqué d'une illégalité.

8. En cinquième lieu, les moyens tirés de l'irrégularité de l'avis du collège des médecins au regard de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'absence de fiabilité de la signature du collège des médecins doivent être écartés, comme non assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

9. En sixième lieu, par un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône n° 13-2021-02-11-001 du 11 février 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs, M. D... C..., signataire de l'arrêté contesté, bénéficiait, en sa qualité de chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile à la préfecture des Bouches-du-Rhône, d'une délégation à l'effet de signer la totalité des actes de la direction des migrations, de l'intégration et de la nationalité et notamment les décisions en matière de refus de séjour, d'obligation de quitter le territoire français, de décisions relatives au délai de départ volontaire et de décisions fixant le pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et ne peut qu'être écarté.

10. En septième et dernier lieu, les moyens tirés de l'insuffisante motivation du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire, de la méconnaissance de l'article 6 ,7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés, par adoption des motifs du jugement qui n'appellent pas de précision en appel.

11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions en annulation de Mme A... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Prezioso.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2022.

2

N° 21MA02966


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02966
Date de la décision : 28/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : PREZIOSO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-11-28;21ma02966 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award