VU la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 31 octobre 1991 sous le n° 91NC00672, présentée pour la SARL GRILL MOTEL, dont le siège social est ... (56000) BREHAN-LOUDEAC, et pour la S.A.R.L. Restaurant GRILL MOTEL, dont le siège social est 50, Route nationale (62490) FRESNES-LES-MONTAUBAN, représentée par leurs gérants respectifs ;
Elles demandent à la Cour :
- d'annuler l'ordonnance en date du 15 octobre 1991 par laquelle le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de LILLE a rejeté leur demande tendant à ce qu'une expertise, ou un complément d'expertise à celle ordonnée par ordonnance du 16 juillet 1991, soit ordonnée pour rechercher l'intensité du bruit qu'engendrera le passage du TGV à proximité de leur immeuble, et, dans la mesure où cette intensité excéderait les normes existantes, indique la nature et le coût des travaux nécessaires pour en atténuer les inconvénients ;
- d'ordonner cette expertise ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 1992 :
- le rapport de M. PIETRI, Conseiller,
- et les conclusions de Mme FELMY, Commissaire du Gouvernement ;
Sur l'exception d'irrecevabilité présentée par la S.N.C.F. :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le gérant de la S.A.R.L. Restaurant GRILL-MOTEL, désigné le 15 juillet 1991 à la suite de la cessation des fonctions de celui qui avait agi pour le compte de la société, a entendu poursuivre l'instance engagée devant le tribunal administratif de LILLE le 2 juillet 1991 ; que dès lors, nonobstant la circonstance que la requête présentée devant la Cour porte à tort la mention du nom de l'ancien gérant, la S.N.C.F. n'est pas fondée à soutenir que la requête de la S.A.R.L. Restaurant GRILL-MOTEL est irrecevable ;
Sur la demande d'expertise :
Considérant qu'aux termes de l'article R.128 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du Tribunal administratif ou de la Cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un deux délègue peut, sur simple requête ... prescrire toutes mesures utiles d'expertise ou d'instruction" ; que la caractère utile d'une mesure d'expertise ou d'instruction s'apprécie au regard de l'intérêt qu'elle peut présenter pour le règlement du litige dont le requérant invoque l'existence ou la survenance éventuelle ;
Considérant que les sociétés requérantes demandent à la Cour l'annulation de l'ordonnance par laquelle le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de LILLE a rejeté leur demande d'expertise portant sur l'évaluation des nuisances sonores qu'occasionnera le fonctionnement de la future ligne ferroviaire du TGV-Nord ; qu'elles exposent que la SNCF leur a proposé une indemnité forfaitaire et libératoire de 425 000 F en réparation du préjudice qui résultera du trafic ferroviaire sus-évoqué et que pour apprécier le caractère satisfaisant de cette offre il est nécessaire d'évaluer d'une part, l'impact acoustique futur du TGV sur leur immeuble et d'autre part le coût des travaux nécessaires pour résorber cet impact ; qu'elles font valoir par ailleurs qu'il est important pour la bonne poursuite de leur exploitation que les travaux d'isolation soient effectués avant la mise en service de la nouvelle ligne ferroviaire ;
Considérant que contrairement à ce qu'affirme la SNCF une telle mesure d'investigation n'est ni impossible ni inutile ; qu'en effet, il est actuellement possible de mesurer l'intensité du bruit provoqué par le passage d'une rame de T.G.V. sur une ligne déjà en exploitation dans des lieux présentant des caractéristiques similaires à l'emplacement où se trouvent les immeubles des sociétés requérantes ; que cette information permettra de déterminer la nature et le coût des travaux d'aménagement nécessaires pour réduire l'impact de ces nuisances sur l'hôtel-restaurant dont les sociétés requérantes sont propriétaires ; que dans ces conditions, eu égard à l'objectif que celles-ci lui ont assigné, l'expertise sollicitée présente le caractère de mesure utile au sens de l'article R.128 précité ;
Considérant que par suite il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée et faire droit à la demande d'expertise présentée par les sociétés requérantes ;
Article 1 : L'ordonnance du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de LILLE en date du 15 octobre 1991 est annulée.
Article 2 : Il sera procédé par un expert désigné par le président de la Cour administrative d'appel à une expertise en vue de :
- rechercher et évaluer aussi précisément que possible, au regard de situations comparables, quel sera l'impact acoustique du passage de rames de T.G.V. sur les immeubles des sociétés requérantes et sur les personnes y demeurant ;
- préciser les travaux nécessaires pour que les effets acoustiques du passage de rames soient réduits ou éliminés dans des conditions conformes à l'usage des immeubles et d'indiquer les coûts de réalisation des mesures d'isolation préconisées.
Article 3 : L'expert prêtera serment par écrit ou devant le président de la cour administrative d'appel ; le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la Cour dans le délai de six mois suivant la prestation de serment.
Article 4 : Les frais de cette expertise seront à la charge des S.A.R.L. GRILL-MOTEL et Restaurant GRILL-MOTEL.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL GRILL-MOTEL, à la SARL Restaurant GRILL-MOTEL et à la société nationale des chemins de fer français.