Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert aux autorités italiennes.
Par un jugement n° 1902773 du 27 novembre 2019, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 décembre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
2°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- le jugement contesté est entaché d'une erreur de fait ;
- le préfet a méconnu l'article 20 du règlement (UE) n°604/2013 ;
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation ;
- l'arrêté contesté méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 ;
Par un mémoire en défense, enregistrée le 28 mai 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête de M. B....
Il soutient que le requérant ne relève plus de la procédure dite de Dublin.
Par une décision du 11 mars 2020, le président du bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert, cette décision ne pouvant plus être légalement exécutée compte tenu de l'expiration du délai de transfert prévu à l'article 29 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant nigérian, s'est présenté le 6 septembre 2019 au guichet unique de la préfecture de la Marne en vue de demander l'asile. La comparaison du relevé décadactylaire de ses empreintes avec le fichier " Eurodac " a révélé que l'intéressé avait déjà sollicité l'asile auprès des autorités italiennes. Le 25 septembre 2019, le préfet du Bas-Rhin a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Le 9 octobre2019, les autorités italiennes ont donné leur accord implicite à cette mesure en application de l'article 18.1 du règlement n°604/2013 susvisé. En conséquence, le préfet du Bas-Rhin a, par un arrêté du 13 novembre 2019, décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile. M. B... relève appel du jugement du 27 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté de transfert.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de transfert :
2. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sous réserve du second alinéa de l'article L.742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code applicable au litige : " (...) II. - Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert ou lorsque celle-ci est notifiée alors que l'étranger fait déjà l'objet d'une telle décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévu au III de l'article L. 512-1. (...) ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date de notification à l'autorité administrative du jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé le transfert de M. B... auprès des autorités italiennes est intervenu moins de six mois après que ces dernières ont implicitement donné leur accord pour la prise en charge de l'intéressé, et donc dans le délai d'exécution du transfert fixé par l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Ce délai a été interrompu le 19 novembre 2019, date à laquelle M. B... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux. Un nouveau délai de six mois a recommencé à courir à compter de la notification au préfet du Bas-Rhin le 28 novembre 2019 du jugement du 27 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a statué sur sa demande. Comme le reconnaît le préfet, ce nouveau délai de six mois étant expiré le 28 mai 2020, l'Italie a été libérée, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement n°604/2013, de son obligation de prendre en charge M. B... et la responsabilité de l'examen de la demande d'asile de ce dernier a été transférée, à compter de cette date, à la France. Il s'ensuit qu'à la date du 28 mai 2020, la décision de transfert est devenue caduque et ne pouvait plus être légalement exécutée. Cette caducité étant intervenue postérieurement à l'introduction de l'appel, les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation de la décision de transfert sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions, au demeurant non chiffrées, de M. B... qui doivent être regardées comme présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. B... dirigées contre la décision de transfert.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
N° 19NC03589
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