Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge, en droits, pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui ont été réclamés au titre des années 2013, 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1802370 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy, a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Kretz, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les sommes mises à disposition par la SCI du Pré des Dames l'ayant été sur la base de contrats de prêts réguliers et ayant date certaine et ces contrats ayant été exécutés conformément à leurs stipulations, la preuve est apportée qu'elles ne constituent pas des revenus distribués au sens du a de l'article 111 du code général des impôts ;
- en tout état de cause, les sommes litigieuses ont fait l'objet d'un remboursement au profit de la SCI du Pré des Dames au travers la SCI Les Ecuries au sens du second alinéa du a. de l'article 111 du code général des impôts ;
- l'administration n'a pas rapporté la preuve d'un manquement délibéré de nature à justifier la pénalité de 40 % de l'article 1729 du code général des impôts.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance n° 20NC03543 du 12 octobre 2021, le premier vice-président de la cour a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité posée par M. B..., tendant à faire constater l'incompatibilité des dispositions du second alinéa du a de l'article 111 du code général des impôts avec les droits et libertés garantis par la Constitution.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Kretz, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est le gérant de la SCI du Prés des Dames dont il détient également 99,9 % des parts sociales. Les bénéfices de cette société sont soumis à l'impôt sur les sociétés et elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. A la suite d'un contrôle sur pièces, M. B... a été regardé comme le bénéficiaire des revenus réputés distribués, sur le fondement du a de l'article 111 du code général des impôts, correspondant aux sommes mises à sa disposition par la SCI du Prés des Dames dans son compte courant d'associé lequel présentait un solde débiteur au titre des années 2013 à 2015. Les rectifications correspondantes opérées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ont été portées à sa connaissance, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, par une proposition de rectification du 22 novembre 2016. Par lettre du 12 décembre 2016, M. B... a refusé ces redressements. En réponse à ces observations, le service a maintenu sa position par une lettre du 20 janvier 2017. Les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2013, 2014 et 2015, assortis de la majoration de 40 % pour manquement délibéré, ont été mis en recouvrement le 30 septembre 2017. La réclamation préalable du 30 septembre 2017 a été rejetée par l'administration fiscale le 25 juin 2018. M. B... relève appel du jugement du 15 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts applicable à la détermination des revenus de capitaux mobiliers : " Sont notamment considérés comme revenus distribués :/a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes./ Nonobstant toutes dispositions contraires, lorsque ces sommes sont remboursées postérieurement au 1er janvier 1960, à la personne morale qui les avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution avait donné lieu est restituée aux bénéficiaires ou à leurs ayants cause dans des conditions et suivant des modalités fixées par décret ". En application de ces dispositions, doivent être regardés comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les montants des soldes débiteurs des comptes courants ouverts dans les écritures d'une société au nom de ses associés, actionnaires ou porteurs de parts. Toutefois des avances octroyées à un associé par une société dans le cadre d'une convention les liant par des obligations réciproques et prévoyant notamment la rémunération de ce prêt par un taux d'intérêt conforme à ceux du marché ainsi que des modalités précises de remboursement ne sont pas imposables sur le fondement de ces dispositions.
3. Il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que le compte courant de M. B... dans les écritures de la SCI du Pré des Dames présentait au 1er janvier 2013 un solde débiteur de 24 675 euros qui a été porté à 34 541 euros au 31 décembre de la même année tandis que le solde débiteur de ce compte courant était de 169 903 euros au 31 décembre 2014 et de 466 805 euros au 31 décembre 2015. Par ces constatations, l'administration rapporte la preuve que les avances mises à la disposition de M. B... au titre de chacune de ces trois années ont constitué des revenus réputés distribués en application des règles ci-dessus reproduites.
4. Afin de justifier de ce que les avances litigieuses lui auraient été consenties dans le cadre d'opérations consenties dans des conditions normales, M. B... fait valoir qu'il a conclu avec sa société deux contrats de prêt. Il produit, pour la première fois en appel, afin d'en justifier, deux décisions de l'assemblée générale des associés. Par une première décision du 30 décembre 2011, l'assemblée générale des associés aurait décidé de lui accorder un prêt de 175 000 euros sur une durée de trois ans au taux de 1 % remboursable " soit par des versements ponctuels soit mensuels ou trimestriels y compris en une seule fois au 31 décembre 2014 ". Par une seconde décision du 29 décembre 2014, l'assemblée générale des associés aurait décidé, d'une part, de prolonger la durée du prêt initial pour deux années supplémentaires, d'autre part, de lui accorder une avance en compte courant de 300 000 euros devant être versée au cours de l'année 2015, pour une durée de deux ans, remboursable au plus tard le 31 décembre 2017. Devant cette cour, M. B... produit également un contrat de prêt daté du 31 décembre 2011 reprenant les stipulations figurant dans la décision de l'assemblée générale du 30 décembre 2011 ainsi qu'un avenant du 29 décembre 2014 à ce contrat de prêt relatif à la prolongation de la durée. Devant cette cour, M. B... produit en outre les bilans de la SCI du Prés des Dames au titre des années litigieuses faisant état à l'actif d'un prêt de 175 000 euros, sans justifier néanmoins de la comptabilisation parmi les produits financiers des intérêts échus.
5. En admettant même que M. B..., par les documents qu'il produit devant la cour, plusieurs années après les contrôles ci-dessus mentionnés, puisse être regardé comme établissant l'existence des contrats de prêt ci-dessus analysés, alors qu'il sont pourtant dépourvus de date certaine faute d'avoir été enregistrés, il n'en demeure pas moins que l'opération consistant pour une société à consentir à son associé un prêt de 175 000 euros puis un second de 300 000 euros, assortis de modalités de remboursement indéterminées, sans prévoir de garanties, à un taux de 1 % sur trois ans, dont il n'est pas soutenu qu'il correspondrait aux taux du marché, pour le premier et sans même prévoir d'intérêt pour le second, ne saurait être regardé comme constituant une opération normale au sens des règles ci-dessus rappelées. Par suite, M. B... ne démontre pas que les sommes mises à sa disposition par la SCI du Pré des Dames ne constitueraient pas des revenus distribués imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Sur la restitution prévue au 2ème alinéa du a de l'article 111 du code général des impôts :
6. Selon l'article 49 bis de l'annexe III au code général des impôts, le remboursement au profit du bénéficiaire des avances, prêts ou acomptes ouvre droit à la restitution des impositions auxquelles le versement a donné lieu. L'article 49 ter de la même annexe ajoute que la somme à restituer résulte de la différence entre le montant de l'impôt régulièrement liquidé et effectivement acquitté et le même impôt liquidé en faisant abstraction de la fraction de l'acompte, prêt ou avance qui a fait l'objet du remboursement, et que ce décompte est opéré sur le principal des droits à l'exclusion de tous intérêts ou indemnités de retard, majorations de droits et amendes fiscales. L'article 49 quinquies de cette annexe prévoit que cette restitution intervient sur réclamation formée auprès du directeur des services fiscaux au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle le remboursement a été opéré et qu'elle est subordonnée, notamment, à la production d'une attestation du comptable public justifiant du paiement de l'impôt.
7. Si M. B... soutient avoir remboursé les sommes qui lui ont été avancées par la SCI du Pré des Dames, il est constant qu'à la date de sa réclamation il ne s'était pas encore acquitté des impositions correspondant à ces revenus distribués. Par suite, il ne remplit pas les conditions ci-dessus rappelées pour prévoir prétendre à la restitution de ces impositions sur le fondement du second alinéa du a de l'article 111 du code général des impôts.
Sur les pénalités :
8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuse ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". La majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts sanctionne la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le manquement délibéré, l'administration fiscale doit apporter la preuve de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations du contribuable, et de son intention délibérée d'éluder l'impôt.
9. Afin de justifier l'application de la pénalité pour manquement délibéré aux impositions litigieuses, l'administration a relevé dans sa lettre de réponse aux observations du contribuable du 20 janvier 2017 que M. B... avait appréhendé sans les déclarer des sommes considérables et de manière répétée sans pouvoir ignorer que ces retraits n'étaient pas justifiés. Ce faisant, l'administration a suffisamment établi l'intention de M. B... d'éluder l'impôt.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 20NC03543 2