La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2023 | FRANCE | N°23MA00038

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 16 octobre 2023, 23MA00038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre du regroupement familial sur le fondement de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2207216 du 8 décembre 2022, le tribunal administra

tif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2022, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre du regroupement familial sur le fondement de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2207216 du 8 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2023, Mme E..., représentée par Me Prezioso, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 décembre 2022 ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de suspendre l'exécution de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire ;

4°) de rétablir le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

5°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui accorder une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire a été prise sans qu'elle n'ait été en mesure de produire ses observations en méconnaissance du principe général du droit de l'Union Européenne à être entendu ;

- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que le préfet n'a pas tenu compte du fait qu'elle était victime de violences conjugales et qu'elle avait déposé une plainte contre son mari ;

- en refusant de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale ;

- elle est en droit de bénéficier du dispositif de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 décembre 2012.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C 277/11 du 22 novembre 2012, C-383/13 du 10 septembre 2013, C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., ressortissante algérienne de vingt-neuf ans, a sollicité le 17 mai 2022 la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement de l'article 4 de l'accord franco-algérien au titre du regroupement familial. Par arrêté du 1er juillet 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé comme pays de destination celui dont elle a la nationalité. Mme E... a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par le jugement du 8 décembre 2022, le tribunal administratif a rejeté cette demande. Mme E... fait appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté, et qui est désormais repris à l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire ou pluriannuel et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé (...) ".

3. Ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la Charte des droits fondamentaux. Si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu.

4. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.

5. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour.

6. Enfin, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt du 10 septembre 2013 cité au point 3, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

7. Il ressort des pièces du dossier que l'appelante ayant présenté une demande de titre de séjour, la seule circonstance que le préfet n'ait pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé l'intéressée qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, elle serait susceptible d'être contrainte de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de la regarder comme ayant été privée de son droit à être entendue, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ce principe ne peut qu'être écarté.

8. En deuxième lieu, l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait insuffisamment motivé doit être écarté.

9. En troisième lieu, d'une part, aux termes des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente (...) ". Aux termes du titre II du protocole annexé au même accord : " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien (...) ". Aux termes de l'article 7 du même accord : " Les dispositions du présent article et celles de l'article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau. (...) d) Les ressortissants algériens autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial, s'ils rejoignent un ressortissant algérien lui-même titulaire d'un certificat de résidence d'un an, reçoivent de plein droit un certificat de résidence de même durée de validité, renouvelable et portant la mention " vie privée et familiale de l'article 7 bis ". Aux termes de l'article 7 bis du même accord : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : (...) d) Aux membres de la famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial. ".

10. Le regroupement familial, lorsqu'il est autorisé au profit du conjoint d'un ressortissant algérien résidant en France, a pour objet de rendre possible la vie commune des époux, ainsi qu'il résulte notamment des stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien.

11. D'autre part, ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Si une ressortissante algérienne ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la première délivrance d'un titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée.

12. Il n'est pas contesté que M. et Mme C... étaient séparés depuis janvier 2022, l'intéressée ayant déposé une plainte pour violences psychologiques et ayant quitté le domicile conjugal, soit depuis une date antérieure à la décision attaquée. Le préfet des Bouches-du-Rhône a dès lors pu rejeter la première demande de certificat de résidence présentée par Mme E... en raison de la rupture de la vie commune. Par ailleurs, l'appelante allègue être victime d'actes de violences psychologiques émanant de son époux et sa belle-sœur. Si elle a entendu se prévaloir de la faculté ouverte au préfet de tenir compte de cet élément en dépit de la rupture de la vie commune, il ne ressort pas des pièces du dossier que les violences dont Mme E... se dit victime soient établies. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son refus sur la situation de l'intéressée que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas délivré à Mme E... le premier certificat de résidence qu'elle sollicitait.

13. Enfin, la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 4 février 2015 (Ministre de l'intérieur c/ M. B... A...) a jugé que la personne en droit de prétendre à l'attribution d'un avantage prévu par un texte peut se prévaloir, devant le juge administratif, des lignes directrices publiées permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre, mais qu'il en va autrement lorsque l'administration a défini des orientations générales pour l'octroi d'une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit. Elle a jugé que la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comportait des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation des étrangers en situation irrégulière, mesures de faveur au bénéfice desquelles ceux-ci ne peuvent faire valoir aucun droit, et que les intéressés ne peuvent donc utilement se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir contre une décision préfectorale refusant de régulariser leur situation par la délivrance d'un titre de séjour.

14. En instituant le mécanisme de garantie de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, le législateur n'a pas permis de se prévaloir d'orientations générales dès lors que celles-ci sont définies pour l'octroi d'une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit, alors même qu'elles ont été publiées sur l'un des sites mentionnés à l'article D. 312-11 précité. S'agissant des lignes directrices, le législateur n'a pas subordonné à leur publication sur l'un de ces sites la possibilité pour toute personne de s'en prévaloir, à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif.

15. Dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, il ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir. Il s'ensuit que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort qu'elle n'a pas pu bénéficier du " dispositif " institué par cette circulaire.

16. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2022.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

17. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'appelle aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin de suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire :

18. L'étranger n'est pas fondé dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir contre un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire à solliciter la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement contestée. Par suite, les conclusions en ce sens présentées par Mme E... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin de rétablissement de l'aide juridictionnelle :

19. Aux termes de l'article 50 de la loi du 10 juillet 1991 : " Sans préjudice des sanctions prévues à l'article 441-7 du code pénal, le bénéfice de l'aide juridictionnelle ou de l'aide à l'intervention de l'avocat est retiré, en tout ou partie, même après l'instance ou l'accomplissement des actes pour lesquels il a été accordé, dans les cas suivants : [...] /4° Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle ou de l'aide à l'intervention de l'avocat a été jugée dilatoire, abusive, ou manifestement irrecevable ; / [...] ". L'article 51 de cette loi précise que : " Le retrait de l'aide juridictionnelle ou de l'aide à l'intervention de l'avocat peut intervenir jusqu'à quatre ans après la fin de l'instance ou de la mesure. Il peut être demandé par tout intéressé. Il peut également intervenir d'office. / [...] 2° Par la juridiction saisie dans le cas mentionné au 4° du même article 50. ".

20. Il résulte des dispositions citées au point précédent que le juge doit, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, prononcer le retrait total de l'aide juridictionnelle accordée pour une requête lorsqu'il juge celle-ci abusive ou dilatoire. Lorsqu'il est prononcé d'office, un tel retrait traduit la mise en œuvre d'un pouvoir propre du juge qui, lorsqu'il en fait usage, ne soulève pas d'office un moyen d'ordre public et n'est en conséquence pas tenu de procéder à la communication prescrite par les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

21. Pour juger le recours présenté par Mme E... abusif et décider pour ce motif du retrait de l'aide juridictionnelle accordée à Mme E..., les premiers juges se sont fondés sur l'absence totale de production par son conseil de pièces justificatives à l'appui de moyens sommaires, imprécis et manifestement infondés. Si de telles circonstances peuvent établir le fait que l'avocat représentant Mme E... a réalisé sa mission dans des conditions critiquables et insuffisantes, elles ne sont pas de nature à permettre de caractériser le recours présenté au nom de Mme E... comme abusif au sens du 4° de l'article 50 de la loi du 10 juillet 1991. Il en résulte que l'appelante est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 décembre 2022, qui lui a retiré le bénéfice de l'aide juridictionnelle au motif que sa demande revêtait un caractère abusif.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme E... dirigées contre l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 décembre 2022 est annulé.

Article 2 : Le surplus de la requête de Mme E... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 octobre 2023.

2

No 23MA00038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00038
Date de la décision : 16/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Famille - Regroupement familial (voir : Etrangers).


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : PREZIOSO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-16;23ma00038 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award