Vu la requête, enregistrée le 20 mai 2009, présentée pour M. Servet A, actuellement retenu au centre rétention administrative, ..., par Me Guillot, avocat ; M.A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 mai 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 10 mai 2009 décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de procéder à un nouvel examen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation temporaire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- ses droits à la défense ont été méconnus dès lors que sa demande tendant à être assisté par son avocat habituel n'a pas été accueillie et que l'audience de première instance a été fixée à une date à laquelle son conseil ne pouvait assister ;
- le principe du contradictoire a été méconnu, le mémoire en défense du préfet ayant été communiqué à Paris une heure avant l'audience fixée à Strasbourg ;
- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le préfet a méconnu l'étendue de ses compétences en s'estimant lié dans son analyse des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Turquie par les décisions de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et de la Commission de recours des réfugiés ;
- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- les stipulations de l'article 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ont été méconnues ;
Vu l'arrêté et le jugement attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2009, présenté par le préfet de la Moselle, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2010 :
- le rapport de M. Giltard, président de la Cour,
- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;
Sur les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 :
Considérant qu'il y a lieu d'écarter les moyens susvisés par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg ;
Sur les moyens relatifs à la violation des droits de la défense et du principe du contradictoire :
Considérant, d'une part, que si M. A fait valoir que, le Tribunal ayant refusé le report de l'audience, il n'a pu être représenté par son avocat habituel qui avait suivi la procédure, il a été représenté à l'audience par un avocat de permanence et, compte tenu du bref délai que la loi lui a imparti pour statuer, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg ne s'est pas prononcé dans des conditions irrégulières en refusant de reporter la date de l'audience ;
Considérant, d'autre part, que si le mémoire en défense a été communiqué à l'avocat habituel de M. A le 13 mai 2009, par télécopie reçue à Paris à 14h, alors que l'audience avait lieu le même jour à 15h, il n'est ni établi ni même allégué que l'avocat présent à l'audience n'ait pu prendre connaissance de ce mémoire en défense avant l'audience ; qu'il a présenté ses observations orales à l'audience après le rapport du magistrat ; qu'ainsi le principe du contradictoire n'a pas été méconnu ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 19-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant que la demande de M. A tendant à la reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 novembre 2004, puis par la Commission des recours des réfugiés le 28 avril 2005 ; qu'une nouvelle demande a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 20 mai 2009 ; que les pièces produites par M. A, qui fait état de l'existence à son encontre de nouvelles poursuites et de risques de persécutions, ne permettent pas d'établir qu'il serait personnellement et directement menacé par des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la décision désignant la Turquie comme pays à destination duquel il sera reconduit ne méconnaît ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 19-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle, qui ne s'est pas cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle de M. A ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 mai 2009 par lequel le préfet de la Moselle a ordonné sa reconduite à la frontière ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Servet A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
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N° 09NC00753