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10/01/2025 | FRANCE | N°24MA00169

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 10 janvier 2025, 24MA00169


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour et d'enjoindre à ce dernier de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation et d

e lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour et d'enjoindre à ce dernier de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2202082 du 11 janvier 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Traversini, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 11 janvier 2024 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, lequel renonce, dans ce cas et par avance, à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie dès lors qu'il justifie résider en France habituellement depuis plus de dix ans ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.

La requête a été transmise au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée par deux décisions du 26 avril 2024 et du 27 septembre 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Danveau.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 28 juin 1982, déclare être entré en France le 1er janvier 2002. Il a sollicité, le 16 novembre 2021, son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'absence de réponse, il a demandé la communication des motifs de la décision de refus implicite de sa demande, par courrier du 29 mars 2022, reçu par le préfet le 31 mars suivant, qui a répondu par courrier du 8 avril 2022. Par un jugement du 11 janvier 2024 dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite portant refus de séjour.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police... ". Aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans le cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogée jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a sollicité le 31 mars 2022 la communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour. Par un courrier du 8 avril 2022, le préfet des Alpes-Maritimes a communiqué les motifs de cette décision. En l'espèce, cette communication vise les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et explicite les motifs pour lesquels la demande de titre de séjour de l'intéressé a été rejetée, au regard de sa situation personnelle, familiale et professionnelle et de l'absence d'éléments déterminants permettant d'établir un motif d'admission exceptionnelle au séjour, telle que la durée de sa présence en France. Ainsi, celle-ci comporte les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision de refus implicite de séjour.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. Si M. A... se prévaut de sa présence en France depuis le 1er janvier 2002, il ne produit aucune pièce permettant d'établir celle-ci à compter de cette année. Les documents produits par l'intéressé entre 2012 et 2015, constitués principalement de factures libellées à son nom, dont la valeur probante est faible, de quelques courriers de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes et de deux cartes d'admission à l'aide médicale de l'Etat, ne permettent d'établir qu'une présence ponctuelle sur le territoire français et sont insuffisants pour démontrer que M. A... avait sa résidence habituelle en France au cours de cette période. Si, à partir de l'année 2016, le requérant produit des pièces plus diversifiées et en particulier des relevés bancaires attestant de mouvements financiers, une attestation d'hébergement à Nice chez sa sœur en situation régulière sur le territoire français et des témoignages de son frère, d'une de ses sœurs, de son neveu et de sa nièce de nationalité française, ces éléments sont insuffisants pour démontrer l'ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France. Il n'établit pas non plus être dépourvu de toute attache personnelle et familiale dans son pays d'origine, en se bornant à produire l'acte de décès de sa mère. Enfin, les éléments dont le requérant, célibataire et sans charges de famille, se prévaut, concernant une aide quotidienne et permanente qu'il apporterait à son beau-frère handicapé suite au décès d'une autre de ses sœurs et une promesse d'embauche à durée indéterminée du 20 octobre 2021 sur un poste de régulateur de stationnement, ne sauraient suffire à établir une insertion sociale et professionnelle particulièrement forte en France. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour, qui n'est pas entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation de M. A....

6. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ",

sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / (...) ".

7. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

8. Compte tenu des éléments mentionnés au point 5 du présent arrêt, en considérant que M. A... ne justifiait pas de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Si le requérant a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'il n'établit pas une présence de plus de dix ans en France à la date de l'arrêté contesté. Ainsi, la saisine de la commission du titre de séjour ne présentait pas de caractère obligatoire. Le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise au terme d'une procédure irrégulière en l'absence d'avis de cette commission doit, dès lors, être écarté.

10. La décision portant refus de séjour à M. A... n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit par suite être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées. Par suite, doivent également être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Traversini et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 janvier 2025.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00169
Date de la décision : 10/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-10;24ma00169 ?
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