Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie pour la période de janvier 2010 à décembre 2012 ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement n°1601586 et 1602753 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juin 2018, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
- le montant des rappels mis en recouvrement est irrégulier dès lors qu'il ne tient pas compte des versements déjà effectués lors des déclarations CA 3 déposées le 21 février 2013 au titre des mois de janvier à novembre 2012, pour un montant total de 7 160,50 euros ;
- la charge de la preuve incombant au contribuable mentionnée à l'article L. 193 du livre des procédures fiscales ne peut pas lui être opposée dès lors que, dans sa réclamation, elle n'a pas demandé la décharge ou la réduction de l'imposition en litige ;
- la proposition de rectification du 1er juillet 2013 fait apparaître un montant de taxe sur la valeur ajoutée collectée reconstitué de 9 016 euros qui est erroné puisqu'il ne tient pas compte de la taxe collectée et réellement déclarée de 7 685 euros ainsi qu'un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible erroné de 45 euros au lieu de 619 euros ;
- les déclarations de TVA afférentes à la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 ont été déposées le 12 février 2013, soit avant l'envoi de l'avis de vérification le 21 février 2013, et en conclut que la procédure de taxation d'office ne pouvait en conséquence lui être appliquée.
En ce qui concerne les rappels d'impôt sur le revenu :
- conformément aux dispositions de l'article L. 193 du live des procédures fiscales, elle a apporté la preuve de la régularité de sa comptabilité en joignant à sa déclaration une copie des grands livres au titre des années 2010 et 2011 et que suite à la première demande du service, elle lui a transmis les pièces justificatives de sa comptabilité, lesquelles auraient dû être prises en compte pour la détermination du revenu imposable ;
- l'imposition en litige ne se fonde sur aucune proposition de rectification valide dès lors que celle du 1er juillet 2013 est entachée d'une erreur matérielle substantielle, constatée dans sa réclamation du 15 décembre 2015.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'activité de courtier en assurance et de conseil en gestion du patrimoine exercée par Mme A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée au 31 décembre 2012. A la suite de ce contrôle, par proposition de rectification du 1er juillet 2013, Mme A... a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période de janvier 2010 à décembre 2012 et à des cotisations d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011 pour des montants respectifs, en droits et pénalités, de 45 773 euros et 32 696 euros. Mme A... relève appel du jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
Sur les conclusion à fin de décharge des impositions :
En ce qui concerne les rappels d'impôt sur le revenu :
2. D'une part, aux termes de l'article 170 du code général des impôts : " 1. En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, toute personne imposable audit impôt est tenue de souscrire et de faire parvenir à l'administration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices, de ses charges de famille et des autres éléments nécessaires au calcul de l'impôt sur le revenu, dont notamment ceux qui servent à la détermination du plafonnement des avantages fiscaux prévu à l'article 200-0 A, et du prélèvement prévu à l'article 204 A ". Aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts ou de l'article L. 2333-55-2 du code général des collectivités territoriales, les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A. / Cette procédure s'applique également lorsque l'administration effectue la reconstitution du montant déclaré du bénéfice industriel ou commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires déterminé selon un mode réel d'imposition. ". Aux termes de l'article R. 194-1 du même livre : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : (...)/2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; (...) ". Aux termes de l'article L. 193 dudit livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".
4. En premier lieu, il n'est pas contesté que, s'agissant de l'année 2010, Mme A... a expressément accepté les redressements qui lui ont été assignés au titre de cette année, dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales précité. Il s'ensuit qu'en vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il lui appartient d'apporter la preuve du caractère exagéré des cotisations d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de cette même année. Concernant l'année 2011, il est constant que les revenus de Mme A... ont été évalués d'office en application des dispositions précitées de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, il lui appartient donc également, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 193 du même livre, d'apporter la preuve du caractère exagéré des impositions mises à sa charge au titre de cette année.
5. Il résulte de l'instruction que l'administration a rejeté la comptabilité présentée par Mme A... au motif que les grands livres ne faisaient apparaître, dans les comptes de produits, que des catégories d'opérations sans détailler l'origine des chiffres indiqués. Elle a également retenu qu'aucun suivi détaillé des clients n'existait et que les produits n'avaient pas été comptabilisés selon les relevés bancaires des comptes professionnels de la contribuable ni d'après les factures d'honoraires et de commission consultées durant la vérification de comptabilité. Enfin elle a constaté une discordance entre les produits comptabilisés et les produits encaissés sur les deux comptes bancaires professionnels de l'intéressée de l'ordre de 15 067 euros en 2010 et 13 593 euros en 2011. Il s'ensuit que c'est à juste titre que le service a, au titre des années 2010 et 2011, estimé que la comptabilité comportait de graves irrégularités et qu'il a en conséquence rejeté la comptabilité comme non probante. En outre, en se bornant à affirmer qu'elle a joint à sa déclaration une copie des grands livres au titre des années 2010 et 2011 et qu'à la suite de la première demande du service, elle lui a transmis les pièces justificatives, Mme A... n'apporte pas la preuve du caractère exagéré des impositions en litige retenues par l'administration, qui s'est fondée, pour effectuer la reconstitution des produits, sur les notes d'honoraires établies par l'intéressée, les relevés bancaires professionnels ainsi que sur les informations, non contestées, obtenues en application des articles L. 81, L. 82 et L. 83 du livre des procédures fiscales.
6. En deuxième lieu, pour les mêmes raisons que celles précédemment indiquées au point 4, Mme A... ne saurait demander que soient substitués aux résultats de 64 956 euros en 2010 et 80 422 euros en 2011, dégagés par le service selon la méthode précitée, les résultats de 54 297 euros et 67 856 euros qu'elle propose au titre de ces mêmes années.
7. Si la requérante soutient que l'imposition en litige ne se fonde sur aucune proposition de rectification valide dès lors que celle du 1er juillet 2013 serait entachée d'une erreur matérielle substantielle, constatée dans sa réclamation du 15 décembre 2015, le moyen n'est assorti d'aucune précision qui permettrait d'en apprécier la nature et le bien fondé. Par suite, il ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
8. D'une part, aux termes de l'article 287 du code général des impôts : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. / 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. ". Aux termes de l'article 39 de l'annexe IV du code général des impôts : " 1.1° La date limite à laquelle les redevables sont tenus de remettre ou d'envoyer au service des impôts la déclaration ou le paiement mentionnés aux 1 et 3 de l'article 287 du code général des impôts est fixé comme suit : (...) /Toutes sociétés autres que les sociétés anonymes :/00, 01, 02... jusqu'à 68 inclus : au plus tard le 19 du mois suivant ;(...) ".
9. D'autre part, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ". Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". La requérante, qui ne soulève pas de moyens relatifs à la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, soutient que les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée afférentes à la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 ont été déposées le 12 février 2013, soit avant l'envoi de l'avis de vérification le 21 février 2013 et en conclut que la procédure de taxation d'office ne pouvait en conséquence lui être appliquée.
10. En premier lieu, d'une part, Mme A... déclare elle-même dans sa requête d'appel avoir déposé l'ensemble de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, le 12 février 2013, et non pas le 19 du mois suivant chaque déclaration mensuelle, comme le prévoient les dispositions précitées de l'article 39 de l'annexe IV du code général des impôts. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a appliqué, pour cette période, la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 précité, sans que puisse être utilement retenue la circonstance que l'avis de vérification de comptabilité lui ait été adressé le 21 février 2013, soit postérieurement à ce dépôt. Par suite, à supposer même que la requérante ait entendu par ce moyen contester la régularité de la procédure d'imposition d'office, ce moyen ne peut qu'être écarté. En outre, il s'ensuit que la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition établies par l'administration au titre de cette période incombe à la requérante.
11. D'autre part, Mme A... ne saurait utilement soutenir que la charge de la preuve incombant au contribuable, telle qu'elle est indiquée à l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, ne lui est pas opposable au motif que dans sa réclamation, elle a seulement demandé la rectification d'une erreur matérielle substantielle, dès lors que cet article définit la charge de la preuve précisément à l'occasion d'une demande de décharge ou la réduction d'une imposition et qu'il est constant que la réclamation qu'elle a formée tend à la réduction de l'imposition contestée.
12. En deuxième lieu, Mme A... soutient que la proposition de rectification du 1er juillet 2013 est erronée en ce qu'elle mentionne d'une part, un montant de taxe sur la valeur ajoutée collectée reconstitué de 9 016 euros qui ne tient pas compte de la taxe collectée et réellement déclarée de 7 685 euros et d'autre part, un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 45 euros au lieu de 619 euros. Toutefois, à défaut d'éléments probants apportés par la contribuable pour remettre en cause la méthode de reconstitution des montants de taxe sur la valeur ajoutée collectée et déductible utilisée par l'administration, fondée sur les factures d'honoraires réglées au cours de la période contrôlée, les relevés bancaires professionnels présentées lors de la vérification de comptabilité ainsi que sur les informations obtenues dans le cadre de la mise en oeuvre des dispositions des articles L. 81, L. 82 et L. 83 du livre des procédures fiscales, Mme A... n'établit pas que les impositions contestées en matière de taxe sur la valeur ajoutée sont exagérées.
13. En dernier lieu, si Mme A... soutient que le service a omis de prendre en compte les montants de cinq chèques encaissés par le Trésor public le 12 février 2013 et portant règlement, à hauteur de 7 160 euros, de la taxe sur la valeur ajoutée due en 2012, ce moyen, qui est relatif au recouvrement de l'impôt, est en tout état de cause inopérant dans le cadre d'un litige d'assiette.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 18NC01686