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03/02/2022 | FRANCE | N°20NC02065

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 03 février 2022, 20NC02065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 14 juin 2020 par lequel le préfet des Ardennes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001012 du 9 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 14 juin 2020 par lequel le préfet des Ardennes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001012 du 9 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2020, M. A... B..., représenté par Me Segaud-Martin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Ardennes de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il méconnaît les dispositions des 4° et 5° de l'articles 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Le préfet des Ardennes, à qui la requête a été communiquée, n'a pas déposé de mémoire en défense.

Une mise en demeure de produire a été adressée au préfet des Ardennes le 24 septembre 2021.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Le rapport de Mme Stenger a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité algérienne, est entré en France selon ses dires en mai 2018. Il a été interpellé par les services de la direction départementale de la sécurité publique le 13 juin 2020 pour usage illicite et détention de stupéfiants. Par arrêté du 15 juin 2020, le préfet des Ardennes l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a octroyé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 9 juillet 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

2. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte, de manière suffisamment précise, les considérations de droit et de fait qui constituent son fondement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisante motivation doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. B... soutient qu'il a transféré en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux dès lors qu'il vit en concubinage avec sa compagne française, laquelle était enceinte à la date de l'arrêté attaqué. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui n'a entrepris aucune démarche pour régulariser sa situation administrative depuis son arrivée sur le territoire français, a déclaré, de manière contradictoire, être en concubinage avec sa compagne depuis le 19 juin 2019 aux services de la caisse d'allocation familiales (CAF) et depuis le 10 mai 2018 aux services de police qui l'ont interrogé, alors que sa compagne a évoqué devant ces mêmes services une vie commune à compter du mois de novembre 2019, soit un an avant l'arrêté en litige. Par ailleurs, l'intéressé n'établit pas ni même n'allègue être dépourvu d'attaches en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans et où résident encore ses parents. En outre, le requérant n'établit pas que sa compagne ne pourrait pas formuler une demande de regroupement familial à son bénéfice. Enfin, M. B... ne justifie d'aucune insertion professionnelle ou d'une intégration dans la société française. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour du requérant en France, le préfet des Ardennes n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

5 En troisième lieu, aux termes du § 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

6. Si le requérant invoque l'intérêt supérieur de l'enfant à naître de son union avec sa compagne, ce moyen ne peut être utilement invoqué pour contester la décision contestée prise antérieurement à la naissance de cet enfant. Il s'ensuit que cette décision ne méconnaît pas l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (... ) / 4) Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...) ". / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

8. Pour les mêmes raisons que celles indiquées aux points 4 et 6 du présent arrêt, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Ardennes a méconnu les dispositions précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1068 modifié.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Martinez, président,

- M. Agnel, président assesseur,

- Mme Stenger, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.

La rapporteure,

Signé : L. STENGER

Le président,

Signé : J. MARTINEZ

La greffière,

Signé : C. SCHRAMM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière :

C. SCHRAMM

N° 20NC02065 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02065
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SEGAUD JULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-02-03;20nc02065 ?
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