Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 juin 2021 par lequel le maire de la Turbie l'a radiée des cadres pour abandon de poste, confirmé par la décision rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 2104367 du 28 novembre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2024, Mme B..., représentée par Me de Premare, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2021 du maire de la Turbie ;
3°) de mettre à la charge de la commune de la Turbie la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que :
En ce qui concerne le jugement attaqué :
- il est entaché de deux erreurs de fait ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté portant radiation :
- cet arrêté n'a pas été précédé de la consultation du conseil de discipline ;
- l'abandon de poste qui lui est reproché n'est pas caractérisé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2024, la commune de la Turbie, représentée par Me Caillouet-Ganet, conclut à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête de Mme B... et à la mise à la charge de celle-ci de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mahmouti,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Caillouet-Ganet, représentant la commune de la Turbie.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... relève appel du jugement du 28 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande aux fins d'annulation de l'arrêté du 14 juin 2021 par lequel le maire de la Turbie l'a radiée des cadres pour abandon de poste.
Sur le bien-fondé jugement attaqué :
2. Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il court d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé.
3. L'agent en position de congé de maladie n'a pas cessé d'exercer ses fonctions. Par suite, une lettre adressée à un agent à une date où il est dans une telle position ne saurait, en tout état de cause, constituer une mise en demeure à la suite de laquelle l'autorité administrative serait susceptible de prononcer, dans les conditions définies au point 2 ci-dessus, son licenciement pour abandon de poste. Toutefois, si l'autorité compétente constate qu'un agent en congé de maladie s'est soustrait, sans justification, à une contre-visite qu'elle a demandée en application des dispositions de l'article 15 du décret n° 88-386 du 19 avril 1986 pris pour l'application de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, elle peut lui adresser une lettre de mise en demeure, respectant les exigences définies au point 2 ci-dessus et précisant en outre explicitement que, en raison de son refus de se soumettre, sans justification, à la contre-visite à laquelle il était convoqué, l'agent court le risque d'une radiation alors même qu'à la date de notification de la lettre il bénéficie d'un congé de maladie. Si, dans le délai fixé par la mise en demeure, l'agent ne justifie pas son absence à la contre-visite à laquelle il était convoqué, n'informe l'administration d'aucune intention et ne se présente pas à elle, sans justifier, par des raisons d'ordre médical ou matériel, son refus de reprendre son poste, et si, par ailleurs, aucune circonstance particulière, liée notamment à la nature de la maladie pour laquelle il a obtenu un congé, ne peut expliquer son abstention, l'autorité compétente est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé.
4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., placée en arrêt maladie depuis le 22 décembre 2020, a été destinataire le vendredi 29 avril 2021 d'un courrier émanant d'une société privée la convoquant à une visite médicale prévue le lundi 3 mai suivant à 17h30. Si l'intéressée ne s'y est pas rendue alors qu'elle ne conteste pas avoir été également avertie de cette convocation par un message écrit sur son téléphone, la commune de la Turbie n'a pas alors pris de mesure à son égard. Au contraire, Mme B... a, par une lettre datée du 18 mai suivant, contesté le bref délai qui lui était imparti et exposé être disponible pour une nouvelle convocation. En outre et comme elle le justifie pour la première fois en appel, Mme B... a adressé par mail à son employeur une attestation d'isolement du 8 au 23 mai 2021, délivrée dans le cadre de la Covid-19 et reçue en mairie le 17 mai 2021, ainsi que des certificats de prolongation d'arrêt maladie au 11 juin puis au 25 juin 2021 que la commune ne conteste pas avoir reçus par mail. Il s'en suit qu'à la date de l'arrêté la radiant, Mme B... avait informé l'administration de sa situation et justifié être dans l'incapacité à reprendre son poste au 10 mai 2021, délai fixé par la première mise en demeure datée du 5 mai 2021, ainsi qu'au 3 juin 2021, délai fixé par la deuxième mise en demeure qui lui a été adressée par courrier du 26 mai, et au 14 juin 2021, délai fixé par la troisième mise en demeure qui lui a été adressée par un courrier du 3 juin 2021. Par conséquent, elle ne pouvait être regardée, le 14 juin 2021, comme ayant rompu le lien avec le service de son fait, la seule circonstance qu'elle n'ait pas justifié par un motif légitime son absence à la visite médicale prévue le lundi 3 mai 2021 étant insuffisante à cet égard.
5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à soutenir que l'arrêté du 14 juin 2021 par lequel le maire de la Turbie l'a radiée des cadres et, par voie de conséquence, la décision rejetant son recours gracieux, doivent être annulées et que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2104367 du 28 novembre 2023 rendu par le tribunal administratif de Nice et l'arrêté du 14 juin 2021 par lequel le maire de la Turbie a radié Mme B... des cadres ainsi que la décision rejetant son recours gracieux sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de la Turbie.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- Mme Rigaud, présidente assesseur,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 janvier 2025.
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N° 24MA00206
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