Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Hôtel Patricia a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation d'impôt sur les sociétés établie au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1601563 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir constaté un non-lieu à statuer dans la mesure d'un dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juillet 2018, la SARL Hôtel Patricia, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 mai 2018 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités laissées à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'établissement par son expert-comptable de la déclaration de résultat de l'exercice 2012 fait apparaître un déficit et non pas un bénéfice imposable ; la méthode de l'administration, qui se borne à reprendre les chiffres de l'exercice, est de son côté sommaire ;
- en tout état de cause, si jamais la méthode de l'administration devait être retenue, il conviendrait d'admettre en charge la prime de bilan versée à son gérant d'un montant de 100 000 euros ainsi que la provision pour charges sociales sur les rémunérations de son gérant ;
- l'absence de dépôt de la déclaration est due aux graves problèmes de santé de son gérant de sorte que la pénalité infligée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts n'est pas fondée.
Par un mémoire enregistré le 13 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Hôtel Patricia a cédé son fonds de commerce le 5 novembre 2012. Par lettre recommandée du 4 avril 2013, notifiée le 6 avril suivant, l'administration l'a mise en demeure de déposer sa déclaration de résultat concernant l'exercice clos le 5 novembre 2012 dans un délai de trente jours à raison de la cessation de son activité. En l'absence du dépôt de cette déclaration, le service a taxé d'office le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés en application du 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales par une proposition de rectification du 6 juin 2013. La cotisation d'impôt sur les sociétés due au titre de l'année 2012, assortie de la majoration pour défaut de dépôt de déclaration malgré une mise en demeure, a été mise en recouvrement le 9 septembre 2013. Les réclamations formées par la société Hôtel Patricia à l'encontre cette imposition ont fait respectivement l'objet d'une décision d'admission partielle du 6 octobre 2015 ainsi que d'une décision de rejet du 14 janvier 2016. la SARL Hôtel Patricia relève appel du jugement du 29 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg, en tant qu'il a, après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer dans la mesure d'un dégrèvement accordé en cours d'instance, rejeté le surplus de la demande.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Aux termes de l'article 201 du code général des impôts : " 1. Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale, minière ou agricole, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi (...) en raison des bénéfices qui proviennent de créances acquises et non encore recouvrées. / (...) 3. Les contribuables assujettis à un régime réel d'imposition sont tenus de faire parvenir à l'administration, dans un délai de soixante jours déterminé comme indiqué au 1, la déclaration de leur bénéfice réel accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat.(...) Si les contribuables imposés d'après leur bénéfice réel ne produisent pas les déclarations ou renseignements visés au 1 et au premier alinéa du présent paragraphe, ou, si invités à fournir à l'appui de la déclaration de leur bénéfice réel les justifications nécessaires, ils s'abstiennent de les donner dans les trente jours qui suivent la réception de l'avis qui leur est adressé à cet effet, les bases d'imposition sont arrêtées d'office ". Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office :/ (...) 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure ". Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Aux termes enfin de l'article R. 193-1 dudit livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ".
3. La SARL Hôtel Patricia n'a pas déposé dans les délais impartis par les dispositions ci-dessus reproduites sa déclaration de résultat au titre de la période du 1er janvier au 5 novembre 2012, date de la sa cessation d'activité, en dépit d'une mise en demeure d'avoir à le faire qui lui a été notifiée le 6 avril 2013. Par suite, c'est régulièrement que son bénéfice relatif à cet exercice a été taxé d'office en application des dispositions ci-dessus reproduites et il lui incombe de rapporter la preuve du caractère exagéré de la cotisation d'impôt sur les sociétés établie en dernier lieu par l'administration, soit en s'appuyant sur les chiffres d'une comptabilité régulière et probante soit en démontrant que la méthode utilisée par l'administration est viciée dans son principe ou sommaire.
4. Afin d'arrêter le bénéfice imposable de la société requérante, l'administration a retenu les montants des produits de l'exercice précédent, diminués d'un montant égal de charges par comparaison à des entreprises similaires du secteur, augmentés de la plus-value de cession des éléments d'actif. La SARL Hôtel Patricia entend se prévaloir de la déclaration de résultat déposée au cours de la procédure contentieuse faisant ressortir un déficit. La société requérante n'est toutefois pas en mesure de se fonder sur une comptabilité régulière et probante, à l'appui de cette déclaration de résultat, de nature à justifier du déficit dont elle se prévaut. Il n'est pas contesté en outre que la société n'a pas été en mesure de produire les pièces justificatives des charges déductibles de son bénéfice au cours de la procédure contentieuse devant l'administration, non plus que devant les premiers juges ou à l'appui de sa requête d'appel. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la méthode utilisée par le service serait sommaire alors qu'elle ne présente pas une évaluation plus précise et complète et que l'administration a admis en cours de procédure des éléments justificatifs relatifs à la plus-value ainsi que des charges supplémentaires de rémunérations.
5. Si la société requérante demande à titre subsidiaire que soit admise en déduction une provision relative au versement d'une prime de bilan à son dirigeant, elle ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une dette certaine de 100 000 euros bruts à ce titre au 5 novembre 2012, en se prévalant d'une décision de l'assemblée générale des associés datée du 5 novembre 2012 mais produite après plusieurs relances du service instructeur en cours de procédure contentieuse, alors qu'elle ne dispose pas d'une comptabilité régulière et probante permettant de vérifier que cette provision aurait été effectivement constatée dans les écritures de l'exercice conformément au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et qu'il n'est pas contesté que les comptes sociaux et décisions d'assemblée n'ont pas été déposés auprès du greffe du tribunal de commerce dans le délai de sept mois de la clôture de l'exercice. Dans ces conditions, en dépit de ce que son gérant a porté cette somme de 100 000 euros sur sa déclaration de revenu et a été imposé à ce titre à l'impôt sur le revenu, la société Hôtel Patricia n'est pas fondée à demander la déduction de cette somme de son bénéfice imposable, ni à soutenir qu'elle ferait, à défaut d'une telle déduction, l'objet d'une double imposition.
6. S'agissant de provision pour charges sociales litigieuse, la société requérante ne rapporte pas la preuve que les cotisations sociales afférentes aux rémunérations de son gérant, admises en déduction du bénéfice à hauteur de 50 000 euros par l'administration en cours d'instance devant le tribunal administratif, constitueraient une dette probable au 5 novembre 2012, date de clôture de l'exercice de cessation, en l'absence de tout élément permettant d'établir que cette rémunération aurait été retenue dans l'assiette des cotisations sociales par l'organisme collecteur. En tout état de cause, les dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts font obstacle à ce que soient admises en déduction les provisions qui n'ont pas " été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ". Si la société entend toutefois obtenir la déduction de cette somme en se prévalant de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-CHG-40-40-40 n° 10 du 12 septembre 2012 sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, il est constant, s'agissant d'une imposition primitive, qu'elle n'a pas fait application de cette instruction en l'absence de dépôt de sa déclaration de bénéfice. Par suite, la SARL Hôtel Patricia n'est pas non plus fondée à demander la déduction d'une somme de 60 000 euros à titre de provision pour charges sociales de son bénéfice imposable de l'année 2012 que ce soit sur le terrain de la loi fiscale ou celui de la doctrine administrative.
Sur les pénalités :
7. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de :/(...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ".
8. Il ne résulte pas de l'instruction, en dépit du certificat médical du 6 février 2014 produit aux débats, que les graves accidents de santé subis par le gérant de la société requérante, survenus au cours de l'année 2009 et en janvier 2010, aient été de nature à empêcher la SARL Hôtel Patricia de déférer à la mise en demeure de déposer sa déclaration de bénéfice notifiée le 6 avril 2013 et alors au demeurant que l'intéressé a pu continuer à travailler au cours de l'année 2012 ainsi qu'en atteste la rémunération, admise en déduction du bénéfice, qu'il a perçue. Dès lors, la SARL Hôtel Patricia n'est pas fondée à soutenir que l'état de santé de son gérant a constitué pour elle un cas de force majeure faisant obstacle au dépôt de sa déclaration de bénéfice en réponse à la mise en demeure du 4 avril 2013. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la pénalité de 40 % pour défaut de dépôt de déclaration lui a été infligée à tort.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Hôtel Patricia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Hôtel Patricia est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Hôtel Patricia et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
N° 18NC02128 2