Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 avril 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de renouvellement de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2200105 du 2 mai 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2022, Mme B... C... épouse A..., représentée par Me Ant, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 avril 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la décision portant refus de séjour :
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 6-5° du même accord et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Une mise en demeure a été adressée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit d'observations en défense.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 2 septembre 2022, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Balaresque a été entendu en audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne, née le 3 avril 1944, relève appel du jugement du 2 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 avril 2021 du préfet des Bouches-du-Rhône rejetant sa demande de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, il est constant que Mme C... a sollicité, à titre principal, le renouvellement de son titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 7°) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, en se prévalant de son état de santé. Si elle s'est également prévalue, par un courrier du 13 décembre 2020, de la durée de son séjour et de ses attaches familiales sur le territoire français pour solliciter, à titre subsidiaire, un titre de séjour sur le fondement du 5° du même article, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet, s'il n'a pas expressément visé le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, a examiné la possibilité de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", eu égard à l'ensemble des éléments relatifs à cette dernière portés à sa connaissance. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
4. Pour prendre la décision contestée, le préfet s'est fondé notamment sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 1er décembre 2020 selon lequel l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays, elle peut bénéficier d'un traitement approprié en Algérie, pays vers lequel son état de santé lui permet de voyager sans risque. Mme C... fait valoir qu'elle est atteinte d'une hypertension artérielle, d'un asthme sévère, d'une pathologie cardiaque, de douleur arthrosiques et d'une dépression sévère. Si elle soutient qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'une prise en charge appropriée à son état de santé en Algérie " en raison des difficultés rencontrées par le système de santé algérien et notamment les pénuries très régulières de médicaments ", elle n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations. Si Mme C... soutient également que son état de santé ne lui permettrait pas de voyager sans risque vers son pays d'origine, en raison de ses troubles respiratoires qui l'empêcheraient de prendre l'avion, les certificats médicaux qu'elle produit, émanant de médecins généralistes, dont l'un en date du 30 septembre 2020 fait état sans autre précision d'un état de santé l'empêchant de prendre l'avion et l'autre en date du 27 octobre 2021, postérieur à la décision attaquée, fait état d'un " état mental actuel ne lui permet[tant] pas d'envisager un voyage dans son pays d'origine quel que soit le moyen de transport ", ne sont pas à eux seuls de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII sur sa capacité à voyager sans risque vers son pays d'origine à la date de la décision contestée, alors en outre qu'il existe d'autres modes de transport que l'avion pour se rendre en Algérie depuis Marseille. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien précitées doit être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Mme C... fait valoir qu'elle réside habituellement en France auprès de sa sœur malade depuis novembre 2016, qu'une autre de ses sœurs et un de ses frères sont de nationalité française, qu'elle a sollicité en janvier 2017 son admission au séjour au titre de son état de santé et qu'à la suite de l'annulation par un jugement du 23 avril 2019 du tribunal administratif de Marseille du refus de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour que lui avait opposé le préfet des Bouches-du-Rhône, elle a obtenu des autorisations provisoires de séjour puis un certificat de résidence valables du 24 juin 2019 au 26 septembre 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier de l'arrêté du 23 avril 2021 dont les motifs ne sont pas contestés sur ce point, que la requérante n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où résident trois de ses cinq enfants et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 72 ans. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à Mme C... le titre de séjour sollicité, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis par cette mesure. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent, dès lors, être écartés.
7. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de Mme C... en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
8. La décision portant refus de droit au séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision à l'appui de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté.
9. Pour les motifs exposés au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 6, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 avril 2021 du préfet des Bouches-du-Rhône rejetant sa demande de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
12. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... épouse A..., à Me Ant et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2023, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2023.
N° 22MA02717 2