Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 16 mars 2015 du préfet du Haut-Rhin portant refus d'acquisition d'une arme, interdiction de détenir plusieurs armes et obligation de se dessaisir de celles-ci dans un délai de trois mois.
Par un jugement n° 1501818 du 22 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir requalifié la demande de M. B...comme dirigée contre la décision du 16 mars 2015 modifiée par la décision du 7 mai 2015 du même préfet, l'a annulée et a enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B... une autorisation d'acquisition et de détention d'arme de catégorie B dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
I. Sous le n° 16NC01566, par une requête enregistrée le 22 juillet 2016, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 juin 2016.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables en raison de la nature dangereuse des armes à feu et de la personne de M. B... ;
- sa demande de sursis présente un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2017, M. A...B..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable car tardive ;
- elle est irrecevable dès lors que son signataire ne dispose pas des délégations pour ce faire ;
- le moyen soulevé par le préfet n'est pas fondé.
II. Sous le n° 16NC01768, par une requête enregistrée le 9 août 2016, le préfet du Haut-Rhin demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 juin 2016 ;
2°) de rejeter la demande de première instance présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Il soutient que sa décision n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 312-3 et L. 312-7 du code de la sécurité intérieure compte tenu de la dangerosité du comportement de M. B....
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2017, M. A...B..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable car tardive ;
- elle est irrecevable dès lors que son signataire ne dispose pas des délégations pour ce faire ;
- le moyen soulevé par le préfet n'est pas fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public.
1. Considérant que M. B... a sollicité le 15 mars 2014 l'autorisation d'acquérir et de détenir une arme d'épaule ainsi que des munitions de catégorie B4 pour exercer du tir sportif ; que par une décision du 16 mars 2015, le préfet du Haut-Rhin a refusé de faire droit à sa demande et lui a également enjoint de se dessaisir des deux armes de catégorie B1 et C qu'il possédait ; qu'à la suite du recours gracieux formé par M. B..., le préfet du Haut-Rhin, par une décision du 7 mai 2015, a confirmé sa décision du 16 mars 2015 en tant qu'elle refusait à l'intéressé d'acquérir et de détenir une arme de catégorie B et lui a enjoint de se dessaisir de la seule arme de catégorie B1, mais l'a autorisé à conserver l'arme de catégorie C qu'il détenait déjà ainsi que la nouvelle arme de catégorie C qu'il venait d'acquérir sous réserve qu'il réussisse l'examen du permis de chasser ; que le préfet du Haut-Rhin relève appel du jugement du 22 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de M. B..., sa décision du 16 mars 2015 modifiée par celle du 7 mai 2015 et lui a enjoint de lui délivrer une autorisation d'acquisition et de détention d'arme de catégorie B ; que le préfet du Haut-Rhin demande également à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce jugement ;
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut acquérir et détenir légalement des matériels ou des armes de toute catégorie s'il n'est pas âgé de dix-huit ans révolus, sous réserve des exceptions définies par décret en Conseil d'Etat pour la chasse et les activités encadrées par la fédération sportive ayant reçu, au titre de l'article L. 131-14 du code du sport, délégation du ministre chargé des sports pour la pratique du tir " ; qu'aux termes de l'article L. 312-3 du même code alors en vigueur : " Nul ne peut acquérir et détenir légalement des matériels ou des armes des catégories B et C s'il ne remplit pas les conditions suivantes (...) / 2° Ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l'arme ou du matériel dangereuse pour soi-même ou pour autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 312-11 de ce code : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme des catégories B, C et D de s'en dessaisir " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour refuser à M. B... une autorisation d'acquisition et de détention d'armes et munitions de catégorie B, le préfet du Haut-Rhin s'est fondé sur le rappel à la loi du 29 février 2010 dont M. B... avait fait l'objet pour des faits de menaces de mort commis le 4 février 2010 à l'encontre de son voisin ; qu'il ressort des pièces du dossier que ces faits commis cinq ans avant la date de la décision en litige sont demeurés isolés ; que M. B... avait d'ailleurs obtenu postérieurement à ces faits une autorisation de détention et d'acquisition pour une arme de poing correspondant à la catégorie B pour le tir sportif, sans qu'aucun manquement ne lui soit reproché ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient le préfet, les déclarations de M. B... lors de son audition du 22 octobre 2014 par les services de la gendarmerie, réalisée dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, selon lesquelles les armes à feu lui permettent de se concentrer, d'exercer sa patience ainsi que la maîtrise de soi et de se détendre, à l'instar de la pratique du yoga, ne révèlent pas un comportement laissant objectivement craindre une utilisation des armes à feux dangereuse pour lui ou pour autrui ; que, par suite, et alors que le préfet ne produit aucun autre élément de nature à regarder M. B... comme présentant un comportement susceptible d'être dangereux, le préfet du Haut-Rhin a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation, d'une part, en refusant de délivrer à M. B... une autorisation d'acquisition et de détention d'arme et munitions de catégorie B, et, d'autre part, en lui enjoignant de se dessaisir de ses armes de catégorie B ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Haut-Rhin n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision du 16 mars 2015 modifiée par sa décision du 7 mai 2015 ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
6. Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions du préfet du Haut-Rhin tendant à l'annulation du jugement n° 1501818 du 22 juin 2016 du tribunal administratif de Strasbourg ; qu'il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16NC01566 par laquelle le préfet du Haut-Rhin demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête n° 16NC01768 du préfet du Haut-Rhin est rejetée.
Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16NC01566 du préfet du Haut-Rhin.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au préfet du Haut-Rhin.
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Nos 16NC01566, 16NC01768