Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... E... a demandé au tribunal administratif de Toulon :
- par une requête enregistrée sous le n° 2003228, d'annuler la décision du maire de Pignans portant affectation au poste d'instructeur en urbanisme ;
- par une requête enregistrée sous le n° 2003320, d'annuler l'arrêté du 3 août 2020 du maire de Pignans portant retrait de sa nouvelle bonification indiciaire ;
- par une requête enregistrée sous le n° 2003323, d'annuler l'arrêté du 3 août 2020 du maire de Pignans relatif à la révision du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ;
- par une requête enregistrée sous le n° 2101459, d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire adressée le 26 janvier 2021, de condamner la commune de Pignans à lui verser la somme de 77 422,20 euros en réparation des préjudices subis résultant du harcèlement moral dont elle s'estime victime, d'enjoindre à la commune de Pignans, sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter d'une semaine après la notification du jugement, de la rétablir dans ses droits, fonctions et postes à la date du 4 juillet 2020 et d'enjoindre à la commune, sous astreinte de 10 000 euros par acte ou agissement à compter d'une semaine après la notification du jugement, de faire cesser tout acte ou agissement portant atteinte à ses conditions de travail, à sa dignité, à son honneur, à son professionnalisme ou à sa santé.
Par un jugement n°s 2003228, 2003320, 2003323 et 2101459 du 10 février 2023, le tribunal administratif de Toulon, après avoir joint les requêtes dont il était saisi, a rejeté les demandes de Mme B... E....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 avril 2023, Mme B... E..., représentée par Me Pistone, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon, en tant qu'il a rejeté, à son article 1er, l'ensemble de ses demandes ;
2°) d'annuler la décision du maire de Pignans portant affectation au poste d'instructeur en urbanisme, les arrêtés précités du 3 août 2020 et la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire du 26 janvier 2021 ;
3°) de condamner la commune de Pignans à lui payer la somme de 77 422,20 euros en réparation des préjudices subis résultant du harcèlement moral dont elle s'estime victime, majorée des intérêts légaux à compter de la date de sa réclamation préalable et de la capitalisation des intérêts ;
4°) d'enjoindre à la commune de Pignans, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter d'une semaine après la notification du jugement, de la rétablir dans ses droits, ses fonctions et postes à la date du 4 juillet 2020 ;
5°) d'enjoindre à la commune de Pignans, sous astreinte de 10 000 euros par acte ou agissement à compter d'une semaine après la notification du jugement, de faire cesser tout acte ou agissement portant atteinte à ses conditions de travail, à sa dignité, à son honneur, à son professionnalisme ou à sa santé ;
6°) de mettre à la charge de la commune de Pignans la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le jugement méconnaît les articles L. 10 et R 741-2 du code de justice administrative, à défaut de mentionner les nom et prénom des juges qui ont rendu la décision et de comporter leur signature ;
- il est entaché d'une erreur de fait et d'une dénaturation des faits et des pièces du dossier ;
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :
S'agissant de la décision de mutation sur un poste d'instructeur :
- elle est entachée de plusieurs vices de procédure à défaut d'avoir fait l'objet d'une déclaration préalable de vacance de poste, en l'absence de communication de son dossier et de consultation de la commission administrative paritaire prévue à l'article 52 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le changement d'affectation n'ayant pas été effectué dans l'intérêt du service et constituant une sanction déguisée ;
- elle est entachée d'un détournement de pouvoir.
S'agissant de l'arrêté du 3 août 2020 portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire :
- il est entaché d'un défaut de motivation en droit et en fait ;
- il constitue un faux en écritures publiques ;
- il est entaché d'une erreur de droit ; l'arrêté en cause emporte des effets rétroactifs ; le changement d'affectation n'a pas été effectué dans l'intérêt du service et constitue une sanction déguisée ;
- il est entaché d'un détournement de pouvoir.
S'agissant de l'arrêté du 3 août 2020 relatif à la révision du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise :
- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation en droit ;
- il constitue un faux en écritures publiques ;
- l'arrêté en cause emporte des effets rétroactifs ;
- il est entaché d'une erreur de droit, le changement d'affectation n'ayant pas été effectué dans l'intérêt du service et constituant une sanction déguisée ;
- il est entaché d'un détournement de pouvoir.
S'agissant de la demande d'indemnisation des préjudices résultant du harcèlement moral :
- elle a subi une dégradation de ses conditions de travail, constitutive d'une situation de harcèlement moral ;
- ses préjudices doivent être indemnisés à hauteur de 75 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2023, la commune de Pignans, représentée par la SELARL Mauduit Lopasso Goirand et associés, agissant par Me Lopasso, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de Mme B... E... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement n'est pas irrégulier ;
- les moyens soulevés par Mme B... E... à l'encontre de l'ensemble des décisions contestées ne sont pas fondés ;
- les faits invoqués par la requérante ne révèlent aucune situation de harcèlement moral et ne sauraient donner lieu à une indemnisation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code pénal ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;
- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;
- le décret n°2006-779 du 3 juillet 2006 ;
- le décret n° 93-863 du 18 juin 1993 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Danveau,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Lopasso représentant la commune de Pignans.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... E..., rédactrice principale de première classe exerçant ses fonctions au sein de la commune de Pignans, occupait depuis 2017 le poste de cheffe de cabinet, de responsable des services urbanisme, marchés publics, contentieux, techniques et d'adjointe à la secrétaire générale. A compter du mois d'août 2020, elle a été affectée au poste d'agent assermenté en urbanisme, entraînant une modification de son régime indemnitaire, en particulier la diminution du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise par arrêté du 3 août 2020 et la suppression de la nouvelle bonification indiciaire par un second arrêté du même jour. Par une demande indemnitaire du 26 janvier 2021, Mme B... E... a, par ailleurs, sollicité la réparation des préjudices causés par la situation de harcèlement moral dont elle estime avoir été victime, à hauteur de 77 422,20 euros. Cette demande a été implicitement rejetée. Celle-ci relève appel du jugement du 10 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation de l'ensemble de ces décisions et à la condamnation de la commune de Pignans à l'indemniser des différents préjudices qu'elle estime avoir subis.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative : " Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus (...) ". Aux termes de l'article R. 741-7 de ce code : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". En l'espèce, le jugement attaqué fait figurer, sur la première page, les noms du rapporteur et du rapporteur public, ainsi que, sur les deux dernières pages, les noms et initiales du président de la formation du jugement et de l'assesseur qui a siégé dans cette formation, ce qui suffisait en l'espèce, dès lors que les dispositions précitées ne font obligation que de mentionner le nom des juges ayant rendu le jugement et non leur prénom. Sur la minute du jugement, figurent en outre la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur du dossier et du greffier, lesquels sont clairement identifiés. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier au regard des dispositions de l'article L. 10 du code de justice administrative ne peut qu'être écarté.
3. Aux termes de l'article R. 741-2 du même code : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. ". Il résulte du jugement attaqué que ce dernier comporte le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont il fait application. Dès lors, ce jugement n'est pas entaché d'irrégularité.
4. Si Mme B... E... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de fait et d'une dénaturation des faits et des pièces du dossier, de tels moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal administratif, ne sont pas de nature à affecter la régularité de ce jugement. Ils doivent, par suite, être écartés.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision d'affectation sur un poste d'agent assermenté en urbanisme :
5. Les dispositions de l'article 41 de la loi du 26 janvier 1984, aux termes desquels " Lorsqu'un emploi permanent est créé ou devient vacant, l'autorité territoriale en informe le centre de gestion compétent qui assure la publicité de cette création ou de cette vacance, à l'exception des emplois susceptibles d'être pourvus exclusivement par voie d'avancement de grade. (...) ", ne s'appliquent pas à l'administration dans le cas où elle prononce une mutation dans l'intérêt du service, ce qui est le cas en l'espèce au vu des éléments exposés au point 11. En tout état de cause, Mme B... E... n'a été privée d'aucune garantie du fait de l'absence de publicité de la vacance de ce poste suite à sa mutation, vacance dont elle a été la première informée par la décision de changement de son affectation. Par suite le moyen tiré de l'absence de publication d'un avis de vacance d'emploi doit être écarté comme inopérant.
6. Aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les ouvriers et employés des administrations ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés, dans leur avancement d'ancienneté ".
7. En vertu de ces dispositions, un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier, en étant averti en temps utile de l'intention de l'autorité administrative de prendre la mesure en cause. Dans le cas où l'agent public fait l'objet d'un déplacement d'office, il doit être regardé comme ayant été mis à même de solliciter la communication de son dossier s'il a été préalablement informé de l'intention de l'administration de le muter dans l'intérêt du service, quand bien même le lieu de sa nouvelle affectation ne lui aurait pas alors été indiqué.
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... E..., qui occupait depuis 2017 le poste de cheffe de cabinet ainsi que de responsable des services urbanisme, marchés publics, contentieux et techniques et d'adjointe à la secrétaire générale, a été affectée, à compter du mois d'août 2020, au poste d'agent assermenté en urbanisme. Ce changement d'affectation a entraîné une diminution des responsabilités qui lui étaient jusqu'alors confiées, ainsi qu'une perte de revenus du fait de la suppression de la nouvelle bonification indiciaire et de la baisse de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise par arrêtés du maire de Pignans du 3 août 2020. Il suit de là que la décision litigieuse constitue une mesure prise en considération de la personne de la requérante, qui devait nécessairement être précédée de la communication de son dossier individuel. Or, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite des élections municipales de 2020, Mme B... E... a été informée, au cours d'entretiens individuels du 9 et 13 juillet 2020, du souhait du nouveau maire de réorganiser les services de la commune et du nécessaire changement d'affectation de l'agent. Cette information ressort également d'un courriel de la secrétaire générale de la commune du 13 juillet 2020 qui lui était adressé. La requérante doit dès lors être regardée comme ayant été mise à même de solliciter la communication de son dossier individuel, quand bien même le lieu de sa nouvelle affectation ne lui aurait pas alors été indiqué. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à consulter son dossier individuel dans le cadre d'une décision prise en considération de la personne et portant changement d'affectation, à le supposer soulevé, doit être écarté.
9. Aux termes de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa version antérieure à celle qui résulte de l'article 10 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique : " L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires (...). ". Par l'effet du 3° du III de l'article 10 de la loi du 6 août 2019 ont été supprimés à l'article précité les mots : " ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires ". Le IV de l'article 94 de la même loi dispose que : " L'article 10 s'applique en vue de l'élaboration des décisions individuelles prises au titre de l'année 2021. / Par dérogation au premier alinéa du présent IV (...) 1° Les décisions individuelles relatives aux mutations et aux mobilités ne relèvent plus des attributions des commissions administratives paritaires à compter du 1er janvier 2020, au sein de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; / (...) ".
10. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que s'agissant des décisions prises à compter du 1er janvier 2020, l'autorité territoriale n'est plus tenue de consulter pour avis la commission administrative paritaire avant de procéder aux mutations des fonctionnaires placés sous son autorité. Dans ces conditions, Mme B... E... ne peut utilement soutenir que la commission administrative paritaire n'a pas été consultée préalablement à l'édiction de la décision litigieuse portant affectation au poste d'agent assermenté à l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté comme inopérant.
11. Ainsi qu'il a été dit au point 8, la mesure contestée a entraîné pour l'agent une perte de responsabilités et de rémunération et constitue ainsi une mesure prise en considération de la personne de Mme B... E.... Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le changement d'affectation litigieux est intervenu à la suite de l'arrivée d'un nouveau maire qui a souhaité réorganiser l'ensemble des services de la commune. Cette dernière fait remarquer en défense que le maire a souhaité recruter un nouveau chef de cabinet, Mme B... E..., qui occupait ce poste depuis 2017, ayant été la collaboratrice directe de l'ancien maire et ne disposant pas ainsi de sa confiance. En effet, les emplois de cabinet, outre qu'ils n'ont pas vocation à être permanents, requièrent un engagement personnel déclaré au service des principes et objectifs guidant l'action de l'autorité politique ainsi qu'une relation de confiance personnelle d'une nature différente de celle résultant de la subordination hiérarchique du fonctionnaire à l'égard de son supérieur. Si la requérante a perdu, du fait de la réorganisation évoquée, les autres fonctions qu'elle occupait en plus de son emploi de cheffe de cabinet, il ressort des pièces du dossier, en particulier de la fiche du poste d'agent assermenté en urbanisme, que la requérante a été réaffectée sur un poste correspondant à son grade de rédactrice principale de première classe, consistant notamment à intervenir sur l'instruction des dossiers d'urbanisme en collaboration avec un autre agent, ce que confirment au demeurant les courriels produits de septembre 2020 portant sur l'instruction d'un permis de construire et la mise en œuvre d'une procédure de péril. Enfin, si les enregistrements audio produits par la requérante peuvent, même s'ils ont été enregistrés à l'insu de ses interlocuteurs, être régulièrement pris en compte par le juge, sans préjudice des éventuelles poursuites disciplinaires ou pénales susceptibles d'être engagées à l'encontre de l'agent. Néanmoins, ceux-ci portent essentiellement sur des conversations qui ne font que rapporter des agissements et citer des propos qu'auraient tenus le maire à l'encontre de Mme B..., à l'exception d'un entretien avec le maire mais dont aucun des propos retranscrits ne révèle l'intention de celui-ci de sanctionner la requérante. Ainsi, les éléments précités sont de nature à établir que son changement d'affectation a été décidé dans l'intérêt du service et ne révèle pas d'intention de l'administration de lui infliger une sanction. Par suite, Mme B... E... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige constitue une sanction déguisée fautive.
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté.
En ce qui concerne l'arrêté du 3 août 2020 portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire :
13. L'arrêté du 3 août 2020 vise notamment le décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale et l'arrêté du 2 avril 2019 portant attribution d'une bonification indiciaire de vingt-cinq points à Mme D... pour l'exercice des fonctions d'encadrement d'un service requérant une technicité en matière de commande publique, de gestion immobilière et foncière, de contentieux ou d'actions liées au développement et à l'aménagement de la collectivité. Il précise que Mme B... E... n'exerce plus depuis le 1er août 2020 les fonctions visées par l'arrêté précité et que la nouvelle bonification indiciaire de vingt-cinq points ne lui est en conséquence plus accordée à compter de cette date. Cet arrêté énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles est fondée la suppression de la nouvelle bonification indiciaire, et permettait à l'intéressée de comprendre l'objet et les raisons de cette suppression. Le moyen tiré de ce qu'il serait insuffisamment motivé ne peut dès lors être accueilli.
14. La seule circonstance que l'arrêté litigieux, qui comporte la signature du maire à la date du 3 août 2020 et qui a été notifié à Mme B... E... le 24 septembre 2020, constituerait un faux en écritures au seul motif qu'il comporterait une date de signature erronée au vu de l'absence du maire le jour de celle-ci, ne suffit pas à établir une altération frauduleuse de la vérité au sens des dispositions de l'article 441-1 du code pénal. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait pour ce motif entaché d'un vice de procédure doit être écarté.
15. Aux termes de l'article 2 du décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale prévoit que " La nouvelle bonification indiciaire cesse d'être versée lorsque le fonctionnaire quitte l'emploi au titre duquel il la percevait. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 18 juin 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique territoriale : " La nouvelle bonification indiciaire est attachée à certains emplois comportant l'exercice d'une responsabilité ou d'une technicité particulière. Elle cesse d'être versée lorsque l'agent n'exerce plus les fonctions y ouvrant droit. "
16. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, les moyens tirés de ce que l'arrêté portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire, qui est motivé par la circonstance que Mme B... E... a cessé d'exercer des fonctions lui donnant droit à cette bonification serait constitutif d'une sanction disciplinaire déguisée et serait entaché d'un détournement de pouvoir doiven être écartés.
17. Les décisions individuelles défavorables doivent entrer en vigueur à la date de leur notification aux personnes concernées. En l'espèce, la décision attaquée prononce le retrait de la nouvelle bonification indiciaire de Mme B... E... à compter du 1er août 2020 alors qu'elle est datée du 3 août 2020 et n'a été notifiée à la requérante que le 24 septembre 2020. L'administration ne pouvait conférer à cette décision, qui n'était pas nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent et ne présentait pas non plus le caractère d'une mesure de régularisation, une portée rétroactive, alors que Mme B... E... n'exerçait pas encore, au vu des courriels produits et de la fiche de poste qui ne lui a également été notifiée que le 24 septembre 2020, ses nouvelles fonctions d'agent assermenté en urbanisme qui ne lui donnaient plus droit au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Dans ces conditions, l'arrêté litigieux est entaché d'une rétroactivité illégale. Par suite, Mme B... E... est fondée à en demander l'annulation en tant qu'il fixe son entrée en vigueur à une date antérieure au 24 septembre 2020.
En ce qui concerne l'arrêté du 3 août 2020 portant révision du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise :
18. L'arrêté du 3 août 2020 vise notamment le décret du 20 mai 2014 portant création du régime tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat, applicable aux collectivités territoriales, le décret du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires territoriaux et la délibération par laquelle le conseil municipal de Pignans a approuvé la mise en place de ce régime indemnitaire pour les agents de la commune. Il précise que Mme B... E..., titulaire du grade de rédactrice territoriale principale de première classe, est, au regard de ses nouvelles fonctions et de son expérience professionnelle, classée dans le groupe de fonctions 1 de la catégorie B et percevra en conséquence, à compter du 1er août 2020, une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise d'un montant de 311,21 euros. Cet arrêté énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles est fondée la modification du montant de l'indemnité versée à Mme B... E..., et permettait à celle-ci de comprendre l'objet et les modalités de cette modification. Le moyen tiré de ce que l'arrêté serait insuffisamment motivé doit dès lors être écarté.
19. La seule circonstance que l'arrêté litigieux, qui comporte la signature du maire à la date du 3 août 2020 et a été notifié à Mme B... E... le 24 septembre 2020, constituerait un faux en écritures au seul motif qu'il comporterait une date de signature erronée au vu de l'absence du maire le jour de celle-ci, ne suffit pas à établir une altération frauduleuse de la vérité au sens des dispositions de l'article 441-1 du code pénal. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait pour ce motif entaché d'un vice de procédure doit être écarté.
20. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, les moyens tirés de ce que l'arrêté en litige constituerait une sanction déguisée fautive et serait entaché d'un détournement de pouvoir doivent être écartés.
21. Les décisions individuelles défavorables doivent entrer en vigueur à la date de leur notification aux personnes concernées. En l'espèce, la décision attaquée révise le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise allouée à Mme B... E... à compter du 1er août 2020, alors qu'elle est datée du 3 août 2020 et n'a été notifiée à la requérante que le 24 septembre 2020. L'administration ne pouvait conférer à cette décision, qui n'était pas nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent et ne présentait pas non plus le caractère d'une mesure de régularisation, une portée rétroactive, alors que Mme B... E... n'exerçait pas encore, au vu des courriels produits et de la fiche de poste qui ne lui a également été notifiée que le 24 septembre 2020, ses nouvelles fonctions d'agent assermenté en urbanisme qui ne lui donnaient plus droit au bénéfice de cette indemnité. Dans ces conditions, l'arrêté litigieux est entaché d'une rétroactivité illégale. Par suite, Mme B... E... est fondée à en demander l'annulation en tant qu'il fixe son entrée en vigueur à une date antérieure au 24 septembre 2020.
En ce qui concerne les agissements constitutifs de harcèlement moral :
22. Aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. " Aux termes de l'article 6 quinquies de la même loi : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) ".
23. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.
24. Les agissements de harcèlement moral dont Mme B... E... prétend avoir été victime au sein de la commune de Pignans consistent en une perte de responsabilités, une mise à l'écart et une dégradation matérielle et qualitative de ses conditions de travail.
25. Si le changement d'affectation de Mme B... E... ayant conduit à une diminution de ses responsabilités et de sa rémunération est susceptible de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, il résulte de l'instruction et des éléments apportés par la commune que l'intéressée a été affectée au poste d'agent assermenté en urbanisme, dont les missions correspondent à son grade. Ainsi qu'il a été dit au point 11, ce changement ne constitue pas, dans les circonstances où il est intervenu, une mesure revêtant le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée mais est justifié par des considérations étrangères à tout harcèlement. Par ailleurs, les courriels produits de septembre et octobre 2020 portant sur l'instruction d'un permis de construire, la mise en œuvre d'une procédure de péril et une demande de la secrétaire générale afin qu'elle réalise l'entretien professionnel d'un des agents du service urbanisme montrent que celle-ci n'était pas dispensée de tâches à exécuter correspondant à son grade de rédactrice territoriale principale. Enfin, conformément aux éléments exposés aux points 14 et 19, les arrêtés du 3 août 2020 portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire et révision du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ne constituent pas des faux en écriture et ne révèlent aucune volonté de nuire à la requérante, la seule circonstance qu'ils soient entachés de rétroactivité illégale ne suffisant pas davantage à révéler une telle intention.
26. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, les enregistrements audio produits ne révèlent en tout état de cause pas une volonté de nuire à Mme B... E... par des faits constitutifs de harcèlement.
27. Il ne résulte pas davantage de l'instruction, en l'absence de toute pièce circonstanciée, que Mme D... aurait été privée d'un emplacement de stationnement réservé aux agents et élus de la commune et de la possibilité d'utiliser un véhicule communal pour ses déplacements professionnels.
28. La circonstance que le service de l'urbanisme ait été fermé au public pendant quelques jours en octobre 2020 en raison de l'absence d'un agent n'est pas susceptible de caractériser un agissement spécifiquement dirigé contre de Mme B... E....
29. La circonstance qu'elle n'aurait pas été tenue informée de la signature et de la transmission aux services préfectoraux d'une délibération du conseil municipal approuvant des délégations de pouvoir au maire, ne saurait suffire à démontrer l'intention de ses supérieurs hiérarchiques de lui nuire et de la déstabiliser sur sa capacité à mener à bien ses missions, les courriels produits montrant au demeurant un certain nombre d'échanges avec la secrétaire générale de la commune. Par ailleurs, la réalité de la mise à l'écart invoquée par la requérante n'est pas davantage établie par l'absence d'invitation à un apéritif organisé dans le bâtiment principal de la mairie et le comportement allégué de certains collègues à son égard. Si la requérante soutient que ses supérieurs lui ont demandé de remettre les clés de la mairie, une telle initiative relève de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et est conforme à l'intérêt du service alors qu'il est constant qu'elle se trouvait en possession de la clé lui permettant d'accéder à son bureau. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... E... ne recevait plus d'appels téléphoniques depuis le 6 juillet 2020 ainsi qu'elle l'allègue, alors que la commune se prévaut de difficultés techniques qui ont été résolues et qui ne portaient pas uniquement sur la ligne téléphonique de la requérante. A cet égard, les courriels de la requérante datés du 27 juillet 2020 et du 10 août 2020, confirmant la réalisation de travaux d'installation dans les locaux du service de l'urbanisme et l'interruption de la ligne téléphonique dans l'ensemble des locaux de la mairie, ne saurait établir une intention de dégrader les conditions de travail de l'intéressée. Il en va de même du changement de bureau envisagé par sa hiérarchie mais qui ne s'est en tout état de cause jamais concrétisé dès lors que l'expert mandaté par la commune a conclu à l'insalubrité et à la dangerosité des lieux.
30. S'agissant du respect des mesures sanitaires permettant de faire face à l'épidémie de covid-19, il ne résulte pas de l'instruction que la requérante n'aurait pas disposé du matériel nécessaire pour se protéger durant l'exercice de ses fonctions et qu'elle aurait, au titre des mesures sanitaires mises en œuvre au sein de la commune, été traitée différemment des autres agents. De plus, la commune de Pignans établit qu'elle a mis à la disposition de ses agents des masques, a organisé un plan de continuité des services et un protocole sanitaire et a élaboré un calendrier de télétravail et de reprise suite au déconfinement.
31. Enfin, la circonstance que Mme B... E... soit suivie pour un syndrome anxio-dépressif qui serait en lien avec l'exercice de ses fonctions ne suffit pas à établir, à elle seule, la réalité des faits de harcèlement moral dont elle fait état.
32. Il suit de là que les éléments de faits soumis par Mme B... E... dans la présente instance, même pris dans leur ensemble, s'ils révèlent une situation conflictuelle entre la requérante et la commune, ne sont pas susceptibles de caractériser l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral à son encontre. Par suite, Mme B... E... n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de la commune de Pignans serait engagée du fait de tels agissements.
33. Il résulte de ce qui précède que Mme B... E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions indemnitaires ainsi que celles présentées à fin d'injonction sous astreinte.
34. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... E... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 3 août 2020 portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire et révision du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise en tant qu'ils fixent une date d'entrée en vigueur antérieure au 24 septembre 2020. Le jugement attaqué doit, dès lors, être annulé dans cette mesure.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
35. L'annulation, par le présent arrêt, des arrêtés du 3 août 2020 en tant qu'ils retirent l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à Mme B... E... et diminuent l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise allouée à cette dernière sur la période du 1er août 2020 au 23 septembre 2020 implique qu'il soit fait injonction à l'administration d'attribuer à Mme B... E... une bonification indiciaire de vingt-cinq points et une indemnité mensuelle de fonctions, de sujétions et d'expertise et de procéder, sur cette période, au calcul et à la liquidation au profit de la requérante des sommes correspondantes dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte pour l'y contraindre.
Sur les frais liés au litige :
36. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°s 2003228, 2003320, 2003323 et 2101459 du 10 février 2023 du tribunal administratif de Toulon est annulé seulement en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande de Mme B... E... tendant à l'annulation des arrêtés du 3 août 2020 portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire et révision du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise en tant qu'ils fixent une date d'entrée en vigueur antérieure au 24 septembre 2020.
Article 2 : Les arrêtés du 3 août 2020 du maire de Pignans portant retrait de la nouvelle bonification indiciaire et révision du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise sont annulés en tant seulement qu'ils fixent leur entrée en vigueur à une date antérieure au 24 septembre 2020.
Article 3 : Il est enjoint à la commune de Pignans de réexaminer la situation de Mme B... E... sur la période du 1er août 2020 au 23 septembre 2020 au regard de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, et de lui verser un rappel des sommes dues à ce titre, selon les modalités précitées au point 35.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... E... et à la commune de Pignans.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, où siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- Mme Rigaud, présidente assesseure,
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 décembre 2024.
Le rapporteur,
signé
N. DANVEAULa présidente,
signé
C. FEDILa greffière,
signé
M. C...
La République mande et ordonne au préfet du Var en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N° 23MA009172