Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour les 23 juin 2004 et 23 mai 2005, présentés pour M. Benoît X élisant domicile ... (67640) par Me Clement, avocat ;
Il demande à la Cour :
1°) - d'annuler le jugement du 13 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 11 octobre 2001 par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, la caisse de Mutualité sociale agricole d'Alsace et la caisse maladie régionale d'Alsace ont suspendu leur participation au financement de ses cotisations sociales pour une durée de trois mois, et l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) - d'annuler la décision du 11 octobre 2001 ;
3°) - de condamner les caisses à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- c'est à tort que le Tribunal a écarté la loi d'amnistie alors que la sanction n'a pas été exécutée entre les parties mais seulement vis à vis de l'URSSAF ; il y a donc lieu d'en faire application ;
- c'est à tort que le Tribunal a mentionné que le moyen tiré de la composition de la commission manquait en fait alors que le procès verbal de la séance du 24 avril 2001 fait apparaître une composition différente de celle prévue par l'article 19§1 de la convention et que son libellé fait obstacle à tout contrôle sur la qualité de ses membres et le lieu d'exercice ;
- c'est à tort que le Tribunal a écarté le moyen tiré des conditions dans lesquelles l'information relative à la consultation du dossier lui a été donnée, conditions qui l'ont empêché d'en prendre effectivement connaissance ;
- c'est à tort que le Tribunal a écarté le moyen tiré de l'incompétence des directeurs de caisses locales à sanctionner alors que la combinaison des articles 14 et 20 de la convention fait mention du contraire ; au surplus la décision signée d'un seul directeur est irrégulière ;
- la sanction est illégale dès lors que n'ont pas été pris en compte les conditions dans lesquelles il exerce son activité ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu enregistré le 15 septembre 2004, le mémoire en défense présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat dont le siège se trouve 2 avenue Schweisguth à Sélestat (67605), représentée par son directeur, par Me Welsch, avocat, tendant au rejet de la requête, à la condamnation de M. X à lui verser la somme de 750 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la loi d'amnistie ne peut plus recevoir application dans la mesure où la sanction a été exécutée par le non-paiement des cotisations par les caisses à la date indiquée ;
- le moyen tiré de la composition irrégulière de la commission manque en fait, et le Tribunal n'a pas commis d'erreur en écartant le moyen tiré des conditions dans lesquelles l'information relative à la consultation du dossier a été donnée, lesquelles se suffisaient à elles mêmes ;
- le moyen tiré de l'incompétence des directeurs de caisses locales à sanctionner résulte des dispositions du préambule de la convention elle même ; la décision est signée des trois directeurs ;
- les conditions dans lesquelles le professionnel exerce seul son activité dans son ressort géographique ne sont pas établies ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;
Vu la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 et notamment son titre III ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'arrêté du 25 mars 1996 portant approbation de la convention nationale des masseurs kinésithérapeutes du 3 février 1994 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2006 :
- le rapport de M. Job, Président,
- et les conclusions de M. Wallerich, Commissaire du Gouvernement ;
Sur l'application de la loi du 6 août 2002 :
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 susvisée : « Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles à l'exception toutefois de ceux qui constituent des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur. » ;
Considérant que les faits de dépassement durant l'année 2000 du seuil d'efficience commis par M. X, masseur kinésithérapeute à ..., ne constituent pas des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur et étaient donc susceptibles d'entrer dans le champ d'application de l'article 11 de la loi susvisée ; que, cependant, ainsi qu'en a jugé le Tribunal sans commettre d'erreur, M. X ne saurait utilement invoquer le bénéfice de cette loi postérieure à la sanction du 11 octobre 2001 prononcée par les directeurs des caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, caisse de Mutualité sociale agricole d'Alsace et caisse maladie régionale d'Alsace en cause, dès lors que la mesure de suspension de la participation de ces dernières au financement de ses cotisations sociales pour une durée de trois mois a été exécutée au plus tard à la date du 28 novembre 2001 à laquelle l'URSSAF du Bas-Rhin a réclamé le paiement d'une somme de 1 050 euros correspondant au montant que les caisses auraient dû verser à cette dernière en règlement de leur participation suspendue pour la période du 1er novembre 2001 au
31 janvier 2002 ; qu'ainsi, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il y a lieu à application de la loi d'amnistie dès lors que la sanction n'aurait été exécutée que dans ses relations avec un organisme extérieur à ceux qui ont prononcé la sanction ;
Sur la légalité de la décision :
Sur le moyen tiré de l'incompétence des auteurs de l'acte :
Considérant qu'il ressort des définitions en tête de la convention nationale organisant les rapports entre les masseurs-kinésithérapeutes et les caisses d'assurance maladie en date du 3 février 1994 approuvé par arrêté du 25 mars 1996 que : « Compte tenu du préambule ci-après et en application de l'article L. 162-9 du code de la sécurité sociale sont convenus le 3 février 1994 des termes de la convention ce qui suit : les parties ci-dessus énumérées, signataires de la présente convention et de ses annexes sont désignées sous le terme de « parties signataires » . On entendra sous le terme de «caisses » - les caisses primaires du régime général ; - les caisses de la mutualité sociale agricole ; - les caisses maladie régionales des travailleurs non salariés des professions non agricoles. (…). » ; qu'aux termes de l'article 21§6 de la convention : » (…) Dans le cadre de la mise en garde, si après une nouvelle période d'un mois, à l'issue des délais précédents, les caisses constatent que le masseur kinésithérapeute persiste dans son attitude, elles peuvent , après avis de la commission socio-professionnelle départementale pris dans le même délai, lui appliquer une des mesures prévues à l'article 20 du présent titre. (…). » ; qu'aux termes de l'article 20 de la convention : « Lorsqu'un masseur kinésithérapeute ne respecte pas les dispositions de la présente convention , il peut, après mise en oeuvre des procédures prévues au présent titre , encourir une ou plusieurs des mesures suivantes : (…) - Suspension de tout ou partie de la participation des caisses au financement des cotisations sociales du professionnel : (…) .» ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 11 octobre 2001 a été signée par les directeurs de la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, de la caisse de Mutualité sociale agricole d'Alsace et de la caisse maladie régionale d'Alsace et non par un seul d'entre eux ; que ces caisses , telles qu'elles sont désignées en tête de la convention, disposaient en propre du pouvoir de sanction en application des stipulations de l'article 21 de la convention ; qu'ainsi le moyen tiré de l'incompétence des autorités signataires doit être rejeté ;
Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission :
Considérant qu'aux termes de l'article 19§1 de la convention : « (…) La section professionnelle comprend : quatre masseurs kinésithérapeutes exerçant dans le département ou la circonscription des caisses appartenant aux organisations syndicales visées ci-dessus . (…) » ;
Considérant qu'il ressort du procès verbal dressé que lors de la séance de la commission socio-professionnelle départementale du 24 avril 2001, la section professionnelle était composée de MM . J-T Y, Pierre Z, Gilles A et François B ; que la qualité professionnelle et le lieu d'exercice de ces derniers résultent directement des dispositions ci-dessus mentionnées ; que, dans la mesure où M. X n'allègue même pas, alors qu'il lui appartient de le vérifier, que ces quatre professionnels ne seraient pas masseurs kinésithérapeutes exerçant dans le département ou la circonscription des caisses appartenant aux organisations syndicales, le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission socio-professionnelle départementale est infondé ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le courrier recommandé que lui a adressé la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat le 27 mars 2001 lui précisait qu'il disposait d'un délai de quinze jours à compter de la notification du courrier pour présenter ses observations écrites et /ou orales conformément à l'article 14§2 de la convention, que s'il souhaitait être entendu par la commission, il pouvait se faire assister par un masseur kinésithérapeute de son choix et qu'il pouvait consulter son dossier auprès de sa caisse primaire d'assurance maladie ; qu'eu égard aux rapports professionnels quotidiens qu'entretiennent les masseurs kinésithérapeutes avec leur caisse primaire de sécurité sociale, à l'identique adresse mentionnée dans le courrier du 27 mars 2001 pour la caisse primaire d'assurance maladie et le secrétariat de la commission socio-professionnelle départementale, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'information relative au lieu de consultation de son dossier et aux heures d'ouverture était insuffisante, et qu'elle aurait eu pour effet de faire échec à son droit de consultation ;
Sur l'erreur manifeste d'appréciation de la situation :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la sanction susmentionnée a été infligée à M. X pour le motif que, pour la deuxième année consécutive, il avait dépassé de 6 454 coefficients le seuil d'efficience fixé à 47 000 coefficients ; qu'au soutien de sa critique du jugement, M. X se borne à reprendre les mêmes arguments que ceux qu'il a présentés en première instance tenant à ce qu'en méconnaissant les modalités spécifiques d'exercice de sa profession , les caisses avaient entaché leur sanction d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu' il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que par les moyens qu'il invoque,
M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les caisses défenderesses soient condamnées à verser à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais qu'il a exposés ;
Considérant qu'en application des mêmes dispositions, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner M. X à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, la somme de 750 euros qu'elle réclame ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : M. X est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, la somme de sept cent cinquante euros (750 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Benoît X et à la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat.
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N° 04NC00550