Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2021 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le meilleur délai et de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 2108116 du 9 mars 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 22NC00777 le 28 mars 2022, M. A..., représenté par Me Eca, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mars 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2021 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le meilleur délai ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas examiné sa situation ;
- le préfet ne pouvait pas légalement lui faire obligation de quitter le territoire français sans avoir préalablement statué sur sa demande de titre de séjour et, en cas de refus, avant l'expiration des délais impartis pour l'exercice des voies de recours ;
- c'est à tort que le préfet a estimé qu'il n'était pas la seule personne en mesure d'assister son frère, admis au séjour pour raisons de santé ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2022, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Goujon-Fischer, président, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant albanais, est entré en France, selon ses déclarations, le 28 août 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 novembre 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 5 avril 2018. Par un arrêté du 2 juillet 2019, le préfet de la Moselle lui a refusé le bénéfice de l'admission exceptionnelle au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le 19 novembre 2021, à la suite d'un contrôle d'identité, il a fait l'objet d'un nouvel arrêté du préfet de la Moselle l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant son pays de renvoi et lui interdisant le retour pour une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 9 mars 2022, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 19 novembre 2021 :
2. En premier lieu, l'arrêté du 19 novembre 2021 énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et satisfait dès lors à l'obligation de motivation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté aurait été pris sans examen préalable de la situation personnelle du requérant.
3. En deuxième lieu, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative prononce une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger se trouvant dans l'un des cas mentionnés au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance faisant alors obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière. Par suite, M. A..., qui ne justifie pas remplir les conditions pour se voir délivrer de plein droit un titre de séjour, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Moselle aurait entaché sa décision d'illégalité en l'obligeant à quitter le territoire français sans avoir au préalable statué sur la demande de titre de séjour qu'il indique avoir déposée et avoir, le cas échéant, attendu l'expiration des délais impartis pour l'exercice des voies de recours contre un éventuel refus.
4. En dernier lieu, si M. A... soutient qu'il assiste au quotidien son frère, admis au séjour pour raisons de santé, il ressort plus précisément des pièces du dossier que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la Moselle a reconnu à ce dernier un taux d'incapacité supérieur à 80 % et lui a accordé le bénéfice de l'aide humaine dans le cadre de la prestation de compensation du handicap, aide assurée par M. A... en qualité d'aidant familial dédommagé et qui comprend l'entretien normal, dont la toilette, l'habillage, l'alimentation et l'élimination, le déplacement dans un hors du logement ainsi que la participation à la vie sociale. Toutefois, le requérant n'apporte pas d'élément précis, en particulier sur les modalités d'exercice de cette fonction d'aidant familial, de nature à remettre en cause l'affirmation du préfet selon laquelle cette fonction d'aidant pourrait être assurée par d'autres personnes. En outre, il n'établit pas être en mesure, au regard de sa propre situation matérielle et professionnelle, d'assurer durablement un tel accompagnement. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en obligeant M. A... à quitter le territoire français, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle et familiale de celui-ci.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A....
Sur les frais liés à l'instance :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Goujon-Fischer, président,
- M. Meisse, premier conseiller,
- M. Denizot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2022.
Le président-rapporteur,
Signé : J. -F. Goujon-Fischer
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau
Signé : E. Meisse
La greffière,
Signé : V. Firmery
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
V. Firmery
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N° 22NC00777