La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/06/2023 | FRANCE | N°23MA00132

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 05 juin 2023, 23MA00132


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par une ordonnance n° 2205880 du 14 décembre 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la Cour :<

br>
Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Dridi, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par une ordonnance n° 2205880 du 14 décembre 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Dridi, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 1er décembre 2022 ;

3°) de " prononcer la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance ne pouvait être regardée comme tardive ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- son droit à être entendu a été méconnu ;

- le 2° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers faisait obstacle à ce qu'il lui fût fait obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il réside habituellement en France depuis l'âge de treize ans ;

- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire n'est pas motivée ;

- elle est injustifiée dès lors qu'il ne présentait pas de risque de fuite ;

- la décision portant interdiction de retour n'est pas motivée en fait ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 1er décembre 2022, le préfet des Alpes-Maritimes a fait obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour à M. B..., ressortissant tunisien né le 11 septembre 2000. Par l'ordonnance attaquée, dont M. B... relève appel, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté comme manifestement irrecevable la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article R. 776-15 du code de justice administrative : " Les jugements sont rendus, sans conclusions du rapporteur public, par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cet effet. (...) Il peut, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les recours entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ".

3. Aux termes de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. (...) ". Le II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative rappelle le délai de recours de 48 heures prévu par les dispositions précitées de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, aux termes de l'article R. 776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 (...) ne sont susceptibles d'aucune prorogation ".

4. D'une part, il résulte de ces dispositions que, pour être recevables, ces requêtes doivent être présentées au greffe du tribunal, pour y être enregistrées, dans un délai de 48 heures suivant la notification de l'arrêté comportant ces décisions. Ce délai de 48 heures, qui n'est pas un délai franc et n'obéit pas aux règles définies à l'article 642 du nouveau code de procédure civile, se décompte d'heure à heure et ne saurait recevoir aucune prorogation.

5. D'autre part, il appartient à un étranger détenu qui soutient que les conditions de la notification d'une obligation de quitter le territoire sans délai prise à son encontre portent atteinte à son droit à un recours effectif, d'apporter des éléments suffisamment précis et vraisemblables sur les conditions matérielles de sa détention pouvant justifier qu'il n'ait pas été mis en mesure d'avertir, dans les meilleurs délais, un conseil, son consulat ou une personne de son choix conformément à l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il incombe à l'administration de produire en sens contraire une argumentation de nature à démontrer que les contraintes résultant de la détention ne faisaient pas obstacle à ce que le délai spécial de 48 heures prévu au II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile commençât à courir.

6. Comme le relève l'ordonnance attaquée, l'arrêté litigieux a été notifié à M. B... par voie administrative le vendredi 9 décembre 2022 à 10 h 50, au parloir de la maison d'arrêt de Grasse. La notification de l'arrêté mentionne que M. B... comprend parfaitement le français et qu'il a refusé de signer la notification. M. B... ne conteste pas avoir effectivement reçu notification de l'arrêté à cette date et à cette heure. La circonstance que cette notification de l'arrêté ne comportait pas la signature de l'agent de la préfecture est sans incidence sur sa régularité.

7. Si M. B... soutient avoir été dans l'impossibilité matérielle d'exercer son droit au recours, il se borne, sans plus de précision, à soutenir " qu'il n'a été en mesure ni de bénéficier d'une consultation juridique au point d'accès au droit de la maison d'arrêt de Grasse eu égard aux délais très contraints (...), ni d'obtenir un accès direct à un téléphone ou un télécopieur ". Or, M. B... ne conteste pas que le " parloir avocat " était ouvert le vendredi et le samedi. S'il indique n'avoir pas eu " accès librement au téléphone pour contacter un avocat, cette demande devant au préalable faire l'objet d'un traitement par les services administratifs de la maison d'arrêt de Grasse ", il ne soutient pas avoir fait une telle demande en temps utile. Dans ces conditions, M. B... n'apporte pas d'éléments suffisamment précis et vraisemblables sur les conditions matérielles de sa détention pouvant justifier qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'exercer ses droits.

8. La demande de première instance a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nice le 13 décembre 2022, soit après l'expiration du délai de 48 heures dont disposait l'intéressé.

9. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande comme manifestement tardive et donc irrecevable. Ses conclusions à fin d'annulation doivent dès lors être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Doivent également être rejetées par voie de conséquence, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions à fin de suspension de l'arrêté préfectoral.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Dridi et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2023, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 juin 2023.

N° 23MA00132 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00132
Date de la décision : 05/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : DRIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-05;23ma00132 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award