Vu la procédure suivante :
Procédure antérieure :
Par une requête enregistrée le 30 janvier 2017, le préfet de la Moselle a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 juillet 2016 par lequel le maire de Falck a accordé à Mme A...un permis de construire en vue de la réalisation d'une maison individuelle.
Par une ordonnance du 16 février 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a suspendu l'exécution de cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er mars 2017, la commune de Falck, représentée par MeC..., demande au juge des référés :
1°) d'annuler l'ordonnance n°1700461 en date du 16 février 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a ordonné la suspension de l'exécution du permis de construire délivré à Mme A...par le maire de Falck en vue de la réalisation d'une maison individuelle ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3. 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le juge des référés a commis une erreur de droit en estimant que l'arrêté contesté ne respectait pas " le porter à connaissance " du 26 avril 2016 du préfet de la Moselle alors qu'un tel document est dépourvu de toute portée normative dès lors que les articles L. 132-1 et L.132-2 du code de l'urbanisme prévoient seulement que les études dont disposent l'autorité administrative compétente de l'Etat sont transmises à titre d'information ;
- si le préfet peut, en vertu des articles L. 562-2 et R. 562-6 du code de l'environnement, rendre immédiatement opposable le plan de prévention des risques naturels prévisibles, le préfet n'a pas engagé cette procédure prévue à l'article R. 562-6 du code de l'environnement ;
- il n'existe aucun doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté du 25 juillet 2016 :
- en effet, en l'absence de risque réel de remontée de nappe au droit de la construction envisagée, le maire de Falck a pu légalement délivrer le permis de construire ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en l'absence de risque réel d'inondation sur le terrain d'assiette du projet ; l'étude réalisée par Geoderis, compte-tenu du caractère incomplet et incohérent des données, notamment en ce qui concerne les cotes altimétriques et la marge d'erreur admise, ne permet pas de caractériser un risque d'inondation avéré ; le préfet ne fait état d'aucun élément probant quant au risque d'inondation ; le territoire de la commune de Falck n'est pas dans une zone d'exploitation du charbon ; en outre, la localisation et les caractéristiques du projet permettent de garantir la sécurité des personnes et des biens ; les études de sol réalisées font état d'une présence d'eau à des profondeurs de 2,30 m et 4 m ; le terrain d'assiette se situe d'ailleurs en zone jaune de la cartographie et non en zone rouge hachurée, ce qui correspond à un risque modéré ; en outre, à supposer même que le projet soit situé en zone rouge hachurée, le rez-de-chaussée de la construction se situe à 1, 10 m par rapport au terrain naturel et la cave sera encastrée et en partie au-dessus du terrain naturel.
Par un mémoire en défense, enregistré au greffe de la cour le 19 avril 2017, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Le préfet soutient que :
- le juge des référés n'a pas entaché d'irrégularité son ordonnance ni commis d'erreur de droit dès lors qu'il ne s'est pas fondé sur le " porter à connaissance " et ne lui a pas donné une portée normative et l'a seulement analysé comme un élément d'appréciation ;
- l'emprise du lotissement de la Prairie située en zones jaune et rouge hachurée est constructible dans les conditions définies par le " porter à connaissance " ; en l'espèce, le projet concerné est situé presque entièrement en zone rouge hachurée et en attendant l'élaboration d'un PPRI, le PAC constitue un document opposable aux demandes d'autorisation de construire ;
- le projet se situe sur une parcelle qui n'est pas considérée comme inconstructible mais soumise à des prescriptions afin d'éviter les remontées de nappe ; l'article 1-5 du PAC interdit les sous-sols et impose que le plancher le plus bas soit situé 50 cm au dessus du terrain naturel ; en l'espèce, la cote du plancher du sous-sol se situe 1,40 m en dessous du terrain naturel ;
- en tout état de cause, le permis de construire pouvait être refusé en application de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme ; les études effectuées sur la remontée de nappe sont sérieuses ; conformément à la circulaire du 16 juillet 2012, la cartographie jointe en annexe du PAC se base sur un scénario sécuritaire ; les études révèlent la présence d'une nappe haute dans le secteur de la commune de Falck.
Par un mémoire enregistré le 24 avril 2017, la commune de Falck conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens. Elle soutient en outre que l'autorité administrative ne peut se fonder sur de simples études effectuées dans le cadre de l'élaboration d'un PPRI pour refuser un permis de construire ; au surplus, le terrain d'assiette du projet se situe à la cote de hauteur 215,97 NGF supérieure à la cote critique.
Par un mémoire enregistré le 24 avril 2017, Mme A...et M. B...concluent à l'annulation de l'ordonnance attaquée. Ils soutiennent que le permis de construire ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Vu la décision de la présidente de la cour désignant M. Meslay, président, pour statuer sur les demandes de référé.
Après avoir convoqué à une audience publique la commune de Falck, le préfet de la Moselle et MmeA....
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 avril 2017 à 14 h :
- le rapport de M. Meslay, juge des référés ;
- les observations orales de MeE..., représentant la commune de Falck ;
- les observations de M. G... et de MmeD..., représentants le préfet de la Moselle ;
- les observations de M.B....
Après avoir prononcé, à l'issue de l'audience, la clôture de l'instruction.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 25 juillet 2016, le maire de Falck a accordé à Mme A...un permis de construire en vue de l'édification d'une maison individuelle située rue des Coquelicots, lot n°14 du lotissement de " La Prairie ". La commune de Falck interjette appel de l'ordonnance du 16 février 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a suspendu l'exécution de cet arrêté du 25 juillet 2016.
2. Aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes de la commune sont régies par le 3ème alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : " Article L. 2131-6 (alinéa 3) le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. ".
Sur les conclusions de la commune de Falck tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
3. Aux termes de l'article L. 132-2 du code de l'urbanisme : " L'autorité administrative compétente de l'Etat porte à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents : 1° Le cadre législatif et réglementaire à respecter ; / 2° Les projets des collectivités territoriales et de l'Etat en cours d'élaboration ou existants. L'autorité administrative compétente de l'Etat leur transmet à titre d'information l'ensemble des études techniques dont elle dispose et qui sont nécessaires à l'exercice de leur compétence en matière d'urbanisme. / Tout retard ou omission dans la transmission de ces informations est sans effet sur les procédures engagées par les communes ou leurs groupements. ".
4. Il ressort des pièces des dossiers que le préfet de la Moselle a adressé, le 26 avril 2016, un courrier intitulé " porter à connaissance ", relatif à la remontée de nappe et à la maîtrise de l'urbanisme, en vue de transmettre à dix communes, dont celle de Falck, des informations relatives au phénomène de remontée de nappe et une cartographie des zones susceptibles d'être impactées par ce phénomène. Ce " porter à connaissance ", qui indique qu'un plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) sera élaboré, comporte en annexe des prescriptions interdisant ou limitant le droit de construire dans des zones figurant dans un document cartographique.
5. Contrairement à ce que soutient le préfet, un tel document, prévu à l'article L. 132-2 précité du code de l'urbanisme, a uniquement pour objet d'informer les communes du cadre législatif et règlementaire à respecter, des projets des collectivités territoriales et de l'Etat en cours d'élaboration et de leur transmettre l'ensemble des études techniques dont l'autorité compétente de l'Etat dispose et qui sont nécessaires à l'exercice de leur compétence en matière d'urbanisme. Le préfet ne peut légalement définir, dans le cadre d'un tel document, en l'absence d'un plan de prévention des risques opposable à la commune, des prescriptions interdisant ou limitant le droit de construire dans certaines zones figurant dans un document cartographique annexé audit " porter à connaissance ". Or, en l'espèce, aucun plan de prévention des risques naturels n'a été élaboré ni prescrit.
6. Ainsi c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif, qui a commis une erreur de droit en considérant que le " porter à connaissance " pouvait édicter des règles d'urbanisme, a estimé que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué ne respectait pas le " porter à connaissance " du 26 avril 2016 " qui, en l'absence actuelle de plan de prévention des risques opposables à la commune de Falck vise à garantir la sécurité des personnes et des biens en édictant des règles d'urbanisme à respecter " était de nature à faire naître un doute quant à la légalité de l'arrêté contesté, alors même qu'il résulte des dispositions des articles L. 132-2 et R. 132-1 du code de l'urbanisme que le " porter à connaissance " est dépourvu de portée normative et qu'aucune autre disposition législative ou règlementaire ne lui confèrent une telle portée. La commune de Falck est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés a, pour ce motif, ordonné la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 juillet 2016 et à demander l'annulation de l'ordonnance du 16 février 2017.
7. Il y a lieu de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur l'autre moyen soulevé par le préfet de la Moselle devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg.
8. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte (...) à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
9. Si, ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6, un " porter à connaissance " faisant état d'une étude en matière de prévention des risques ne revêt pas de portée normative, il peut constituer, dans le cadre d'une demande de permis de construire, un élément d'appréciation du risque auquel est exposé le terrain d'assiette du projet. Le préfet soutient à cet égard que le projet est situé dans une zone présentant un risque fort de remontée de nappe et que le permis de construire aurait donc dû être refusé en application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
10. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier compte-tenu, d'une part, de la situation de la parcelle d'assiette du projet, située à la cote 215, 97 NGF, alors que le préfet indique, sur la base des études hydrogéologiques qu'il a fait réaliser, que la nappe des Grès du trias inférieur est située à la cote 213, 50 NGF à 1, 5 km du projet, et d'autre part, des caractéristiques de la construction dont le rez-de-chaussée est situé à plus de 1, 10 m de hauteur par rapport au niveau le plus bas du terrain naturel, même si la cave est partiellement située en-dessous du terrain naturel, que le projet serait exposé à un risque avéré de remontée de nappe. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le maire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en délivrant le permis de construire attaqué n'est pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Dès lors, la demande du préfet de la Moselle tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 juillet 2016 ne peut qu'être rejetée.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la commune de Falck une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg en date du 16 février 2017 est annulée.
Article 2 : L'Etat versera à la commune de Falck une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La demande aux fins de suspension de l'exécution de l'arrêté du maire de Falck en date du 25 juillet 2016 accordant un permis de construire à Mme A...est rejetée.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Falck, au préfet de la Moselle et à Mme F...A....
Copie en sera adressée au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Fait à Nancy, le 2 mai 2017.
Le juge des référés,
Signé : P. MESLAY
La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. ROBINET
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N° 17NC00512