La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2024 | FRANCE | N°23MA00887

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 18 octobre 2024, 23MA00887


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière (SCI) La Tarente a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté de péril imminent pris par le maire d'Ollioules le 1er octobre 2020.

Par un jugement n° 2003291 du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 1er octobre 2020, a mis à la charge de la commune d'Ollioules une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de

s conclusions de la requête.





Procédure devant la cour :



Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) La Tarente a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté de péril imminent pris par le maire d'Ollioules le 1er octobre 2020.

Par un jugement n° 2003291 du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 1er octobre 2020, a mis à la charge de la commune d'Ollioules une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 avril 2023 et 20 décembre 2023, la commune d'Ollioules, représentée par la SELARL LLC et associés, agissant par Me Faure-Bonaccorsi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 16 février 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SCI La Tarente ;

3°) de mettre à la charge de la SCI La Tarente la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ouvrage en cause ne constitue pas une dépendance de la voie publique ; il s'agit d'une construction précaire réalisée sur un terrain privé en vue de son aménagement ;

- l'ouvrage en litige ne présente pas les caractéristiques d'un mur de soutènement de la voie publique ; il a été aménagé postérieurement à la création de la voie publique et sert à retenir les gravats et déchets amassés sur le terrain ; il incombe à la SCI La Tarente d'en assurer l'entretien et la réparation ;

- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 30 octobre 2023 et 4 janvier 2024, la SCI La Tarente, représentée par la SELARL Debeaurain et Associés, agissant par Me Berenger, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête d'appel de la commune d'Ollioules ;

2°) de mettre à la charge de la commune d'Ollioules la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le mur litigieux est un mur de soutènement dont l'objet est de retenir les terres de la voie publique où se trouvent notamment des places de stationnement ;

- la circonstance qu'elle aurait édifié le mur n'a aucune incidence sur l'appartenance de ce dernier au domaine public ; aucun titre de propriété n'attribue à la SCI La Tarente la propriété du mur litigieux ;

- ce mur permet d'éviter que la décharge sauvage présente sur le domaine public ne vienne empiéter sur la parcelle cadastrée section BC n° 68.

- dans l'hypothèse où le mur ne serait pas considéré comme un accessoire indispensable de la voie publique, les mesures provisoires de mise en sécurité du mur qui ont été prescrites sont inadaptées et disproportionnées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Haas, représentant la commune d'Ollioules, et de Me Tagnon, représentant la SCI La Tarente.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) La Tarente est propriétaire d'une parcelle cadastrée section BC n° 68, située 873 Chemin de Piédardant à Ollioules. Par un courrier du 23 septembre 2020, le maire d'Ollioules a informé la SCI La Tarente qu'il engageait une procédure de péril imminent visant un ouvrage de soutènement situé sur cette parcelle. Une expertise a été diligentée par le tribunal administratif de Toulon par ordonnance du 28 septembre 2020 à la demande de la commune. L'experte a déposé son rapport le 30 septembre 2020. Le maire d'Ollioules a pris le 1er octobre 2020 un arrêté de péril imminent concernant cette construction et a mis en demeure la SCI La Tarente, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de cet arrêté, de procéder à l'évacuation et au relogement des personnes exposées à un risque d'effondrement de l'ouvrage et de réaliser les travaux de sécurisation et de confortement nécessaires. Par un jugement du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a cependant annulé cet arrêté. La commune d'Ollioules relève appel de ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du 1er octobre 2020 :

2. Aux termes de l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " Le maire prescrit la réparation ou la démolition des murs, bâtiments, édifices ou monuments funéraires menaçant ruine dans les conditions prévues aux articles L. 511-1 à L. 511-4-1 du code de la construction et de l'habitation. ". Aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction alors applicable : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques : " Font également partie du domaine public les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1 qui, concourant à l'utilisation d'un bien appartenant au domaine public, en constituent un accessoire indissociable. ".

3. En l'absence de titre en attribuant la propriété aux propriétaires des parcelles en bordure desquelles il est édifié ou à des tiers, un mur assurant le soutènement de la voie publique située en surplomb et dont la présence évite la chute de matériaux qui pourraient provenir des fonds qui la surplombent doit être regardé comme un accessoire de la voie publique et comme appartenant, par suite, au domaine public, alors même qu'il serait implanté dans sa totalité sur le terrain privé de la société ou qu'il aurait été réalisé par une personne privée.

4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'expertise réalisée par Mme A..., experte en bâtiment, à la demande du tribunal administratif de Toulon, que l'ouvrage litigieux est un mur de soutènement situé sur la parcelle cadastrée section BC n° 68 appartenant à la SCI La Tarente. Il est précisé qu'en surplomb du mur se trouve le chemin communal de Piédardant, dont il n'est pas contesté qu'il appartient au domaine public, ainsi qu'un emplacement utilisé pour le stationnement de véhicules. L'experte indique, à l'appui de photographies, que ce mur, servant également de clôture à la parcelle, est constitué majoritairement de poteaux électriques en béton menaçant de s'effondrer en cas de fortes pluies et doit faire l'objet de travaux de confortement afin d'assurer la protection des occupants de la parcelle et des usagers de la voie publique. Il est constant par ailleurs que l'arrêté de péril imminent pris par le maire d'Ollioules qualifie également l'ouvrage en cause de mur de soutènement, et précise que l'état dans lequel il se trouve ne permet pas de garantir la sécurité publique. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un titre ait attribué à la SCI La Tarente, ou à un tiers, la propriété du mur en cause, l'acte notarié du 14 février 2008, portant sur la parcelle cadastrale BC n° 68 acquise par la SCI La Tarente, n'en faisant, au demeurant et en tout état de cause, aucune mention. Cet ouvrage doit ainsi être regardé comme permettant d'assurer la sécurité des usagers de la voie publique dont il constitue ainsi un accessoire indispensable. La circonstance qu'il ait aussi pour fonction de servir de limite séparative à la parcelle, qu'il ait permis l'installation de caravanes, containers, mobil-homes et le stockage de matériaux est sans incidence sur cette qualification. Sont également sans incidence les faits, à les supposer avérés, que l'ouvrage ait été construit après la création du chemin communal et que celui-ci ne suive pas précisément le linéaire de la parcelle section BC n° 68 ou de la voie publique. Enfin, la commune d'Ollioules n'établit pas davantage qu'il existerait en réalité un autre mur de soutènement, initialement édifié pour assurer le maintien de la voie, mais qui serait désormais recouvert par l'ouvrage en litige. Par suite, et dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le mur en cause, qui est un mur de soutènement des terres situées en surplomb, constitue un accessoire de la voie publique, celui-ci doit être regardé, en l'absence de titre en attribuant la propriété à la SCI La Tarente ou à un tiers, comme appartenant au domaine public et devant être entretenu par la commune, et ce quand bien même il n'aurait pas été construit par cette dernière.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ollioules n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du maire de cette commune du 1er octobre 2020.

Sur les frais liés au litige :

6. Les frais de l'expertise confiée à Mme A..., experte, liquidés et taxés à la somme totale de 996,66 euros par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon du 7 octobre 2020, sont mis à la charge définitive de la commune d'Ollioules.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI La Tarente, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune d'Ollioules demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune d'Ollioules la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SCI La Tarente et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Ollioules est rejetée.

Article 2 : Les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme totale de 996,66 euros par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon du 7 octobre 2020, sont mis à la charge définitive de la commune d'Ollioules.

Article 3 : La commune d'Ollioules versera à la SCI La Tarente la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière La Tarente et à la commune d'Ollioules.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2024.

N° 23MA00887


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00887
Date de la décision : 18/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Police - Police de la sécurité - Immeubles menaçant ruine.

Domaine - Domaine public - Consistance et délimitation - Domaine public artificiel - Biens faisant partie du domaine public artificiel - Voies publiques et leurs dépendances.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : CABINET JEAN DEBEAURAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-18;23ma00887 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award