Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Mahmouti a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante algérienne, relève appel du jugement du 27 juin 2022 par lequel tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande aux fins d'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'ensemble des décisions contestées :
2. L'arrêté attaqué a été signé par Mme C..., adjointe au chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile, qui a reçu par un arrêté n° 13-2021-08-31-00005 du 31 août 2021, publié au recueil des actes administratifs n° 13-2021-247 de la préfecture des Bouches-du-Rhône, délégation de signature pour l'ensemble des attributions exercées par M. A..., chef du bureau, ayant reçu délégation de signature du préfet notamment pour les refus de délivrance de titre de séjour, les obligations de quitter le territoire, les mesures fixant le pays de destination et les interdictions de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté comme manquant en fait.
En ce qui concerne la décision portant refus d'admission au séjour :
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
4. Mme D... ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français et s'y est maintenue malgré deux obligations de quitter le territoire français datées du 27 juin 2016 et du 17 décembre 2018 édictées à son encontre, confirmées par le tribunal administratif, et qu'elle ne conteste pas ne pas avoir exécutées. En outre, les documents qu'elle produit n'établissent pas son allégation selon laquelle elle réside en France de manière continue depuis 2010, notamment s'agissant des années 2010 à 2013 pour lesquelles elle ne justifie que d'une présence ponctuelle sur le territoire national. Si, par ailleurs, ses deux enfants et ses petits-enfants vivent en France, elle ne démontre pas non plus l'existence d'un obstacle à ce qu'elle retourne en Algérie pour solliciter les autorisations nécessaires afin de revenir leur rendre visite. Elle n'établit pas davantage la nécessité de la présence d'une tierce personne à ses côtés en se bornant à se prévaloir d'une attestation ancienne, datée du 27 mars 2017, et peu précise, faisant état d'un tel besoin " en cas de crise ", ainsi que d'une attestation rédigée le 16 février 2021 par sa fille qui certifie la prendre en charge en raison d'une " maladie chronique ". Enfin, elle a vécu dans son pays d'origine jusqu'au moins l'âge de 46 ans selon ses déclarations et si elle expose être séparée de son mari qui y est demeuré, il est constant qu'y vivent encore ses parents. Ainsi et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision lui refusant un titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations citées au point 3.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que la décision de refus de titre de séjour n'est pas illégale. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Enfin, la requérante ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Selon l'article L. 612-10 de ce même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".
9. Il ressort des termes mêmes des dispositions précitées de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
10. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
11. Il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet des Bouches-du-Rhône a relevé que Mme D... soutenait être entrée en France le 30 septembre 2010 et y résider habituellement depuis sans pouvoir toutefois l'établir, en ayant fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement, qu'elle n'était pas dépourvue d'attaches familiales sur le territoire français mais disposait de fortes attaches dans son pays d'origine. Si le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas fait référence, dans sa décision, au critère relatif à la menace à l'ordre public que représenterait la présence de l'intéressée sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... représenterait une telle menace et que l'autorité préfectorale aurait retenu une telle circonstance à son encontre. Ainsi, dans la mesure où les termes de l'ensemble de l'arrêté litigieux établissent que la situation de la requérante a été appréciée au regard de sa durée de présence en France, des conditions de son séjour et de l'existence d'une précédente mesure d'éloignement, le préfet des Bouches-du-Rhône a suffisamment motivé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
12. En second lieu, pour les motifs exposés précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour et compte tenu notamment de ce que Mme D... a fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement qu'elle ne conteste pas ne pas avoir exécutées, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
13. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
14. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions accessoires :
15. Par voie de conséquence de ce qui vient d'être dit, les conclusions de la requérante présentées en appel à fin d'injonction et au titre des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2023 où siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- M. Mahmouti, premier conseiller,
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juin 2023.
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N° 22MA02080
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